Qu’est-ce que la subjectivité ?

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subjectiviteOn peut dire que l'année aura été consacrée à une mise en cause radicale de la subjectivité dans ses conceptions religieuses ou mythiques qui n'épargnent pas la philosophie, jusqu'à l'existentialisme au moins, ni bien sûr la politique, en particulier le supposé rationalisme démocratique plutôt démenti par les faits. Tout cela n'empêche pas la subjectivité d'exister et de constituer notre expérience intime de la vie.

Après avoir constaté à quel point elle était plus déterminée que déterminante - que nous ne sommes pas le centre de l'univers autant qu'il nous semble et que son destin ne dépend pas de nous autant qu'on l'imagine -, il faut bien réintroduire une subjectivité définie non seulement par la représentation mais par ce qu'on ressent et ce qu'on peut, par ce qui caractérise notre être-au-monde, c'est-à-dire d'être confronté à des rencontres et des possibilités qu'on n'a pas choisies mais qui constituent bien notre réalité actuelle, réalité constituée essentiellement de rapports sociaux (être-pour-les-autres). Réalité à laquelle le sujet s'oppose par construction, dénonçant son indifférence et ses injustices qu'on ne peut cependant corriger que localement, une par une. Il reste bien ce qui dépend de nous, l'intervention pratique de la subjectivité et du vivant, notre marge de liberté et d'action même si des forces supérieures ont finalement le dernier mot et que notre esprit est brouillé par toutes sortes d'influences néfastes qui l'aveuglent si souvent (il n'y a pas de désir de savoir mais seulement de croyances rassurantes).

Cette réintroduction de la subjectivité dans une histoire soumise à des causalités plus matérielles avait déjà été tentée par Jean-Paul Sartre autour de 1960, en réponse aux attaques de Lukàcs[1], avec "Question de méthode" essayant de concilier "Marxisme et existentialisme", ce qui aboutira à sa "Critique de la raison dialectique". Il n'arrivera pas à en achever le second tome qui tentait vainement de fonder une intelligibilité de l'histoire comme si elle était l'émanation de la subjectivité (et non le règne de l'après-coup). Sous le titre Qu'est-ce que la subjectivité ? vient de paraître justement une conférence italienne de 1962 initialement appelée "Marxisme et subjectivité", ce qu'on pourrait traduire par "matérialisme et subjectivité", voire déterminisme et liberté, illustrant avec des anecdotes son grand oeuvre qu'il venait de publier et préfigurant son travail sur Flaubert, sorte de psychanalyse matérialiste. Plutôt que d'en faire une véritable critique, c'est surtout l'occasion de réexaminer l'incidence politique d'une subjectivité dépouillée de sa transparence à soi.

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Le plaisir du travail

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la valeur travailDebord considérait que son acte le plus subversif avait été d'écrire sur un mur "Ne travaillez jamais" et Rimbaud disait avoir "horreur de tous les métiers". Rien ne paraît plus réactionnaire que de vouloir valoriser le travail en soi, simple justification d'une exploitation éhontée et de la soumission passive au devoir comme à la peine (travail, famille, patrie).

Il y avait incontestablement quelques bonnes raisons, depuis notre exil du paradis des chasseurs-cueilleurs, d'identifier le travail à la peine et la contrainte, punition divine sinon forme d'esclavage. Il se pourrait cependant qu'à l'ère du numérique et de l'automatisation, le travail se dépouille de sa pénibilité physique pour ne plus consister en simple dépense d'énergie, comme dans la thermodynamique originelle, mais bien plutôt comme l'inverse de l'entropie ce qui n'est pas exactement la même chose et moins fatiguant à s'appuyer, tout comme la cueillette, plutôt sur l'information (comparable au démon de Maxwell triant les molécules les plus rapides au lieu de les accélérer). Sur cette face, on peut dire le travail "immatériel" du fait qu'il n'exploite pas une "force de travail" mais mobilise des subjectivités avec leurs compétences particulières pour l'exécution d'une tâche au service d'un objectif commun.

Dans ce contexte, il faut montrer en quoi l'autonomie est essentielle pour sortir de l'aliénation salariale mais aussi qu'il ne s'agit absolument pas de se délivrer du travail comme du royaume de la nécessité pour un royaume de la liberté qui se révèle bien vide et livré en général à de si piètres divertissements. Il ne s'agit pas de s'éviter toute difficulté, ni même d'épargner les corps mais de passer du travail forcé au travail choisi, du travail souffrance ("désutilité") au travail plaisir voire au travail passion, il s'agit enfin de rendre le travail désirable autant que faire se peut. Ce qu'il est déjà d'une certaine façon, si l'on en croit les sondages et malgré de nombreux contre-exemples, d'autant plus convoité sans doute qu'il manque (il faut voir comme les salariés défendent leur emploi). Il y a encore de grands progrès à faire pour qu'on puisse s'en satisfaire, notamment à gagner un peu plus en autonomie, mais ce qui pourrait passer raisonnablement pour de simples voeux pieux semble malgré tout confirmé par les évolutions en cours.

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Vivement 2050 ?

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Programme pour une économie soutenable et désirable
vivement-2050Cette fois, on peut dire qu'on a affaire quasiment à la version officielle de l'alternative, du moins pour les pays riches, celle de l'ONU (du PNUD) dans la suite du rapport Meadows sur les limites de la croissance (rapport de Rome). Si ce n'est pas beaucoup plus convaincant, on verra que ce n'est pas tellement éloigné des propositions d'ATTAC même si leur démarche, qui privilégie le consensus sur la confrontation, s'appuie beaucoup plus sur les nécessités matérielles que sur la combativité militante. Le titre reprend pourtant le leitmotiv de rendre désirable un monde sans croissance, comme si le monde était le résultat de nos désirs et de notre subjectivité, comme si on décidait de la société dans laquelle on vit, illusion tenace. Comme la plupart, ils s'imaginent en effet qu'il s'agirait de "parvenir à s'entendre sur un projet de société soutenable et désirable" (p65) alors qu'il serait bien sûr impossible d'accorder nos désirs, ce n'est que sous la menace bien réelle qu'on resserre les rangs dans l'urgence.

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Le petit manuel de la transition d’ATTAC

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transitionAprès avoir beaucoup travaillé ces derniers temps à revenir à une forme de matérialisme historique rénové contre les illusions de la politique, les dangers du volontarisme, de l'extrémisme, de l'idéalisme et du moralisme, le temps est venu des travaux pratiques et de porter la critique sur les propositions qui se donnent comme alternatives, puisqu'il ne s'agit pas seulement de comprendre la transformation du monde mais bien d'essayer de le changer réellement pour mieux s'y adapter.

On ne parlera pas ici de tous ceux pour qui l'alternative se limite au retour du nationalisme, du protectionnisme, des nationalisations, à la sortie de l'Euro, au rejet des immigrés, à la fermeture des frontières pour pouvoir s'isoler du reste du monde et se retrouver "entre-nous" (fantasme d'Emmanuel Todd qui en connaît pourtant les disparités familiales et alors même que 50% des salariés travaillent pour des multinationales) ! Les interventions africaines actuelles nous rappellent comme cette Nation tant vantée avait une dimension coloniale, d'où viennent les immigrés d'aujourd'hui (comme les Pakistanais vont en Angleterre). La mondialisation nous l'avons faite les armes à la main. On ne parlera pas non plus de ceux qui rêvent de l'expropriation des capitalistes et de la collectivisation de l'économie comme au bon vieux temps. Tant qu'à faire, autant s'attaquer à ceux qui se présentent comme altermondialistes, et dont j'ai été le plus proche, en regardant ce qu'ils proposent comme "Petit manuel de la transition" pour toutes celles et ceux qui aimeraient mais doutent qu'un autre monde soit possible !

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Revenu garanti vs revenu de base (vidéo)

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Dans le cadre d'une vidéo intitulée "Un revenu pour la vie" (et qui a besoin d'être financée), Les Zooms Verts ont insisté pour venir me voir le 20 octobre dernier afin de filmer un échange avec Frédéric Bosqué sur les différences entre revenu garanti et revenu de base.

Je ne suis pas télégénique ni un bon orateur et ce n'est que l'enregistrement brut de la conversation, avec des longueurs et des raccourcis douteux, bref c'est un peu pénible et bien trop long mais il me semble que la discussion est assez éclairante sur le sujet, notamment par la différence des arguments mobilisés. On aborde aussi les questions du travail, du don, des coopératives municipales ou des monnaies locales ainsi que la nécessité que je défends d'une approche matérialiste et systémique, à l'opposé d'un volontarisme politique vanté de toutes parts mais qui n'est que le symptôme de notre impuissance. Curieux comme on se croit obligé de promettre le bonheur et de croire à des rêves alors qu'il ne s'agit que de faire face (difficilement) aux nécessités.

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Revue des sciences décembre 2013

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Pour la Science

Physique, espace, nanos

Climat, écologie, énergie

Biologie, préhistoire, cerveau

Santé

Techno

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Sortir du capitalisme. Le scénario Gorz

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Colloque organisé à Montreuil en novembre 2012 par le MAUSS
ScenarioGorzJe dois dire que j'ai trouvé cet ensemble de 16 courtes communications plus intéressant que le livre précédent sur Gorz ("André Gorz, un penseur pour le XXIème siècle") auquel j'avais pourtant participé, témoignant mieux, par les critiques même dont il est l'objet, de sa position singulière en même temps que de tous les débats auxquels il a été associé, principalement autour des thèmes de l'autonomie et du travail. S'y dessine d'une certaine façon la constellation intellectuelle de la gauche depuis Mai68 avec toutes ses divisions idéologiques (qu'on peut trouver risibles pour la plupart) et la suite d'échecs auxquels elle a été confrontée ainsi que les si difficiles révisions auxquelles il a fallu se résoudre (du communisme à l'autogestion puis la RTT et le travail autonome enfin), Gorz devançant souvent les autres et pas seulement dans sa politisation de l'écologie.

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Préface pour les temps futurs

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p-guyL'avenir est on ne peut plus incertain et les perspectives bien sombres alors même qu'on aurait les moyens comme jamais de relever les défis écologiques et sociaux auxquels nous devons faire face. Il semble cependant presqu'aussi difficile de faire un diagnostic juste de notre situation (entre négationnisme et catastrophisme) que d'arriver à s'entendre sur ce qu'il faudrait faire pour s'en sortir, le facteur humain sur lequel on voudrait s'appuyer étant, hélas, le maillon faible dans l'histoire.

Notre époque vit incontestablement la plus grande mutation non seulement de l'espèce humaine mais de la biosphère, au moins par sa rapidité. A la fois sur le plan de la technologie, de la population et de l'écologie, nous sommes confrontés à la nécessité d'une réorganisation complète de notre système de production. La plupart imagine ce changement de système comme un choix politique plus ou moins arbitraire de valeurs morales et une conversion des esprits pour leur idéal alors qu'il relève plutôt de la pression des faits. Au lieu d'imaginer d'autres mondes à sa guise, il vaudrait mieux se convaincre qu'il n'y a pas d'alternative et que nous sommes bien obligés de changer pour nous adapter à des changements matériels déjà effectifs. C'est ce monde qui ne peut plus durer et se transforme, mais il n'est que trop évident que la transition risque d'être très douloureuse pour les plus faibles et qu'il ne suffit pas de prendre le pouvoir pour savoir quoi faire.

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La révolution numérique

Temps de lecture : 22 minutes

Comme on m'a demandé, suite au billet précédent, de revenir sur la révolution numérique pour en préciser les enjeux et que je n'ai pas le temps actuellement de refaire un texte sur ce sujet que j'ai traité tant de fois, il ne m'a pas semblé inutile de reprendre ici l'introduction de mon livre de 2004 "Le monde de l'information" qui est sans doute mon livre le plus difficile mais certainement le plus indispensable pour comprendre notre temps. Occasion de rendre hommage à Jacques Robin dont la révolution informationnelle était l'obsession depuis toujours et à qui je dois d'en avoir compris toute la portée une fois clarifié ce concept d'information qui était resté si obscur.

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La théorie de l’évolution comme théorie de l’information

Temps de lecture : 24 minutes

L'interprétation de la théorie de l'évolution comme théorie de l'information et processus cognitif n'est pas nouvelle où c'est l'acquisition (la sélection) et la transmission d'informations génétiques par l'ADN qui produit, dans l'après-coup, une inversion locale de l'entropie par réaction adaptée, correction d'erreurs et reproduction. Le nouveau deep learning ou apprentissage autonome par renforcement, dont les performances en reconnaissance d'image surclassent largement les autres algorithmes, est lui-même basé sur la théorie de l'évolution comme théorie de l'information. Ce n'est pas ce qu'on discutera ici cependant, mais les conséquences sur notre être au monde d'une causalité qui vient de l'extérieur, dans l'après-coup, et d'une évolution dont nous continuons d'être les sujets loin d'en être les auteurs, matérialisme historique rénové qui réduit notre horizon temporel mais où se dissout la figure de l'homme et les prétentions de la subjectivité comme de l'identité.

En bouleversant complètement le monde et nos modes de vie, l'organisation sociale et le travail lui-même, le déferlement du numérique montre très concrètement qu'il y a un point sur lequel Marx avait complètement raison, et ce n'est certes pas sur le prophétisme communiste comme réalisation de la religion mais, tout au contraire, sur la détermination matérielle de l'histoire par la technique et l'impossible conservatisme face à une réalité révolutionnaire, découverte de l'évolution dans les systèmes de production indépendamment de notre bon vouloir. C'est cette appartenance à une évolution qui nous dépasse qui est inacceptable à la plupart, tout comme le déterminisme économique longtemps dénié et pourtant on ne peut plus manifeste.

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Revue des sciences novembre 2013

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Physique, espace, nanos

Climat, écologie, énergie

Biologie, préhistoire, cerveau

Santé

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Revue des sciences octobre 2013

Temps de lecture : 74 minutes

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Physique, espace, nanos

Climat, écologie, énergie

Biologie, préhistoire, cerveau

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Techno

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La blogosphère en panne

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C'est moi ou il y a un trou d'air dans la blogosphère depuis la rentrée ? Le thème de la fin des blogs est un marronnier et c'est peut-être juste rezo.net qui s'épuise mais, c'est un fait qu'il y a pas mal de blogueurs qui arrêtent ou lèvent le pied, et, surtout, qu'en dehors des sciences et techniques toujours aussi dynamiques, on n'a pas grand chose d'intéressant à se mettre sous la dent en ce moment.

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La place de la commune dans l’économie post-industrielle

Temps de lecture : 10 minutes

placeDerrière les soubresauts d'une crise financière qui menace les protections sociales et provoque un chômage de masse dans l'Europe du sud, nous vivons une mutation d'une toute autre ampleur dont on ne semble toujours pas bien prendre la mesure. En effet, ce n'est pas seulement le développement des pays les plus peuplés qui remet en cause notre ancienne base industrielle mais bien plus l'entrée du monde entier dans l'ère du numérique à une rapidité sans précédent, comparable à celle d'une véritable pandémie. S'il est compréhensible de vouloir récupérer des emplois perdus, on ne peut se cacher que la diminution des emplois industriels est plus liée à l'automatisation et la robotisation qu'aux délocalisations, même si celles-ci existent aussi.

Dès lors, il n'y a pas grand chose à espérer d'une relocalisation industrielle même s'il faut toujours encourager la production au plus près de la demande (ce que les imprimantes 3D et autres Fab Labs faciliteront de plus en plus). Toutes les nostalgies n'y feront rien à vouloir revenir aux 30 glorieuses si ce n'est au XIXème, nous n'avons pas le choix sinon d'entrer résolument dans l'ère du numérique qui sape petit à petit et en profondeur l'organisation sociale précédente. C'est notamment le cas du niveau national qui perd pas mal de son importance alors que le local s'en trouve d'autant plus revalorisé. Dès lors, il ne s'agit plus tant d'une relocalisation qui nous ramènerait à un état antérieur ou limiterait simplement la globalisation marchande, il s'agit bien plutôt de recentrer toute l'économie sur le local.

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Du matérialisme historique au volontarisme fasciste

Temps de lecture : 35 minutes

A partir de Gentile et de l'interprétation du matérialisme historique comme praxis

Le principal défaut de tout matérialisme jusqu'ici est que l'objet extérieur, la réalité, le sensible ne sont saisis que sous la forme d'Objet ou d'intuition, mais non en tant qu'activité humaine sensible, en tant que pratique, de façon subjective.
[...]
Les philosophes n'ont fait qu'interpréter le monde de diverses manières mais ce qui importe, c'est de le transformer. (Thèses sur Feuerbach, Karl Marx)

Gentile, La Philosophie De MarxSi Heidegger a été nazi au nom d'une philosophie de l'existence, il avait été précédé par l'actualisme de Giovanni Gentile, philosophe officiel du fascisme. Il est primordial de comprendre de quelle façon le fascisme provient du marxisme, à partir d'une interprétation idéaliste à la fois de l'injonction de transformer le monde et de la praxis, d'un sujet actif opposé à un objet passif (bien avant Lukács). L'autonomie donnée à l'idéologie et aux conceptions du monde par rapport à l'infrastructure en fait un choix arbitraire de valeurs, dans un historicisme assumé, un peu comme celui de Heidegger à ses débuts (malgré de grandes différences) donnant l'illusion de pouvoir changer l'histoire elle-même. On peut y voir l'origine de la réduction du politique à la morale (l'éthico-politique de Gramsci - le plus influencé par Gentile - véritable religion laïque remplacée aujourd'hui logiquement par l'islamisme) menant tout droit aux tendances rouges-bruns qui contamineront les marxismes eux-mêmes. Ce processus de fascisation se caractérise par l'abandon du matérialisme au profit du volontarisme et d'un constructivisme dépourvu de dialectique (qu'on peut dire kantien) où la transformation du monde ne tient plus qu'à la lutte idéologique, à l'espoir que "l'idée devienne force matérielle en s'emparant des masses" (ce qui sera la force du mythe pour un Georges Sorel au parcours effectivement sinueux entre gauche et droite, syndicalisme révolutionnaire et royalistes ou fascistes).

Cette traduction bilingue de "La Filosofia di Marx" de Gentile (1899), préfacée par André Tosel, ne sera pas seulement l'occasion de dénoncer les fausses interprétations du rôle des hommes dans l'histoire, conceptions qui sont à l'origine de l'égarement de la gauche comme de la droite dans le siècle des idéologies, mais aussi de préciser le sens que peut avoir pour nous un matérialisme historique et dialectique, matérialisme pratique impliquant certes l'action de l'homme mais qui est plus déterminée que déterminante (en dernière instance).

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Revue des sciences septembre 2013

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Fin de la revue des sciences

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La revue du mois de mars devait être la dernière. J'ai essayé depuis une autre formule qui s'est révélée moins intéressante avec une charge de travail plutôt supérieure, ce qui fait que j'ai tenté de revenir à l'ancienne formule le mois dernier mais, comme annoncé dans un commentaire du 18 août, cette fois il n'y aura plus de revue des sciences publiée sur le blog. Cela me prend en effet beaucoup trop de temps alors qu'il faut que je trouve des revenus complémentaires n'ayant plus les moyens de vivre.

Il pourra y avoir quelques brèves de temps en temps, selon mes disponibilités, mais sans doute assez peu (il n'y en a eu que 3 au mois d'août).

En fait j'ai dû reprendre les revues des sciences jusqu'en octobre 2018, fin définitive.

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Une existence digne de ce nom

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WPBanksy-life-is-beautifulLa remise en cause de notre existence est à la fois la chose la plus banale et la plus embrouillée. Difficile d'en tirer les fils sans s'y perdre, marché florissant des sagesses, des religions comme du "développement personnel", sinon des philosophes médiatiques qui prétendent nous donner les clés du bonheur et nous apprendre à être nous-mêmes ! S'il y a tant de charlatans, c'est malgré tout que la question de l'exigence d'une "existence digne de ce nom" se pose et n'est pas de celles dont on se débarrasse si facilement même si elle n'a pas forcément de réponse (ou alors plusieurs).

Ce serait une erreur de réduire la philosophie à cette question de la vie bonne, comme beaucoup le font dans la confusion entre la passion de la vérité et le souci thérapeutique (ou les technologies du bien-être). Il n'empêche que la question se pose à laquelle tous les philosophes sont confrontés, s'empressant d'y répondre en général par le plaisir de la connaissance et de la contemplation ainsi que par le mépris des autres plaisirs, trop éphémères et bestiaux à leur goût - avec le souci, au nom du gouvernement de soi et de l'auto-nomie, du détachement des passions et de nous délivrer du singulier par l'universel, autant dire nous délivrer du souci de l'existence, tout au plus nous apprendre à mourir (consolation de la philosophie). De ne pas situer la vérité hors de la vie ni la réduire aux plaisirs du corps, l'existentialisme introduit une toute autre exigence d'intensité, de créativité, de prise de risque qui est sans aucun doute sa part d'irrationalisme mais peut-être pas aussi fou qu'un rationalisme qui se croirait dépourvu de contradictions (alors qu'il en vit) et resterait insensible au vécu individuel. Pour Sartre, l'existentialisme est un humanisme, ce que récusera Heidegger, mais c'est incontestablement pour l'un comme pour l'autre, une nouvelle éthique plus qu'une ontologie, dans le rapport à soi-même au lieu d'une morale du rapport à l'autre et sa liberté (comme l'avait cru Gorz). Mon récent retour sur les premiers cours de Heidegger m'a semblé en tout cas l'occasion de se confronter à cette exigence de vérité dans l'existence qui nous met face à notre liberté et à nos choix.

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Revue des sciences août 2013

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Retour à l’origine de la pensée de Heidegger

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OntologieLa parution des premiers cours de Heidegger est un événement important pour comprendre les origines de sa pensée, lui qui prônait justement de toujours revenir à l'origine pour se délester de tous les discours qui la recouvrent. Cela permet aussi de se réconcilier avec les problématiques qu'il a mises au jour, et qui alimenteront toute la période existentialiste, avant leur contamination par la période nazie (et même s'il fréquentait déjà les cercles réactionnaires et pangermanistes). De quoi mieux comprendre à quel point son parcours s'enracine dans la théologie (notamment Luther et Kierkegaard bien qu'il soit lui-même catholique "à l'origine" O22), ce qui expliquerait la religiosité de ses partisans, ainsi que ce qui l'oppose radicalement à la phénoménologie dans laquelle il s'est pourtant formé comme assistant de Husserl. Celui-ci est en effet accusé de scientisme, à viser une certitude impersonnelle, alors qu'il s'attache lui-même à la temporalité de l'existence et son historicisme vécu (nébulosité éloignée d'idées claires et distinctes), assumant sa finitude et son point de vue dont nul ne saurait s'abstraire. Ce qui est mis ainsi en valeur, c'est le rapport direct et personnel de chacun à l'histoire, historicité de l'être-là humain comme ouverture aux possibilités du moment (être dans un monde).

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