La guerre aux pauvres : amende et taxe

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Je suis un des rares écologistes qui était opposé aux écotaxes, préférant les quotas - que refusaient mes petits camarades, montant sur leurs grands chevaux pour dénoncer cet horrible "marché des droits à polluer" comme si les écotaxes étaient si différentes ! Cette rigidité idéologique a provoqué l'échec d'une gravité extrême de la conférence sur le climat de l'époque (la COP6 à La Haye en 2000). De précieuses années ont été perdues pour rien (et cela m'a fait quitter les Verts).

En tout cas, j'insistais déjà à cette époque sur la distinction entre "pollueurs choisis" et "pollueurs subis", l'essentiel étant d'offrir des alternatives. Juste payer plus cher sans pouvoir rouler moins n'a aucun intérêt écologique et pèse démesurément sur les plus pauvres. Les taxes sur les énergies fossiles devront certes augmenter en même temps que les énergies renouvelables vont se généraliser, devenant de plus en plus concurrentielles. Elles sont beaucoup moins utiles avant si on n'organise pas la transition. Le rattrapage du diesel sur l'essence est tout aussi contestable, le diesel émettant moins de CO2 et la tendance étant plutôt de l'interdire dans les agglomérations à cause de sa pollution aux microparticules - mais là aussi, on cible surtout les pauvres qui ont de vieilles voitures.

Cela commence à faire beaucoup. Il semble que tout ce qu'on pouvait craindre du détournement de l'écologie au profit des plus aisés se réalise. Le problème des élites, n'est pas qu'elles ne seraient pas bien intentionnées et soucieuses seulement de leurs intérêts, mais qu'elles sont déconnectées des réalités et ne se rendent pas compte du tout de la situation en faisant, par exemple, comme si les aides de l'Etat suffisaient pour se payer une voiture électrique quand on a un tout petit revenu ! Le résultat est toujours le même : les pauvres sont de plus en plus pauvres alors que ce sont les élites qui en profitent...

On retrouve exactement la même chose pour le cannabis qu'on n'ose pas légaliser comme le mouvement mondial actuel nous y obligera (après le Canada, l'Inde, l'Afrique du sud) mais qui sera de fait légalisé pour les riches pouvant payer leur amende sans problème (c'est presque cadeau) alors qu'elle sera bien trop lourde pour les autres, renforçant l'injustice et l'arbitraire d'une prohibition inapplicable et inappliquée. Il semble impossible qu'une révolte des députés (ou des juristes?) permette de se passer de cette étape, supposée dédramatisante mais qui pourrait être catastrophique pour la même raison que pour des écotaxes sans alternatives : si on n'organise pas la distribution du chanvre en le légalisant, cela ne peut que renforcer la pègre au lieu de pacifier les banlieues. L'enjeu est d'importance.


Je mets ici les textes que j'écrivais à l'époque pour les Verts sur les écotaxes :

- Écotaxes ou production écologiste (05/1998)

- Motion écologie ou écotaxes (03/2000)

- Quotas, écotaxes, croissance et climat (02/2000)

- Inflation, pétrole, écologie : soutenir le mouvement social (09/2000)

- La marchandisation du monde (09/2000)

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