Le massacre des utopies

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http://raforum.apinc.org/IMG/jpg/Mscroi.jpgC'est peu de dire que notre rationalité est limitée et qu'il n'y a aucune alternative crédible. Lorsque le Monde diplomatique prétend le contraire et nous donne les dernières nouvelles de l'Utopie, c'est vraiment à pleurer ! A lire le niveau des propositions et des débats, la situation semble décidément bien plus grave qu'on ne pouvait le penser. Qu'on dérange des gens de si loin pour des bêtises pareilles, c'est incroyable ! Il y a de quoi être en colère contre ces mondes imaginaires qui se présentent comme libertaires alors qu'ils sont encore plus contraignants et moralistes, jusqu'à un certain totalitarisme ne tolérant aucune survivance du passé, et tout cela au nom de principes illusoires et de fausses analyses ! Il faut en finir avec ces utopies stupides et dangereuses alors que c'est la globalisation marchande qui est complètement utopique et qu'il faudrait y opposer rapidement des alternatives locales.

Il y a des problèmes pratiques à résoudre et nous avons besoin d'une alternative concrète au productivisme et au libéralisme qui nous menacent, pas d'un monde prétendu parfait, ni d'un homme nouveau complètement fantasmé, bien loin de ce que nous sommes réellement. C'est pour défendre notre liberté concrète qu'il nous faut nous organiser collectivement et combattre les utopies "libertaires" tout aussi bien que l'utopie libérale. C'est pour avoir une chance de s'en sortir qu'il faut remplacer les idéologies abstraites et les déclarations de principe par une véritable intelligence collective qui prenne en compte les contraintes écologiques, sociales et matérielles. C'est contre nos propre rangs qu'il faut nous retourner car c'est de là que vient le danger, de là ce qui nous condamne à l'impuissance. Après le constat théorique, les travaux pratiques, donc.

L'utopie bien sûr peut se comprendre en plusieurs sens. Ainsi Ricoeur oppose l'utopie à l'idéologie comme la transformation du monde à la justification de l'ordre existant. Dans ce sens, nous avons besoin d'utopies, comme projets de ce qui n'existe pas encore, mais nous n'avons certainement pas besoin de ce qui ne peut exister nulle part, encore moins de mauvaises utopies qui nous mènent au pire ! En se livrant au massacre des utopies, ce sont les chances d'une utopie réaliste qu'on préserve, c'est l'utopie d'une véritable alternative qu'on défend.

La liste est longue des belles idéologies qui tournent au cauchemar, des religions d'amour qui tournent à la haine de l'autre jusqu'au libéralisme qui nous prive de toute liberté ou le pouvoir du peuple qui devient très vite un pouvoir sur le peuple. Plus elles promettent la perfection de liberté, d'égalité, de bonheur et plus elles se révèlent mortifères dans l'acharnement pour en imposer l'existence par la négation de l'existant. La naïveté ici est un crime, tout comme le moralisme trop sûr de son bon droit et qui rejette le mal sur un quelconque bouc émissaire diabolisé pendant qu'on se forge de soi-même une image sans tache. Il faut avoir le courage d'affronter les faits dans leur complexité et avec prudence (ce qui n'exclut pas l'audace ni la rapidité de réaction), plutôt que s'enivrer avec des mots.

On peut mettre sur le même plan l'utopie libérale et l'utopie communiste (ou fasciste) qui dessinent un monde parfait en voilant une réalité désastreuse et le prix humain à payer pour conformer la réalité à son modèle. Bien d'autres utopies pourraient se révéler aussi sanglantes par leur degré d'irréalisme, qu'elles se prétendent libertaires ou écologistes. La nécessité du contrôle de l'économie ne doit pas nous empêcher d'examiner de très près la façon dont on prétend le faire, et le pouvoir qu'on croit s'arroger ainsi. Il y a des utopies moins dangereuses sans doute, car un peu trop réformistes, comme celle d'une décroissance de l'économie par réduction du temps de travail et des consommations sans changer de système de production. Voilà qui ne fera au mieux que retarder une véritable alternative, c'est déjà assez grave tout de même. Sinon, les rêves de suppression totale de l'argent ou du marché n'ont guère de chance d'aboutir mais, il faut bien préciser qu'en ces matières, c'est seulement l'extrémisme qui pourrait être catastrophique, alors que monnaies locales et gratuité peuvent effectivement réduire le pouvoir de l'argent. Il faut juste se garder de tout simplisme et de généralisations hâtives. On peut dire la même chose des utopies anti-techniciennes, anti-industrielles ou de retour à la nature qui non seulement peuvent être dangereuses à se vouloir trop absolues, mais surtout ne constituent en rien de véritables alternatives.

Avant d'aborder l'article proprement dit, il faut dire un mot de l'utopie auto-gestionnaire, car je partage complètement cet objectif démocratique, tout comme celui de liberté et d'égalité. Là-dessus, il ne peut y avoir aucun doute. La seule question est de savoir comment y parvenir et si c'est si facile, s'il suffit de décréter que chacun prend ses affaires en main, ou si c'est un peu plus compliqué à organiser pas à pas avec tout le monde, en corrigeant bien des erreurs et des effets pervers. Il faut donc certes essayer de "s'occuper de ses affaires", c'est bien l'objectif, mais il ne faut pas en nier les limites et pas rêver supprimer ainsi toute exploitation, encore moins l'Etat ou le marché ! La réalité restera multiple et perfectible, intrication de logiques plus ou moins contradictoires. Etre révolutionnaire n'est pas être extrémiste mais exige au contraire d'être clairvoyant, c'est-à-dire prudent et réaliste. Il n'y a pas de justice sans justesse (summum jus, summa injuria).

Albert Venons-en au fait. Un certain Michael Albert, fondateur de Znet et qui croit avoir trouvé la solution à tous nos maux, ce qu'il appelle l'économie participative (ou ParEcon), a organisé une réunion en juin 2006, pendant cinq jours, aux Etats-Unis pour discuter des alternatives au capitalisme. Il a pu y attirer quelques activistes dont certains représentants du Monde Diplomatique ou d'ATTAC, en particulier en faisant miroiter la présence de quelques vedettes comme Chomsky, qui ne sont pas venus, mais les autres n'étaient pas les premiers venus pour autant, et c'est bien ce qui est le plus désespérant, reflétant toute la désorientation actuelle. Heureusement qu'il y avait Susan George à cette réunion pour revenir un peu sur Terre au milieu des utopies les plus farfelues, les "supposez que", "imagine..." sur lesquels s'édifient des châteaux de carte quelque peu inquiétants ! On peut dire que ça commence fort :

Bien qu'« égalitaire », « solidaire » et « autogérée », l'économie participative ne réclame pas l'égalité absolue des salaires, moins encore l'idée, jugée irréaliste, du « à chacun selon ses besoins ». Elle a pour critères de rémunération « l'effort et le sacrifice » dans la « production de biens socialement utiles ». Qui travaille plus et plus dur dans des conditions plus difficiles reçoit donc davantage.

On se frotte les yeux devant ce beau moralisme, c'est un retour pur et simple à Thomas d'Aquin ! La valeur mesure la peine, tout comme dans les modèles néoclassiques où le travail est une "désutilité" ! Le problème c'est que le travail a bien changé depuis ce temps là et si des moines changeaient de travail quand ils commençaient à y trouver plaisir, Marx remarquait déjà que la valeur d'une marchandise ne dépendait pas du plaisir ou de la peine du travailleur mais seulement du temps passé. Depuis notre entrée dans l'ère de l'information, c'est encore plus ridicule car la motivation, l'implication, le plaisir même sont devenus partie intégrante du travail lui-même, en particulier dans les services. Par contre le travail ne se mesure plus au temps passé désormais, donc l'idée d'une rémunération proportionnelle à l'effort et au sacrifice est complètement impossible, impossible de mesurer l'effort (avec une jauge à effort?) et qui donc en décidera ? De même, qui décidera de ce qui est "socialement utile" ? Ne pourrait-on craindre à juste raison un pouvoir trop arbitraire ?

Il est essentiel de ne pas confondre capitalisme et marché comme on voudrait nous le faire croire avec le terme "économie de marché", et il y a peut-être un juste milieu entre le tout marchand et l'absence de tout marché ! Vouloir supprimer complètement le marché est très dangereux et complique inutilement les choses, on ne peut tout dé-libérer, vouloir décider de tout dans des assemblées sans fin... Surtout pour y substituer des absurdités comme le fait de ne pas vouloir faire de différence entre travail qualifié et non qualifié, sans tenir compte du travail préparatoire, de la formation, etc., sans allouer les moyens aux compétences et au développement humain. Au bout du compte on reste dans le cadre d'un travail forcé au lieu de favoriser un travail autonome, il ne faut pas juger de belles théories à leurs intentions affichées mais bien à leurs conséquences pratiques.

L'économie participative abhorre l'organisation sociale qui assigne les tâches d'exécution, de nettoyage aux uns, et réserve les missions d'encadrement, de création aux autres. Elle combat le modèle industriel né de la spécialisation fordiste. Si, dans les pays capitalistes comme dans les pays « socialistes » (stakhanovisme), ce modèle a favorisé un essor de la productivité, c'est au prix d'une organisation du travail aliénante et « ennuyeuse » (du type de la chaîne de montage automobile). Mais c'est également, selon Albert, en consolidant le pouvoir d'une troisième « classe », les « coordonnateurs », dont le surgissement aurait contredit le schéma marxiste d'une société ayant pour dialectique principale l'opposition entre les détenteurs du capital et ceux qui vendent leur force de travail.

Voilà encore sous les apparences d'une analyse historique, avec la prétention de dépasser Marx, ce qui n'est qu'une analyse historique au plus mauvais sens du terme, c'est-à-dire datée et complètement archaïque ! L'époque du fordisme, du taylorisme et du stakhanovisme est bien derrière nous même s'il y a encore des chaînes de montage, le travail a changé, de plus en plus qualifié et donc spécialisé mais en un tout autre sens que celui d'OS (Ouvrier Spécialisé) d'autrefois car la spécialisation est désormais valorisée dans un travail "virtuose", les tâches répétitives étant de plus en plus automatisées. C'est le développement de l'immatériel qui change tout dans une économie de la relation basée sur la communication, la connaissance, la connexion et la créativité (il faudrait bien sûr nuancer, il s'agit juste de montrer en quoi les anciennes perspectives ne sont pas adaptées aux nouvelles forces productives).

Il est d'ailleurs très intéressant de suivre cette thématique de la parcellisation des tâches et de la spécialisation auxquelles on oppose un homme complet qui saurait tout faire et maîtriserait complètement sa vie comme son oeuvre ! J'ai moi-même longtemps défendu ces positions que le taylorisme justifiait amplement et c'est seulement la pratique de l'informatique qui m'a convaincu que le raisonnement ne s'y appliquait pas, mettant du coup en évidence ce que pouvait avoir de complètement mythique l'idée d'un homme total, alors que la division du travail nous tient ensemble et nous rend complémentaires et interdépendants comme l'avait montré Durkheim, riches de nos diversités. Certes, il ne faut pas être monomaniaque et garder l'esprit ouvert mais l'idéal d'une vie parfaitement équilibrée est non seulement un mythe, c'est une dangereuse utopie où chacun serait interchangeable... Que fera-t-on de ceux qui sont "différents", passionnés, exclusifs ? Il y a en tout cas un monde entre ces préoccupations qu'on peut dire religieuses et les contradictions concrètes que nous devons résoudre. Il est tout de même curieux qu'on tombe dans ces rêveries inconsistantes et si ennuyeuses quand on y pense !

Il n'y aurait plus, ni à General Electric ni ailleurs, de « patron » ou de « femme de ménage », mais des acteurs égaux d'« ensembles équilibrés de tâches » (balanced job complexes) conçus et calculés par voie de négociations ou de discussions.

Vous imaginez le binz ? C'est vraiment du blabla pour ne rien dire, sinon que ça fait très totalitaire tout de même, avec aucune place pour autre chose. C'est le genre d'idéologie qui n'est que pure apparence quand elle prétend se réaliser, renforçant le mensonge du pouvoir qui doit se dénier comme pouvoir. C'est l'exemple d'un enfer de bonnes intentions et des ravages du simplisme. Mais bien sûr on nous expliquera que non, ce ne sera pas bureaucratique, tout se passera très bien et dans la bonne humeur ! Il faut lutter contre les inégalités, pas faire comme si l'égalité était réelle.

Le refus de la séparation entre fonctions d'exécution et fonctions de direction y est tel que South End Press (quatre employés) décida, au moins une fois, d'exclure de la coopérative un de ses membres qui, par crainte de prendre un jour une décision préjudiciable au collectif, refusait de devenir responsable de choix éditoriaux. Réclamant de pouvoir demeurer à un poste « subalterne », il se déclarait satisfait de contribuer ainsi à la mission commune. Impossible, lui fut-il répondu : la loi du participalisme est dure, mais c'est la loi...

C'est à se tordre ! Au moins on a la démonstration immédiate de l'absurdité d'une utopie qui lorsqu'elle tombe sur un os, un démenti du réel, ne peut réagir autrement qu'en expulsant cette réalité gênante. Si tu ne rentres pas dans le cadre de mon utopie tu seras éliminé ! Mais Albert, il en est fier et raconte cela comme un exploit, comme s'il avait tué père et mère pour la bonne cause. Il est vraiment dangereux d'avoir une vision si simpliste et unilatérale du réel et des gens avec qui nous devons apprendre à vivre !

Susan

Susan George suggéra d'abord cette objection par le biais d'une question « anthropologique » : a-t-il jamais existé dans l'histoire de l'humanité une société sans classes, surtout quand la définition des classes, au-delà de la propriété des moyens de production, incorpore aussi le savoir des « coordonnateurs » ? Peu convaincue par la réponse (peu convaincante), elle trancha : « Dès lors que vous êtes hautement qualifié dans ce que vous faites, vous devez pouvoir vous y consacrer à fond. »

Je ne suis pas toujours d'accord avec Susan George, mais tout de même assez souvent. En tout cas elle représente dans ce débat la voix de la raison qui nous rassure un peu. De même dans son explication du peu d'empressement des coopératives argentines à politiser et diffuser leur expérience :

Susan George avança une autre interprétation. Peut-être un peu lasse des batailles d'appareil qui déchiraient son association Attac, elle rappela l'objection qu'Oscar Wilde (1854-1900) avait opposée au socialisme de son époque : « Ça impose trop de réunions. » Or, ajouta-t-elle dans un murmure approbateur, « les gens sont vite fatigués, ils n'ont pas envie de consacrer tout leur temps libre à des assemblées interminables et à un travail d'évangélisation ». Indirectement, la remarque visait le participalisme et ses poupées gigognes de conseils de quartier ou d'entreprise, de vingt-cinq à cinquante adultes chacun, qui délibèrent beaucoup afin que l'ensemble des participants puissent trancher en connaissance de cause les questions qui les concernent.

Oui tout cela ne tient pas debout, c'est une construction abstraite sans aucun rapport avec la réalité concrète. Certes il faudrait arriver à une structure fédérative, donc un emboîtement qui n'est pas si éloigné que cela mais plus diversifié et moins systématique, sans l'ambition de supprimer tout pouvoir, toute domination, etc. Ce serait déjà bien qu'on arrive à faire un peu mieux et que ce ne soit pire encore ! Il faut partir du local et de ce qu'on peut y faire. On verra que cela n'ira pas si loin car on ne peut changer de peuple, il faut faire avec les gens tels qu'ils sont, pas qu'avec nos copains anarchistes ou des communautés de fanatiques...

Assurément, les partis politiques chercheront à coloniser les mouvements sociaux pour leur imposer leurs valeurs hiérarchiques et autoritaires. Cela ne devait pas faire oublier qu'en face existait trop souvent la... « tyrannie de l'absence de structures ».

Certes, on n'échappera pas aux pouvoirs, aux conflits, aux injustices, à tous les problèmes posés par les organisations, mais il faut souligner que le libéralisme a mis en évidence le caractère contradictoire de la liberté et la "tyrannie de l'absence de structures", dévoilant ainsi la connivence entre libertaires et libéraux, malgré qu'ils en aient ! Il faut se battre sur deux fronts à la fois, contre l'organisation et contre la désorganisation !

Le message, qui aurait pu passer pour iconoclaste dans une telle assemblée, ne suscita guère de remous. Sans doute parce qu'après une dizaine d'années, la rhétorique des solutions partielles, des communautés en réseau, du « changer le monde sans prendre le pouvoir », commence à lasser. Trop de palabres, de « narcissisme antiautoritaire » (formule d'un intervenant anarchiste), de médiatisation sans fin ; trop peu d'effets sur un capitalisme toujours talentueux dans l'art de récupérer ce qui ne le menace pas de front.

Vincent Cheynet va encore plus loin, dénonçant l'individualisme de certains adeptes de la "simplicité volontaire" ainsi que le marché des idéologies où se perd le commun : derrière l'apparente contestation du système par tous les petits groupes radicaux, ce qui se reproduit, c'est un marché des utopies déraciné de tout ancrage social :

Le masque de l'esprit libertaire est alors employé, en contradiction avec son contenu historique, pour défendre un individualisme forcené et une incapacité profonde à penser le collectif. L'ultralibéralisme a engendré de véritables enfants soldats, non seulement dans les multinationales, mais aussi jusqu'au coeur de sa contestation.

Jean-Pierre Garnier enfonce le clou en dénonçant derrière la méfiance post-moderne envers les organisations un néoréformisme proche du laisser-faire libéral et qui accompagne la globalisation marchande plus qu'il ne la conteste.

« Plus d'organisation hiérarchique et centralisée, mais un "mouvement de mouvements" structuré en réseau ; plus de cadre national préalable pour se constituer en force politique, mais un activisme d'emblée transnational ; plus de classe ouvrière compacte et disciplinée, mais des "citoyens" à fort capital culturel soucieux de préserver leur autonomie et leur individualité ; plus de "grand soir" ni de "lendemains qui chantent", mais des "alternatives concrètes" et des "utopies réalistes" (...). Cette "figure moderne" n'est autre que celle d'un néoréformisme oeuvrant à la promotion d'une mondialisation à la fois "démocratique", "équitable", "solidaire" et "écologique". »

Ces éclairs de lucidité redonnent un peu d'espoir mais on retombe dans le ridicule à prétendre encore, malgré toutes ces objections, à une société idéale, sans classe, etc., alors qu'on doit simplement essayer de construire un système de production alternatif au productivisme capitaliste, ce qui ne serait déjà pas si mal. On se croirait revenu parfois aux beaux temps du communisme et de ses disputes byzantines sur l'aliénation, thème repris par les écologistes maintenant. Le pire, c'est qu'admettre que resteront quelques petits problèmes résiduels dans cette supposée terre promise passe pour une preuve d'intelligence !

Ils n'ignoraient pas non plus que, même « après le capitalisme », dans une hypothétique société sans classes, nombre de questions resteraient sans réponse évidente : le droit des enfants, la légalisation de la drogue, la pornographie, la prostitution, la liberté religieuse quand elle contredit l'égalité des genres, l'allocation de ressources médicales aussi coûteuses que les transplantations cardiaques, le traitement des animaux, le clonage, l'euthanasie...

Evidemment le mal existait avant le capitalisme (si cela a un sens de parler du Mal alors que la cause du mal est presque toujours le Bien!) et, si on devrait effectivement gagner en qualité de vie à sortir du capitalisme salarial, ce n'est pas ce qui réglera tous nos problèmes pour autant. Ces critiques ne visent pas plus particulièrement ce pauvre Albert, ni à faire triompher une théorie contre une autre (inutile de préciser qu'avec le PC, la LCR ou LO ce ne serait guère mieux!). Je ne me sens pas si éloigné des aspirations qui s'y expriment, je suis juste désespéré par leur caractère idéaliste, simpliste et normalisateur!

Il ne s'agit pas d'y opposer une alternative toute faite, mais il faudrait au moins partir des contraintes que n'importe qui d'autre rencontre lorsqu'il travaille la question : partir des nouvelles forces productives, de la nécessité de relocaliser l'économie et de sortir du productivisme. Les propositions qui me semblent pouvoir y répondre (coopératives municipales, monnaies locales, revenu garanti) ne sont pas de moi mais sont inspirées d'expériences concrètes ainsi que de Murray Bookchin, de Jacques Robin ou d'André Gorz, et seront à mettre en oeuvre selon toute une gamme de variations locales. Je suis bien conscient de leurs insuffisances mais c'est dans cette direction qu'il faut aller pour développer notre autonomie et construire une alternative adaptée à l'ère de l'information, de l'écologie et du développement humain. Ce sont, en tout cas, des questions pratiques à résoudre localement (la relocalisation ne peut venir d'en haut!), avec réalisme et non avec la prétention d'abolir le marché, les classes sociales et toute aliénation ! Ce serait déjà une grande révolution que d'arriver à de nouveaux rapports de production qui tiennent compte des nouvelles forces productives et des contraintes écologiques qui s'imposeront de toutes façons, avec ou contre nous.

L'avenir se joue maintenant et il faut faire preuve de réalisme plus que d'utopie, en dénonçant le caractère utopique du productivisme capitaliste. Mais, bien sûr, la question du réalisme se pose avec de plus en plus d'acuité entre rapports de force à court terme et enjeux vitaux à plus long terme. Qu'est-ce que le réalisme aujourd'hui ? Est-ce la concurrence internationale contre laquelle on ne pourrait rien, le libéralisme qui nous dominerait pour toujours ? Est-ce la fin catastrophique du pétrole ? ou bien est-ce la prise de conscience que ce monde n'est pas durable, constater la catastrophe d'un monde qui va inexorablement vers un réchauffement aux conséquences incalculables ? Ce n'est pas dire que c'était tellement mieux avant, mais la maison brûle, ce n'est pas qu'un slogan, et nous devrons trouver rapidement des alternatives vivables qui ne régleront pas tous les problèmes et ne sortiront pas du cerveau d'un illuminé mais résulteront de la convergence d'expériences locales, avec toutes leurs limites, de ce que nous ferons, ici et maintenant (le peu que nous pourrons).

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36 réflexions au sujet de “Le massacre des utopies”

  1. Contre l'autodestruction.
    Nous appartenons à la nébuleuse anti-libérale (à préciser).
    Ce qui nous lie est bien plus fort que ce qui nous sépare (aucune religiosité dans cette affirmation).
    Chacun d'entre nous a été, à un moment de sa vie, dans la position de réussir au sens classique du terme (à préciser) . Et a choisi une autre voie.
    Formulé autrement, opportunisme, recherche du pouvoir (à tout prix), manipulation, conformisme, cynisme, mortification sont des traits assez minoritaires de nos personnalités (ni idéalisation, ni moralisation). Un tel socle commun devrait nous permettre de ne pas désespérer (à défaut d'espérer).
    Seul le "faire" a raison. Bâtissons, diffusons, faisons confiance à priori, sanctionnons (sauvagement) à posteriori.
    Débusquons (éventuellement) la rhétorique. Favorisons (si possible) la dialectique.
    Cette incapacité à nous unir, si elle devait persister, ne constituerait-elle donc pas la victoire ultime du libéralisme ?
    Je craindrais alors que pour une longue période encore, les évènements ne choisissent à notre place.
    Claude Animo

  2. Tout à fait d'accord avec cet article (un peu long).
    L'utopie, c'est le père Noël des enfants, le paradis éternel des religions, l'opium des fumeurs d'opium (ou d'autres choses).
    Un attrape-gogos à but lucratif, un moyen de fuir sa réalité humaine (ou de dominer celle des autres par prosélytisme), un amollisseur définitif de cerveau.
    Entre élever mon esprit et garder les pieds sur terre, je préfère la terre avec sa matière, ses odeurs fortes et ses vents coulis.

  3. Je suis largement d'accord avec cet article (les "dernières nouvelles de l'utopie" sont en effet bien attristantes), mais il me pose aussi certaines questions :
    Quid de la force motrice que peuvent avoir idéaux et utopies ? Les moteurs de l'action humaine (individuelle ou collective) se limitent-ils à la prise en compte "réaliste" d'intérêts (individuels ou collectifs) ?

    Il faut -je crois- prendre garde de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain : si utopie et idéalisme peuvent être des entraves à l'action et à la transformation du monde, et même causer les dérives que l'on sait, ils n'en demeurent pas moins des appuis et des ressources à l'action (la pensée d'un ailleurs ou d'un autrement étant la condition de la critique et de la mobilisation).
    Ce dont il faut se défaire, finalement, ce n'est pas de l'utopie en tant que tel, mais peut-être plus des conceptions "monothéistes", unitaires, exclusives, des utopies.

  4. Il me semble que j'ai clairement annoncé au début de mon article qu'on avait besoin d'utopies mais d'utopies réalisables. Un certain idéalisme est effectivement nécessaire à l'action mais à condition que cet idéalisme accepte la confrontation au réel. C'est le dogmatisme qu'il faut combattre (quoiqu'on puisse soutenir aussi qu'on ne peut se passer de dogmatisme), en tout cas le simplisme et la pensée abstraite trop absolue et totalitaire. Il faut accepter le caractère contradictoire de la réalité, pas s'y soumettre passivement, mais toute formulation est à replacer dans son contexte : il ne s'agit jamais que de tordre le bâton dans l'autre sens, ici celui du réalisme, dans un contexte trop réformiste je pourrais tout aussi bien défendre l'utopie...

  5. En effet, merci pour ce point de vue...
    Suite à ma lecture du diplo, j'ai lu le bouquin d'Albert traduit en français. J'y ai trouvé finalement beaucoup plus d'éléments me permettant d'interroger encore un peu plus les disfonctionnements de la société actuelle qu'un modèle fiable et convaincant pour l'avenir.
    Je suis d'accord avec vous : ériger le travail en valeur absolue de reconnaissance aussi bien sociale qu'économique me glace le dos...
    Cependant, les propositions concrètes d'Albert pour permettre un meilleur épanouissement de chacun (meilleure répartition des tâches valorisantes et dégradantes) dans le fonctionnement actuel de nos associations et organisations me paraissent pour le coup réalistes et intéressantes.

  6. Il est bien sûr tout-à-fait normal de se répartir les tâches dans les familles comme dans les associations et il faut essayer de rendre le travail plus épanouissant mais, encore une fois, ce qu'on peut lui reprocher c'est de vouloir en faire une loi absolue et de dénier la complexité d'une réalité qui ne se plie pas à des principes trop rigides venus du haut mais doit se construire par le bas, à partir des acteurs eux-mêmes et de leurs propres principes.

  7. eh eh nous sommes tout à fait d'accord Jean !
    C'est aussi que je pensais à une note du traducteur de "Après le capitalisme" qui se demandait dans quelle mesure le fonctionnement des structures anti-capitalistes françaises était vraiment fidèle à leurs idées ou si au contraire elles ne reproduisaient pas malheureusement le schéma aliénation/domination dans la répartition des tâches.

    Très bonne continuation à vous...

  8. Il est certain que le fonctionnement des Verts par exemple les disqualifie et donne de l'écologie une vision catastrophique mais c'est plus une question de cohérence et d'efficacité que de schéma aliénation/domination car il est fou de vouloir sortir de ce schéma, tout ce qu'on peut c'est réduire la domination, tout comme les inégalités, pas les supprimer. Encore une fois, rien ne nous autorise à prétendre atteindre une quelconque perfection, on peut juste faire un peu mieux, on peut discuter et s'organiser mais il faut oublier ces rêves inatteignables d'un positif sans négatif, de la fin de l'aliénation, de l'injustice et des pouvoirs, on n'en demande pas tant, surtout quand on sait que ça mène au pire !

  9. Qu'avez-vous lu d'autre sur l'économie participative à part l'article de Halimi ? Rien n'indique dans votre texte que vous avez cherché à en savoir plus sur le sujet que le résumé fait par Halimi. Autre indice que vous n'êtes pas allé plus loin que l'article dans le monde diplomatique pour écrire votre texte : pas de mention du site des rencontres [ http://www.zmag.org/junemtg.html ] qui vous aurait pourtant permis de voir que le sujet principal des rencontres n'était pas l'économie participative.

    Ce qui me fait aussi rager un peu, c'est la légèreté avec laquelle vous parlez de Znet, fondé par Albert et dans lequel écrivent régulièrement des gens - certainement eux et elles aussi des "illuminés" et des esprits "totalitaires" - comme Chomsky, Zinn(howard, pas john ;), Avnery, Fisk, etc. Et Halimi et George, évidemment.

    désolé mais je n'ai pas le temps tout de suite de poursuivre. à demain j'espère.

  10. Bonjour,

    Je suis moi-même très critique à l'égard du Parecon, pour de multiples raisons qui recoupent largement les vôtres.

    Mais vous avez raison, construisons donc :

    Je ne sais pas dans quelle mesure vous classerez ce qui suit dans les "utopies venues d'en haut ou d'un illuminé" ou au contraire dans les "expériences locales réalistes".

    Il me semble intéressant de constater que la grande majorité des PME (qui sont LES entreprises créatrices d'emploi et qui, à mon sens, ne participent que très peu aux multiples dérives du capitalisme actuel ; il faudrait développer, je n'ai ni le temps ni la place) ont un point commun non négligeable :
    la plupart d'entres elles ne rémunèrent pas le capital.

    Partant de là, j'ai tendance à considérer qu'il n'y a pas de plus gros frein à une réelle "liberté d'entreprendre" (dans une sorte de nouveau et vrai sens du terme) que cette obligation d'une course permanente et sans fin à une rémunération du capital toujours supérieure.

    Ainsi cette course à la rémunération du capital devient une sorte d'esclavage de l'entreprise, dont les représentants n'ont souvent plus d'autre choix que cette fuite en avant productiviste suicidaire.

    Je travaille donc depuis quelques temps avec un groupe d'amis (dont quelques économistes) sur cette idée simple et qui pourrait, à tort, paraitre utopique : l'abolition de la rémunération du capital.

    Je vous vois grimacer... ce n'est PAS une utopie. C'est extrêmement concrêt. Des millions d'entreprises, précisément celles qui "marchent" (au sens où le définirait surement un réel indicateur de "bien-être"), fonctionnent comme celà aujourd'hui, sous nos yeux !
    J'ajoute que bon nombre de leurs patrons (dont je fais partie) ne demanderaient pas mieux que d'être débarrassés de cette horreur.
    Et que ces entrepreneurs ont l'immense avantage d'être encore des êtres humains, donc capables d'humanité, de choix responsables dans les orientations qu'ils prennent, liberté que n'ont plus les comités de direction des grands entreprises, composés de mercenaires et "obligés" d'atteindre les objectifs fixés par un actionnariat "non-incarné".

    Il y a 3 jours un colloque de l'association française des Sces eco débattait une proposition d'imposition du capital. ça me semble être une bêtise (voire une atteinte à la propriété privée). Mais il est déjà possible d'en parler !
    Ne s'attaquer "que" à la rémunération du capital me semble autrement plus réaliste et judicieux.
    J'ajouterai pour finir (et en espérant que vous voudrez bien accorder à cette proposition plus d'intérêt que ne saurait en susciter mon modeste talent dans un commentaire de blog) que cette proposition rejoint (à mon grand étonnement) certaines bases du christianisme et de l'Islam. (l'interdiction de "l'intérêt").
    Pour un athée comme moi, rejoindre, par le raisonnement, ces principes religieux (et précisément ceux qui ont été par la suite pervertis par les "églises") constitue plus qu'un clin d'oeil : un encouragement.

  11. en allant sur la page:
    http://www.dollarsandsense.org/a...
    on trouve les liens permettant d’acceder directement et gratuitement au reseau des reseaux des cooperatives de toute l’Amerique latine (plusieurs millions de cooperateurs),avec ses multiples pages
    de descriptions et de bilans d’experience, evidemment en espagnol et en portugeais.
    L’astuce d’Albert fut double,il a compris la barriere de la langue,il a crée un site payant et un journal papier payant sur l’economie sociale mondiale,puis il a invité des sommites mondiales pour la pub de ses publications.
    L’extraordinaire dans l’affaire,c’est qu’apparamment il a oublié d’inviter des representants directs du mouvement social latino americain qui evidemment en 5 minutes de debat lui auraient demontré la futilité de son discours.
    Aujourd’hui on en est a peu pres partout la,les acteurs directs n’ont pas la parole,et les porte parole foisonnent?

  12. Bien sûr il est normal que les partisans d'Albert ne soient pas contents, et j'avoue ne pas bien connaître ses propositions mais j'ai donné l'adresse de ZNet, je savais donc que Chomsky et Howard Zinn y contribuaient, et je ne tape pas que sur "l'économie participative" mais sur toute la gauche jusqu'aux libertaires. J'ai donc sûrement tort, tout va sans doute très bien et la révolution sera bientôt victorieuse...

    Ma critique concerne effectivement l'article d'Halimi comme symptôme de notre débilité politique (la question n'étant pas son degré d'ironie plus ou moins déplacée) et dont la lecture m'a bien agacé, servant d'illustration de notre rationalité limitée malgré toutes les intelligences réunies. Je n'ai bien sûr aucune légitimité à le faire, je ne fais pas le poids.

    Je ne pense pas que les propositions d'Aureliano Buendia valent beaucoup mieux même si j'attends comme lui de fortes turbulences du capitalisme américain et que j'ai, moi aussi, créé et dirigé une entreprise pendant plus de 10 ans (avant de me retrouver au RMI!). Il est exact qu'il est bien difficile de rémunérer le capital dans la plupart des petites entreprises qui sont soumis à forte concurrence. Un Droit à l'Initiative Economique serait nécessaire mais je propose plutôt de passer par les "coopératives municipales", suivant en cela les arguments de Bookchin. Ce n'est pas forcément idéal mais cela s'inscrit du moins dans un projet plus global que "l'abolition de la rémunération du capital" dont on voit mal comment ce serait possible si même les religions n'ont pu l'imposer !

    En tout cas merci à Vladimir pour le lien, montrant qu'on parle de pratiques existantes, et non d'utopies fumeuses, avec cette réflexion d'Henri de Roche "le vieux coopératisme était une utopie qui cherchait sa pratique alors que le nouveau coopératisme est une pratique à la recherche de son utopie".

  13. Au Venezuela, le gouvernement Chavez, semble encourager la formation de coopératives face au secteur privé et même public. De 800 coopératives en 1998, ils sont passés à 100.000 en 2005. Avec 1,5 millions de membres; c'est à dire 10% de la population active.
    Ils viennent de mettre en place une monnaie "sociale" (les mirandinos) pour développer l'échange et le troc entre coopératives. Le gouvernement Chavez a aussi mis en place une banque uniquement pour les femmes (BanMujer), facilitant grandement leur accés au crédit. Il semblerait aussi que les femmes les plus pauvres ont droit à une forme de revenu garanti (80% du smic).
    http://www.venezuelanalysis.com/...
    Il y a une détermination des classes populaires à s’organiser pour résoudre les problèmes de leur communauté. Dans le Venezuela bolivarien, les institutions demeurent au service de l’organisation populaire. Et le véritable contrôle et la gestion des Missions (Education, Santé) ou des initiatives comme celle des cantines populaires sont assumés par la communauté.
    Chavez et ses amis qui s'opposent au capitalisme et ses valeurs ne veulent pas non plus une économie à la soviètique; c'est pour ça qu'ils tâtonnent, qu'ils expérimentent.
    Il y a peut-être une place de consultant pour Jean Zin au Venezuela...
    Source:
    http://www.venezuelanalysis.com/...

  14. "[On a] besoin d'utopies mais d'utopies réalisables"

    Ah... c'est que c'est un peu compliqué de décider par avance de ce qui est réalisable.

    Autant l'article du Diplo montrait nos utopistes à l'autre extreme, celles d'utopies improbabales je dirais (et votre article est une excellente decronstruction, merci), autant on ne doit courri le rsique d'etouffer l'innovation en imposant aux utopies de se montrer "réalisable" à l'aune de je ne sais quelle mesure.

    Une manière d'eviter cela ce serait peut etre de prendre une apporche progressive : les utopies qu'on peut réaliser aujourd'hui transformeront le contexte (nous inclus) suffisamment pour en rendre d'autres possibles. Il n'est pas etonnant ques les rêves changent d'une génération à l'autre.

  15. Vous "avouez" ne pas très bien connaître le travail théorique de quelqu'un qui à la confiance de chomsky, fisk, zinn, george, halimi etc. _mais_ vous citez l'adresse de son site, et ça vous suffit pour écrire 7 pages sur un article (un peu plus court) du monde diplomatique qui résume ce travail dans le cadre d'un article peut-être ironique à la portée plus large et je devrais en plus me laisser résumer par "partisan de Albert" ?

    Ben non.

    Par exemple, j'ai moi aussi du mal avec cette notion d'évaluation du sacrifice dans le travail, et j'arrive difficilement à imaginer au niveau mondial le fonctionnement de parecon. Passons, je ne suis pas en quête de solution clefs-en-main et parfaites...

    En fait, je pense que vous n'avez pas compris grand chose à l'article (bizarrement construit) de Halimi et à l'objet de ces rencontres organisées par Albert. Le but de ces rencontres était de prendre un moment conséquent (une semaine + les préparatifs puisque les textes supports aux discussions étaient - et sont - disponibles à l'avance ) pour réfléchir à plusieurs aux diverses facettes d'une société telle que nous la voulons, en prenant en compte les personnes qui la composent aujourd'hui.

    Quel mal y a-t-il à ce que quelques dizaines de personnes du monde entier, impliquées à différents niveaux (syndicalistes, journalistes, militant-e-s féministes, etc.) se réunissent pour ça ? Selon moi, même si c'est un échec cette réunion, et Halimi le dit un peu, c'est toujours intéressant que des gens qui s'estiment mais n'ont pas l'occasion de discuter à plusieurs se retrouvent pour confronter leurs idées (et sans doute en rejeter certaines).

  16. Désolé je suis agressif dans mon dernier message. Et quand je dis que vous n'avez pas compris grand chose, j'exagère. C'est plutôt que j'ai l'impression vous avez un peu réduit cet article, Albert et ces rencontres aux dimensions de votre théorie sur la rationalité trop limitée.

    Il est possible que je rate un truc, aussi. Et j'ajoute que je ne rejette pas vos textes en bloc - que j'accède depuis rezo.net - ni même ce texte-là, comme je l'ai dit dans mon précédent commentaire.

  17. Oui, c'est curieux car ce qui m'est reproché c'est un manque de déférence envers nos porte-paroles auto-proclamés or, c'est justement le fait que ce soient supposées être des personnalités émminentes qui rend l'échec aussi significatif !

    Il n'y a bien sûr rien de mal à se rencontrer, c'est même ce qu'il faut faire, mais ce qui est dramatique c'est de n'en rien sortir, que des conneries, et je le dis parce que c'est grave, c'est pas pour blesser quiconque. J'ai peut-être été trop ironique avec Albert, que je ne connais pas, mais ce sont les idées que j'attaque, telles qu'exprimées et reprises par Halimi parce que c'est ce qui est significatif ici.

    Dans ma critique je ne fais pas que déverser des insultes ou remplir du papier (je rectifie d'ailleurs que mon texte ne fait que 5 pages alors que celui d'Halimi en fait 7 chez moi, même si c'est à cause de la présentation!). Je suis sans doute trop long s'il ne s'agissait que de démontrer comme Albert et Halimi sont nuls, alors que mon propos est beaucoup plus précis dans la critique et orienté vers la construction d'une véritable alternative, pas vers le dénigrement systématique.

    Je trouve la situation très mauvaise et qu'on est mal barré avec ATTAC et le Monde Diplo, tout comme avec le PS, le PC, les Verts, sans compter la LCR, etc. Je le dis. Car si on ne trouvera aucune issue du côté de ces organisations sclérosées, il y a tout de même beaucoup d'intelligence qui se manifeste dans certains blogs (dont certains des intervenants de cette discussion) et les choses peuvent se retourner très vite, à condition de ne pas rester spectateurs béats de notre impuissance, englués dans des idéologies dépassées, et de construire une véritable alternative.

    A part ça, merci à Anièry de rappeler cet aspect trop méconnu de la révolution vénézuellienne qui se développe sous la forme de coopératives. Cependant il y a des différences importantes avec nos sociétés plus développées qui sont beaucoup plus tournées vers l'immatériel et il me semble qu'ils devraient tirer parti des critiques de Bookchin envers les coopératives pour en faire des coopératives municipales et la monnaie sociale devrait rester une monnaie locale. Ce sont les seuls points que j'aurais à conseiller peut-être à Chavez mais je ne suis pas un expert, je ne prétends rien savoir, je manque d'expérience au moins !

    Enfin je dirais à Doomu Rewmi que, bien sûr on ne sait pas à l'avance ce qui est réalisable, mais du moins on peut voir ce qui est trop uniforme, trop abstrait, trop simpliste, trop "parfait". Beaucoup peut être amélioré, pas seulement réformé mais reconstruit sur d'autres règles, il n'y a jamais rien de parfait !

  18. Nous nous sommes visiblement très mal compris. Je précise 2 ou 3 choses et vous laisse discuter entre vous, puisque le débat a évolué.

    Je n'ai jamais dit que "Il est exact qu'il est bien difficile de rémunérer le capital dans la plupart des petites entreprises qui sont soumis à forte concurrence. "
    Mais quasiment le contraire : je pense qu'il est utile de remarquer que, VOLONTAIREMENT, les PME ne rémunèrent pas le capital !
    Parce qu'elles sont les seules à en avoir la possibilité et que ces entreprises fonctionnent très très bien.
    Que nous avons donc sous les yeux un système de production qui fonctionne sans rémunération du capital et ne saurait donc s'appeler plus longtemps "capitalisme".
    CQFD.

    Que plutôt qu'essayer de réinventer de nouveaux modes de production, il suffit peut-être, tout simplement de changer les règles de la production.

    Bref.

    Et sur les églises, (ce qui est un détail) je disais, non pas qu'elles n'ont pas réussi à l'imposer, mais justement qu'elles ont combattu et détourné des principes qui semblent pourtant faire partie d'une "morale" humaine "profonde".

    Quand à la difficulté ou pas de "le faire", j'en reste pour ma part là : "tout le monde savait que c'était impossible ; puis est arrivé un idiot qui ne le savait pas. Et il l'a fait".
    Je retourne donc le faire et j'arrive.
    😉
    (Je suis joignable sur mon blog pour toute personne que ce sujet intéresse.)

  19. Je ne suis toujours pas sûr d'avoir compris (le VOLONTAIREMENT) mais cela m'évoque Bernard Friot "Et la cotisation sociale créa l'emploi" où il voulait que la cotisation sociale serve de capital aux entreprises... Cela n'a peut-être aucun rapport, de toutes façons, je n'approuve pas du tout Bernard Friot.

    Je comprends qu'on s'attache à des problèmes réels comme celui-là mais il faut avoir une vision plus globale de la question. Bien sûr je n'ai pas la science infuse, je peux ne pas comprendre et dénigrer ce qui se révélera tout-à--fait faisable. Je dis ce qu'il m'en semble à première vue mais ne suis pas une autorité !

    Ceci dit, les petites entreprises n'ont jamais été "capitalistes", sauf lorsque les banques les liquident ou qu'une grosse entreprise les achète. Il n'y a pas tant à inventer, le nouveau mode de production, on le connait déjà, il s'agit juste de changer les rapports de production (passer du salariat au travail autonome), les modes de distribution (revenu garanti) et de circulation (gratuité numérique) ! Donner à chacun les moyens de produire par lui-même, d'être sa propre entreprise, d'un travail autonome, d'un travail choisi est une des nécessités de la production immatérielle, mais ce n'est qu'un élément d'un ensemble.

  20. Je vais sans doute me faire houspiller, mais je suis devenu un grand lecteur de Friedriech V. Hayek.

    Je ne partage pas ses opinions, mais je trouve que ses idées sont stimulantes, notamment son idée d'un ordre collectif crée en dehors de notre cerveau par nos actions et par les régles empiriques que nous établissons.

    Or, j'ai l'impression que nous sommes dans une impasse parce que ce que nous ne tenons pas compte de cela: il nous est difficile de batir parce que nous pensons pouvoir rebatir à partir de rien le monde.

    Du coup nous ne faisons rien: il y a peut être quelques choses à chercher de ce côté là...

  21. > JeanZin
    ... et d'arriver, enfin, entre autres, à l'application "réelle" du 23 de la DUDH : "Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage."

    Je prends, peut-être à tort, votre "pas sur d'avoir compris" comme une invitation à clarifier...
    (si ça vous saoule, dites le, je ne me vexerais pas, promis)

    Vous êtes patron de votre PME qui "gagne de l'argent". (si elle en perd, elle meurt, cette contrainte me parait "naturelle" et acceptable. Dommage, sans doute, mais acceptable).
    Vous avez, en très gros, le choix d'utiliser cet argent en :
    - investissement (machines, etc.)
    - salaires et embauches supplémentaires (rémunération du travail, y compris le vôtre)
    - dividendes (rémunération du capital)

    Si vous regardez comment se comportent le grande majorité des patrons de PME, ils ne versent pas de dividende ; ils ne rémunèrent donc pas le capital, et préfèrent réinvestir l'ensemble des gains en investissement ou en embauches et augmentations.
    (quelques études vous soutiendront le contraire ; elles se trompent car elles comptent comme "rémunération du capital", des dividendes que certains patrons se versent, pour de bêtes raisons fiscales, en rémunération de leur travail.)
    Vous êtes sur une répartition "volontaire" de la valeur entre travail et capital à 100/0.
    Ces entreprises fonctionnent très bien et ne sont effectivement pas "capitalistes".

    Dès que vous faites entrer un actionnaire qui ne "travaille pas". (cas de quasiment toutes les grandes entreprises), vous allez devoir rémunérer cet actionnaire. Cette valeur échappe à la rémunération du travail et passe à la rémunération du capital. Or le capital circule avec une très grande liberté et va donc se diriger vers le plus "rentable", sans autre considération. Si vous souhaitez le conserver (et vous êtes, à ce stade, bien obligé), vous vous retrouvez dans cette course au profit toujours supérieur qui semble être à l'origine de bien des maux de cette planète.
    C'est le modèle dominant actuel.

    Si nous imaginons un monde sans rémunération du capital (ce qui est déjà très souvent le cas, je le répète,et donc tout à fait réaliste), nous n'aurions plus alors que des petites entreprises, ce qui constitue, vous me l'accorderez un premier pas vers votre (notre) souhait que chacun soit sa propre entreprise. (j'y reviendrai).

    J'ajoute que ses petites entreprises sont dirigées par des hommes et des femmes (au sens "êtres humains") qui sont donc capables de choix "éthiques". Ce qui est totalement impossible à un comité de direction, obligatoirement inféodé aux objectifs de rentabilité d' un actionnariat désincarné.

    Dès lors, votre/notre évolution souhaitée des rapports de production devient presque une évidence !
    Chacun peut désormais être sa propre entreprise et choisir son activité, puisqu'il a enfin, l'assurance qu'il ne sera pas détruit/bouffé par un plus gros, souvent plus médiocre, mais qui aura juste amené à lui plus de capital !

    Rahh, je me rends compte que ce n'est pas encore d'une clarté folle... désolé. Essayez de relire ou juste d'y penser. Je vous assure que je ne vous embeterai pas comme ça (et que je ne passerai pas autant de temps), juste pour une lubie de passage.

    Concernant ce que vous disiez du changement dans les rapports de production, ça ressemble furieusement à l'organisation en réseau.
    Elle est évidemment bien supérieure à celle, pyramidale, de l'entreprise actuelle. Raison de plus pour "rééquilibrer la concurrence" entre ces formes d'organisation, en ne laissant pas l'entreprise s'accaparer la totalité du capital !

    Enfin, et juste pour faire avancer l'ensemble, ce que vous dies est très (ne vous choquez pas, hein) proche de certaines théories libérales. Notamment parmi les plus dures (école autrichienne), dont certains "pontes" (Hayek) soutenaient l'idée d'un revenu minimum garanti.
    Je les avais plutôt fuit jusqu'à maitenant, à tort. Je suis persuadé que certains d'entre eux peuvent devenir des alliés, improbables certes, mais sincères. Je crois aussi que ceux qui se définissent souvent comme "anti-libéraux" se trompent d'ennemi et sont en fait "anti-capitaliste" (mais il faut croire que c'est moins "mode"...)

    Enfin, et j'en aurai fini, parmi ce que j'ai trouvé de plus pertinent en économie jusqu'à maitenant :
    - le passage des droits de succession à 100% (de la part d'un ami économiste de droite !)
    - l'attribution, du coup (redistribution) d'un capital de "départ" à tout citoyen.
    (et vous voyez qu'on retombe encore sur "chacun devient/peut devenir sa propre entreprise")

    Voilà. Il me reste, en espérant avoir suscité un embryon d'intérêt, à vous souhaiter une bonne nuit !

  22. >Aureliano

    Tiens c'est marrant, mais je pense un peu comme vous!
    Il m'arrive de penser que des libertariens Hayekiens pourraient devenir des alliés, notamment ceux ce reconnaissant dans le Hayek Tardif de La présomption Fatale, qui contient des choses très pertinentes sur les petites communautés humaines.

    Ca semble assez bien vérifié expériementalement lorsqu'on étudie les réseaux et les statistiques de type Small Worlds.

    Par contre je pense être résolument anticapitaliste, c'est à dire anti-bureaucratie....

  23. > blob : Je n'avais pas lu votre commentaire avant de poster le mien. Je ne peux qu'applaudir ! (étonnant que deux personnes citent Hayek en même temps sur un blog comme celui ci, non ?)

    Vous disiez "il nous est difficile de batir parce que nous pensons pouvoir rebatir à partir de rien le monde."
    --> d'où ma proposition d'adaptation de l'existant, certes radicale (mais pas plus que l'abolition de l'esclavage...) Plutôt que tenter vainement de tout repenser ex nihilo.
    Cette fois, je file. Encore désolé pour le côté extrêmement laborieux de mon commentaire ci-dessus. C'est pourtant très simple... mais je suis claqué.

  24. > blob :
    nos commentaires se sont à nouveau croisés ! (je faisais donc référence, ci-dessus, au précédent).

    Anti-capitaliste aussi pour ma part. Clairement. Mais pas anti-entreprise en tant que telle (même si je crois beaucoup plus au "réseau" !), ni même anti-marché (pour moi, le marché, c'est un lieu d'échange de valeurs marchandes. je n'y vois aucun inconvénient tant qu'on définit ce qui est marchand et ce qui ne l'est pas) et pas non plus, étonnament, anti-libéral...

    (euh... ce que je raconte plus haut n'est pas du tout "bureaucratique". pas compris)

    Bon cette fois, je file au pieu.
    En espérant vous recroisez un jour.. ciao.

  25. On devrait jamais aller dormir car le réveil fut un peu rude de se voir envahi ainsi par Hayek ! De quoi se faire houspiller sans doute, mais ça me donne surtout un coup de mou !

    En effet Hayek est, sinon le responsable du moins la caution de toutes les saloperies du néolibéralisme or je n'arrête pas de dénoncer libéraux et libertaires pour leur dogmatisme qui nous réduit à l'impuissance en refusant de reconnaître les contradictions de la liberté ! Il faudrait arrêter de croire qu'être anti-libéral serait être contre la liberté alors qu'ils 'agit de s'opposer à une idéologie libérale dogmatique nous privant de toute liberté et de tout avenir, il s'agit de s'opposer à une politique réelle pas à des valeurs.

    Pour moi Hayek est l'exemple même du dogmatisme (du scepticisme dogmatique) ainsi que d'erreurs de base sur la cognition et la théorie de l'information. Bien sûr il ne dit pas que des bêtises et son mérite sera d'avoir réfuté la théorie libérale néoclassique basée sur une information parfaite mais les conséquences qu'il en tire valorisant un "ordre spontané" que personne n'a voulu sont ridicules et souvent extrémistes. En fait, il a servi à toute la vogue de "l'auto-organisation" qui faisait partie des inévitables exagérations post-totalitaires, en réaction dialectique à la période précédente.

    Je parle un peu d'auto-organisation dans ma newsletter du mois de septembre :

    jeanzin.free.fr/...

    J'y donne une citation de Marx pour montrer que Hayek n'a pas découvert l'ordre spontané, il a seulement donné une valeur positive et quasi religieuse à ce que Marx considérait comme le fait regrettable d'effets négatifs et qu'il rapprochait du fétichisme : "Les relations qu'ils entretiennent entre eux sont, en fait, une subordination à des rapports qui existent indépendamment d'eux et surgissent du choc entre les individus indifférents les uns aux autres" (Marx, Grundisse I).

    Donc bien sûr, il faut en tenir compte pour arriver à rebatir. Il n'y a pas de table rase, on ne part pas de rien et on ne peut faire n'importe quoi. Il faut respecter la complexité du réel et tenir compte des mouvements de masse qui nous échappent. Ce n'est pas une société à refaire d'un coup mais prendre à chaque fois la bonne décision sans hésiter à se corriger si ça tourne mal. Donc, oui, il faut être réaliste mais ce n'est pas une raison pour justifier l'ordre établi et ne pas le réguler comme tout processus vital, car, contrairement à ce qu'on croit, le caractère chaotique d'un phénomène n'empêche pas de le contrôler il faut seulement y adapter sans cesse la régulation.

    Je discute de cela (Hayek entre autres) plus en détail dans ma petite brochure (non publiée encore), "La complexité et son idéologie" :

    jeanzin.free.fr/ecorevo/s...

  26. " et nous devrons trouver rapidement des alternatives vivables qui ne régleront pas tous les problèmes et ne sortiront pas du cerveau d'un illuminé mais résulteront de la convergence d'expériences locales, avec toutes leurs limites, de ce que nous ferons, ici et maintenant (le peu que nous pourrons)."

    Oui, faisons, et vite et bien, le torchon brûle et la haine gagne du terrain
    a l'époque de mes 20 ans, nous pensions avoir triomphé de l'obscurantisme, aller d'un pas serein vers des lendemains chantants, grave erreur, Allende avait déjà été assassiné...c'est ça l'utopie, croire que son instant de félicité immédiate sera étenel et partagé par l'humanité entière
    la chute est dure, interminable.

    je voyage, je regarde, j'écoute...le monde est immense
    et j'ai encore plein d'énergie

  27. une utopie qui se réalise ou qui est éventuellement réalisable n'est plus une utopie
    l'utopie permet d'envisager des chemins, des directions, des orientations

    aller ne serait-ce que de 1% dans la direction d'une utopie c'est déjà bien
    enfin, si l'utopie en question est bonne
    on a vu ce que pouvait donner certaines utopies au 20ème siècle (le national-socialisme entre autre)

    donc pour moi une utopie c'est surtout des idées irréalisables dans l'immédiat mais cela permet surtout de se poser des questions, de remettre les choses à plat, de réfléchir sur la situation actuelle et de réaliser des choses concrètes maintenant
    l'utopie c'est aussi et avant tout une remise en question de notre situation actuelle
    l'utopie c'est aussi envisager un monde idéal avec une société idéale
    or, aucun système n'est idéal (c'est en cela que l'utopie est ...utopique)
    il n'y a que des systèmes imparfaits
    envisager le contraire c'est entrer (voir réentrer) dans le totalitarisme
    le capitalisme en lui-même est une forme d'utopie aboutie puisque qu'il se veut un système idéal voir parfait (la fameuse loi du marché)
    démontrer l'imperfection manifeste du système capitaliste et les problèmes qu'ils engendrent et que nous commencons seulement à entrevoir (pollution, crise, guerre, corruption, ....) serait déjà un grand pas en avant
    or à l'heure actuelle on évoque ces problèmes sans les connecter directement avec le système capîtaliste
    quand on écoute les médias, tous les problèmes que nous avons semblent nous tomber du ciel ou bien être causé par les hommes eux-mêmes alors que c'est le système qui est détraqué
    aucun lien direct n'est évoqué avec le système économique dans lequel nous vivons chaque jour
    cette occultation (volontaire ?!) m'émerveille chaque jour

    alors quel système pour demain ?
    jean zin évoque un système basé sur le local : monnaie locale, coopérative communale, ...
    cela évoque un peu le système des communautés
    il faudrait qu'existe un lien communautaire important, une participation active des différents acteurs
    cela va t'il dans le sens actuel pris par nos sociétés ?
    cela a t'il été testé ? il faudrait faire des essais je pense

    le problème je pense se situe dans le fait que l'on mélange plusieurs niveaux différents : la société, l'économie, l'individu, le politique dont les aspirations sont différentes et dont les modes de fonctionnement ne sont pas basés sur les mêmes principes
    il faudrait donc à mon avis dans un premier temps essayer de définir les différents niveaux et les différents acteurs, quels liens existent entre eux et quels sont leurs modes de fonctionnement

  28. l'époque ressente a fermé de façon autoritaire ces chemins qui ne mennent nulle part . le squatt est devenu un délit séverement punis , tout comme le fait de ce droguer . c'est enfin l'émeute qui fait les frais de la tolérence zéro . la transgression est pourtant décisive pour apprendre à connaitre ses limites . et une société qui ne saurait pas organiser , ou du moins tolérer les débordements et la furreur fabriquerait en série des névrosés . si mai 68 a été la révolution du devenir et des folies sans lendemain le fait que nous ayons avant tout besoin d'un avenir ne doit pas nous faire oublier que même à un âge avancer on se doit d'avoir des folies d'ados . sans pour autant aller jusqu'a penser que l'on peut capter l'énergie pulsionnelle du soleil en se mettant une antenne dans le cul ... la situation sociale n'est telle pas comparable à celle d'une victime de torture . face au traumatisme intentionnel infligé par un bourreaux invisible et qui l'a fait basculer dans un mutisme complét, une céité libidinal et cognitive et un syndrome de répétition incarné dans chaque geste la responsabilité du medecin est de tenter une véritable réanimation psychique dont la fête et sa pulsation pychrome est un élément central . l'exemple de la torture peut prêter à sourire . pourtant, à bien comprendre l'AGCS , il faut bien voir que notre horizon à moyen terme se situe entre le mur qui sépare palestiniens et israêliens et des expériences comme guantanamo . le capitalisme commence sérieusement à devenir autoritaire ... voilà pour l'actualité du vampire . face à cela ily aurait donc en plus tout une politique de la singularité quelconque à mettre en place à côté des mesure de relocalisations . rétablir un rapport à la nature ( au sens large ) dont la crise est sans précédant dans l'histoire de l'humanité , tolérer le squatt , l'émeute, l'orgie et légaliser le cannabis . on n'imagine pas à quel point la génération qui vient après 1977 à été sacrifiées et n'a connu finalement que la crise , chez elle c'est le désir de communisme qui semble enfouie au plus profond du sable et qui pourrait bien ressurgir de façon explosive au milieu de toute cette bande de déshériters comme une fièvre impossible à négocier . je m'avance un peu mais je pense qu'il n'est pas impossible qu'il y est un retour de l'autonomie et des indiens métropolitains . dès lors il serait criminel de ne pas prendre en compte l'immédiateté de leurs aspirations .

  29. oui la guerre de la présence peut tout aussi bien que la guerre à l'effet de serre contribuer à la refondation d'une communauté humaine . un element qui a attiré mon attention dans l'actualité récente , c'est le succès que rencontre aujourd'hui le slam . cette pratique est anciennes , peut être autant que l'art oratoire lui même , mais en france ça fait à peu près 10 ans que le mouvement est lancé , dans l'ombre du hip hop et du rap . cela fait maintenant à peu près 6 mois que cette pratique qui évoluait jusqu'a présent dans la clandestinité de l'underground , rencontre un réel succès médiatique et un engouement populaire . mais j'ai parfois le sentiment que c'est toute une génération qui part les chemins de l'art , essaye de se prouver à elle même qu'elle n'est pas encore morte . cherchant le vertige et le risque et disant "tout sauf rien à foutre" et à la limite , le "delire plutôt que le néant du désert" . je sais pourtant bien que les approches célébrant le temps des tribus et le nomades (maffessoli ) manque crellement de recul historiques que l'ennui n'est pas seulement contre révolutionnaire mais je crois qu'il serait malhonnète de ne pas tenir compte de cette réalité tribale qui travail bien plus que la jeunesse et les villes . par exemple il y a aussi le réelle succès que rencontre l'hédonisme . je n'aime pas beaucoup michel onfray mais son invitation à créer des micro communautés jubilatoire marche plutot bien au box office de la philosophie , c'est à dire qu'il y a une réelle aspiration .

  30. Qu'il y ait une aspiration à l'hédonisme dans nos sociétés marchandes, ce n'est pas un scoop ! Ce qui n'a pas de succès c'est la réalisation de l'hédonisme, c'est un fait, ce n'est pas la loi qui nous empêche de jouir. La réalité de la liberté, avec laquelle il faut compter, c'est l'échec de ses rêves, c'est de devoir bâtir sur du sable... La transgression, c'est le plus désirable effectivement, le plus facile, il ne faut pas s'en priver mais cela fait partie de ce que la répétition use jusqu'à la corde pour se pendre. C'est sûrement ce qui s'appelle devenir vieux par rapport à l'enthousiasme de la jeunesse qui tombe dans tous les tableaux de l'époque ! A vrai dire l'enthousiasme des débuts retombe très vite dans la désunion et le ressentiment. Il faut faire avec cette réalité pas essayer de rejouer notre jeunesse enjolivée. Ce n'est pas ce que je pense, c'est comme ça que ça se passe et j'essaie de m'en tirer dignement sans renoncer à l'essentiel avec la volonté d'aller aussi loin que l'époque peut le permettre, dans la pratique et sans me payer de mots. Je ne peux dire que j'y arrive, souvent en-deça de la main, inégal à la tâche, au bout du rouleau...

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