Solutions imaginaires

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shadokPrendre aux riches, supprimer l'argent ou la propriété, arrêter le progrès ou la croissance, augmenter les salaires, réduire le temps de travail, ne pas rembourser ses dettes, supprimer l'armée, se réapproprier les médias, une démocratie radicale, sortir de l'Europe et de l'Euro, etc.

Comme une bonne partie de ma génération, j'ai voulu passionnément changer le monde après Mai68 mais, contrairement à la plupart et lorsque le chômage m'a permis d'y consacrer tout mon temps, je m'y suis attelé très sérieusement. En témoigne la quantité de textes que j'y ai consacré. Je ne peux pas dire, hélas, que cela m'ait rendu très optimiste sur les chances d'y arriver...

En fait, à comprendre la théorie de l'évolution par la théorie de l'information, c'est-à-dire par la détermination du milieu, et devenir de plus en plus matérialiste, j'y ai perdu toute illusion de pouvoir décider de l'avenir face à l'accélération technologique et l'étendue de nos limites cognitives, ce qui ne veut pas dire que notre action ne serait pas décisive dans ces temps de mutation mais en partant plutôt du local et de la nécessité de relocaliser une économie globalisée à l'ère du numérique. Il n'y a rien là cependant qui puisse provoquer l'enthousiasme des foules, ni satisfaire un quelconque besoin métaphysique ni même notre indignation devant les injustices du monde qu'on peut seulement réduire à notre mesure.

Impossible de s'y résoudre, sans doute. Pour Ernst Bloch, il serait impossible de vivre sans utopie, sans rêves, encore plus de transformer la société sans une bonne dose d'idéalisation. Le principe espérance serait indispensable à la vie comme à la politique, carotte devant notre nez pour nous faire avancer ! Le mythe de la boîte de Pandore nous assure pourtant que l'espérance y serait restée enfermée... Le désir qui nous porte paraît indissociable d'un esprit qui regarde le monde et veut le refaire (Bloch nous assure même que "le bâton tordu veut être redressé" !), dénonçant ses injustices et voulant le soumettre à notre jugement, le passer au cordeau, ne pouvant accepter enfin une réalité qui nous blesse et nous choque tant. D'avoir une pensée et de se projeter dans l'avenir nous oblige au moins à dire ce que nous voudrions - sans s'embarrasser hélas de sa faisabilité le plus souvent !

A de nombreuses reprises, en politique, on a bien expérimenté pourtant à quel point il n'était pas sans dangers de nourrir des fantasmes et ne pas tenir compte des rapports de force ou de la situation économique. Cela mène généralement à la confusion de ce qui est juste pensable et pur imaginaire, avec le possible effectif, le réalisable à notre portée. Rien ne sert de chauffer les foules en faisant appel à Jaurès, à Robespierre, si ce n'est à Dieu lui-même, pour nous éviter la confrontation avec les réalités matérielles. C'est, en effet, la première illusion, illusion religieuse d'une conversion universelle des coeurs qui nous ferait entrer soudain dans le royaume de la justice. La Révolution Culturelle chinoise a pu y ressembler, mais avec quel résultat ! Il nous faut revenir à des objectifs plus modestes, malgré qu'on en ait...

Selon certains, il ne faudrait pas tenir compte de l'échec du communisme qui resterait une hypothèse crédible comme s'il n'avait pas rassemblé déjà la majorité de la population mondiale ! Il ne faudrait pas non plus tenir compte des échecs des derniers mouvements sociaux et de la montée de l'extrême-droite, pas plus qu'il ne faudrait tenir compte du reste du monde, de l'écologie, du numérique, etc. C'est tout juste si la faute n'en reviendrait pas à ceux qui osent émettre des critiques là-dessus et ne feraient que désespérer Billancourt, empêchant qu'un grand mouvement progressiste ne balaye tout sur son passage ! On peut laisser ces militants autistes continuer à se taper la tête contre les murs, cela n'avancera à rien qu'à retarder les adaptations nécessaires et le retour des luttes d'émancipation.

L'autre attitude serait, au contraire, de coller aux évolutions, les orienter autant que faire se peut à notre profit, la seule solution serait de s'engager dans la grande transformation de l'ère du numérique et dans des solutions locales au désordre global, seule façon d'être fidèle en acte à ce refus de l'injustice mais c'est une fidélité trop dérisoire pour les utopistes refusant de faire le deuil de l'impossible en passant de l'éthique au politique.

Après avoir critiqué les propositions d'ATTAC ou du PNUD, on va donc essayer de passer en revue, de façon un peu trop sommaire j'en conviens, quelques fausses bonnes idées ne constituant que des solutions imaginaires : prendre aux riches, supprimer l'argent ou la propriété, arrêter le progrès ou la croissance, augmenter les salaires, réduire le temps de travail, ne pas rembourser ses dettes, supprimer l'armée, se réapproprier les médias, une démocratie radicale, sortir de l'Europe et de l'Euro, etc. Il ne s'agit pas de prétendre que la plupart de ces revendications ne seraient pas souhaitables, même si ce n'est pas toujours le cas, mais qu'elles ne sont pas faisables en l'état et surtout qu'elles nous détournent de solutions plus effectives.

prendre aux riches

La première idée qui s'impose, depuis toujours, c'est de prendre aux riches, sinon de les pendre ! D'un côté, il y a la misère, le manque d'argent et le poids du nombre, de l'autre, il y a des riches en petit nombre qui ont trop d'argent et qui étalent leur morgue et leur vacuité. Les caisses sont vides, les coffres sont pleins, la solution saute aux yeux, pas la peine d'y réfléchir plus longtemps. Pas si facile pourtant de mettre la main sur une richesse qui n'est plus détenue dans un coffre justement ! Voilà bien l'exemple d'une évidence qui ne se vérifie plus.

Rimbaud disait que la richesse a toujours été bien public, constituant en effet des réserves pour des temps difficiles mais la richesse a toujours été liée au pouvoir (au début "richeise" signifie "puissance"), ce qui veut dire aussi des réseaux, des obligés. Il ne faut donc pas croire que les riches vont se laisser faire, d'autant qu'on ne sait pas où commence la richesse (à être propriétaire de sa maison ?), beaucoup de gens peuvent se sentir concernés, plus ou moins à tort. L'impôt sur la fortune par exemple peut être difficile à payer pour ceux qui héritent d'un logement bien placé mais n'ont qu'un revenu modeste.

Une bonne partie de la richesse n'étant pas dormante mais circulant, placée notamment dans les entreprises, cela peut avoir aussi des conséquences néfastes sur l'économie, jusqu'à réduire les rentrées fiscales... On essaie donc bien de prendre aux riches mais cela ne rapporte pas tant que ça, du fait de leur petit nombre justement. A supposer qu'on rafle tout à l'occasion d'une révolution, on ne le ferait qu'une fois et au prix d'une sérieuse désorganisation générale, il ne faut pas espérer financer durablement quoi que ce soit avec ce coup d'éclat - sinon obtenir des terres par exemple mais bien peu la cultivent encore !

Si la richesse des riches ne peut suffire à éponger la pauvreté des pauvres, elle peut quand même y contribuer mais surtout, il n'est bon pour personne d'avoir de trop grandes inégalités, même le FMI en convient, raison suffisante pour revenir aux taux d'impositions des années d'après-guerre, pouvant aller jusqu'à 80% et qui ont eu un véritable effet de réduction des inégalités (et valent bien mieux qu'un salaire maximal facilement contournable).

Sauf, qu'une fois qu'on a dit cela, on ne voit pas comment on pourrait augmenter les impôts dans le contexte actuel alors qu'ils sont parmi les plus élevés du monde et qu'on a déjà des révoltes fiscales. Il y faut des circonstances exceptionnelles, un rapport de force défavorable aux possédants (accusés de collaboration en 1945) ou très favorable aux travailleurs (en l'absence de chômage). Ce n'est pas du tout le cas pour l'instant et peut évoluer (notamment avec le succès de Thomas Piketty aux USA) mais on a vu déjà comme la tentative de taxation exceptionnelle de 75% a produit un tollé général ! On peut penser que c'est juste une question de cycle et qu'on y viendra mais actuellement, il ne faut pas trop y compter...

supprimer l'argent

On peut être beaucoup plus radical encore et, pour supprimer richesse et capital, vouloir abolir l'argent ! C'est une pensée qu'on ne peut s'empêcher d'avoir depuis la plus haute antiquité, l'argent incarnant de la façon la plus pure la corruption et le fétichisme de la marchandise, totem qu'il suffirait donc d'abattre pour être délivré du mal qu'il porte... C'est vraiment le type de pensée magique le plus absurde témoignant de notre indécrottable connerie, comme si on n'avait pas évolué depuis les temps les plus reculés. Que des gens défendent encore aujourd'hui avec aplomb cette chimère montre l'étendue de notre désorientation et de notre impuissance. Le pire, c'est que j'y ai cru moi-même dans ma jeunesse (comme à bien d'autres conneries) et que même Gorz insistait encore auprès d'EcoRev' à la fin de sa vie pour revendiquer cet idéal de suppression de l'argent. N'étant quand même pas complètement aveugle, il admettait que la possibilité était nulle d'y arriver dans l'état du monde actuel et se rabattait sur les monnaies locales (que je défends aussi) mais en maintenant que ce n'était pour lui qu'un pis aller par rapport à une gratuité universelle qui n'est guère possible pourtant dans une société ouverte et hors du cadre familial.

Il faut bien sûr étendre (ou défendre) le champ de la gratuité, du domaine du numérique aux biens communs, mais ce n'est pas avec des positions extrémistes qu'on peut y arriver et tout au contraire par la distinction de domaines spécifiques, vitaux, où la gratuité s'impose pour des raisons précises (techniques pour le numérique). Sinon, le retour au troc ne serait en rien un progrès comme certains le prétendent alors que des monnaies locales sont l'outil indispensable de la relocalisation et de la sortie du capitalisme (n'étant pas thésaurisables car fondantes). C'est toute la distance qu'il y a entre une idée qui n'exprime qu'une aspiration et sa concrétisation dans le réel. Cela n'empêche d'ailleurs absolument pas la nécessité d'une refondation du système monétaire mondial, mais qui dépend assez peu de nous...

supprimer la propriété

La suppression de la propriété est un projet largement partagé puisque c'était l'objectif du communisme qui a dominé le monde pendant plusieurs décennies. L'expérience n'en a guère été concluante, c'est le moins qu'on puisse dire, se résumant à une "propriété collective" aux mains d'une bureaucratie corrompue. Les plus convaincus vous diront qu'il n'y a jamais eu de véritable communisme (le leur, le pur, démocratique et tout et tout), pourtant sur le nombre, il y a eu toutes sortes d'expérimentations mais aucune de "démocratique", ces régimes ne résistant que par la terreur et s'effondrant (passant à l'ouest) dès que les élections sont libres et les frontières ouvertes.

Une certaine dose de propriété semble bien indispensable au moins pour protéger la vie privée mais l'économie aussi en a besoin, on l'a bien vu, l'agriculture en premier lieu, même si des entreprises publiques peuvent remplir parfaitement leur fonction (l'économie est toujours plurielle : publique, privée, associative, domestique). Cela n'empêche pas qu'il faudrait pouvoir limiter la propriété, avoir plusieurs formes de propriétés ne permettant pas d'en abuser ni de posséder une trop grande part de richesse jusqu'à fausser l'expression démocratique. Des lois comme les lois anti-trust ou contre les banques too big to fail ou les réglementations écologiques vont déjà dans ce sens qui doit être approfondi. Ce n'est pas gagné mais il est certainement nécessaire de se battre pour cela, sans revenir au rêve d'une suppression de toute propriété, assimilant l'humanité à une grande famille...

arrêter le progrès

Tout le monde, un moment ou un autre, a pu pester contre le progrès, en premier lieu bien sûr, ceux auquel ils devaient la destruction de leur emploi ou de leur milieu. Pourtant, si on avait commencé par le plus illusoire, c'est sans doute par là qu'il aurait fallu commencer tant les critiques de la technique se révèlent inopérantes. Tout au contraire on subit une accélération technologique implacable devant laquelle nous sommes de plus en plus impuissants. Il y a bien des résistances de toutes sortes qui se constituent, s'imaginant faire barrage par leur littérature héroïque aux avancées des sciences et techniques, d'autant plus fiers d'eux qu'ils défendent la vie contre la machine, seuls contre tous. Ces gens vous prennent de haut, petits coqs qui se poussent du col, ils ne vont pas se laisser faire, eux, contrairement à nous... sans rien changer à rien ! Au moins nous auront-ils avertis, derniers représentants d'une humanité déchue !

La réalité, c'est que le numérique bouleverse complètement nos vies et nous force à nous y adapter sans cesse, l'automatisation faisant perdre leur emploi à de nombreuses catégories sociales qui devront se reconvertir, notamment dans un travail autonome. Mieux vaudrait l'admettre que le dénier vainement et s'imaginer que le progrès ne serait qu'une idéologie ne tenant qu'à la naïveté ou le délire de quelques technolâtres alors que les causalités sont matérielles et que l'évolution technique a sa propre logique.

arrêter la croissance

Il est assez comique de voir comme la prétendue critique idéologique ne sert qu'à conforter ses propres croyances et réduire des processus matériels à de simples vues de l'esprit, attitude religieuse s'imaginant qu'il suffirait de changer les représentations pour que le réel en soi transfiguré ! Non seulement on voudrait que la technique, pourtant on ne peut plus matérielle, ne soit qu'une idéologie mais on voudrait que la croissance ne soit qu'une lubie d'économistes, ce qui est tout aussi consternant ! Pour le croire, il faut avoir de l'économie une vision statique et ignorer ce qui fait le dynamisme du capitalisme, ce qu'on appelle "le cercle vertueux de la croissance", boucle de rétroaction positive à la base de tous ses emballements mais qui est indissociable de ce système de production à évolution rapide. Il ne suffit donc pas de mettre en cause la croissance quand ce qu'il faudrait, c'est changer de système de production, ce qui est une toute autre paire de manche (et ne peut se faire que par le bas, comme dans les villes franches du temps de la féodalité).

Que la décroissance soit un impératif écologique ne permet pas d'en faire un mot d'ordre ni un programme, dont la débilité est flagrante et l'inutilité totale (contre-productive même). De toutes façons, tant qu'on n'aura pas atteint le pic de population (entre 2050 et 2100), il ne peut y avoir de véritable décroissance (sauf dans les anciens pays développés). Ce qu'il faut plutôt, c'est un découplage de la croissance économique et des consommations matérielles, une relocalisation de l'économie et un système de production moins productiviste, basé sur le travail autonome et le développement humain (revenu garanti, coopératives municipales, monnaies locales). Bien sûr, la faisabilité de ces propositions peut être mise en doute mais, en attendant, la croissance mondiale continue à plein régime et son déficit chez nous pèse d'abord sur les plus faibles. Il ne serait certes pas mauvais de propager une culture de la pauvreté et des systèmes d'entraide, voire faire sécession avec le monde des riches, mais plutôt que de rester dans la marginalité, c'est bien la production elle-même qu'on devrait changer, mettre en place des dispositifs concrets et des circuits alternatifs au lieu de se contenter d'agiter de belles idées ou de vouloir changer les individus.

sortir du capitalisme

Voilà bien un objectif que je partage depuis longtemps mais qu'on prend trop souvent à la légère et, à vrai dire, sous la seule forme d'une étatisation qui a montré ses limites sans changer fondamentalement le système de production et qui n'a aucune chance de revoir le jour. L'hypothèse centrale du marxisme était que la collectivisation serait plus productive que l'investissement privé, ce qui faisait tenir tout l'édifice théorique mais n'a absolument pas été vérifié. Cet argument matérialiste étant tombé, il ne reste plus qu'une simple idéologie volontariste et même totalitaire. Si on accepte l'évidence d'une détermination de l'économie par l'évolution technique, la sortie du capitalisme a plus de chance d'être la conséquence de l'ère du numérique et d'une économie post-industrielle que de notre militantisme acharné.

Reste qu'il faut bien construire les conditions d'un nouveau système de production relocalisé et d'une sortie du salariat (qui était pour Marx la condition du capitalisme et de son productivisme : voir "travail salarié et capital"). Ne pas se contenter d'étatiser les organisations productives telles quelles demande cependant du temps et ne peut s'envisager que sur la longue durée, à partir du local, dans la confrontation avec les contraintes effectives.

Dès lors qu'on reste dans le cadre du capitalisme, les revendications qui peuvent aboutir sont très restreintes, n'affectant pas le fonctionnement général d'une production déterminée par la circulation et dominée par la finance. Interdire les licenciements est absolument impossible dans un tel système en évolution constante et basé sur des "destructions créatrices". Pour ne pas dépendre du capital, il ne faut pas travailler pour des entreprises capitalistes ! De toutes façons, défendre ainsi les "insiders" est assez insupportable quand il y a des millions d'outsiders et un chômage de masse qui dure depuis des dizaines d'années déjà.

Il est tout aussi difficile de vouloir interdire la publicité tout en restant dans ce système marchand, ce qui ne doit pas empêcher d'essayer de la réglementer mais sans grande chance de la réduire significativement, hélas ! Enfin, vouloir s'attaquer à la cupidité des hommes comme à l'hubris du capitalisme, c'est ne pas comprendre qu'ils font partie intégrante de son mode de fonctionnement et non pas de la folie ou la méchanceté de quelques uns.

augmenter les salaires

Une revendication de base est celle de l'augmentation des salaires, constitutive du rapport de force travail/capital mais qui est bien plus fonction du taux de chômage que de la combativité des organisations syndicales. Sur ce plan, Mai68 a pu être considéré comme une grande victoire obtenant par les accords de Grenelle, des augmentations considérables (35 % du salaire minimum et plus de 10 % des autres salaires) qui allaient cependant être annulées en quelques années par l'inflation provoquée, qui a elle-même déclenché en retour la première crise du pétrole par l'augmentation brutale de son prix, avec la montée du chômage qui en a découlé. Rien de magique donc.

Ce n'est pas une raison pour renoncer à toute revendication salariale qui peut être profitable à tous et permettre de larges mobilisations (mais surtout en période d'inflation). Il faut juste ne pas trop en attendre. Dans le contexte actuel, comme les pays du sud de l'Europe, la tendance est plutôt contraire, la désinflation salariale étant jugée nécessaire à notre compétitivité dès lors qu'on ne peut faire appel à une dévaluation monétaire pour nous ajuster aux pays du nord. Limiter la casse ne serait déjà pas si mal, et même assez improbable. Il ne suffit pas là encore de vouloir ignorer les faits en accusant l'avidité patronale sans tenir compte du niveau insensé de chômage qui pourrait s'aggraver encore à cause des mesures de rigueur.

Il ne paraît pas pensable à l'heure actuelle que la "gauche de gauche" puisse en profiter pour accéder au pouvoir mais il ne fait aucun doute qu'elle se heurterait aux réalités économiques comme tous les gouvernements de gauche avant elle. Il ne sert à rien de le nier même si cela ne doit pas décourager une indispensable résistance.

réduire le temps de travail

J'ai été un chaud partisan des 32H (de la semaine de 4 jours) bien avant qu'on obtienne la loi sur les 35H introduisant la flexibilité dans les entreprises, ce qu'on n'avait pas du tout prévu, et se traduisant surtout par les fameux congés RTT désorganisant plutôt les temps sociaux (et les hôpitaux entre autres). Cela n'a certes pas eu que des mauvais côtés mais s'est révélé assurément très éloigné de ce qu'on espérait, créant sans doute des centaines de milliers d'emplois au début mais seulement pour un temps et avec un impact très faible sur un chômage qui augmente encore et se compte par millions.

Croire qu'on pourrait obtenir dans ces conditions une nouvelle réduction du temps de travail généralisée et sans perte de salaire avec une résorption du chômage exige un déni complet de réalité alors même que le recul de l'âge de la retraite (jusqu'à 70 ans en Australie!) va dans le sens contraire. Cela ne doit pas empêcher de favoriser les temps partiels choisis mais ne peut aller bien loin. Le risque est plutôt de voir les 35h remises en cause et, de même qu'on ne peut trop attendre des impôts quand ils sont déjà parmi les plus élevés, on ne peut trop attendre d'une réduction du temps de travail quand on est déjà si bas.

Surtout, cette focalisation sur le temps de travail est complètement inadaptée au travail immatériel qui ne se mesure plus par le temps, comme le travail industriel, et mobilise souvent toute la vie. La question ne devrait pas être celle de la réduction d'un temps de travail contraint mais plutôt de changer le travail pour changer la vie, accéder au travail choisi, au travail autonome et au plaisir dans le travail (la réalisation de soi, la valorisation de ses compétences), ce qui est tout autre chose.

ne pas rembourser ses dettes

Dans notre contexte de crise de la dette, la tentation est forte de ne pas la rembourser, ce qui semble inévitable et a toujours été le cas en pareille circonstance. Les banquiers le savent bien, on ne peut tondre un oeuf ! Sauf qu'il faut être déjà tondu et des circonstances dramatiques pour se dérober à ses obligations. Vouloir simplement rayer ses dettes d'un trait de plume n'est qu'une vue de l'esprit, nécessitant en tout cas de ne pas avoir besoin de financements futurs.

Un krach toujours possible peut effacer une partie de nos dettes mais, en l'absence de guerre, le moyen le plus sûr reste celui de l'inflation, d'entamer un nouveau cycle de Kondratieff, phase normalement favorable aux travailleurs, dont le revenu s'indexe sur l'inflation, plus qu'aux rentiers. De quoi cette fois alléger vraiment le poids de la dette mais certainement pas suffisant pour régler tous nos problèmes ! L'inflation devrait revenir mais, pour le moment, c'est la déflation qui continue à cause de l'Euro.

supprimer l'armée

Parmi les trésors de guerre dans lesquels on s'imagine pouvoir puiser pour rembourser nos créanciers ou distribuer à la population, il y a le budget de l'armée. Notons que les pays communistes n'ont pas du tout supprimé l'armée, en faisant tout au contraire le soutien de leur pouvoir, mais la suppression de l'armée fait incontestablement partie des fausses évidences dont on attend beaucoup trop. Le budget des armées est en diminution depuis longtemps dans nos contrées, trop sans doute par rapport à ceux qui s'arment jusqu'aux dents. Il est vrai que ceux qui rêvent de supprimer l'armée rêvent tout autant de supprimer les banques et autres activités néfastes, ce qui est supposé dégager des ressources énormes permettant de financer tout le reste sans rien faire, ce qui est très surévalué.

Il est certain que le commerce des armes est une activité honteuse et corruptrice. Pire, on voit que la possession de moyens militaires oblige presque à s'en servir pour, dans le meilleur des cas, venir au secours de populations menacées mais on a vu comme ces opérations humanitaires tournent mal et laissent derrière elles des pays ravagés n'arrivant pas à se reconstruire. L'argument principal pour la suppression des armées, c'est qu'on ne risquerait plus de guerre, ce qui n'a rien de si assuré et la faiblesse se paye toujours au prix fort. Juste avant la guerre de 1914, personne n'imaginait qu'une guerre soit encore possible à l'ère industrielle, le basculement peut être très rapide. S'il faut prôner la non-violence de notre camp, autant que faire se peut, il faut se méfier du pacifisme face à Hitler car pour être pacifique, il faut être deux.

Il vaudrait sans doute mieux une armée européenne (voire une armée de l'ONU) mais on n'en est pas encore à pouvoir sortir de l'escalade des armes, qui a commencé de l'âge de bronze à l'âge de fer, et dans laquelle nous sommes pris malgré nous, ayant causé la perte de grandes civilisations comme la civilisation chinoise qui n'avaient pas suivi le rythme. Les grandes guerres sont un facteur important des sauts technologiques. Le spectre de la bombe atomique ne s'est pas dissipé, ni les tensions internationales et les traités eux-mêmes suffisent à provoquer un engrenage fatal comme dans le déclenchement de la guerre de 1914 (ou peut-être actuellement en Ukraine). On peut toujours espérer que les dépenses militaires continuent de baisser, rien n'est moins sûr dans les années qui viennent et, de toutes façons, il ne faut pas en attendre de grands bénéfices (pour la France, c'est quand même 50 milliards mais beaucoup plus pour la Chine ou les USA).

démocratie directe ou radicale

La démocratie fait l'objet de tous les contresens et suscite chez certains des espoirs disproportionnés avec sa pratique effective. Ainsi, à prendre l'exemple de la Suisse, qui peut être prise pour modèle en la matière, il ne semble pas que cela révolutionne beaucoup l'économie ! Je suis bien sûr partisan d'une démocratisation plus poussée, avec tirage au sort, non cumul, statut de l'élu, référendum, etc. Seulement, c'est une illusion de s'imaginer à la suite de Rousseau que la démocratie exprimerait la volonté générale d'un peuple unifié. C'est bien plutôt "le pire des régimes à l'exclusion de tous les autres" où ce ne sont presque jamais les meilleurs qui sont élus mais seulement les plus rusés, ambitieux, cyniques ou fanatiques, ceux qui aiment le plus le pouvoir - ce qu'il faudrait tempérer par une dose de tirage au sort et, par exemple, un premier tour de désignation des candidats avant qu'ils ne se déclarent. Une démocratie n'est guère plus qu'un régime de discussion publique et de résolution des conflits par le vote majoritaire. Ce n'est pas rien mais rien à voir avec l'image qu'on s'en fait d'unité patriotique, ne se réalisant que pendant les guerres, voire à l'occasion de compétitions sportives, c'est-à-dire dans l'opposition à d'autres pays faisant taire nos profondes divisions internes (entre classes).

En aucun cas, la démocratie ne saurait être une solution à tout comme on se l'imagine bien légèrement au regard de l'histoire. En particulier, aucun vote enthousiaste ne pourra changer les lois de l'économie ni les rapports de force, ni les contraintes écologiques et matérielles. La démocratie permet de faire des choix, d'arbitrer entre intérêts divergents, mais pas de "faire ce qu'on veut" ni même de décider de la société dans laquelle on veut vivre, confrontés à une pluralité de modes de vie et de convictions.

Ce qui est le plus comique dans les discours populistes ou révolutionnaires, c'est la prétention de parler au nom de tous, ou même seulement d'une majorité silencieuse dont on se fait le porte voix sans y avoir aucun titre, exactement comme des mystiques qui se croient inspirés par Dieu. C'est un biais cognitif très courant qu'on appelle "l'illusion de l'unanimité", ne voyant pas pourquoi tout le monde ne serait pas de notre avis étant donné nos intentions si pures ! Seulement, voilà, on se rend compte souvent quelques années après, qu'on ne disait que des conneries, inspirées certes par l'air du temps, les idéologies à la mode et les préjugés de nos petits groupes mais certainement pas des opinions majoritaires encore moins la vérité révélée.

Faire appel au patriotisme, à l'identité, à l'amour, la fraternité ou le tout nouveau "convivialisme" fait de beaux discours mais dénie le caractère pluraliste de la démocratie (tout comme les prétendues "démocraties populaires") et ne mène qu'à de grandes déceptions, si ce n'est à quelque massacre au nom du Bien ou d'un homme nouveau, plus moral, moins égoïste - quitte à l'envoyer dans des camps de rééducation s'il rompt cette trop belle unanimité de façade. Une démocratie qui veut normaliser les désirs n'est plus qu'une dictature de la majorité alors qu'il n'y a de véritablement démocratique qu'une démocratie des minorités, démocratie pluraliste protégeant la liberté individuelle et l'égalité des citoyens, l'égale dignité de leurs modes de vie qu'il ne s'agit pas de changer, pas plus que de changer la société. La démocratie est bien plutôt un travail difficile de délibération, avec beaucoup de perte de temps en réunions pour arriver à des compromis acceptables par tous !

Il y a donc bien contradiction entre révolution et démocratie (et pour arrêter une révolution, rien de mieux que des élections), ce qui n'empêche pas que des moments révolutionnaires sont nécessaires périodiquement pour changer des institutions devenues obsolètes mais pour laisser ensuite de nouveau place à la démocratie ordinaire.

Personne ne peut nier que notre démocratie a besoin d'une sérieuse rénovation à l'ère du numérique mais il serait absurde de s'imaginer atteindre une quelconque perfection qui nous mettrait à l'abri de ses limites et dérives alors qu'il faut se donner au contraire les moyens de les corriger par des contre-pouvoirs (sans paralyser le pouvoir pour autant). Il est donc bien absolument nécessaire de démocratiser nos institutions même si cela reste très éloigné des utopies populistes.

réappropriation des médias

Persuadés que les choses devraient bien se passer et simplement perverties par les puissants, pas mal de gens s'imaginent que tout ce qui va mal ne serait dû qu'à la propagande des médias (Poutine d'un côté, les Américains de l'autre) et qu'il suffirait de se les réapproprier pour faire triompher la vérité (la nôtre). L'influence des médias est certaine mais quand même pas autant que certains l'imaginent, comme si les idéologies étaient purement arbitraires et juste une question d'hégémonie ou de moyens de communication. Leur influence est nettement en baisse par rapport à celle de l'Eglise d'antan, suscitant plutôt la suspicion générale aujourd'hui mais, surtout, la réappropriation a déjà eu lieu à l'ère d'internet qui multiplie les sources et où s'exprime le même éventail d'opinions, des plus délirantes aux plus intéressées... sans changer grand chose ni donner accès à la réalité cachée par quelque complot de nos gouvernants. On peut toujours encourager "l'auto-défense intellectuelle", ce n'est pas ce qui fera sortir d'une autre propagande simplement opposée à la première, encore moins ce qui suffirait à renverser les pouvoirs. Il n'y a pas la vérité d'un côté et le mensonge de l'autre, du moins pas aussi caricaturalement, mais leur dialectique se constituant dans la confrontation historique.

sortir de l'Europe et de l'Euro

Je n'ai certes pas été le dernier à critiquer une Europe qui prétend se fonder sur une concurrence libre et non faussée ou un Euro dépourvu de souveraineté étatique. La malfaçon ne fait aucun doute et s'explique facilement par l'histoire. Impossible de rester en l'état mais, comme en bien d'autres domaines, rien ne se fait jamais que dans l'urgence. C'est ainsi que l'Europe a progressé la plupart du temps.

Il n'y aurait rien d'impossible à ce que l'Euro se désagrège même si c'est loin d'être le plus probable. Cela nous redonnerait incontestablement une marge de manoeuvre monétaire que nous avons perdu mais nous découvririons assez vite que cette marge n'est pas si grande qu'on le prétend et comporte pas mal de revers. Les espoirs mis dans un retour au franc sont assez délirants, confortant l'idée que nous vivrions sur une île et dans le meilleur des mondes si nous n'avions pas à souffrir de l'Euro ! S'il n'est donc pas complètement exclu qu'une sortie de l'Euro puisse nous être relativement favorable, cela n'aurait en tout cas rien d'une révolution !

Derrière les critiques de l'Europe et de l'Euro, il y a l'étrange illusion qu'à se retrouver "entre-nous" tout irait mieux, comme si cela avait jamais été le cas ! Les souverainistes de gauche propagent de bien fausses nouvelles, comme si le "peuple" n'était que le "peuple de gauche", comme s'il n'y avait plus de droite ni de classes sociales. On se demande comment on peut se persuader de telles fantaisies. Le plus insensé est de voir ces souverainistes s'indigner d'être confondus avec des nationalistes car ces petits chéris ne sont que dans la pure théorie et pas dans notre monde où les extrême-droites prospèrent sur les décombres de la crise et présentent le retour à la souveraineté nationale comme la clef de tous les problèmes alors même que cela ne changera rien à notre situation géographique, notre inclusion dans l'Europe et nos échanges avec nos voisins. Il ne faut espérer aucun bénéfice substantiel à en tirer et plutôt un renforcement de la compétition entre nations et systèmes fiscaux, au contraire d'une fédéralisation. Le statu quo n'est pas tenable mais dans ces domaines, ce sont les événements qui décident pour nous plus que les hommes. Si un éclatement de l'Europe ou une sortie de l'Euro n'ont rien d'inenvisageable, c'est quand même se foutre de notre gueule d'en rajouter sur les avantages comme un camelot en foire au moment même où il faudrait combattre la montée des nationalismes dans toute l'Europe !

Les promesses du protectionnisme ou d'éventuelles nationalisations sont d'autant plus surévaluées que nous sommes encore une des premières puissances économiques, avec 50% des salariés qui travaillent pour des multinationales (et 25% pour l'exportation). Si une dose de protectionnisme serait bien souhaitable, notamment pour l'agriculture, cela ne peut rester que marginal et nous nuire plus que nous profiter étant donnée notre position de départ d'ancienne puissance déclinante. On ne parle pas de l'expulsion des immigrés, dont les bienfaits sont aussi outrageusement gonflés et les effets collatéraux assez terribles, sinon pour montrer que les versions de gauche (internationalistes) du nationalisme peuvent difficilement résister à ces dérives droitières qui en découlent logiquement.

Ce qui est assez incompréhensible, c'est qu'on puisse présenter la sortie de l'Europe comme quelque chose de révolutionnaire, sans doute à cause des risques encourus, alors que le repli sur un national-capitalisme ne promet rien de bon. Il est vrai que ces partisans de la restauration de notre souveraineté nationale font comme si elle n'avait jamais existé et l'idéalisent d'autant plus qu'ils sont victimes de l'illusion de l'unanimité dénoncée plus haut, se prenant pour le peuple sans reconnaître toutes nos divisions et des rapports de force qui sont loin de nous être favorables.

Il vaudrait bien mieux changer l'Europe et se diriger vers un fédéralisme européen (qui ne ferait pas disparaître les nations) mais il faut avouer que les conditions ne semblent pas encore réunies (d'un mouvement social européen). Tout est donc possible, dans un sens ou dans un autre, mais dont aucun ne serait le paradis.

lutter contre l'austérité

On s'approche de solutions moins illusoires et plus réalistes à combattre une austérité qui ne fait qu'aggraver les déficits qu'elle est censée réduire. C'est bien là qu'on voit l'absurdité des mesures prises, absurdité reconnue par de nombreuses institutions économiques. Ce n'est pourtant pas par pure bêtise mais bien parce qu'on y a été obligé d'une façon ou d'une autre (par la pression des marchés et celle de l'Allemagne comme payeur en dernier ressort). S'en sortir est urgent mais n'est pas aussi évident qu'on peut le clamer sur les tribunes. Il faudrait en premier lieu avoir une majorité pour cela, ce qui peut se produire mais n'est pas encore le cas.

Quoiqu'il en soit, qu'on s'en sorte rapidement par une politique keynésienne et un retour de l'inflation ou que l'Europe végète encore pendant des dizaines d'années, cela ne nous évitera pas toutes les adaptations nécessaires dans un monde en évolution accélérée et ne sera pas une situation idyllique. Aucune raison là non plus d'en faire trop et de présenter la nécessaire lutte contre l'austérité comme une solution miracle.

 

Comme cet article, déjà bien trop long, est consacré aux solutions imaginaires, je ne citerais que rapidement ce qui me semble constituer des solutions effectives, celles sur lesquelles il faudrait se concentrer au lieu de poursuivre des chimères.

On peut prendre en exemple la Taxe Tobin qui finit par aboutir après des années de mobilisations sociales (ATTAC), montrant à la fois que des combats légitimes peuvent avoir une issue positive mais aussi qu'il y faut beaucoup de temps et sous une forme toujours très édulcorée par rapport au projet initial. Ce n'est pas là non plus ce qui apportera des ressources inépuisables à tous les besoins mais seulement un mode de régulation de la finance utile par la taxation des flux (et qui n'empêche pas qu'il faudrait interdire des spéculations nocives, pas seulement les taxer).

La défense et l'extension des biens communs tout comme de la gratuité numérique sont également des luttes prioritaires où des victoires sont possibles bien qu'à chaque fois ponctuelles.

solutions_localesLe plus important reste, à n'en pas douter, la transition écologique, processus à peine entamé dans lequel il faudrait s'engager plus résolument, notamment la transition énergétique pouvant être un facteur de développement mais surtout la relocalisation qui ne doit pas être envisagée dans sa dimension nationale mais bien locale. Ce n'est guère mobilisateur, il faut bien le dire mais voilà qui est pourtant à notre portée cette fois au contraire des utopies globales. En particulier des monnaies locales pourraient corriger en partie les défauts d'une politique monétaire trop restrictive. Par elles-mêmes, les monnaies locales tiennent du gadget sans aucune portée à moins qu'elles ne soient prises en main par des municipalités pour les étendre à toute la population et dynamiser les échanges locaux. Je crois indispensable de les compléter par des coopératives municipales, instruments du développement humain et du passage au travail autonome (mais je suis bien isolé sur ce point) que les partisans des revendications critiquées ici accuseraient bien plus volontiers de solution imaginaire - ce que je ne crois pas du tout mais sa faisabilité demande effectivement à être démontrée (tant qu'une municipalité ne s'y est pas engagée).

La difficulté, c'est que le travail autonome ne peut s'envisager sérieusement sans un revenu garanti qui n'est pas vraiment à l'ordre du jour non plus et passe pour encore plus utopique même si les partisans d'un revenu de base se multiplient. Sauf qu'ils versent effectivement trop souvent dans l'utopie, notamment d'une "fin du travail" au moins très prématurée au lieu de prendre en compte la transformation complète du travail à l'ère du numérique, ce qui est tout autre chose. Surtout, l'insistance sur l'universalité d'un revenu d'existence condamne celui-ci à être notoirement insuffisant, condamnant aux petits boulots de merde au lieu d'un véritable travail choisi. Il ne suffit pas de prétendre en faire un "revenu primaire" ou même un "salaire à vie" pour obtenir un montant suffisant, restant là aussi dans les solutions imaginaires. Il faut s'appuyer malgré tout sur le fait qu'un revenu garanti est devenu une nécessité économique, pour sortir d'une précarité destructrice, et qu'on pourrait au moins compléter les minima sociaux par une allocation en monnaie locale, mais il faudra sans doute pas mal de temps pour arriver à quelque chose de satisfaisant.

On voit qu'il ne manque pas de fausses pistes pour égarer les révoltes légitimes et détourner de combats pourtant vitaux. Il est clair que moins on espère, plus c'est réalisable mais c'est tout le contraire de ce qu'on voudrait. On voudrait des raisonnements alambiqués nous expliquant que tout cela ne résulte que d'un malentendu millénaire, de fausses idéologies, d'un mauvais usage des mots (que le travail n'est pas un coût mais une richesse ou une invention récente, que les charges sont des cotisations, etc.) et que si tous les gars du monde voulaient se donner la main le monde en serait changé pour toujours !

Lorsqu'on se résout à être matérialiste et qu'on prête attention aux processus concrets, toutes les idéologies se relèvent n'être que du délire sans aucune autre effectivité que de mener à des décisions dogmatiques plus ou moins catastrophiques. Il ne peut s'agir de se réclamer d'un idéal élevé comme on nous y encourage de toutes parts mais de simplement déterminer ce qu'on peut faire dans la situation présente et avec les moyens réellement à notre disposition - qu'il ne faudrait pas surestimer - au lieu de vouloir être plus radical que les autres et se prendre pour un héros.

Être réaliste ne peut signifier pour autant se contenter de gérer les affaires courantes et perpétuer un ordre injuste. La rupture anthropologique que nous vivons ne laisse aucune place au conservatisme. On peut dire que jamais période ne fut aussi révolutionnaire, il faut juste ne pas se tromper de révolutions (écologique, technologique, cognitive, sociale). Hélas, l'histoire semble montrer qu'il faut le plus souvent en passer par le pire et des "destructions créatrices" - ce dont le numérique pourrait nous préserver à l'avenir, nous faisant passer de l'entropie à l'écologie mais pour l'instant, nous avons bien du mal à vivre avec notre temps et ne pas vouloir simplement reproduire un passé révolu...

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112 réflexions au sujet de “Solutions imaginaires”

  1. Bonjour,
    Plutôt vivifiant votre intervention, je lis votre blog de temps en temps, et j'y puise des réflexions à propos de l'écologie politique. Merci encore pour ce dégrisement nécessaire (avec cette touche d'ironie mordante) envers des idées auxquelles il m'arrive moi même d'adhérer peu ou prou (s'en aller jusqu'à prôner la suppression de l'argent, ni celle des riches !). Cela étant dit:
    - On ne se débarrasse pas aussi facilement des transcendances, et besoin d'utopies et imaginaires alternatifs: c'est peut être même un trait caractéristique de l'humain, de ce point de vue, vous êtes tout aussi utopiste à votre manière ...
    - Plus précisément, ne retombez vous pas vous même dans les rêves chimériques, lorsque vous prônez le revenu garanti ? Ce qui pose également le rapport au travail bien sûr, qui est un fondamental du système capitaliste. N'est ce pas un rêve chimérique (que je partage volontiers pourtant), et la RTT n'est elle pas plus "réaliste" de ce point de vue (car elle ne s'en prend pas aussi frontalement à l'idéologie du travail salarié) ? Cordialement.

    • Je souligne moi-même le besoin de rêver mais les utopies se développent à la mesure de notre impuissance et trouvent beaucoup moins de partisans en dehors des crises.

      Le drame effectivement, c'est que les véritables solutions apparaissent comme des utopies alors que les utopies apparaissent comme de véritables solutions ! Une nouvelle RTT ne servirait à rien et ne se fera pas, inutile d'en parler, alors que le revenu garanti s'impose qu'on le veuille ou non. Comme je le précise, je ne me suis pas appesanti sur des propositions que je défends dans de nombreux autres textes mais contrairement aux utopistes du revenu universel, je ne déconnecte pas du tout le revenu garanti du travail puisque c'est au contraire "un revenu pour travailler" couplé à des coopératives municipales.

      Outre les textes consacrés à ce sujet, je peux renvoyer sur cette vidéo (un peu longue) :

      http://jeanzin.fr/2013/12/07/revenu-garanti-vs-revenu-de-base/

      • Bonjour,
        Merci pour le lien, j'ai visionné une grande partie de la vidéo. Je trouve l'échange intéressant et surtout cette idée de lier le revenu garanti à la production me paraît fondamentale, parce que à mon sens, la plupart des mouvements qui évoquent le revenu de base, se placent - et vous le dites en effet- du côté de la redistribution, et non pas de la production. Il y a je crois une part de production nécessaire, sur laquelle nous ne pouvons faire l'impasse. Même si en effet, certaines personnes sont indépendantes et auto-suffisantes, lorsque la majorité reste dépendante du circuit de production. Je trouve séduisante cette idée de distinguer autonomie et auto-suffisance. Une coopérative de production peut être autonome, mais reste dépendante.

        Toutefois, la place de l'industrie au sens classique ne doit pas être minimisée, tant au niveau national qu'au niveau mondial. Lorsque vous évoquez la disparation de l'économie de l'énergie industrielle au profit d'une nouvelle économie de l'information nécessitant des compétences locales et non mesurables en temps, la question de la production de l'énergie et des biens de première nécessité (transports, habitats) reste fondamentale. Ici la RTT a toute sa place.

        Plus fondamentalement peut être, votre exemple de la production à l'objectif appelle une remarque: dans la vidéo vers 45' vous évoquez cet exemple même d'un objet (une chaise) que l'on produirait en tant qu'objectif, sans tenir compte du temps de travail. Ceci appelle tout de même deux considérations:

        a) le temps de travail reste une mesure implicite du temps consacré à remplir les objectifs de production. Il y a une prégnance de ce temps dans les subjectivités, c'est indéniable. Je n'en ai pas la preuve formelle mais il me semble que la plupart des secteurs qui fonctionnent à l'objectif et non au temps de travail, se fondent implicitement sur un temps "objectif" global moyen.

        b) en rapport avec la remarque précédente, le seul moyen finalement de déconnecter la question du travail de celle du temps, serait effectivement de relocaliser l'économie, mais là on s'attaque avec le nerf de la guerre capitaliste: la concurrence mondiale. La dictature du temps de travail, y compris sous sa forme rénovée de RTT, est liée à la compétition mondiale.

        • Je crois vraiment que l'industrie va rejoindre l'agriculture en part d'emplois avec l'automatisation qui s'accélère et peut concerner tout autant le transport et même la construction 3D. Ce n'est pas une raison pour négliger ce qui représente encore pour l'instant une part importante (mais déjà inférieure aux secteurs immatériels), c'est une raison pour ne pas en faire un projet d'avenir et se focaliser uniquement sur les industries restantes.

          Lorsque je dis qu'il n'y aura pas de nouvelle loi de réduction du temps de travail (légal et sans réduction de salaire), je ne dis pas du tout qu'il ne peut pas y avoir de réduction du temps de travail dans une entreprise ou un secteur particuliers. Dans le transport effectivement, il faut limiter le temps de travail (bien supérieur aux 35h) pour des raisons de sécurité et de santé. Cela n'en fait pas une mesure anti-chômage.

          Il est évident qu'une chaise est une production matérielle dont la valeur se mesure par le temps de travail au contraire du travail immatériel (créatif, de programmation mais aussi de la réparation par exemple). Je ne l'ai prise comme (mauvais) exemple que pour opposer un travail par objectif (comme dans les professions libérales ou artisanales) et le salariat où ce qu'on paye, c'est un temps de travail comme temps de subordination et non la production elle-même. Il est certain que tant qu'on est dans la production matérielle, cela ne change pas grand chose, sinon qu'on reste libre de l'organisation de son temps. Ce qui fait toute la différence, ce sont les productions qui ne se mesurent plus par le temps (un même programme peut prendre quelques jours ou un mois selon l'expérience, la chance, les outils disponibles, etc.).

          Une partie de la production industrielle sera relocalisée par des imprimantes 3D, la compétitivité, fondamentale pour l'industrie, perdant de l'importance du fait que les coûts de fabrication sont devenus souvent négligeables par rapport au coût final plus dépendant de la marque, de la nouveauté, de divers opportunités, etc. Ce qui va prendre de l'importance, c'est plutôt le développement humain, la valorisation de ses compétences, l'épanouissement dans le travail (travail virtuose, passion, plaisir). On est au milieu du gué mais il ne faudrait pas rester fixé sur le passé, effectivement plus familier...

  2. Bonjour M. Zin,

    J'ai beaucoup apprécié votre billet dont je ne commenterai qu'un détail tellement il est dense.

    Je me réfère aux conditions nécessaires et suffisantes pour débloquer le processus d'intégration européenne que vous voyez stagner indéfiniment.

    Je pense au contraire, peut-être par excès d'optimisme, que d'une part, la crise des subprimes a révélé les faiblesses d'une zone monétaire dépourvue de politique budgétaire commune et l'idée d'une union fiscale et budgétaire fait son chemin, certes cahin-caha, mais au moins elle existe et est discutée.
    D'autre part, la crise ukrainienne nous montre clairement le besoin de cheminer vers une intégration de la politique extérieure européenne et la refonte des traités internationaux de coopération et alliance militaire.

    Ce n'est pas lourd, je sais, mais c'est tout de même un peu mieux qu'avant ces deux crises, même si on a l'impression d'entrer dans la vallée de la mort. D'ailleurs, les souverainistes nationalistes l'ont bien compris puisqu'ils sont presque tous pro-russes, en ce moment.

    • Oui, l'Europe avance dans les crises mais sans qu'on y puisse grand chose et de façon bancale. On va sans doute vers une harmonisation fiscale et sociale mais cela ne peut se faire qu'à tout petits pas (ou ce serait le moins disant qui l'emporte).

      Je suis moins optimiste que vous sur l'Ukraine que l'Europe aurait beaucoup de mal à intégrer et devrait plutôt se désintégrer, avec un risque de guerre comme on ne l'a pas connu depuis longtemps. J'espère qu'on l'évitera mais l'issue reste bien incertaine.

      • En fait, je ne parlais absolument pas d'intégration de l'Ukraine dans l'UE. Je voulais seulement dire que cette déchirure de l'Ukraine entre les blocs Est et Ouest et le cortège habituel de propagande idéologique où l'on retrouve des antagonismes que l'on pouvait croire oubliés, peut nous pousser à comprendre que l'Europe se doit de former un véritable troisième bloc où la cohésion et la solidarité remplacerait le patchwork cousu tant bien que mal, fil à fil et plus ou moins dans le dos de l'opinion publique. Les excuses et les bonnes raisons pour cette construction au bout par bout ne manquent pas mais elles ne peuvent justifier, à mon avis, que l'on continue dans la situation actuelle.
        L'Ukraine devrait jouer le rôle que lui impose sa géographie, celui de pont ( et zone-tampon car tant qu'il y aura des Poutine, des Chambre de Commerce USA qui se placent au-dessus de n'importe quelle loi et des énergumènes à la croix gammée décomplexée, les tensions sont inévitables ) entre L'UE et la Russie.

        D'autre part, il y a beaucoup à dire sur l'évolution prévisible du système mondial d'échanges. La seule chose que je soulèverai est l'inévitable abandon du dollar comme référence mondiale tôt ou tard. Un nouveau système quel qu'il soit, ne pourra voir le jour qu'après une négociation entre les grands blocs économiques. L'UE ne peut se présenter à cette échéance dans l'état actuel. C'est à gros traits, ce que je pense.

        • Assez d'accord mais il me semble que la crise ukrainienne montre aussi qu'on ne peut s'arrêter à la constitution de grands blocs, forcément destinés à s'affronter, et qu'on va être obligé d'intégrer la Russie, la Chine, d'élargir à une véritable globalisation si on veut éviter les conflits (ou après un conflit catastrophique ?).

          • Ah oui ! Je suis tout à fait d'accord. Je pense seulement que cette mondialisation rationnelle ne pourra avoir lieu qu'une fois constitués les grands blocs dont je parlais et auxquels il faut ajouter la Chine, l'Inde, un bloc sud-américain que le Brésil devrait commencer à envisager sérieusement et un bloc africain dont on voit très mal pour l'instant d'où il pourrait sortir.

  3. Le chômage, que je considère comme priorité, peut nous pousser dans deux directions. Le revenu d'existence ou la RTT. Nouvelle Donne propose la RTT, comme vous le savez. Je soutiens la RTT mais seulement la RTT du travail productif. Je propose que le temps ainsi dégagé soit reversé sur du travail social (sorte d'empowerment). Les pompiers sont déjà organisés de cette façon depuis longtemps (20% de professionnele et 80% de volontaires). En même temps si le financement de l'état social passait massivement du travail à la conso, il me semble possible de réduire très significativement et rapidement le chômage.
    Je suis d'accord avec votre proposition de coopérative municipale+revenu garanti+monnaie locale, mais je ne vois pas cette proposition s'imposer assez rapidement.

    • Il est certain que mes propositions sont à plus long terme au niveau macro bien qu'elles puissent être mises en oeuvre très vite au niveau municipal. Il est tout aussi certain que le chômage est le problème principal mais il est complètement absurde de compter sur la RTT pour cela (encore plus son reversement en travail social !). Il est tout aussi certain qu'il n'y aura pas de sitôt une nouvelle RTT et qu'elle n'aurait de toutes façons pas d'effet sur le chômage : on l'a déjà expérimenté et notre chômage est parmi les plus importants !!

      J'avais fait des réunions publiques avec Larrouturou avant la loi sur les 35h et il n'était pas absurde de croire au partage du travail à cette date (comme il n'était pas absurde du temps de Marx de croire à la propriété collective des moyens de production) mais arriver à y croire encore me dépasse complètement, il faut avoir un blocage cognitif.

      Ceci dit, je n'ai pas vu de RTT dans le programme de Nouvelle Donne pour les européennes dont j'approuve la plupart des propositions bien qu'elles n'aient aucune chance d'être adoptées (pas plus que mes propositions, donc), ces élections ne servant que de communication politique (agitation idéologique on disait avant!), ce qui n'est pas si mal mais nourrit quand même les utopies et disperse les forces plus qu'autre chose (je viens de lire encore ce matin un nombre incroyable d'articles très fiers de défendre des utopies impossibles, on est vraiment très mal barrés). Il y a bien une proposition de revenu de base mais tellement faible que ce n'est qu'un gadget même si c'est révélateur.

      Sinon, pour faire baisser le chômage, le plus efficace serait de sortir de la rigueur, des politiques macroéconomiques moins restrictives et inflationnistes. De plus en plus de forces poussent en ce sens mais on n'y est pas encore. Le basculement des cotisations des bas salaires (uniquement) sur l'impôt serait aussi nécessaire, ce qui a d'ailleurs plus de chances de se faire mais qui ne peut compenser les effets de la rigueur budgétaire.

      • Bonjour,
        Je ne vois pas en quoi le fait de croire à la RTT relèverait d'un "blocage cognitif". Lorsque l'on observe l'évolution du temps de travail sur 150 ans, cela va dans le sens d'une diminution des heures travaillées. Prôner la RTT consiste à extrapoler l'évolution historique de nos sociétés. D'autre part, en terme de création d'emploi, les études (en particulier celles de M. Husson) montrent qu'il y a eu environ 350000 postes créés. En fait, deux facteurs ont permis cela en 1998-2001: la croissance et la RTT. M. Larrouturou, de ce point de vue a le mérite de ré-ouvrir le débat. Vous me semblez sous estimer le facteur "culturel" en matière économique, c'est à dire en terme marxien, celui de la "superstructure" (qui en fait l'infra-structure). Si personne ne provoque ces débats (que cela soit la RTT ou le revenu garanti, ou un mixte des deux), alors en effet, rien n'est possible. L'avenir est autant affaire de changements imaginaires (culturels) que de conjectures sur ce qui est possible immédiatement. Les deux aspects vont de pair.
        Sinon, dans un autre registre, je suis en train de lire le dernier ouvrage de F. Flippo "Nature et Politique": une somme impressionnante sur les fondements philosophiques, économiques et politiques de l'écologie. Ses liens avec le marxisme, le néolibéralisme etc. Sans doute la première fois que quelqu'un s'attelle à un tel travail de synthèse. Avec - enfin - une réhabilitation du Sartre de la "Critique de la Raison Dialectique" (notamment la notion de sérialité etc.), base théorique pour comprendre les autonomies de groupes. Cordialement

        • Je connais les arguments par coeur qui n'ont pas du tout évolué, y compris le fait qu'on travaillerait plus en France qu'en Allemagne mais si je dis effectivement que les 35h ont créé des emplois au début, on voit bien que cela n'a pas empêché le chômage de monter, il est même possible que les 35h en soit une des causes (mineure). Ne pas le reconnaître, c'est ne pas vouloir voir la réalité et ne sert à rien. Il n'y aura pas de nouvelle loi de réduction du temps de travail pour tous (sans diminution de salaire!), ce qui n'empêche pas que des secteurs peuvent privilégier le temps partiel. La question qui est posée par le chômage de masse et par le travail immatériel n'a rien à voir avec la RTT, c'est cela dont il faut se persuader pour ne pas se disperser dans des impasses.

          Il est certain que je suis un des rares à gauche à rester matérialiste et considérer qu'on surévalue beaucoup trop l'idéologie (de même que je ne crois pas du tout que les fondements de l'écologie soient idéologiques mais matériels). Avant, c'était la droite qui s'offusquait au nom de valeurs suprêmes d'un marxisme qui faisait de l'économie le déterminant de la société. Maintenant, c'est à gauche qu'on prétend que l'économie ne serait qu'une idéologie et que c'est l'idéologie qui est supposée mener le monde (le néolibéralisme étant accusé de tous les maux) ! Il faut certes un changement culturel mais pas pour revenir en arrière et tout au contraire pour s'adapter aux nouvelles réalités économiques à l'ère du numérique (et d'un travail qui ne se mesure plus par le temps). Le sujet de l'article, c'est cela, qu'on croit à des conneries mais je ne crois pas du tout, hélas, que ma prose suffise à faire revenir à la raison tous ceux qui ont tellement besoin d'espoir...

          On m'a d'ailleurs écrit, pour me vanter Nouvelle Donne comme plus positif que moi : "matérialistes + rationalistes = pessimistes", comme si c'était moi qui noircissait la situation présente, preuve qu'il ne s'agit que d'idéalistes qui ne mèneront à rien et qui sont pour moi la cause de notre impuissance (mais ça fait du bien d'y croire sans aucun doute et ma position est certes moins confortable et gratifiante). Je n'ai bien sûr jamais prétendu qu'il ne faudrait rien faire, ni qu'il n'y avait aucune solution.

        • Les RTT se sont accompagnés d'une stagnation des salaires pour un peu de temps, mais pour ceux qui n'étaient pas payés à la pièce, il fallait souvent en faire autant en moins de temps, en termes d'objectifs au forfait, résolution du même nombre de problèmes... Dans quelques cas, comme c'est devenu le mien, le temps de travail n'a en fait aucune importance, puisqu'il ne s'agit plus que de trouver quelques idées qui rapportent beaucoup au point que mes revenus ne représentent pas grand chose en comparaison, mais sont relativement lentes à mettre en œuvre dans une organisation complexe.

          Ce qui est curieux chez un gars comme Filoche, représentatif de la gauche, c'est son souhait de rester dans l'Euro, ne pas faire de dévaluation interne tout en ne voulant pas faire de dévaluation fiscale par la TVA qui est la seule solution restante pour rétablir la balance commerciale. La masse des salaires chargeables se réduisant, puisque l'automatisation tend à un aplanissement de 90% des salaires pour ne laisser plus que les 10 derniers pour-cents à pouvoir être chargés, quitte à ce qu'ils s'expatrient pour l'être moins.

          Avec Montebourg, c'est l'industrie qui a la vedette, sauf que même les émergents ont atteint leur pic d'industrialisation et bien plus rapidement que ne l'ont fait les pays développés :

          Dani Rodrik (2014) propose une explication simple au phénomène de désindustrialisation précoce en reliant celui-ci à l’intégration aux marchés mondiaux. Lorsqu’un pays s’intègre aux marchés internationaux, son industrialisation est de plus en plus déterminée par les dynamiques de consommation des pays développés et de moins en moins par les siennes. Or la consommation des pays riches change en faveur des services, ce qui limite de plus en plus la marge d’industrialisation des pays émergents. Par conséquent, les niveaux d’industrialisation des pays riches et pauvres doivent converger, et ce indépendamment de leurs niveaux de revenu.

          http://www.blog-illusio.com/article-les-pays-emergents-face-a-leur-desindustrialisation-prematuree-123472337.html

          A moyen terme, le manque de main d’œuvre peu ou beaucoup qualifiée allemande va manquer, à ce moment le NAIRU fera grimper l'inflation allemande, c'est ce qui provoque les réticences actuelles à augmenter les salaires allemands jusqu'au moment inéluctable, sans compter que ce n'est pas le gouvernement allemand qui décide des salaires...

          • Le lien est intéressant, confirmant une désindustrialisation que les plus anciens ne peuvent même imaginer et qui montre à quel point la focalisation sur l'industrie est à côté de la plaque.

            Pour les 35h, j'en avais dénoncé les effets pervers dès 1999, la loi Aubry étant très éloignée de ce qu'on préconisait :

            http://jeanzin.fr/ecorevo/politic/35h.htm

          • Beaucoup de ceux qui se gargarisent d'industrialisation n'ont jamais sérieusement travaillé dans l'industrie qui se résume à des bureaux d'études de plus en plus, conception de produits et process, de l’expertise administrative de dossiers divers, marketing, affaires légales... en fait du travail sur mesure d’artisan, le bucolisme traditionnel en moins.

            Les industries qui ont atteint leur maturité vivent en partie sur une rente provisoire de position et l'entretiennent en grattouillant pour baisser les coûts matière et process avec quelques petites améliorations fonctionnelles qui ne sont pas des sauts gigantesques technologiques.

            Ensuite, ce sont souvent des start up qui font le saut, comme on me le propose récemment avec une technologie sorte d'agriculture de tissus humains, construction down-up cellulaire, qui n'est pas non plus de l'impression 3D, de bouts d'organes pour remplacer les prothèses inertes actuelles. Dans ce genre d'activité, le mot entrepreneur retrouve plus le sens de pionnier.

          • Encore une illustration du schisme croissant entre main d’œuvre "énergétique" et main d’œuvre "informationnelle" à effet de levier :

            http://www.atlantico.fr/sites/default/files/u57128/2014/04/chomage_atlantico-1_2.jpg

            Augustin Landier : Je pense que les syndicats sont restés enracinés dans le thème de la France industrielle et leur clientèle traditionnelle d’ouvriers. Ils ne s’adaptent pas à l’entrée dans le monde des services, où les trajectoires professionnelles sont plus mobiles. Et les gens ne sont pas dupes, ils voient bien que les symboles ne correspondent plus à la réalité, et que la mise en avant de la figure de l’ouvrier n’est pas représentative du personnel peu qualifié d’aujourd’hui.

            http://www.atlantico.fr/decryptage/salaries-patrons-actionnaires-politiques-qui-est-plus-fort-aujourd-hui-en-france-1er-mai-jean-charles-simon-augustin-landier-1059167.html

        • Certaines propositions de ND sont séduisantes mais toutes sont discutables . D'autre part elle se fondent toutes sur la mise en œuvre d'un plan étatique ce qui va complètement à l'encontre de l'Europe , ce qui signifie qu'elles supposent une sortie de l'Europe. Enfin , Nouvelle Donne n'a rien de nouveau en terme de méthodologie politique : c'est un "nouveau " parti , mais un parti , c'est à dire une structure s'inscrivant classiquement dans le schéma de fonctionnement représentatif actuel. Tout comme par exemple l'UPR d'Asselineau.
          Changer la Donne est bien plus compliqué ; les partis proposant des sorties de "la crise" ont une vue étriquée de la situation et correspondent bien à l'imaginaire cacophonique d'analyses sectorielles.

          • "D'autre part elle se fondent toutes sur la mise en œuvre d'un plan étatique ce qui va complètement à l'encontre de l'Europe , ce qui signifie qu'elles supposent une sortie de l'Europe. "
            Non, chaque pays dispose de marges de manoeuvres au sein de l'Europe. C'est même le principe de subsidiarité.

            "Nouvelle Donne n'a rien de nouveau en terme de méthodologie politique". Oui c'est un parti, mais il est quand même nouveau sur le plan de son organisation interne puisqu'il est le premier à mettre en oeuvre la sociocratie (dont il ne faut sans doute pas attendre des miracles, mais quand même quelque chose de nouveau en politique).

          • Si le cadre de l'Euro n'est pas changé, je doute sérieusement que le programme soit applicable ou alors une faible part.

          • "C'est la faute à ou aux "!

            On ne peut pas sérieusement penser qu'une société mondialisée en pleine mutation avec les enjeux qu'elle a puisse continuer à se gouverner comme aux trente glorieuses : des représentants sachant en haut et des pêcheurs de petite friture de l'autre, en bas ... Et ça c'est la faute à tout le monde. Et tous les conservateurs ,s'accrochant à ce système , notamment en proposant des explications , des fautes à et des mesures pour , rendent un très mauvais service à l'intérêt général qui demanderait un profond changement mental dans la manière d'interroger notre relation au monde et de nous gouverner .
            Il apparaît évident que toute proposition top down de gouvernance est obsolète dans un monde ouvert et que l'orientation est vers de micro entités autonomes ,les échelons supérieur facilitant la mise en réseau .Les grands plans de construction -isolation urbain me laissent rêveur à un moment où il faudrait sans doute bien plus s'interroger sur la déconcentration urbaine.
            Le concept de "citoyenneté " européen , celui décrit par exemple sur le site de l'ue http://ec.europa.eu/citizenship/index_fr.htmme laisse rêveur :"L’Union européenne est faite par et pour ses citoyens!" affirme t on ; en fait "le citoyen " est une association ou une ONG qui dans le cadre d'un programme dit "Programme l'Europe pour les citoyens" peuvent solliciter des subventions . Mais allez analyser ,critiquer , proposer d'autres approches de l'Europe , allez participer aux politiques européennes ....ça c'est pas prévu au programme !

    • Je vais défendre le principe RTT productif + reversement en travail social qui me semble en effet bien plus pertinent que la simple RTT.
      Une des questions à résoudre: "qui va s'occuper des enfants, des vieux, des handicapés etc...et avec quels fonds?"
      On a d'un côté 10% de chômeurs et de l'autre un besoin de main d'oeuvre sociale considérable. Je ne dis pas qu'il faut obliger les chômeurs à faire le travail social comme Wauquier. Mais qu'il serait possible de s'organiser pour mutualiser ce travail (pourquoi pas auprès de coopératives municipales sociales). Je connais d'assez près quelques cas qui seraient très heureux de pouvoir le faire, obligés dans un premier temps d'assumer travail et prise en charge d'un handicapé ou d'un Alzheimer, puis de lâcher leur travail pour pouvoir faire face. D'un point de vue économique, je ne vois pas où le bat blesse. C'était un peu la proposition de société de soin mutuel de Martine Aubry, mais qui est restée complètement dans le flou et les beaux principes. Il me semble que pas mal de gens pourraient s'y retrouver parce que ça répond à un réel besoin. Une partie du financement de ce travail pourrait se faire au moyen d'une monnaie complémentaire (pourquoi pas gérée localement).

      • Il me semble qu'il y a déjà une possibilité (très insuffisante) d'indemnisation pour les aidants et qui vient d'ailleurs de devenir imposable (tout cela à vérifier). Qu'on facilite le temps partiel dans ce cas serait souhaitable mais dépend des secteurs et n'a rien à voir avec une durée légale, ne concernant sans doute qu'un nombre restreint même si cela pourrait rester significatif (sans beaucoup influer sur le chômage cependant). Une telle mesure pourrait donc se défendre mais pas dans sa présentation première.

        Quand on défendait les 35h, on parlait aussi de plein d'utilisations vertueuses du temps dégagé (en particulier pour l'exercice de la démocratie), ce qui ne s'est pas du tout vérifié (une bonne partie a été bouffé par plus de temps passé au ménage!).

        • "Quand on défendait les 35h, on parlait aussi de plein d'utilisations vertueuses du temps dégagé (en particulier pour l'exercice de la démocratie), ce qui ne s'est pas du tout vérifié (une bonne partie a été bouffé par plus de temps passé au ménage!)."
          Complètement en phase avec ça. A l'époque j'avais souligné cette illusion qui me semblait correspondre à l'utopie du temps choisi de Gorz. C'est la raison pour laquelle je serais plutôt pour un fléchage du temps productif libéré.
          Je vais retravailler la question des volumes de temps en jeu qu'il faudrait passer à du travail social, j'en avais fait une estimation en 1998 (à la hache, je ne suis pas du tout armé pour ça), j'avais trouvé un gisement de 1,5h par jour par actif (c'est p81 de ce document très naïf)

      • Cette question du gisement d'heures qu'on pourrait passer au domaine social est primordial et difficile à évaluer du fait qu'il relève en partie de choix et de définition du périmètre. A partir des données INSEE "Tableau de l'économie française 1997-1998" (ça date, mais finalement pas tant que ça sur le plan de la structure), j'avais estimé le travail en France pour l'année 1996 selon 4 catégories, en effectif en millions de personnes et en millions d'heures. J'avais trouvé (marchand monétarisé (Agriculture, pêche, biens d'équipement, services...); 16M de personnes; 24320M d'heures); non marchand monétarisé (admin, enseignement, santé, armée); 6 M de pers; 9120M d'h); marchand non monétarisé (travail au noir, bricolage, jardinage, SEL...); 50M de pers; 2000M à 10000M d'h); non marchand non monétarisé (vie sociale, associations, famille) 58,4M de pers; 52000M à 60000M d'heures).
        A partir de ces données on calcule facilement qu'environ 10% de l'activité est reconnue par un salaire. Une étude détaillée de notre temps passé au travail au cours d'une vie avait trouvé 9%, ce qui valide mes estimations.
        J'avais ensuite tenté une estimation du temps qui me semblerait nécessaire de passer à des activités sociales non spécialisées. J'ai utilisé 4 (catégories; effectif; activité à consacrer; temps à consacrer par unité par jour; total par an) ;(0-5ans; 4,5Millions; nurserie, crèche; 5h par jour par enfabnt; 8212M d'h par an)(5-12ans; 6Millions; soutien scolaire; 1h; 2190Md'h par an)(>80ans; 3Millions; compagnie, soins légers; 2h; 2190M d'h par an)(Handicapés; 0,4M; accompagnement, soins légers; 6h par jour; 876M d'heures par an); soit un total de 13468 Millions d'heures par an. Pour 25 millions d'actifs, ça nous donne 1,5h par jour. Si on fait une RTT de 1/3 du gisement de 13468M d'heures, soit environ 4500M d'h, soit environ 15% des 33440 Millions d'heures monétarisées soit environ 5 ou 6h par semaine.
        Il me semble donc que le gisement de travail social serait très largement capable d'absorber cette RTT transférée du domaine actuellement monétarisé au domaine social actuellement non monétarisé.

        • Une précision sur les 10% de temps reconnu par un salaire, ou, ce qui revient au même 10% de notre temps de vie à occuper un travail reconnu. Je suis parti sur une base de temps de vie active de 16h/jour/personnex58.4Mx365=340000M d'h. Comme j'avais établi que 33440M d'h étaient reconnues par un salaire, le rapport fait bien environ 10%.

          • Je partage ce regard d'Eloi Laurent d'une Europe qui détricote l'état providence et passe ainsi à côté de ce progrès historique complètement nécessaire.
            Cela ne signifie pas que cet état providence échappe à tous les défauts qui sont les nôtres et que cette avancée ne soit toujours à remettre en question ; mais sans cette vision amont activement structurante ,pas de projet commun aval : des sociétés éclatées qui marchent au fil de l'eau en fonction de ce qui leur arrive , des partis , des mouvements , des associations, des entreprises , des secteurs contraints par l'économie, sans lien politique de projet.
            Après ...Serons nous capable de lui donner un bel avenir ? C'est tout autre chose.

          • Il a raison sur le long terme, devant assurer la reproduction de la société et des compétences mais je ne sais s'il va jusqu'à défendre un revenu garanti pour cela et cela ne veut pas dire que les conditions de la concurrence internationale ne vont pas gravement affecter notre système social.

          • Quelques réalisations et projets allant en ordre dispersé vers un état providence participatif: service civique, congé solidaire et en chantier le congé d'engagement ou congé volontariat, sans oublier les pompiers (quand même 200000 personnes dont 80% de volontaires). C'est très partiel et par petits bouts, mais ça va quand même dans le sens de cette relation de partenariat productif/social que je défends dans le contrat mixte généralisé productif/social.

  4. Si l'on considère que le chômage est conjoncturel , alors toute une série de solutions peuvent être tentées; s'il est structurel et émerge dans la logique de l'organisation actuelle des sociétés , alors toutes les mesures contre le chômages sont des "solutions imaginaires ". Dans cette seconde hypothèse qui me semble fondée, placer le "chômage" comme la priorité nationale est une chimère puisque la priorité devrait bien être l'analyse structurelle de nos sociétés et leur organisation , du lien engendré entre ces modes d'organisation et le chômage et des possibles réorganisations de la société ; mais il est beaucoup plus confortable d'en rester à l'incantation , pour le chômage ou le changement climatique , ou la transition énergétique, cela permet à tous de conserver leurs acquis ; quand on voit qu'un pays est capable de revoter aux présidentielles pour un cumulard sénile proche de la fin, juste pour conserver l'existant on mesure que par analogie , il vaut mieux s'exciter comme un cabri et crier chômage ,chômage , climat ,climat, Europe , Europe et surtout pas s'interroger sur le fond , ce qui structure et oriente parce qu'on a,à juste raison, l'intuition que cela va beaucoup chambouler nos vies. Donc citoyens , aux urnes, continuez votre "devoir" qui consiste à ne surtout rien changer .

    Un revenu universel serait logique dans le contexte mais tout aussi logique que les http://www.bioalaune.com/fr/actualite-bio/11641/robots-abeilles-arrives-sauver-lhumanite : on ne pourra bientôt vraiment plus choisir son monde.

    • On n'a jamais pu choisir son monde (sauf très localement), ni au temps de l'empire romain, ni au temps des invasions barbares, ni au temps de l'industrie et donc ni au temps du numérique.

      Il y a du chômage structurel et du chômage conjoncturel, différent selon les pays. C'est une priorité car cela cause beaucoup de misère et de souffrances mais on peut effectivement vouloir le régler en revenant aux 30 glorieuses de l'ère industrielle ou en favorisant le travail autonome de l'ère du numérique.

      • Oui , le local nous montre qu'on peut parfois (difficilement) agir.
        Mais il y a encore des Romains et des Barbares qui imposent "leur" monde; c'est beaucoup plus diffus et systémique mais c'est là au cœur des logiques d'organisation et objectifs de la société.
        Le mode d'organisation de l'acte politique qui devrait théoriquement être un acte libérateur s'inscrit lui même dans cette logique barbare empêchant l'accès à toute libération qui aujourd'hui ne passe plus par le glaive ou le canon, puisque ce n'est pas tel ou tel groupe humain l'oppresseur mais structurellement dans notre propre fonctionnement , mais par la démocratie dans son sens exact de prise de pouvoir par l'organisation de la réflexion et la décision collective.
        La matérialité positive de l'avancée des sciences , du numérique...Ne pourront pas suffire à donner le la d'une libération mais seulement nous être d'un grande utilité si et seulement si nous devenons (mutation finale?) des êtres politiques.
        En face des solutions imaginaires que nous proposons nous devrions mettre le monde imaginaire que nous construisons. Imagination fertile mais suicidaire puisque tout nous montre qu'il n'est pas durable.
        Je me répète mais le disque de ma pensée est rayé sur ce paragraphe d'une solution non réaliste mais obligée d'une réorganisation de la société passant par une réorganisation de la politique.
        Le réalisme est devenu lui même imaginaire .Nous serons des démocraties ou nous ne seront plus.

  5. Hollande est un enfumeur comme les autres dirigeants européens, le rêve d'une Europe fédérale est aussi une solution imaginaire, il n'y aucune probabilité plausible que l'ensemble des pays signent un accord de réformes de fond :

    Il faut s’appuyer sur le fait que la stratégie du retournement ne peut fonctionner en termes électoraux que si les citoyens ne comprennent pas qu’on essaye de les manipuler. Dévoiler la manipulation est alors plus efficace que la mise en place de règles. Dont acte.

    http://www.ofce.sciences-po.fr/blog/election-et-derivee-du-chomage-la-strategie-du-retournement/

    • Assez d'accord aussi sur le point qu'on ne peut pas séparer les problèmes et les échelons en morceaux et croire qu'en coupant une branche (l'Europe ) on retrouvera le bonheur national .
      Ce qui compte c'est le structurel, les logiques , les finalités de projet . C'est le tout qu'il faut interroger , non pour tout comprendre mais pour orienter où l'on veut . Redonner de la volonté et donc du projet , cela bien sûr à tous les échelons puisque le monde est mondialisé.
      Cette démarche radicalement autre , ce passage de la gestion au projet de société , cette rupture avec profit , croissance, compétitivité ne peut pas prendre racine dans le terreau de l'organisation politique représentative. Toutes les solutions techniques, sectorielles, gestionnaires sont imaginaires et dangereuses en ce sens qu'elles détournent de la réalité qui s'annonce tragique, et des seules solutions possibles qui prennent appui sur l'humain et un choix de société qui ne peut émerger que d'une interrogation -recherche collective bien menée. C'est bien alors tous les échelons qu'il s'agit d'activer , d'abord le local , un local qui puisse s'appuyer sur le national , et les autres échelons disponibles et volontaire sur la construction d'un projet alternatif .

      ......Néanmoins si une branche est assez pourrie et dégrade le tronc , il n'y a , à un moment donné ,pas d'autre issue que de s'en séparer.
      La souveraineté est un concept aujourd'hui vide de sens que ce soit en France ou ailleurs si on veut bien lui donner son sens qui est réflexion -délibération -décision .

    • "réquisition des banques centrales de ces pays pour émettre des euros ou des « nouveaux euros » ; possibilité pour elles de prêter directement aux États et dans tous les cas de garantir leurs autres emprunts, conditions pour créer des obligations publiques communes ; refus de siéger dans les instances européennes tant que la révision des traités n’est pas mise à l’ordre du jour."

      "La sortie de l’euro actuel ne serait donc pas un préalable, mais l’aboutissement d’un processus collectif ou bien une menace mise à exécution en cas d’impossibilité de négocier."

      On ne voit pas le début d'un commencement qu'un chef d'état de la ZE, et à fortiori plusieurs, se lancent dans un tel bras de fer...

      • Avoir des dettes fédérales est incontournable si on veut interdire les déficits budgétaires nationaux et gérer l'inégalité des territoires. Le modèle est celui des Etats-Unis, ce qui ne s'est pas fait cependant sans la guerre de sécession.

        Il n'y a certainement personne qui puisse taper du point sur la table sans très fortes raisons, mais je reste persuadé que ce sont les faits qui décident, les grands hommes ne font jamais que ce que leur dicte la situation. Il est certain qu'il n'y a rien à espérer de cette Europe à court terme, elle doit absolument changer ou éclater. Il y a de toutes façon besoin de revenir à un noyau dur, la folie ayant été de s'étendre à 28 pays, on voudrait y rajouter la Turquie, ce qui n'en fait qu'un marché commun, un libéralisme plus extrême que celui des USA (les complotistes faisant de l'Europe une création américaine oublient qu'elle n'a commencé à s'étendre et nous échapper qu'après la chute du communisme et l'intégration des pays de l'est).

        • Que l'on fasse une Europe fédérale me va très bien et c'est bien parce que Maastricht ne proposait pas ça que j'ai voté non, en plus de la structure organisationnelle complètement alambiquée et illisible. L'Europe telle quelle peut durer encore 10 voire 15 ans, comme le scénario japonais, avant qu'un évènement vraiment très grave contraigne un ou des dirigeants européens à se rebeller, et probablement pas pour renégocier une autre Europe si il est d'extrême droite. Actuellement, après les tentatives vers l'Ukraine cafouilleuses de l'UE, c'est le traité transatlantique qui se négocie alors que rien n'est résolu des problèmes de fond européens.

          L'UE est devenue un asile de cinglés...

    • ça ne vaut pas rien, certes, mais pas grand chose quand même. Toutes les techniques de survie, de récupération, de réseaux parallèles sont utiles, surtout dans des périodes troublées, mais leur portée reste anecdotique. Il n'y a rien de neuf là dedans. On a connu ce genre de pratique en Californie dans la période post-hippies (au-delà du whole earth catalog) et leur charge subversive a été nulle. Par contre, il n'est pas du tout inintéressant de se lancer dans de telles pratiques marginales pendant une période forcément limitée mais dont on peut tirer beaucoup (cela vaut mieux que de ne rien faire ou de se faire chier).

      • En effet,

        Je pense que cela peut bcp aider au réseau, de façon assez constructive d'ailleurs, car malheureusement pour le moment, les alternatives locales telles que celles d'une coopérative municipale restent quasi-caduc (malgré que le front de gauche ait été élu à montreuil pour ma part, là où je loge...). Ne sommes-nous pas dans cette situation de faible capacité (en dehors de la proposition intellectuelle) d'action justement !

        Je pense d'ailleurs à présent qu'une coopérative municipale accompagnée de monnaies locales restera presque impossible tant qu'un revenu garanti ne sera pas généralisé (d'expérience...). Quoique...

        Je pense que pour l'instant le plus important reste malgré toutes les contraintes salariales qui délocalisent les habitants en général et les déconnectent trop de la vie territoriale, de créer un réseau convivial basé sur des rapports purement humain et par le biais d'un art engagé et médiateur entre les habitants et les personnes dites "actives" c'est à dire volontaires pour aider à l'anticipation du danger d'une dictature économique par le haut (déjà bien esquissée par l'europe, le fmi etc. et les multinationales, c'est le cas de la dire).

        V13 cherche à trouver des projets terres à terres et faciles qui puissent mobiliser de façon plutôt dispersée dans un premier temps tout un chacun. Je pense pour t'aider d'un point de vue systémique que le premier objectif reste un réseau solide qui puisse peu à peu s'élargir et qui se baserait sur un rapport de confiance purement humain, ce qui demande du temps, de l'humanité et de l'ouverture à tous.

        Avant de revendiquer quoique soit (si ce n'est par un biais artistique), il faut pirater la culture de l'anonymat (en ce qui concerne les villes) et refaire vivre au plus la culture et les animations perdues par la fonction économique des villes dortoirs.

        Sans ça on n'arrivera à rien et la démocratie participative locale mise en place par certaines localités restera caducs (seul espace de liberté législative citoyenne pour l'instant).

        Je pense également qu'il faille sortir du communautarisme militant de l'écologie politique car sans ça, de nouveaux liens ne se créeront que très difficilement et de façon trop étroite.
        Je suis donc pour la dispersion de ce genre de communautés déjà informées (et qui tournent souvent en boucle) afin qu'elles se confrontent au terrain qu'elles analysent...

        Sinon que penses tu des élections européennes..? Abstention ?

        • Comme je suis un esprit très contrariant, moi qui n'ai pas voté depuis le référendum je vais sans doute aller voter cette fois que l'Europe est devenue si ringarde mais je n'en espère rien et on a besoin de la pression des eurosceptiques pour changer une Europe qui n'est pas viable en l'état mais je ne suis pas pour l'éclatement. Quand l'extrême-droite est pour la sortie de l'Euro je crois important de se positionner contre même s'il y a des arguments pour, question de rapport de force et de ne pas être l'idiot utile de nos adversaires.

          • Le vote aux européennes n'a à mon sens aucun intérêt. Ce sont les chiffres de l'économie qui pourront faire bouger les choses en Allemagne mais avec 0,8% de croissance allemande au premier trimestre, ça ne peut que conforter l'opinion allemande et donc Merkel de ne rien changer. Si dans le monde du travail les allemands sont agréables et assez relax, l'appareil d'état est très psychorigide, voire impitoyable parfois. Je me suis fait matraqué pour une connerie insignifiante, zèle de la police, du procureur et de l'administration. Là où je suis il y a peu de délinquance, alors l'administration judiciaire doit tellement s'ennuyer que le moindre truc en devient un fromage.

            Pour en revenir à l'Europe, rien ne va changer tant que l'économie allemande s'en sort et le massacre va continuer ailleurs, vote ou pas pour un parlement croupion :

            http://www.latribune.fr/actualites/economie/union-europeenne/20140515trib000830133/croissance-les-illusions-perdues-de-la-zone-euro.html

          • Etre pour ou contre l'éclatement est aussi insignifiant, personne n'en décide pas plus que des tremblements de terre.

            Eurosceptique n'a pas vraiment de sens non plus, il y a diverses façons de concevoir l'Europe, celle actuelle, celle souhaitée par divers manifestes en France ou Allemagne...

            Qui restent très imaginaires. Et puis faut arrêter de raconter des conneries sur la paix en Europe grâce à Maastricht, c'est vraiment prendre les gens pour des cons ignares.

          • Il est au moins nécessaire de s'opposer au nationalisme et je ne suis pas si sûr qu'on ne pourrait de nouveau faire la guerre aux boches à une occasion ou une autre alors qu'on est encore saturé de films sur le nazisme. Paradoxalement, la monnaie unique a bien été faite par crainte de la grande Allemagne réunifiée (il y a eu ces jours-ci un très bon documentaire sur le sujet dont je n'ai vu qu'une partie) alors qu'elle s'est faite au profit de l'Allemagne et que c'est maintenant la source principale de notre animosité.

          • C'est l'histoire de l'arroseur arrosé, Mitterrand croyait brider l'Allemagne avec une monnaie unique qui correspondait parfaitement au modèle allemand ordo-libéral et pas vraiment au modèle social français. Mitterrand reconnaissait lucidement son désintérêt et son ignorance concernant l'économie, était entouré, comme souvent ses successeurs, de mauvais conseillés.

            Le nationalisme se développe quand la situation économique et sociale se dégrade. Lutter contre le nationalisme c'est lutter contre ses causes qui ne sont pas tant idéologiques que matérielles. La cause de croissance des nationalismes actuels c'est le fonctionnement de la zone Euro, sa BCE bridée... si c'est pas modifiable après d’âpres négociations, alors...

            Entre faire la guerre aux boches et sortir de l'Euro, je préfère la seconde option.

          • En y réfléchissant, je pense que la thèse de la sortie de l'Euro pour dévaluer et rétablir la balance commerciale par rapport à l'Allemagne a peut être marché dans le passé, mais actuellement j'y crois moins.

            L'Allemagne anticipant la montée de sa monnaie peut prendre des mesures, comme la Suisse l'a fait, pour freiner cette montée, elle peut également parallèlement baisser l'ensemble de ses salaires publics et privés qui n'y perdraient pas vraiment puisque le pouvoir d'achat des importations serait encore plus favorable.

            L'Allemagne a montré qu'elle savait très bien faire des dévaluations internes pour des raisons liées à son dialogue syndical spécifique. Dans la mesure où une dévaluation interne dans le cadre d'une monnaie forte est bien orchestrée, la dévaluation monétaire des autres pays de l'ex-Zone Euro serait un coup d'épée dans l'eau. Il resterait que les pays latins s'écharperaient à coups de dévaluations monétaires successives.

            A rajouter le souk de l'intrication des dettes pas si clair que le prétendent certains :

            https://www.lhemicycle.com/4530-le-vrai-probleme-de-la-zone-euro-cest-son-heterogeneite/

            Le seul intérêt de la sortie de l'Euro reste de revenir à un peu plus d'inflation ailleurs qu'en Allemagne. Mais cette histoire de rééquilibrage de la balance allemande est beaucoup moins évident...

          • Oui, il y a une grosse différence entre l'évidence que ce serait mieux de pouvoir dévaluer dans notre situation et le fait de sortir de l'Euro qui serait un gros bordel dont on ne profitera pas forcément.

            Si ce qui est nécessaire pour garder l'Euro n'est pas fait (aller vers plus de fédéralisme), il y aura éclatement mais ce n'est pas du tout comme si on avait gardé le Franc et cela ne règlera pas magiquement tous nos problèmes, au contraire (comme Ruffin et Todd s'imaginent une France protectionniste protégée de la mondialisation).

          • En économie comme en physique, il y a des phénomènes d’hystérèse qui sont souvent sous estimés, le chemin aller n'est pas le chemin retour.

          • Je ne voterai pas ; mais depuis qqtemps je ne vote pas non plus pour les présidentielles et les députés.

            J'estime que le système politique et électoral tel qu'il est organisé n'est pas en capacité de résoudre quoi que ce soit ; reste à savoir ce qu'on veut résoudre et où on veut aller .
            Pour moi le problème majeur est de réussir une mondialisation durable . L'Europe comme force économique en capacité de tenir tête aux émergeants ne m'intéresse absolument pas . La sortie de l'Euro et l'Europe pour tirer notre épingle du jeu au niveau national ne m'intéresse pas; les logiques restent strictement les mêmes.
            Nous sommes condamnés à construire une mondialisation durable qui ne pourra l'être qu'en s'appuyant sur le principe de coopération , de démocratie et d'écologie . Sortie des logiques de compétitivité , de finance etc construction collaborative entre pays et participative , incluant l'ensemble des citoyens autour du projet d'une mondialisation durable .
            Le reste est insignifiant et à côté de la plaque .
            Je ne suis pas partisan du "plus jamais ça ".
            Alors bien sûr si on ne voit pas ou ne croit pas qu'on va à la cata , on peut discuter de l'Euro , de Marine Lepen , des verts etc

            J'ai pleine conscience que ce que je dis là est stupide et complètement idéaliste au regard d'où on en est ,mais je suis complètement incapable de rentrer dans un jeu dont les règles et les objectifs me semblent stupides et suicidaires.

          • Cet article est bien plus raisonnable que tous ceux qui parlent de façon bien trop théorique de la sortie de l'Euro (y compris Bernard Maris) qui serait une énorme catastrophe mais il faut voir comme les commentaires prétendent qu'on veut juste leur faire peur ! La montée de l'extrême-droite partout nous promet des moments terribles, la conjuration des imbéciles. Certes, les supposés "intelligents" n'étaient guère brillants mais si on cherche le pire, on va l'avoir...

          • De nombreux Nobel d'économie semblent aussi approuver la fin de l'Euro, comme quoi l'incertitude est maximale...

            Les souverainistes français m'agacent de plus en plus, les causes selon eux des problèmes sont toujours extérieures à la France. L'immobilier français délirant, ils n'en parlent jamais, la modernisation de l'industrie et de la RD française en retard sur bien des points, non plus...

            L'extrême droite, selon eux, a un plafond de verre infranchissable, ce qui est tout aussi idiot, comme le montre l'histoire.

          • Non, la plupart des économistes disent que l'Euro n'est pas viable, ce qui est évident. Greenspan était très étonné que cela semble marcher au début. Pour ma part j'ai répété comme d'autres qu'on ne pouvait avoir une monnaie sans Etat et limitée à la lutte contre l'inflation. Les "Nobels" ne peuvent dire autre chose, la zone Euro étant très loin d'être "optimale", mais ils sont conscients des problèmes posés par une sortie et plaident plutôt pour le sauver par plus de fédéralisme (sauf pour des pays déjà en faillite comme Chypre, voire la Grèce) et surtout pour une politique monétaire plus souple.

            Qu'on le fasse est douteux, l'éclatement est donc possible mais le coût en sera exorbitant (une crise systémique pire que la précédente) et sonnerait sans doute le glas de notre puissance économique, pas seulement pour un an ou deux et pas du tout l'amélioration attendue. Pour que ça ne soit pas trop catastrophique il faudrait que l'éclatement (le passage à une monnaie commune) se fasse dans le secret un week-end sans l'annoncer avant (pas la victoire d'un parti ouvertement décidé à le faire) et par l'accord de tous les pays concernés, ce qui semble bien impossible.

            http://www.liberation.fr/politiques/2014/01/23/sortir-de-l-euro-des-nobel-pris-au-piege-par-le-front-national_975044

          • Est ce que maintenir l'Euro en monnaie commune et réactiver les monnaies nationales pour les échanges intérieurs ne serait pas une voie à explorer ?

          • En "théorie" oui, mais en réalité cela équivaut à augmenter nos dettes en Euro de 20% au moins par rapport à la monnaie nationale. Ce qui serait le moins douloureux sans doute, c'est une sortie de l'Allemagne. Des monnaies locales et régionales pourraient aider mais de toutes façons il faudra bien régler la gouvernance de l'Euro et cela dépend très peu de ce qu'on peut en penser !

          • Nos dettes restent en Euro , nos échanges externes aussi .
            Le Franc devient une monnaie interne qui joue le rôle des monnaies locales : On peut conventionner qu'elle est fondante et elle permet de stimuler les échanges et l'économie interne.
            L'état redevient là créateur de monnaie ; il y a facilitation au niveau des politiques d'aides sociales et économiques, facilitation d'investissements .
            ça ne résout pas le problème de l'Euro mais ç'est un outil pour stimuler l'économie et les politiques nationales .

            ???

          • merci du conseil... J'hésitais ! Ces temps ci je me disais voter car selon politis le parlement européen face aux avis contraires peut être immobilisé pour certaines réformes du type : canada/europe (accords commerciaux et consors...).

            Par contre c'est vrai que je m'imagine (m'imagine..!) plutôt en dehors de l'europe avec un réseau international subversif qui favoriserai avant tout l'interlocal.

            Il faut bien dire que je suis idiot ! car je n'avais pas penser à la facette du FN... :p

            Malgré que je commence un peu à faire mon propre cheminement intellectuel, je continue à te lire, car ça me fait du bien et me regorge de conseil en me remettant les idées en place !! 🙂

            Merci de continuer Jean ! Hommage à Barbara (très beau)

            Merci 🙂

            Amitiés et Amour

            Baz

          • Si on gardait nos dettes en Euros et qu'on passait au Franc en interne, les recettes fiscales seraient en franc, dévaluées d'au moins 20% par rapport à l'Euro, ce qui augmente d'autant la charge de la dette.

          • Selon certains, dans le cas d'une monnaie Euro commune, la plupart des contrats de dettes publiques et privées françaises sont liés au droit français, ces dettes seraient donc en Francs.

            Le restant des autres dettes resteraient en dollars, livre...

  6. Les capitalistes cherchent non l’utilité à travers la consommation mais le pouvoir à travers la redistribution. Et ils atteignent leur but non en augmentant l’investissement et en alimentant la croissance, mais en permettant au chômage d’augmenter et aux emplois de devenir rares.

    http://frappermonnaie.wordpress.com/2014/05/10/profiter-de-la-crise-pourquoi-les-capitalistes-ne-veulent-pas-dune-reprise-et-ce-que-cela-signifie-pour-les-etats-unis/

    • Article débile variante des théories du complot et qui prouve à quel point on délire quand on imagine une volonté à l'origine des malheurs du monde.

      D'abord, "les capitalistes" cela n'existe pas, les différents capitalistes en concurrence les uns avec les autres ayant des intérêts divergents. Ce qui existe, ce sont les banques centrales et notamment la federal reserve qui certes défendent les intérêts des banquiers, notamment en luttant contre l'inflation, ce qui effectivement implique d'éviter le plein emploi en se basant sur le NAIRU (non-accelerating inflation rate of unemployment) qui n'a rien de caché mais constitue bien, hélas, un des indicateurs principaux des banquiers centraux dans les phases de lutte contre l'inflation (phase dépressive du cycle de Kondratieff). Plus il y a de chômage et plus le rapport de force capital/travail est défavorable aux travailleurs et les inégalités s'accroissent mais cela ne veut absolument pas dire que "les capitalistes" ou même les banques centrales seraient responsables de taux de chômages excessifs qu'elles essaient de réduire en injectant des sommes déraisonnables dans l'économie. Ils aimeraient bien effectivement maîtriser l'économie en fonction de leurs intérêts mais n'y arrivent pas tant que ça et, normalement, on devrait entrer dans une nouvelle phase d'inflation où les règles sont tout autres.

      Inutile en tout cas d'aller chercher une motivation psychologique des capitalistes, que ce soit l'utilité, le plaisir, la cupidité ou la compétition alors qu'on a affaire à un système de production qui détermine les "acteurs" bien plus qu'ils ne peuvent en influer le cours. Croire le contraire c'est imaginer un Hollande cynique agissant au nom des illuminati pour le malheur des pauvres chômeurs alors qu'il est simplement impuissant à retourner une situation économique qui a des multiples déterminants (Euro, Allemagne, pays émergents, numérique, crise de la dette, système social, niveau des impôts, etc.).

      Le problème, c'est que tous ceux qui s'imaginent que leur militantisme puisse être déterminant sont obligés de penser que le fait de ne pas appliquer leurs solutions miracles est voulu ! Il est même très difficile de penser autrement (on se fait traiter de pessimiste, de vendu, de défaitiste, de traître).

      • L'article passe surtout à côté du fait que les cycles d'amélioration technologique permet l'emploi en phase ascendante d'investissement et les détruit quand les investissements tournent à plein régime. La robotisation des taches mécaniques et intellectuelles actuelle supprime des emplois à grande vitesse.

        En ce moment, je m'en aperçois pour un truc tout bête. Avant, je faisais faire une succession de moules prototypes pour tester des membranes moulées en élastomère.

        Maintenant, je fais faire des modèles numériques qui permettent de voir leur comportement en vidéo, les concentrations de contraintes et les défauts, comme en imagerie médicale, modifier la forme et voir à nouveau la vidéo de son comportement, avant de faire le moule proto réel quasi-final.

        Ce qui évite la fabrication de nombreux moules et pièces moulées, et donc de la main d’œuvre, sans compter le gain de temps :

        http://nouvellesdelhumanite.over-blog.com/article-la-borne-interne-du-capitalisme-entretien-avec-ernst-lohoff-sur-les-causes-et-consequences-de-la-c-123585041.html

        • ça aussi, c'est des conneries. Comme toujours on s'appuie sur une vérité (l'automatisation) pour construire un délire simpliste basé sur une causalité unique. La suppression des emplois dans l'agriculture a été presque totale, ce n'est donc pas nouveau. Il ne s'agit pas de la fin du travail mais de sa complète transformation ce qui est tout autre chose même si cela crée du chômage de masse (non qualifié surtout). Il est fort probable que le numérique rende le capitalisme industriel obsolète mais pas tant par disparition de l'emploi que par le fait que la productivité ne se mesure plus par le temps. Tout cela témoigne que tout le monde dit n'importe quoi devant une situation intolérable sur laquelle on n'a pas de prise mais qu'on prête foi à ces discours donne la mesure de notre connerie malgré internet et l'accès à tout le savoir du monde... [dans une émission de télé sur la sexualité un spécialiste vient de dire qu'il reste difficile d'avoir accès à des informations fiables sur ce sujet pourtant omniprésent sur le net, ce qui est le cas dans les autres domaines : politiques, économiques, scientifiques, etc.]

          • "Il est fort probable que le numérique rende le capitalisme industriel obsolète mais pas tant par disparition de l'emploi que par le fait que la productivité ne se mesure plus par le temps."

            Mais pas du tout, le capitalisme industriel se rend très bien compte avec lenteur, certes, que la productivité ne se mesure plus par le temps de travail, mais par les investissements et assouplissements managériaux. C'est même cet aiguillon qui me permet, avec un peu d'insolence, de négocier mes conditions de travail face ma hiérarchie allemande.

            La mesure par le temps est une affiche destinée aux masses, la réalité un peu plus stratégique est que ceux qui sont remarqués pour leur productivité hors temps sont parfois compris. C'est juste un problème de positionnement dans la chaine de valeur.

            Ce n'est pas du tout nouveau.

            Le numérique ne rend pas obsolète le capitalisme industriel, mais l'amplifie.

            La frontière entre industrie et services s'estompe vite, au point qu'industrie devient un terme obsolète. C'est terminé ce mot industrie, il n'y a plus que des services, projets impromptus...

          • "dans une émission de télé sur la sexualité un spécialiste vient de dire qu'il reste difficile d'avoir accès à des informations fiables sur ce sujet pourtant omniprésent sur le net, ce qui est le cas dans les autres domaines : politiques, économiques, scientifiques, etc"

            Oui, et alors, ca démontre quoi ? Sur des sujets bien plus simples j'ai pu constater les affirmations débiles que j'ai détruites. C'est pas parce que n'importe qui raconte n'importe quoi qu'on y prête foi. Comme si le scepticisme n'avait pas son droit de réserve caustique.

          • "ça aussi, c'est des conneries. Comme toujours on s'appuie sur une vérité (l'automatisation) pour construire un délire simpliste basé sur une causalité unique. La suppression des emplois dans l'agriculture a été presque totale, ce n'est donc pas nouveau. Il ne s'agit pas de la fin du travail mais de sa complète transformation ce qui est tout autre chose même si cela crée du chômage de masse (non qualifié surtout)."

            Mon fils s'installe sur la ferme et fait des pâtes alimentaires au blé dur ; cela depuis la culture du blé , fabrication des semoules , fabrication des pâtes, leur séchage , la commercialisation ; ce secteur comme les autres est fortement automatisé et industrialisé ,au sens de travailler sur de grands volumes ; cette industrie maîtrise parfaitement tous le processus de fabrication , achat des matières premières et vente . Il est ainsi complètement inutile qu'un jeune s'installe dans ce secteur puisque tout est fait et pas besoin de lui pour manger des pâtes. Il en va ainsi de toute l'agriculture ,de tout l'artisanat et nombreux métiers .
            La question est de savoir si sa démarche est un retour en arrière où une ouverture sur un avenir qui organise le travail et le monde autrement . Où est la connerie ?
            Peux t on penser que les progrès techniques et l'automatisation construisent mécaniquement le monde réel ? N'avons donc nous plus notre mot à dire ?
            Pour sécher nos pâtes nous avons du réinventer la lune : le séchage de la pâte alimentaire n'a rien de simple et doit respecter des cycles précis ; les pratiques et les matériels ont fait l'objet de nombreux brevets .....Alors à quoi bon réinventer le monde, et nous y coltiner nous mêmes ? Pourquoi donc avons nous construit nous mêmes , expérimenté , encore et encore ?
            Où se situe donc le travail autonome ? Bidouiller quelques conneries inutiles avec l'imprimante 3 D ?
            Je ne jette pas l'imprimante 3 D , ni les drones , rien! je prends tout et suis passionné de tout ça , mais la connerie se met là aussi . Elle est vraiment partout et nous colle à la peau , le nous incluant bien sûr celui qui écrit , ceux qui lisent et le "maître " des lieux.

          • Je n'ai pas du tout parlé de connerie à propos de ceux qui retournent à l'artisanat qui a très certainement un avenir malgré (ou à cause) de l'automatisation généralisée qui a incontestablement sa part de connerie. C'est cependant très difficile sans un revenu garanti ou un marché touristique.

            Je ne me suis jamais exclu de la connerie, ayant au contraire parlé de notre "commune connerie" et utilisant cette fois aussi le "nous". Il faut bien dire pourtant que je trouve que je dis beaucoup moins de connerie que la plupart de ce que je lis, même si je sais que cela pourrait aussi être une connerie...

            Sinon, je ne crois pas que le numérique amplifie le capitalisme mais qu'il reste bien lié à la mesure du travail productif direct par le temps (au temps de reproduction des marchandises) ce qui n'est plus du tout le cas de sociétés comme Google par exemple et ne doit pas l'être pour les services à la personne notamment. En tout cas, ce n'est pas si simple et il est un fait que la connerie triomphe partout et pas seulement sur la sexualité...

  7. "Il faut à tout ce monde un grand coup de fouet". Mouvements sociaux et crise politique dans l’Europe médiévale.

    http://revueperiode.net/il-faut-a-tout-ce-monde-un-grand-coup-de-fouet-mouvements-sociaux-et-crise-politique-dans-leurope-medievale/

    Cet article de Silvia Federici montre bien que ce qu'on appelle populisme, les révolutionnaires ou les jihadistes sont exactement pareils que les millénaristes ou hérétiques du Moyen-Âge mettant en cause la légitimité de leurs élites, églises, seigneurs (ce que Vaneigem avait déjà souligné en parlant des hérétiques du libre-esprit). Ce n'est certes pas la première fois qu'on défend des solutions imaginaires et qu'on échoue à changer un monde injuste et insupportable !

    Je suis plus réservé sur le rôle majeur donné à la prostitution bien que ce qu'elle dit soit intéressant.

  8. Evolution du travail :

    If the tasks involved can be summarized as a set of speci c activities
    accomplished by following well-defi ned instructions and procedures, the occupation is considered routine. If instead the job requires flexibility, creativity, problem-solving, or human interaction
    skills, the occupation is non-routine.

    https://ae833aaf-a-62cb3a1a-s-sites.googlegroups.com/site/nirjaimovich/papers/JPJR.pdf?attachauth=ANoY7cp8fuFiL63TwVgf_0G43ARSElzGPQMrCrnUovYDkTuhOvhVgTm9oYAEcN-UuvXwVQ_Q_EshhGTexQQHhVBk_8nnb7IYJWK58JSRi8kkhfwIcd7aS6RLWAnszUmFGJA80iprEC2KmauJu9T_PeG9UAzlpy8VH_j9PCnUzFd0jx4pd2E_rEDD1vjaYM8gMZbu-TKzqKoI3ldEEVt0kZ5nS0PNOiUF2g%3D%3D&attredirects=1

  9. Le FN propose des "solutions" de loin imaginaires, à côté desquelles le discours de la gauche de gauche semble pragmatique. Cela permet tout de même à ce parti, d'engranger des victoires électorales. Avec la bénédiction des médias de l'oligarchie.

    • Je n'ai pas dit que la démagogie n'était pas payante, au contraire, c'est ce qui rend la démocratie si décevante, mais je ne crois pas que le Front de gauche y échappe, même si c'est à leur insu (il y croient), ce qui ne leur profite pas pour autant. Tenir compte de la réalité ne semble pas la caractéristique des militants qui veulent toujours voir une possibilité de victoire même dans la défaite (si l'extrême-droite gagne, il faudrait faire une politique encore plus de gauche ou bien si le nationalisme gagne, il faudrait être encore plus nationaliste qu'eux!).

      Si la gauche est si faible, c'est largement de sa propre faute d'être trop archaïque et ne pas répondre aux mutations que nous subissons, c'est d'être une mosaïque de petits marquis et de tendances éclatées, des militants professionnels sans aucune cohérence ni projet crédible. A moins d'un improbable mouvement social de grande ampleur, aucun espoir de ce côté.

        • Certes, il faut intégrer l'abstention mais s'il y a de nombreuses et très diverses raisons de s'abstenir à ces élections (un peu moins que la dernière fois quand même), il n'y a pas trop de raisons de s'imaginer que les abstentionnistes auraient voté autrement, un vote vaut au moins comme sondage grandeur nature sur un échantillon statistique bien plus important, les résultats ne devant être corrigés qu'à la marge par la masse des abstentionnistes (plutôt de gauche sans doute).

          On se rassure à trop bon compte à vouloir minimiser le score du Front National qui le met pour la première fois en position de prendre le pouvoir même si cela reste très improbable encore mais des circonstances exceptionnelles pourraient l'y mener. En tout cas, ils devraient avoir gagné leur place dans les médias. On peut écrire un scénario rose où sa victoire pèse assez pour que l'Europe sorte de l'austérité et la prospérité retrouvée fasse baisser son score mais cela peut aussi le renforcer et si le chômage peut baisser, la précarité devrait continuer assez pour fournir des troupes aux discours de haine.

          Le plus grave, c'est la contamination des esprits, la nouvelle hégémonie idéologique qui gagne même la gauche de la gauche au nationalisme et aux valeurs réactionnaires, tout comme cela a pu se produire au début de la période fasciste, pour des raisons à la fois cycliques et tenant à l'incurie européenne, pratiquant les mêmes politiques de monnaie forte que pendant la crise des années 1930, tout en devant faire face à la mondialisation, l'automation, la montée des prix de l'énergie... sans parler de tous les risques écologiques ! On ne voit pas un discours de gauche tenir le coup par rapport à la promesse d'une patrie qui nous protège de tout cela à la fois et nous promet des effusions nationales. Tout ce qu'on voit, dans cette nouvelle hégémonie idéologique, c'est un discours de gauche qui lui aussi ne voit d'autre solution que dans la nation - et qui ont tous rejoint les fascistes dans les années 1930 (comme le rappelait Boltanski à midi).

          • Il ne faut pas minimiser le score du FN .

            Mais selon moi dépasser le FN qui n'est que le bouton sur la figure et s'attacher à la maladie qui fait sortir et prospérer ce bouton. Les manifs des jeunes (aujourd'hui dans l'actu ) me laissent rêveur et me font un peu peur sur la capacité à se mobiliser pour en découdre, tant il est plus facile de désigner des coupables et de s'engager dans des processus exponentiels ( et incontrôlables) de haine , que de se poser et réfléchir un peu.
            Il est évident qu'il y a un problème avec la mondialisation , la démocratie et la nation . Il est tout aussi évident que l'Europe et les gouvernants nationaux sont à ce sujet dans la confusion la plus totale et en plus ne proposent aucun questionnement de fond sur ce sujet qui n'est pas du tout évident.
            Dans ce contexte où on avance sans poser de questions il est évident qu'un parti qui apporte des solutions simples à ces sujets est assuré de ramasser les pions d'un jeu pourri qui révèle les vraies motivations des dirigeants( c'est à dire tous les partis et tous leur satellites amont et aval) .

            La tenaille consistant à voter et participer à la mascarade pour mettre de la crème sur le bouton ne fait qu'apporter de l'eau au moulin d'une aventure qui, plus le temps passe, construit un avenir difficile.

          • On peut reprocher le simplisme du FN et des souverainistes, mais du côté de l'UE, de l'Allemagne et de la commission de Bruxelles le simplisme est tout autant de mise.

          • Je suis assez d'accord avec cette idée que les abstentionnistes auraient voté de manière à peu près identique. D'ailleurs un récent sondage du journal "Le Monde" tendait à la prouver. Mettre en avant l'abstention est une manière de se rassurer à bon compte, pour minimiser le score inquiétant du FN. Je trouve plutôt inquiétant ce déni de réalité, très présent sur les forums. D'un autre côté, être anti-Fn ne fait évidemment pas une politique, pas plus que de revenir à des notions nationalistes. Cela dit, il s'agit de trouver le bon "compromis", parce que le discours à gauche consistant à rejeter tout ce qui relève du fait national, est également un problème quelque part. L'internationalisme n'est pas icompatible avec une vision nationale émancipée. S'agit de trouver la bonne recette, le bon équilibre. Mais la vraie question n'est pas là. Elle est de combattre le néolibéralisme. Et il semble que cela ne puisse se faire à l'heure actuelle, qu'au niveau européen. En même temps, l'on voit mal un mouvement social toucher 25 pays en même temps. Je pencherais plutôt pour un mouvement impliquant les pays du Sud les plus touchés par l'austérité. Mais cela ne se décrète pas. Cela dit, ce qui est un antidote au FN, est bien le mouvement social. Ce parti disparaît des écrans radar, lorsque les gens battent le pavé. A chaque fois lorsqu'il y avait de grands mouvements, il disparaissait. C'est donc bien un parti qui prospère sur le désarroi social et la sérialisation des individus.

          • On peut dire tout le mal qu'on veut de l'Europe, de l'Allemagne et du gouvernement ou de la gauche, dire que le FN est un symptôme, rien de tout cela ne peut éviter de combattre avec la plus grande fermeté ces dangereux fachos (nationalistes, xénophobes, racistes, autoritaires, sécuritaires, répressifs, régressifs, réactionnaires, etc.). Même s'il y a peu de chances que cela serve à quelque chose et que l'avenir est bien sombre, les arguments pour minimiser cette nécessaire résistance sont débiles.

            On ne peut espérer un grand mouvement social qui balaierait la montée de l'extrême-droite dans cette situation sans issue et sans projet de gauche crédible (surtout après l'échec d'une mobilisation sans précédent contre la réforme des retraites), encore moins au niveau européen mais si la nation n'est plus le niveau pertinent dans le contexte actuel, n'étant plus qu'une survivance archaïque incapable de sauvegarder nos acquis, c'est parce que le bon niveau désormais, c'est le local voire la région, ce que personne ne veut admettre mais qui reste le niveau où des initiatives se multiplient et peuvent se fédérer (en dehors des partis).

            Il faudrait aussi développer une nouvelle contre-culture libertaire contre le retour de l'autoritarisme y compris à gauche mais le moins qu'on puisse dire, c'est que l'ambiance n'y est pas favorable pour l'instant...

          • Quand bien même des souverainistes modérés ou le FN arriveraient au pouvoir, ils vont vite s’apercevoir que certaines de leurs lubies seront à modérer sérieusement au risque de perdre assez rapidement tout.

            Ceci dit ils sont actuellement très cons sur pas mal de sujets économiques, toujours ne trouvant les causes des problèmes français que dans les pays étrangers, Chine, Allemagne, alors qu'il y a un paquet de problèmes strictement français comme l'immobilier, la liste est longue. C'est bien parce que ils sont largement stupides, que le jour où ils auront le pouvoir, ils seront vite désarçonnés.

            Je ne crois pas du tout à l'instauration possible d'un régime fasciste en Europe.

            Même Orban en Hongrie tire des bords entre libéralisme et autoritarisme car il sait parfaitement jusqu'où ne pas aller trop loin.

          • Oui, je suis un peu con, ce n'est pas si grave et même Orban est relativement acceptable. De toutes façons, ce ne sera jamais aussi pire que dans les années 1930 (difficile de tenir la comparaison) et d'ailleurs les fascistes n'étaient pas si mal, c'était juste une gauche nationaliste (rien à voir avec les nazis). Tant qu'il n'y a pas de chambres à gaz, pas besoin de s'inquiéter...

          • Le souverainisme en France c'est plus proche du gaullisme qui n'était quand même pas un régime fasciste.

            Quand à l'extrême droite française, elle me parait suffisamment incompétente pour ne pas rester longtemps en place. JM Le Pen devait en être assez conscient pour n'avoir jamais cherché sérieusement le pouvoir en accumulant gaffes sur gaffes. La gestion des mairies par le FN a toujours montré à quel point ce parti est constitué de bras cassés plus proches des pieds nickelés que du nazisme.

            En revanche, l'UE, soit disant fer de lance de la démocratie internationaliste, a de bizarres fréquentations en Ukraine...

            1. Je ne crois pas encore que le FN puisse prendre le pouvoir. Ce n'est pour l'instant qu'un risque devenu simplement moins impossible et qu'il faut prendre au sérieux, pas le minimiser, même si ce ne serait certainement pas pour mille ans !

            2. La grande bourgeoise Marine Le Pen s'est entourée de gens très compétents de l'élite qu'elle dénonce, rien à voir avec son père, même si un éclatement est toujours possible.

            3. Les bras cassés de la base, effectivement très craignos, peuvent faire des dégâts à la base justement.

            4. Le plus grand danger, pour l'instant, c'est la contamination des esprits par le nationalisme notamment à gauche (c'est leur dernière cartouche).

          • Le lit de la montée du nationalisme me parait être la nullité en économie des partis alternatifs FDG, UDI, PC, EELV, DLR, MRC et de gouvernement, UMP, PS. Ils sont tous plus ou moins à 2 ou 3 trains de retard, des têtes d'enclume. Régis Debray est dans ce courant également. Il n'y a qu'à voir l'hystérie déclenchée dès qu'un rachat comme celui d'Alstom se profile, ou la condamnation de la BNP par les USA, il n'y a plus de rationalité critique. Il y a des tas de problèmes en France, mais c'est d'ailleurs qu'on veut nous fait croire qu'ils viennent. C'est ce fourvoiement qui ouvre la marche à un nationalisme crétin.

            Pour ce qui du fascisme, il est en bonne voie, sous forme verte, des côtes atlantiques à l'est asiatique avec des moyens militaires et tactiques autrement conséquents :

            https://www.youtube.com/watch?v=_Y0XePcK0Tg#t=80

            https://www.youtube.com/watch?v=_Y0XePcK0Tg#t=80

          • Oui, la montée du fascisme n'est pas un problème franco-français et participe d'un cycle idéologique mondial qui touche tout le monde et où l'islamisme est en pointe.

            Le plus ridicule ici, c'est la prétention de Montebourg de faire un OS français (rien compris le mec!).

          • Il y a dans l'ensemble de nombreuses reconfigurations en cours :

            Pour s'opposer aux doctrines sociopolitique ( "risque zéro") et militaire ("zéro mort") dominantes, le concept de TAZ (Temporary Autonomous Zone ou zone autonome temporaire) apparaît, comme 'enclave libre', potentiellement nomade et se nourrissant du Web. "L'Art de la Guerre au Nouveau Moyen-Âge" verrait le retour de la violence anarchique, succédant au conflit interétatique, la gamme de raisonnement stratégique s'articulant alors autour de ce nouveau paradigme d'affrontement des volontés, l'équilibre de la terreur évoluant du "nucléaire" vers le "moléculaire".

            lechardon.net/index.php?post/2014/05/15/«-Europe-Mad-Max-Demain-»%2C-Bernard-Wicht

          • C'est hallucinant et ne peut être dit que par un Allemand alors que les pays du sud souffrent tellement mais en économie le dogmatisme règne en maître (Trichet était pas mal dans le genre).

  10. Le fascisme et autres réjouissances totalitaristes se fondent sur l'absence de démocratie ,c'est à dire d'égalité en amont (pas de "décideurs" plus malins que les autres, mais une participation de tous aux réflexions-décisions) , respect de l'autre . Il est évident que nos régimes soit disant démocratiques font le lit du fascisme ; ils imposent en douceur une seule idéologie , une oligarchie , des inégalités amont (décisions non collectives) et avales (répartition des richesses ),une grande confusion.
    C'est pourquoi je pense qu'il est vain et contre productif de taper sur le FN ou tel ou tel autre mais qu'il faut s'appliquer à établir un régime démocratique. Le boycott du vote pour signifier qu'on est pas dupe . Le problème n'est pas la nation mais la place et l'usage de cet échelon territorial et politique dans une vision globale démocratique , humaine et écologique du monde.
    Une réforme en profondeur de notre système politique , notamment la mise en place d'un outil public de réflexion adossé à des référendums , en impliquant et en tenant compte de l'ensemble de la population n'est ni une voie facile ni une panacée mais une nécessité sans laquelle ce qu'on peut penser dire ou faire , c'est comme p dans un violon.
    Il est par trop évident que les décideurs , les nantis , les sachant n'en veulent surtout pas ; évident que les peuples ne se l'imaginent même pas et raccrochent leur mécontentements sur du plus concret . Les décideurs , je me fais de plus en plus un plaisir de "leur rentrer dedans" et pour le reste l'organisation de réflexions dans les communes me semble être le plus approprié.

    • Effectivement, la question n'est pas celle de l'échelon national qui reste important mais du nationalisme qui le surinvestit et veut homogénéiser la population. Seulement, même si je suis d'accord sur le déficit démocratique, il est absurde d'en faire le seul déterminant, comme si cela suffisait pour se débarrasser des décideurs, nantis et sachants - outre le fait qu'il y a peu de chance qu'on arrive à une "sixième république" plus démocratique à court terme (même le parti pirate est déjà dans les choux confirmation que le champ politique impose sa loi même aux plus marginaux et qu'il ne suffit pas de dénier les hiérarchies pour qu'elles disparaissent).

      L'opposition à l'oligarchie et aux élites (identifiées souvent aux banquiers juifs) était déjà une des causes des fascismes qui n'ont pas amélioré les choses sur ce plan, c'est le moins qu'on puisse dire. La seule façon de régénérer vraiment la démocratie, c'est une guerre ou une révolution permettant d'avoir des élus moins corrompus (issus de la résistance). En attendant on ne peut laisser s'installer un pouvoir autoritaire sans rien faire même si l'efficacité peut en être douteuse au début. Il faut absolument dénoncer les idéologies totalitaires, sortes de millénarismes qui mènent à des dictatures au moins aussi corrompues mais qui correspondent hélas tout-à-fait à la psychologie des foules et à l'amour du maître. L'égalité de tous malgré les différences de classe ou de statut est obtenue plus facilement dans la même obéissance au chef (qui veut notre bien) que dans les controverses démocratiques. Un livre vient de sortir qui montre comme les italiens aimaient vraiment Mussolini avec toujours l'idée que s'il y avait de la corruption, c'est parce qu'il ne savait pas!

      On a vécu trop longtemps dans l'idée que le fascisme n'était qu'une erreur historique ne pouvant revenir alors qu'il correspond à un besoin profond des sociétés qu'il faut bien identifier même s'il est difficile d'y résister quand on est dans le moment du cycle idéologique où il devient hégémonique (de même qu'il était difficile de ne pas être communiste au moment de son triomphe mondial). Le cycle idéologique correspond au cycle économique (Kondratieff, 1929) mais tient aussi à la déception qui touche forcément une idéologie puis son idéologie contraire, constat à chaque fois du ratage, de notre impuissance, un peu comme on passerait, d'après Albert O. Hirschman, de l'engagement dans la vie publique au repli sur la vie privée et vice versa en fonction des déceptions de l'une, puis de l'autre...

  11. "Effectivement, la question n'est pas celle de l'échelon national qui reste important mais du nationalisme qui le surinvestit et veut homogénéiser la population. Seulement, même si je suis d'accord sur le déficit démocratique, il est absurde d'en faire le seul déterminant, comme si cela suffisait pour se débarrasser des décideurs, nantis et sachant....."

    La plupart des gens n'ont jamais eu accès à une réflexion sur ce sujet de la nation et son sens au sein de la mondialisation . Si "la démocratie" (au sens de réflexion et prise de décision collective) n'est pas le seul déterminant du changement , c'est sa condition de possibilité . La démocratie(au sens précédemment indiqué - y en a t il un autre ?) est l'anti thèse du libéralisme. Face au réchauffement climatique et autres réjouissances écologiques, face au problème du travail et de ressources pour tous , face à la montée des extrêmes , il ne peut y avoir que ce chemin qui je le reconnais, s'il est une nécessité, n'est ni compris ni même perçu et en ce sens reste encore une utopie.
    Il est pourtant beaucoup plus utopique de croire qu'on puisse s'en sortir avec les outils politiques actuels qui ne sont ni des outils , ni de la politique.
    Il manque trois choses pour avancer un peu : la claire perception du désastre qui vient , qui est un déterminant clé ,et certainement pas réellement acté , la claire perception du caractère désuet , inadapté , mensonger de l'organisation politique actuelle , la compréhension que la réflexion et prise de décision collective (démocratie) est l'outil du changement ; il met de fait du lien commun entre les libertés individuelles, alors que le libéralisme les met en concurrence entre elles et contre la planète . Réfléchir et décider ensemble est le fondement nécessaire des sociétés de demain . Il n'y a rien d'autre qui puisse fonder les sociétés modernes si elles veulent seulement pouvoir vivre .
    Il est évident que si on examine la situation avec un regard scientifique , historique, sociologique ... ces propos sont stupides : "ça ne marche pas comme ça " me suis je déjà entendu dire ; mais du point de vue de l'action , de l'acteur politique , de ce qu'il est nécessaire de faire , il faudra bien que ça marche comme ça .

    Le fascisme n'est pas, en effet , une erreur historique , il est inscrit en nous mêmes dans ce que nous sommes ; le plus jamais ça est une douce illusion , vœu pieux dérisoire et hypocrite qui ne change rien ; seule une action sur nous même( en temps de paix relative) en rehaussant d'un cran notre exigence et structure démocratique peut laisser espérer du mieux. C'est dire que je suis vraiment pessimiste !

      • Il est pourtant temps d'inverser la logique des conneries : qu'est ce que ça veut dire qu'un type entouré de ses conseillers (d'autres types ) puisse s'arroger le droit de prendre un crayon et de redessiner la carte du pays ????!!!!!!

        Parce que c'est le progrès , parce que c'est le sens de l'histoire , parce qu'il faut aller vite , parce qu'on va éduquer ?... Foutaises et re foutaises ! Qui connait sa région ? le nombre de conseillers ? Ce qu'ils font exactement ? le budget régional ? Les compétences ? Le bilan de l'efficacité ? Où sont les analyses sérieuses , les audits ? Quel sens donner aujourd'hui à l'aménagement du territoire ?

        On a là typiquement sur ce sujet l'illustration de nos pratiques politiques obsolètes !

        Ce qui pouvait marcher en temps de vaches grasses ne peut plus marcher lorsqu'on rentre dans une crise de civilisation.

        Faut il attendre que tout s'écroule pour y voir plus clair ? Dans ce cas la clarté ne serait elle pas de lancer une étude , audit , réflexion nationale sur ce sujet de l'aménagement du territoire ?(et bien évidemment tout le reste) Non en faisant faire le job par les cabinets d'experts habituels mais directement par les lambda que nous sommes .Et nous trancherons . Comme nous trancherons sur l''Europe et ce que nous voulons .
        Le rôle de l'état n'est il pas de faire émerger la conscience , le savoir et la volonté populaire ? Le mythe de ceux qui savent ne doit il pas être abrogé ?
        Le peuple ne possède aucunement le savoir mais les sachant non plus . On ne coupera pas à un travail collectif impliquant la société dans son ensemble . Ce qui signifie : changement de méthode de gouvernance, mise en place d'un outil national -local de réflexion / organisation de référendums.
        Il est temps de pousser dehors les dirigeants qui ne souhaitent pas s'engager dans cette direction consistant à nous donner les moyens de réfléchir et décider des grandes orientations de la société.

        • Il ne suffit pas de vouloir une rénovation pourtant bien nécessaire mais il y a des surprises dans l'histoire et je n'avais pas trop vu venir ce bouleversement introduit par le redécoupage territorial et même si je n'y crois pas trop cela pourrait se révéler (un peu comme les cahiers de doléance) l'occasion idéale pour un débat de grande ampleur sur notre démocratie (plus qu'une sixième république) concernant les populations dans leur vie quotidienne et en organisant des référendums pour savoir avec qui on se regroupe et quels niveaux on garde. En tout cas il faut certainement pousser dans ce sens, en dehors des idéologies et des partis obsolètes, sur des enjeux concrets éminemment politiques, notamment ceux de la relocalisation. Une façon peut-être de sortir de la nasse même si c'est loin d'être gagné...

          • Je ne suis pas certain que de faire des régions plus grandes aille dans le sens d'une décentralisation, mais aille au contraire dans le sens d'une recentralisation au niveau de grosses métropoles régionales. Le problème n'est probablement pas tant le nombre de niveaux mais l'articulation et liens entre ces niveaux, pour éviter des redondances et balkanisations.

            Les communautés de communes par exemple sont utiles car elles pourraient permettre une négociation groupée en position de force face à de gros prestataires privés comme ceux réalisant le traitement des eaux. Un petite commune se fait souvent avoir sur ces contrats, tandis que les grandes villes sont en meilleure position de négociation.

          • Soit dit en passant, dans de nombreuses entreprises privées, il y a souvent encore plus de niveaux et elle fonctionnent tout de même.

          • Xavier de la Porte est toujours intéressant même si je n'avais pas été à son émission quand il m'avait invité. Cest certainement ce que certaines municipalités pourraient faire.

            Effectivement plus les régions sont grandes plus on s'éloigne de la démocratie de face à face et on entre dans les magouilles politiques. C'est du moins le signe que la nation n'est plus le niveau principal (sauf pour la redistribution). Le problème du nombre se retrouve dans les communautés de communes qui devront dépasser les 20 000 habitants.

          • Les bonnes idées passent souvent à la trappe, parce que les mecs hype impliqués dans les négociations taillent à la hache et ne comprennent pas grand chose des solutions techniques en dentelle. Pour exemple, dans la grosse multinationale où je suis, j'avais déposé un brevet encore inexploité. La chaine de décision avait bille en tête sous traité l'affaire à une boite externe avec un bidule bien plus cher à produire, sans me consulter vraiment. Je leur expliquais quand même, mais ils étaient excités sur autre chose comme des contrats de partenariat bidons. Les contrats bidons ça excite, pas la rationalité technique et économique...

            Maintenant, le truc me revient et je ramène ma soluce 10 fois à 40 fois moins chère selon les marchés à fournir, des dizaines de millions de produits. Ca fait quand même 5 ans de perdus depuis le dépôt de brevet, et donc des pertes de gains sérieusement réduits pour les hôpitaux, plus des pertes de gains conséquentes pour là où je bosse.

            La morale de l'histoire est que le niveau d’entropie de l'information reste important.

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