Les salauds au pouvoir

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C'est une tendance bien connue dans les moments de crise de rechercher des boucs émissaires et de rendre les pauvres et précaires responsables de leur propre sort. La montée du chômage qui en fait un phénomène social, macro-économique, le rend aussi forcément trop lourd à financer, charge qu'on va imputer aux chômeurs eux-mêmes, devenus une surpopulation indésirable dont on aimerait bien se débarrasser. Il y a toute une tradition anglo-saxonne complètement décomplexée qui va dans ce sens, de Malthus et Spencer à Thatcher et ses successeurs qui en rajoutent sur la culpabilisation des pauvres même si on ne va plus jusqu'à prôner ouvertement leur élimination au nom de la science lugubre que serait l'économie ! Chez nous, cette brutalité était moins bien admise par notre égalitarisme républicain, restant l'apanage de l'extrême-droite ou de petits salauds ambitieux genre Wauquiez. C'est pourquoi il faut s'alarmer de voir ces discours repris par un gouvernement, censé de plus être de gauche !

Certes, il n'y a là rien de neuf, dira-t-on. Les pauvres ont constamment été soumis à l'état d'exception, l'oppression et le mépris : ce sont les perdants, les losers, une race inférieure que les winners, très contents d'eux-mêmes et de leur réussite sociale, contemplent de haut. Il faudrait bien faire changer la honte de camp, rendre plus honteux ces véritables salauds qui nous accablent de leur morgue et de leurs petits esprits mais, par définition, on ne pourra jamais mettre les perdants (prolétariat) au pouvoir. La seule force des pauvres est le nombre - ce qui ne veut pas dire hélas qu'il suffirait de faire nombre pour ne pas se croire du côté des dominants, mettre encore plus salauds au pouvoir et chercher d'autres boucs émissaires : juifs, musulmans, immigrés, étrangers. Le ressentiment peut être ravageur, mieux vaudrait ne pas l'attiser par la haine des chômeurs.

Si je reviens avec retard sur les menaces de François Rebsamen envers les chômeurs, c'est que je trouve qu'il s'en est un peu trop bien tiré et n'a pas eu le retour de bâton mérité, qu'on a été finalement bien trop indulgent avec cette raclure qui met en jeu des vies, ses propos ayant été minorés voire justifiés alors que ce sont ceux d'un minable qui fait porter aux plus faibles le poids de ses propres échecs. C'est tout de même un peu fort un gouvernement qui enfonce le pays dans la crise, entretient un chômage de masse et accuse les chômeurs ensuite de ne pas rechercher assez activement un emploi ! Il y a de quoi rendre fou. Le problème n'est pas, comme le prétend bêtement Dominique Schnapper, de contrôler la fraude et les droits des chômeurs comme tout autre droit, mais bien de vouloir faire dépendre l'indemnisation de la recherche active d'un emploi introuvable.

Le problème ce n'est pas seulement qu'il n'y a rien de plus cruel que d'accuser ceux dont personne ne veut et qui ne reçoivent que des lettres de refus, quand on daigne leur répondre, mais que cela perpétue l'incroyable illusion qu'on pourrait passer son temps à chercher un travail qu'il n'y a pas ! Au début, bien sûr, même si c'est en prenant son temps pour reprendre son souffle, on suit les pistes qui nous semblent les plus naturelles et favorables, on sollicite ses réseaux, on consulte quelques sites voire quelques associations quand on ne tombe pas dans le panneau des formations à la recherche d'emploi... Mais au bout de quelques mois ou années, on finit forcément par s'épuiser à un moment ou un autre, ne sachant plus où chercher, ayant besoin sans doute d'une aide, de propositions adaptées mais surtout qu'il y ait moins de chômage et certainement pas de sanctions supprimant un revenu vital ! Des contrôleurs prétendent qu'en leur foutant une belle peur ça "redynamise" les chômeurs découragés, mais pour combien de temps ? On peut toujours consulter chaque matin les rares offres de pôle emploi, assaillies de lettres de candidatures dans lesquelles on sait bien que la nôtre fera pâle figure (trop jeune, trop vieux, trop diplômé, pas assez, trop atypique ou basané, etc.). Cela ne sert à rien qu'à vous déprimer un peu plus à chaque fois. Rien là dedans, en tout cas, qui crée un seul emploi et puisse faire diminuer le nombre de chômeurs en dehors de radiations arbitraires qui sont parfois de véritables condamnations à mort, absolument inacceptables !

Il y a des mesures urgentes à prendre, pour favoriser notamment le travail autonome et trouver un débouché local à des compétences inemployées mais il faut être un véritable salaud pour vouloir priver des gens de tout revenu sous prétexte que les politiques de rigueur européennes ont détruit tous les emplois disponibles. C'est cette réalité que ce gouvernement ne veut pas reconnaître : que sa politique produit un chômage de masse - dont il est le seul coupable, pas les chômeurs qui en sont les victimes - et qu'on ne peut laisser personne sans revenu, ce qui est à la fois inhumain et ne ferait qu'aggraver la crise. Si on avait des hommes politiques à la hauteur de notre situation, au lieu de nous conduire au désastre qui s'annonce, de se défausser sur les plus faibles de leur propre incompétence, faire mine de hausser le ton devant une réalité qui leur échappe et surtout d'entretenir de faux espoirs, comme si le chômage dépendait de notre bonne volonté, c'est bien plutôt la nécessité d'une garantie du revenu pour tous à laquelle il faudrait se résoudre ainsi qu'à un véritable service de l'emploi qui ne laisse pas les gens se débrouiller tout seuls mais les aide à valoriser leurs compétences et accéder au travail autonome. La gauche, hélas, est moribonde, gangrénée par la tête, et laisse déjà place au pire...

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105 réflexions au sujet de “Les salauds au pouvoir”

  1. Ces types n'ont jamais été au chômage, sont blindés de thunes et n'ont donc aucune connaissance concrète de tous les détails et grains de sable qui grippent le chômeur.

    Quand bien même un chômeur serait prêt à la mobilité géographique, souvent il faut qu'il paye les frais de déplacement pour entretiens d'embauche, parfois bidons car le budget prévu a été annulé juste après l'entretien, ou parce que il s'agit de renseignement économique dans le cas des cadres pour avoir quelques infos sur la concurrence. Une loi devrait être votée pour que les déplacements soient tout ou en partie pris en charge par le recruteur, c'est trop facile de faire déplacer les gens qui sont au taquet à leurs frais et/ou aux frais de Pôle Emploi pour rien.

    Attali, dont il faut faire le tri dans les propos, n'a pas tort dans le CSOJ dernier de dénoncer la gabegie de la formation continue qui ne va presque pas vers les chômeurs. A rajouter une politique économique qui détruit l'emploi, le tableau est complet.

  2. Jean,

    Bien sûr personne n'a envie de voter pour des "salauds", des "raclures" et autres "minables". On l'a du reste déjà vérifié lors des élections municipales et européennes. On le confirmera l'année prochaine. Et en 2017 Hollande — ou un autre candidat fauxcialiste — se prendra un coup de pied au cul à fracturer le bassin. On se donnera au moins ce plaisir-là : leur foutre encore une branlée mémorable.

    Notre problème — et c'est le mot oublié dans ton billet — est qu'ils sont aussi très cons. Mais vraiment très très cons. Bêtes à manger du foin. Sots que c'est pas permis de l'être autant. Ils ne comprennent pas nos leçons. Ils n'ont rien appris de la déculottée de Jospin en 2002. Rien appris de la branlée de Royal en 2007. On peut leur faire porter le bonnet d'âne, leur taper sur les doigts avec une règle, leur foutre des claques, leur faire porter un sabot autour du cou : ils sont cons. Désespérément cons.

    Quand j'étais gosse, les chiens comme ça, on les donnait à l'équarrisseur quand il venait prendre vaches ou cochons crevés. Mais qu'est-ce qu'on peut en faire aujourd'hui ? Oui, je sais mais c'est cruel et je ne suis pas partisan de la peine capitale. Mais pourtant il serait envisageable de les condamner au RSA à vie dans un souplex de 17 m2, non chauffé, orienté plein nord

    • Notre problème — et c'est le mot oublié dans ton billet — est qu'ils sont aussi très cons. Mais vraiment très très cons. Bêtes à manger du foin. Sots que c'est pas permis de l'être autant. Ils ne comprennent pas nos leçons. Ils n'ont rien appris de la déculottée de Jospin en 2002. Rien appris de la branlée de Royal en 2007. On peut leur faire porter le bonnet d'âne, leur taper sur les doigts avec une règle, leur foutre des claques, leur faire porter un sabot autour du cou : ils sont cons. Désespérément cons.

      Ben non, ce serait moindre mal s'ils n'étaient que cons. En fait, ils font juste leur boulot d'administrateurs d'une colonie US. Et vraisemblablement on changera d'administrateurs, mais les autres seront appointés par le même employeur.

      • Bah, on est d'accord. Moi, je me plaçais juste de leur côté en regardant d'abord leur propre intérêt : l'électeur va les virer sans ménagement. Et si les plus en vue vont se reclasser sans souci dans les fauteuils confortables de multinationales, il y aura beaucoup de petites mains qui vont goûter les charmes des petits matins blêmes de Pôle-(pas-d')Emploi...

      • Que ce soit gauche ou droite les véritables patrons sont la BCE, Wall Street, les banquiers et industriels qui se gavent de dividendes.
        Vous pensez vraiment que le courant droite gauche signifie encore quelque chose ? Allez vite vite réviser vos notions de scrutins en lisant l'excellente étude réalisée par Condorcet sur les différents mode de scrutions ... vous serez sidérés et en même temps peu surpris.

        http://personal.lse.ac.uk/blanchen/research/Paradoxes_de_vote_en_France_v-ecran.pdf

        Belle fin e journée à vous.

        Eric

  3. Plutôt que salauds, je pense que ces sous fifres sont idiots au point de se tirer une balle dans le pied. Y a qu'à voir Cahuzac ou Thevenoud qui fraudent le fisc tout en étant affectés à des fonctions relevant du fisc, c'est ubuesque, du pur Monty Python. Ca me rappelle un de mes oncles militant du PS, pété de pognon, qui fraudait le fisc, avec l'assentiment du fisc, tout en rackettant des petits commerçants ou petits patrons dans une tradition mafieuse impeccable de style.

    Concernant Hollande, je sais pas trop, peut être qu'il joue la montre contre Merkel et attend un renversement de conjoncture des opinions BCE, Renzi, indicateurs éco... pour sortir du bois au moment opportun.

  4. Ils sont très certainement plus cons qu'ils ne le croient mais le terme de salaud fait référence à ceux que Sartre appelait ainsi, d'abdiquer leur liberté pour se réfugier derrière leur rôle social et leurs déterminismes avec en plus ici cette connotation d'enfoncer les autres et de céder à son narcissisme, croire ce qui arrange plutôt que reconnaître son incompétence, et avoir une attitude complètement odieuse tout en se croyant le meilleur des hommes, ne faisant qu'appliquer la stricte justice à ce qu'ils prétendent, tout en se déchargeant de toute responsabilité morale envers ceux qu'on condamne ainsi.

    • Ils s'en lavent les mains, c'est nullard, mais le phénomène est là incontournable. Un hermétisme cognitif indécrottable et il faut faire avec, il y n'y a me semble t il presque aucune chance qu'ils changent de point de vue tant qu'ils seront dans les ors républicains. Seule la bête perte de tout mandat ou une condamnation en justice peut éventuellement les faire se remettre en cause. Et encore...

    • Oui, ce n'est certainement pas ce que j'ai écrit de plus indispensable mais derrière la dénonciation de la brutalité des élites, je voulais surtout réfuter l'idée qu'on pourrait passer son temps à chercher du travail une fois qu'on a constaté qu'il n'y en avait pas, ce que je n'ai vu affirmé nulle part alors que c'est la réalité vécue par des millions de gens.

    • On m’écrivait il y a peu : « Rien de très nouveau en soi sous le soleil de Satan! On serre toujours plus la vis en ce qui concerne les pauvres (cf Le fichier des allocataires) et les classes moyennes. Mais les riches et ceux du CAC 40 vont encore une fois de plus s'en mettre plein les poches! La crise profite décidément bien à quelques uns, les mêmes comme toujours d'ailleurs! Pourtant des solutions radicales s'imposeraient comme taxer les plus-values financières, les mouvements financiers spéculatifs, obliger les entreprises du cac 40 de s'acquitter de ce qu'elles doivent à l'état, revoir l'assiette fiscale de A à Z, lancer des grands travaux (cf Keynes), réindustrialiser sérieusement le pays et surtout relancer le pouvoir d'achat des plus pauvres et des classes moyennes. La rigueur va hélas ralentir encore plus la croissance, créer plus de chômage et donc plus de pauvres! Mais on préfère servir les intérêts particuliers de quelques uns au lieu de s'occuper de l'intérêt général!!! Bref on va reservir une soupe infecte à ce qui fait les forces vives d'une nation, à savoir ses ouvriers, employés et petits cadres. Tout ça pour enrichir des actionnaires qui, après avoir fait main basse sur l'argent et la richesse commune, rachètent avec ce même argent sur lequel ils ont spéculé sans vergogne, via des produits financiers toxiques, massivement de l'or, des biens immobiliers et dieu sait quoi encore, au lieu d'investir massivement dans les entreprises et donc de relancer la croissance! Moi je mange plus de cette soupe et on me fera pas avaler leurs couleuvres. Le grand casse du millénaire se poursuit et on laisse faire! Réveillez vous, merde! »

      Oui les inégalités explosent ce qui signe la fin d’une civilisation, il faut interdire la spéculation et le fait que l’économie mondiale dépende d’un casino, où les riches s’accaparent les richesses comme jamais vu dans l’histoire humaine... la taxation de la finance est l’idée de Yann moulier boutang, c’est vers cela qu’on va car on ne supprimera pas la finance folle (qui peut tout s’acheter) du jour au lendemain... Ce qui est sûr, comme en 1945, la société est un champ de ruine et la vieille Europe une vallée de larmes : ce n’est pas le travail qui manque, bien au contraire … c'est vrai, il y a le feu et personne ne réagit !! L’automne risque d'être chaotique ... sinon super ce petit déroulé didactique DJ baca...
      Et OUI je trouve que la situation est bien tendue!!! Irréelle, intenable, une atmosphère de fin du monde

      • cela dit la vrai richesse ce n'est peut être pas les entreprises ( pas toutes ) mais surtout les gens , les précaires et les fauchés ceux qui bien entendu vont le plus morfler ... et c'est un non sens économique criminelle et une ânerie nationale de premier plan que de penser que la crise , comme c'est cyclique il suffit t'attendre la reprise ( qui visiblement ne reviendra pas , en tout cas pas sans nous et notre intervention populaire.. ceci pour sortir de l'impasse suicidaire dans laquelle nous mettent les marchés et les maffias financières ).... à nous de montrer les crocs et de mettre la patate dans la gueule à tous leurs cerbères et commissaires , et faire la nique aux convocations et autres salles factures !!

  5. Ce fut une époque où seule la perspective d'un avenir d'épouvante tempérait la tristesse du présent.

    Brüning lui-même n'avait rien d'autre à offrir au pays que la misère, la morosité, la limitation de la liberté et l'assurance qu'on ne pouvait rien obtenir de mieux. Tout au plus pouvait-il exhorter au stoïcisme. Mais il-était trop austère de nature pour que même cette exhortation fût convaincante. Il ne lança à la nation ni une grande idée, ni un appel. Il ne faisait que la recouvrir d'une ombre chagrine.

    http://enpassant-englanant.blogspot.fr/2011/03/en-lisant-sebastian-haffner-histoire.html

  6. C’est l’histoire d’un plein emploi qui ne reviendra pas et de l’action de son fantôme sur les vies aujourd’hui.

    C’est l’histoire d’étranges institutions pour lesquelles ce plein emploi qui n’existe pas vaut à la fois boussole et centre de gravité ; l’histoire d’un Pôle emploi qui désigne les chômeurs comme des « candidats ». Candidats à quoi ? À l’emploi bien sûr. Et tout ce qui excède ce rôle assigné sera susceptible de sanction, de mépris, d’éviction, de correction, de procès.

    C’est l’histoire de la participation obligée à un jeu délétère dont personne ne connait les règles et celle d’un Pôle emploi qui, pour mener ce jeu, inculquer les comportement concurrentiels que chacun devrait reproduire pour décrocher la timballe tant espérée, endosse les rôles nécessaires au déploiement d’un théâtre si quotidien que les tragédies qui s’y jouent passent d’ordinaire inaperçues ; l’histoire d’un juge des comportements des chômeurs qui est aussi l’un des bourreaux de leurs déviances, d’un arbitre des « droits » de ses sujets qui organise dans le même temps l’existence de ses candidats, de l’un des animateurs d’une disponibilité à l’exploitation que l’on voudrait sans bornes et incarnée en chacun ; l’histoire d’un Pôle emploi, agent instructeur d’un procès sans fin, toujours recommencé, sauf à disparaître, radié, « découragé » - comme ils le disent de ceux qui ne s’inscrivent ou ne pointent plus faute d’y trouver un quelconque intérêt (plus de la moitié des chômeurs, intermittents compris, sont non indemnisés) - ou employé, c’est-à-dire contrôlé par d’autres instances de la société-entreprise.

    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5925

  7. Bonjour, vous dites : On peut toujours consulter chaque matin les rares offres de pôle emploi, assaillies de lettres de candidatures dans lesquelles on sait bien que la nôtre fera pâle figure (trop jeune, trop vieux, trop diplômé, pas assez, trop atypique ou basané, etc.).
    Et le pire vient une fois embaucher pour un temps limité car à ce jour c'est Tjrs pour un temps limité.
    Déjà le matin tu as des km à faire " pas payé" avec des limitations à 30 km/h, des dos d'anes, les ronds points, des feux rouges, des radars qui te ralentissent et te bouffent du temps et tout le monde connaît l'adage le temps C 2 etc. Bref tu arrives et là tu te retrouves avec 5 personnes il y a 4 chefs et un chefaillon qui te gueulent dessus déjà c'est nul tu as envie de courir prendre l'air, etc...rebref c'est simple il y a toute la société à revoir. Plaisir.

  8. Malheureusement cet article ne dit rien de l'inquiétante continuité socialiste en matière de flicage et de stigmatisation des chômeurs... Les déclarations de l'abject Rebsamen énoncent une fois de plus le diktat de l'idéologie du travail (le travail est une forme majeure du contrôle sur le temps).

    Lorsqu’il était 1er ministre, Pierre Mauroy avait dès 1983 dénoncé les « faux chômeurs » ; en 1992, Martine Aubry, ministre de l’emploi avait fait adopter une loi sur le contrôle des chômeurs qui inversait la charge de la preuve ; Jospin premier ministre avait, en 1998, répondu aux mouvements de chômeurs et précaires préférer « une société de travail à l’assistance » (reniant ainsi toute valeur de solidarité, ouvrant la voie au « travailler plus » pour gagner rien de N.S, voir [À gauche poubelle, précaires rebelles], Collectif d’Agitation pour un Revenu Garanti Optimal (CARGO), mai 1998).

    Mettre l’entreprise au pinacle, c’est attaquer les salariés. C’est signifier que l’on ne doit plus les considérer comme des producteurs de richesse mais comme des « coûts ». Le chômeur, même non indemnisé, est la figure paradigmatique de cette dépense indue, à réduire, etc. Cette « valorisation » de l’entreprise a été mise en oeuvre dès les années 80, voir [Trois critiques des années Mitterrand].

    Il s’agit de faire accepter n’importe quel emploi à n’importe quelle conditions, voir [Alerte ! Pôle emploi commence à radier pour refus d’Offre Raisonnable d’Emploi].

    Quelques recettes pour passer au travers Pôle emploi : [déjouer les convocs pour « entretien téléphonique », les radiations, le suivi....]. Mais la solution reine, c’est la lutte, car c’est en s’abstenant de lutter que l’on encourage les oligarques en charge de la gestion de la population à aller si loin, au bout de ce qu’ils peuvent. Et nous, que ne pourrions nous pas ?

    Encore faut-il se faire une idée un tant soit peu précise dece à quoi nous sommes confrontés. Ce qui leur tient lieu d'objectif en la matière, c'est le "modèle allemand", et ses 25% de travailleurs pauvres (voir [Dette et austérité, le modèle allemand du plein emploi précaire].

    Anyway, comme tous les travaux historiques, tant qu'il y aura des pauvres, et quelques aides ou droits, il y aura stigmatisation des "imméritants". Tant qu'il y aura un marché de l'emploi, il y aura un contrôle administratif et moral sur la "disponibilité" du vivier.

    L'état providence est le butin dune guerre civile. Et dans cette guerre l'état néolibéral ne joue pas seulement la "guerre de classe" mais bien une guerre contre la population.

    • Sur l'état providence, lire le livre d'Eloi Laurent "Le bel avenir de l'état providence" dans lequel il démontre que l'état providence est une condition du développement et non pas une charge, donc plutôt une solution qu'un problème. Ce lieu commun économique qui nous fait considérer l'état comme un ménage plutôt que comme un régulateur fait décidément beaucoup de dégâts (C'est sans doute une des conséquences d'une certaine conception libérale -Hayek?-qui a diffusé profondément au point de devenir lieu commun).

    • Oui, ce petit billet d'humeur ne dit pas tout (d'autres articles auraient mérité plus d'attention que celui-là!). Je n'ignore pas non plus les saloperies des "socialistes" depuis toujours ni que ce n'est en rien une nouveauté d'exiger des preuves de la recherche d'emploi ("rien de neuf" ai-je dit), c'est juste que la culpabilisation des chômeurs s'aggrave en même temps que le chômage mais surtout qu'il n'y a plus d'emploi qu'on puisse rechercher.

      Comme le l'ai déjà répondu à un commentaire, ce qui m'a fait écrire ce texte, c'est surtout cette évidence trop méconnue qu'on ne peut passer son temps à chercher un emploi qui n'existe pas, ce que pour ma part je n'ai jamais entendu (il ne s'agit pas de l'idéologie du travail, ni du contrôle en général ni de refuser une "offre raisonnable d'emploi", ni de l'assistance, etc.) et que semble en tout cas ignorer Dominique Schnapper pourtant supposée avoir étudié la question (il y en a sûrement d'autres qui ont déjà constaté ce fait mais ce n'est pas ce qui a été débattu en réponse à Rebsamen). Il ne s'agit pas de tout confondre ni de répéter toujours la même chose depuis plus de 20 ans !

      Pour ce qui est de la lutte, il faut certainement y participer quand il y a un mouvement comme celui des chômeurs en 1998 (dans mes interventions au RdB je me trompe en le datant de 1997 ! C'est l'âge...) mais je ne vois pas bien ce qu'apporte d'être un militant professionnel à temps complet. Plus généralement, je ne crois pas du tout que nos droits et le prétendu "Etat providence" soient le résultat des luttes ouvrières comme on le croit un peu trop alors qu'il a été plus ou moins généralisé dans d'autres pays par des gouvernements (Beveridge, Bismarck, etc). En bon matérialiste, je suis plutôt persuadé que c'est leur effet positif (keynésien) sur l'économie qui les a imposé (sur la reproduction, notamment pour avoir de bons soldats, ce qui préoccupait les anglais), en quoi je rejoins effectivement Eloi Laurent. Dans "Salaire, prix, profit" Marx montre que la lutte ne paie qu'à booster l'économie et ne pas trop rogner sur les profits, la marge de manoeuvre étant très étroite (si le rapport de force détermine prix et salaire, c'est dans une fourchette très contrainte matériellement). Je ne compte donc pas tant sur notre combattivité (que je souhaiterais bien sûr plus forte) mais sur la pression des faits : ce sont les transformations du système de production qui imposeront une garantie du revenu, ce que les nullards du gouvernement ne semblent pas savoir et qui, en attendant, ne fait qu'étendre la souffrance sociale et les tentations extrémistes.

  9. Zut, j'ai du louper quelque chose dans l'incertain des liens :

    À gauche poubelle, précaires rebelles
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5374

    Trois critiques des années Mitterrand
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5633

    Alerte ! Pôle emploi commence à radier pour refus d’Offre Raisonnable d’Emploi
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5670

    Pôle emploi : déjouer les convocs pour « entretien téléphonique », les radiations, le suivi...
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=5630

    Dette et austérité, le modèle allemand du plein emploi précaire
    http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=6023

  10. Sans culture et procédure de sélection particulière, on sélectionne plutôt les salauds comme leaders (les +/- comme position de vie en analyse transactionnelle, c'est à dire ceux qui ont une forte estime d'eux-même et une faible estime des autres).
    J'ai maintenant un recul de deux années d'expérience qui me montre que la sociocratie d'Endenburg aboutit à une sélection nettement plus probable de +/+ (bonne estime d'eux-même équilibrée avec une bonne estime des autres), cette sélection s'accompagne d'un contrôle, d'une régulation des ambitions des +/- de s'approprier les groupes.

    Il y a des cultures qui mettent plus en avant la relation que l'entité (l'individu). C'est par exemple le cas de l'animisme. Il me semble que ces cultures sont un peu mieux armées pour résister aux ambitions des salauds (je ne milite pas pour l'animisme, ce qui n'aurait aucun sens, mais il est possible que le développement de la culture écologique redonne plus de poids aux relations).

    • Je parle dans la revue des sciences du fait qu'on récompense la confiance en soi plus que les qualités réelles et que la confiance en soi n'est pas forcément une qualité, en tout cas pas en sciences. C'est bien une logique de système qui sélectionne les salauds mais, pitié, pas l'analyse transactionnelle et sa positivité à deux balles !

  11. Juste une petite remarque : « les loosers » s'écrit plutôt « les losers » du verbe « To lose », perdre plutôt que du verbe « To loose », desserré, relâché. C'est une confusion fréquente même chez les anglophones dont l'anglais et la langue maternelle.

  12. À Harvard, l'écart de richesse aux États-Unis jugé "pas tenable"
    http://www.latribune.fr/depeches/reuters/2014-09-08/a-harvard-l-ecart-de-richesse-aux-etats-unis-juge-pas-tenable.html

    "Des dirigeants à courte vue pourraient se satisfaire d'une économie dont les entreprises gagnent sur les marchés mondiaux sans améliorer les conditions de vie aux Etats-Unis. Mais tout dirigeant ayant une vision à long terme sait que l'économie joue une part essentielle dans la prospérité de tout Américain"

    Ils comptent un peu trop sur la formation et les infrastructures, n'allant quand même pas jusqu'au partage de la richesse ! Du moins on semble découvrir que la paupérisation des travailleurs n'est pas bonne économiquement comme les Nobles ont découvert avec le tableau économique de Quesnay leur dépendance des paysans et des producteurs. Ce n'est donc pas charité ni progressisme mais conscience de nos interdépendances dans un système de production.

        • A part inconditionnalité, qui est un point fondamental, et qui effectivement saperait les bases même de diverses modalités du contrôle et de la stigmatisation des pauvres, etc., je ne suis pas sûr de bien comprendre ce qu'est ce revenu de base...

          La plupart des montants évoqués me paraissent trop faibles, comment refuser l'emploi dégradé pour des "productions" inutiles voire nuisibles ?
          quelles ont les forces sociales qui seraient en mesure d'imposer la réforme fiscale nécessaire à alors qu'il n'y a actuellement dans le capitalisme aucune tendance réformiste (sans doute faute de positions révolutionnaires réellement existantes pour y contraindre) ? Toutes les réformes que nous connaissons sont en fait des "contre réformes, etc.

          • Mon article précédent s'appelle "Un revenu de base nécessaire mais pas suffisant". Le revenu de base, en soi, n'a pas grand chose de progressiste car il n'a aucune chance d'être suffisant, ce qui serait pourtant indispensable. J'en ai été un opposant tant que j'ai cru qu'on pouvait avoir mieux mais je crois maintenant que ce sera ça ou rien.

            Le revenu de base est une mesure libérale qui n'a pas besoin d'un fort soutien populaire mais seulement de prouver sa pertinence économique. Il s'imposera (ou l'impôt négatif) pour réduire les salaires nominaux tout en augmentant les revenus des salariés pour pouvoir faire face aux pays à bas salaire tout en maintenant le niveau de vie local, dans une logique différente du fordisme dont le cercle vertueux est cassé par les importations massives.

            Outre la diminution du chômage, qui dans le système actuel est une calamité, les raisons de soutenir un revenu de base, c'est de pouvoir l'utiliser pour sortir du salariat et subventionner le travail autonome mais cela exige des institutions complémentaires sans lesquels le revenu de base n'a rien d'alternatif, ce que j'appelle des coopératives municipales mais dont d'autres associations locales peuvent remplir la fonction.

            Le principe, c'est que, dès lors qu'on ne peut avoir l'idéal (un revenu suffisant) on peut profiter d'un revenu de base pour avoir un revenu suffisant en le complétant avec du travail choisi, autonome, valorisant mais pour cela il faut donner les moyens à tous de valoriser leurs compétences sans penser que ça se fait tout seul. On cumule ainsi une sécurité minimale avec le plaisir d'un travail qu'on aime mais qui ne rapporte pas assez, tout en pouvant être relativement suffisant avec le complément d'un revenu de base.

            Cette partie là ne se fera pas toute seule, n'intéressant pas les libéraux, mais c'est la partie cruciale pour passer à un nouveau système de production, post-industriel (post-salarial), qui est certes moins flamboyant (et même un peu restrictif) mais plus adapté à notre avenir avec le monde du numérique et les contraintes écologiques à l'époque du pic de population.

            Il y a mille raisons de vouloir plus mais c'est ce qui me semble possible dans notre mutation actuelle. Les conditions politiques n'y sont cependant pas du tout, plutôt orientées vers le pire en un premier temps du moins. Le temps de l'histoire est trop long pour nous qui quelquefois s'accélère soudain.

  13. Simplement et brutalement dit. C'est bien ! Que reste-t-il comme choix si ce n'est la rupture. Je ne vois pas comment un système si bien huilé pour laisser les "pauvres" à leur place (payer et crever) permettrait une quelconque évolution selon ses propres règles. Sans être d'un naturel particulièrement pessimiste, je ne crois pas que l'on puisse changer quoi que soit en passant par les urnes...

  14. bonjour,
    avez vous remarquez le "déroulé",tout ça est cohérent dans l'orientation néo libéral de ce gouvernement,des lois votées contre les travailleurs et par conséquent contre les chomeurs-ses;
    les cadeaux fait au patronat....énorme et qui pleure en plus parce que pas assez;
    alors quoi?vous croyez naîvement que normal 1er attend ce que la commission lui laisse une marche de manoeuvre?pathétique...
    la réalité est que ce trou du cul n'a aucune vision politique,la réalité est qu'il a signé des accords au moment de sa prise de fonction qui jamais n'iront dans le sens d'une relance de l'activité,il s'est simplement couché devant la doxa libérale européenne.pour nous "les sans dents" le problème est résolu,de l'emploi il n'y aura pas car bosser pour des entreprises à courte vue dont la véritable activité est de faire de la marge à 2 chiffres à très court terme,récupérer un max de subventions et ensuite se plaindre du coût du travail,ça c'est la réalité...
    Par pîtié ne dénaturez pas le mot socialiste,appelez les solfériniens,oligarques,ce que vous voulez mais pas avec ce mot dont le sens que lui a donné Jaures ne peut s'attribuer à ces gens là...
    actuellement un gars qui a un emploi est un chômeur en puissance car quid de l'évolution de carrière,quid de ses conditions de travail et à la merci de décision arbitraire,trop vieux,pas assez performant,etc...la grosse pression quoi...
    vous avez raison de dire que pôle emploi nous prend pour des putes,déplacement géographique,emploi précaire à la petite semaine,salaire dérisoire et je pense que l'être humain que l'on désigne comme chomeur a un cerveau,qu'il a une acuité à ne pas se laisser faire et que forcement il n'acceptera pas tout et il a raison...
    actuellement j'en ai un d'emploi avec le système de management que l'on connait mais si pour une raison ou une autre je sois viré,je peux vous dire que ce sera la guerre,d'une manière ou d'une autre le combat pourrais devenir moins abstrait et je serais sans pitié...
    en 2012 une autre alternative était proposé mais où étaient-ils donc ceux qui pleurent leur maman maintenant,où étaient-ils lors des marches contre l'austérité,contre l'ANI,le CICE,TAFTA,TISA etc...
    ha ouais c'est vrai fallait surtout pas élever la voix,tous ça était...trop utopique n'est-ce-pas?tous ça ne pouvais se réaliser et bien eux de leurs côté le font...
    alors fort bien de dénoncer mais faut s'engager maintenant, ne pas sortir des absurdités du style "les prolétaires ne pourront jamais être représenté" ce qui est faux bien évidemment...
    tout cela est lié mais la bataille sera rude pour effectuer une désintox de tout ce merdier,demain il faudra bien une politique de rupture et pour cela j'ai envie de dire sans cynisme:"au boulot"

    • C'est pourtant la triste vérité que les dominants ne sont jamais des dominés et qu'une démocratie transparente, sans manipulations ni groupes de pression n'est qu'un fantasme irréel. Les militants les plus radicaux ne sont d'ailleurs pas les derniers à truquer les votes pour la bonne cause (on le voit dans les élections internes aux partis, tout comme on l'a vu à ATTAC). Répandre la croyance dans une démocratie absolue (comme devaient l'être les soviets, démocratie des conseils), c'est faciliter l'usurpation par des démagogues et un pouvoir autoritaire sans réplique car prétendu absolument légitime. La réalité est bien plus sordide et donne lieu à d’innombrables luttes et contestations, plutôt régime de la discussion publique qui est bien le pire des régimes à l'exclusion de tous les autres.

      Surtout, au lieu de croire que la domination explique tout (il y a toujours eu domination, y compris dans les régimes "socialistes", donc elle n'explique rien), il faut essayer de comprendre les processus matériels en jeu, les forces en présence, car les gouvernants ne font absolument pas ce qu'ils veulent mais presque toujours ce qu'ils sont forcés de faire (au moins de leur point de vue). Notre intervention est indispensable mais non pas pour imposer une prétendue "volonté du peuple" qui n'existe pas, seulement pour dénoncer les souffrances ou les ratés et accélérer des adaptations nécessaires, rôle essentiel de peser sur nos dirigeants contre leurs autres contraintes, tout comme de rétablir l'équilibre entre travail et capital, sans qu'on puisse en attendre des miracles (mais dès qu'on baisse la garde, on le paie très cher). Des alternatives plus ambitieuses peuvent se construire mais en partant du local et de sa dure réalité pas de formules magiques ni par l'expulsion de ceux qui ne pensent pas comme nous.

      Actuellement, il n'y a vraiment rien de bon à attendre de notre démocratie, les prolétaires se faisant représenter par une grande bourgeoise qui leur promet de tout casser et nous débarrasser des méchants (Europe, Banquiers, étrangers).

  15. "C'est une tendance bien connue dans les moments de crise de rechercher des boucs émissaires et de rendre les pauvres et précaires responsables de leur propre sort"
    Une forte tendance des moments de crise est aussi d'attendre des sauveurs. Le temps de crise favorise les profils opportunistes, ceux qui savent orienter cette recherche effrénée de solution vers des boucs émissaires assez crédibles, ceux qui savent jouer de la peur de l'exclusion du groupe et de la peur de porter atteinte au groupe (tout ce qui se transforme facilement en culpabilité). Ceux qui mobilisent des alternatives du style "bons et des mauvais travailleurs", des "bons et des mauvais magistrats", "des bons et des mauvais enseignants" ... plus souvent qu'à leur tour font partie de ces opportunistes qu'il faut absolument fuir!

    • Oui, on est prêt à croire n'importe quel tribun qui prétend parler au nom du peuple, que les autres on va les chasser du pouvoir et que voter pour moi, c'est voter pour vous, qu'on va rétablir la démocratie et pas confisquer le pouvoir cette fois mais le restituer "à tous", yes we can, etc. Cette figure du sauveur n'a rien de nouveau, on a vu comme Heidegger s'y croyait. Il n'est certes pas supportable de penser qu'il n'y a pas de solution simple, un retour à l'ordre et à la justice se limitant à se débarrasser des salauds qui nous gouvernent si mal pour que tout s'arrange au mieux de nos intérêts. La solution est plus concrète et locale, à se coltiner le réel avec toutes ses contraintes mais là-dessus le "peuple" est aussi divisé et indécis que les élites et les foules préfèrent croire aux paroles magiques qui les enflamment, plutôt aller au pire que de ne rien faire. Il n'y a pas de sagesse des foules ni de bon sens des peuples, la connerie est bien universelle n'étant pas réservée aux salauds, hélas...

      J'ai souvent relevé le contraste des années 1930 entre les prétentions révolutionnaires de nous délivrer de toute aliénation et la catastrophe qui se préparait d'une aliénation bien plus réelle celle-là. Mais comment empêcher la montée du nazisme dans ces années là ? Personne n'y a réussi, c'est un fait, devant cette déferlante irrésistible. Il y a des périodes où il semble qu'on ne puisse rien faire. Certains s'en sont suicidés mais la suite leur a donné tort car ceux qui triomphent aujourd'hui peuvent être tout aussi vite renvoyés aux poubelles de l'histoire (car le réel résiste à l'idéologie), mais en tout cas, il n'y a aucune raison de peindre notre avenir en rose d'une VIè république démocratique, socialiste et révolutionnaire...

        • Tout le problème est là, on ne peut pas se mettre d'accord, sauf avec notre propre groupe ou parti (et encore), chacun tenant à ses convictions inébranlables.

          Par exemple, il est impensable que les syndicats abandonnent des "droits acquis" des salariés pour adopter de nouveaux droits plus profitables aux précaires et, bien sûr, il est illusoire de s'imaginer que les riches vont accepter d'être dépouillés de leur richesse ou que les Allemands vont décider de payer pour les autres.

          C'est parce qu'il n'y a pas de vérité qui s'impose à tous dans la transparence du monde (la science expérimentale est basée sur cette constatation) que ce sont des processus matériels qui décident pour nous et des conflits entre positions opposées (guerre de religions dont aucune n'est vraie) qui nous ballotent d'un côté ou de l'autre jusqu'à trouver un point de relatif équilibre. Ce pourquoi on ne pourra peut-être pas éviter le FN (pas sûr quand même) avant d'en avoir éprouvé toute l'horreur.

          • "Tout le problème est là, on ne peut pas se mettre d'accord, sauf avec notre propre groupe ou parti (et encore), chacun tenant à ses convictions inébranlables."

            Notre contexte culturel très polarisé entre une tendance autocratique très verticale et une tendance participative très horizontale (l'autogestion des années 70-80) ne nous aident pas à entrevoir des modes de concertation et de délibération basées sur les faits et les arguments viables plutôt que sur les pb d'idéologies et de luttes de places. Je crois que c'est un terrain sur lequel il y a beaucoup à faire (sans trop en attendre tout de même parce que ce n'est pas de la magie)

          • On parle de concertation, de gens raisonnables, alors que c'est le FN qui a le vent en poupe et croit revenir à une vraie démocratie (autoritaire). La réalité de la démocratie n'est pas l'élection des meilleurs et des plus bienveillants, c'est la colère, la haine et le ressentiment d'un côté, l'ambition (la ruse, l'argent) et la surestimation de soi de l'autre, avec en tout cas la plus grande division sur ce qu'il faudrait faire.

            Eric Dupin conteste que le FN soit aux portes du pouvoir et il a raison factuellement. A l'heure actuelle il est inenvisageable qu'il gagne les prochaines élections présidentielles ou législatives, mais il faut compter avec une dynamique nourrie par la nullité des autres, un effet de mode qui peut être très contagieux à mesure que l'extrême-droite se dé-diabolise et que la crise dure et s'aggrave. Il n'y a pas tant de raisons de se rassurer, pas plus que sur les autres sujets (la fin de l'histoire, c'est du passé !).

  16. La relocalisation c'est bien joli, mais nous sommes dans une forte globalisation. C'était le cas dans la 2ème partie du XIX ème siècle, rien de nouveau. On peut trouver ça navrant, mais la mobilité géographique fait partie de ce monde, grande découverte...

    Ce n'est que ce qui s'est produit depuis des millénaires avec les migrations. Les bouleversements climatiques et économiques ne venant que renforcer la tendance migrationniste. Se cramponner à son bled ne permet pas de valoriser son expérience.

    • Il n'a jamais été question de s'enfermer dans le local, ce qui serait parfaitement débile, mais où qu'on soit, on vit dans un environnement local qui est devenu crucial aussi bien économiquement qu'écologiquement. Ce n'est pas parce qu'on peut se déplacer qu'il faudrait tout transformer en autoroutes et en parkings invivables. On peut aussi préférer rester chez soi et gagner moins, c'est un choix individuel. Ce qui n'est pas individuel, c'est l'organisation locale partout indispensable justement pour équilibrer la globalisation et non pas pour la nier.

  17. Merci pour cet article très bien écrit auquel j'adhère. Il y a un réel problème en France concernant le chômage, mais il faut le vivre pour le comprendre. Quand des politiciens planqués derrière leur bureau se permettent de voter des lois sur des situations qu'ils ne connaissent pas, il y a de grandes chances qu'ils soient à côté de la plaque.

    Je suis trilingue, j'ai travaillé pendant plus de 20 ans, j'ai donc une solide expérience professionnelle. Il y a deux ans, je suis revenue en France après avoir vécu longtemps au Québec. Je pensais qu'il ne me serait pas trop difficile de trouver un emploi, mais j'ai vite déchanté. Autodidacte, j'ai tout appris en travaillant, mais je n'ai pas de diplôme. Le résultat : réponses négatives, voire pas de réponse à mes candidatures.

    J'ai donc décidé de faire une formation pour obtenir l'équivalent du BTS d'assistante de direction bilingue anglais. Il me faut trouver deux stages non rémunérés. Et... même pour un stage non payé, c'est le parcours du combattant ! Idem : refus, pas de réponse.

    On peut incriminer les employeurs, mais d'un autre côté, la lourdeur qui encadre les stagiaires pousse les entreprises à ne plus en vouloir. Il y a une longue liste de tâches qu'on nous demande d'accomplir, certaines étant totalement irréalistes, voire irréalisables. Piloter un projet par exemple, construire des outils de communication. Quelle société accepterait de confier un projet à un stagiaire qui ne connaît rien de l'entreprise et n'est là que pour 4 semaines ? Cette absence de souplesse est un frein à la formation professionnelle.

    J'ai discuté récemment avec un recruteur qui me disait que plusieurs de ses clients cherchent des candidats et n'en trouvent pas. On pourrait donc sauter au constat facile : postes vacants + fort taux de chômage = chômeurs qui ne veulent pas travailler. Je pense que cette situation est surtout due aux exigences de plus en plus incroyables de bien des entreprises qui proposent des postes à hautes responsabilités payés une misère et pour lesquels le candidat doit avoir des diplômes, de l'expérience, des grandes compétences, ne pas être trop jeune, ni trop vieux, ceci, pas cela, etc.

    Il y a tout un système à revoir pour encourager l'embauche, mais c'est bien plus facile de faire mentir les statistiques en radiant à tout va que de se retrousser les manches.

    Ce qui m'inquiète, c'est que de tels propos sur les chômeurs divisent encore plus la France. Bien des gens qui ont un emploi depuis longtemps et ignorent à quel point la situation s'est détériorée approuveraient de telles mesures sanctionnant les chômeurs. Bien des chômeurs sont légitimement outrés par lesdits propos. Ce qui me fait craindre que la stupidité et l'aveuglement du gouvernement actuel donnent des ailes au FN qui pourrait remporter les prochaines élections présidentielles. Le cauchemar absolu...

  18. Comment les politiciens dévoués aux riches font-ils pour être élus ?

    http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20140911trib6ab4b1d46/quand-l-electeur-moyen-epouse-la-cause-des-plus-riches.html

    Lorsque les intérêts de l'élite diffèrent de ceux du reste de la société, c'est le point de vue de l'élite qui est pris en compte - presque exclusivement [...] Ils soulignent que « le point de vue de l'électorat général n'a pour ainsi dire aucun poids » dès lors que sont prises en compte les orientations des groupes d'intérêts et les préférences des riches Américains.

    Ces résultats démoralisants soulèvent une question importante : Comment les politiciens, peu soucieux des intérêts de la vaste majorité des citoyens, font-ils pour être élus, et plus important, pour être réélus, alors qu'ils sont essentiellement aux ordres des plus riches ?

    Un politicien qui représente en premier lieu les intérêts des élites économiques doit trouver d'autres moyens de séduire le plus grand nombre. L'une des solutions est présentée par les politiques nationalistes, sectaires et identitaires - une approche politique basée sur les valeurs culturelles et le symbolisme au lieu des intérêts de l'ensemble des citoyens. Lorsqu'une campagne électorale est menée sur ce front, elle est remportée par celui ou celle qui parvient le mieux à « amorcer » nos repères culturels et psychologiques latents, pas par celui ou celle qui représentent au mieux nos intérêts.

    De manière analogue, l'émergence de la droite religieuse, accompagnée de conflits culturels sur les « valeurs familiales » et d'autres questions divisant les esprits (par exemple, l'immigration) ont servi à camoufler la forte progression de l'inégalité économique depuis la fin des années 1970. Cela a permis aux conservateurs de se maintenir au pouvoir malgré leur mise en œuvre de politiques économiques et sociales défavorables aux classes moyennes et défavorisées.

    Ce faisant, ils enflamment les passions contre les minorités ethniques et religieuses. Pour les régimes (souvent corrompus jusqu'à la moelle) qui représentent les élites économiques, c'est un stratagème payant dans les sondages. Les inégalités croissantes dans les pays avancés et en développement infligent ainsi deux coups durs au système politique démocratique : elles se traduisent par la négation progressive des droits des classes moyennes et défavorisées et encouragent une politique sectaire toxique au sein des élites.

    Bien sûr il faudrait ajouter qu'en dehors de la simple corruption, les riches ont les moyens d'entretenir des politiciens, de financer leurs campagnes, de soutenir leurs partis, d'alimenter leurs réseaux, etc. Un autre effet pervers est simplement de trop payer les élus, ce qui les fait rentrer dans le monde des riches et les déconnecte de la majorité.

  19. Si je reviens avec retard sur les menaces de François Rebsamen envers les chômeurs.

    Je me demande si son message n'est pas également destiné aux employé(e)s de Pole Emploi qui trainent des pieds pour appliquer ces contrôles, car le contrôle ce n'est pas leur métier.

    cela perpétue l'incroyable illusion qu'on pourrait passer son temps à chercher un travail qu'il n'y a pas

    Oui chômeur, hamster même combat. Ce qui importe c'est de faire, seul le mouvement de la roue importe. Pôle emploi fait d'un chômeur/se un producteur/rice de justificatifs de recherche d'emploi qui, comme tu le dis n'existe pas ou si peu. Et en retour celui qui n'en produit pas assez est radié, mais, et c'est Rebsamem qui le dit dans son interview, il peut se réinscrire ("Meu nan, on n'est pas des monstres"). Formidable ! Pole emploi invente le mouvement perpétuelle, à défaut tout ces gens créent leur emploi 😉

  20. Un auteur qui me semble instructif de lire: le géographe Christophe Guilluy.
    Il utilise une démarche très matérialiste qui devrait vous convenir.
    Son dernier bouquin "La France périphérique: comment on a sacrifié les classes populaires" me semble très intéressant et bien relié au thème de cet article (je l'ai écouté ce matin sur FC, ce qui m'a donné envie de lire son bouquin)

      • merci pour ce lien avec ce texte très critique. Ce n'est pas du tout ce que j'avais entendu à la radio, j'en étais plutôt resté au constat de la France périphérique qui n'est pas remis en cause dans l'article.
        Vu l'orientation du livre, si ce texte critique est solide, je n'ai plus très envie de me le procurer! Je vais plutôt en rester à Davezies sur ce sujet.

      • Le texte critique en lien est involontairement très rigolo. Je pourrais prendre pas mal d'exemples mais celui qui m'a particulièrement amusé reproche à Guilluy "une vulgate marxiste" ce qui ferait le lit du... Front National bien que Guilluy en affirme à n reprises sa profonde défiance !

        Guilluy met des concepts et une théorie sur les mots de ceux — en zone rurale ou en urbaine hors périmètre d'attraction d'une dizaine de métropoles — qui se sentent abandonnés, qui sentent même que la politique de l'UMP comme du PS souhaiterait bien volontiers s'en débarrasser.

        En lisant Guilluy je songe à tous ces habitants et élus ruraux désemparés devant la fermeture en série des bureaux de poste, des gares, des perceptions, des casernes de gendarmerie, des écoles, des collèges et des lycées. Près de chez moi il a fallu une grève solidaire de toute la population, pas un élève dans les écoles avec fermeture de tous les magasins, pour empêcher la fermeture d'un lycée. Des connards réacs de petite ville qui ne veulent pas envoyer leurs enfants étudier à x centaines de kilomètres...

        Je suis en train de lire Guilluy sur le conseil des pseudo-intellos parisiens bourgeois qui en écrivent tant de mal que l'on se dit que ça doit être vraiment intéressant. J'ai beaucoup lu Michéa sur cette même défiance et, en effet, Michéa se révèle tout à fait passionnant avec son retour au sources du socialisme anarchisme communisme.

        Bien sûr Michéa qui cite à chaque page Marx, Engels, Proudhon, Bakounine, Leroux, Gramsci, Orwell, London et trois douzaines d'auteurs de même farine, est tout comme Guilluy un suppôt du Front National !

        • Michéa est un dangereux crétin qu'on entend beaucoup en ce moment (et qui s'entend très bien avec Finkielkraut). Il ne suffit pas de bonnes intentions ni de citer de bons auteurs pour ne pas être l'idiot utile des fachos (qu'on pense à Georges Sorel dont Mussolini s'est inspiré).

          Il semble que Christophe Guilluy, qui se définit comme étant de la gauche réac et très apprécié par Eric Zemmour, soit de la même eau. Bien sûr il y a un fond de vérité dans sa thèse (j'habite dans cette campagne paumée désertée par les services publics) mais prétendre que le sort de la France périphérique serait pire que celui des banlieues c'est méconnaître le déséquilibre des transferts fiscaux vers les campagnes au détriment des banlieues justement. De mon point de vue, ces espaces délaissés n'ont rien à attendre des Parisiens (de l'Etat) qui sont autant pour eux des colonisateurs mais seulement de la reprise en main de leur vie locale.

          Je réponds maintenant uniquement parce que Politis vient de faire une critique du livre. Encore une fois, il ne s'agit pas de nier un certain nombre de faits mais de mettre en cause leur présentation, leur mise en récit et la scientificité de la démarche plus apparentée à l'idéologie.

          Selon Nicolas Jounin :

          "Les analyses de Christophe Guilluy se caractérisent d'abord par la faiblesse de ses données, concepts et arguments. Son projet assez commun, semble moins scientifique que politique : il s'agit de promouvoir comme sujet politique les classes populaires françaises blanches sous un double référent de classe et de race".

          • Une autre critique de Christophe Guilluy :
            http://www.laviedesidees.fr/Une-France-contre-l-autre.html

            Outre qu'il confond les corrélations et les causalités, le principal problème que pose ses simplifications, c'est de mettre l'immigration et la question des valeurs, de l'identité, à la base de la politique. Il fait comme si on ne faisait pas tout pour limiter l'immigration, comme si on avait le pouvoir d'empêcher les immigrés de risquer leur vie mais outre que ce n'est qu'un mécanisme de bouc émissaire (s'il n'y a plus de service public, c'est parce que les immigrés pompent toutes nos aides), c'est faire une erreur sur la notion d'immigrés car, si les musulmans peuvent en être les symboles même ici où ils ne se voient guère, je suis tout autant un étranger pour les gens du coin qui votent Front National alors que leur nation se réduit au village et que même le village d'à côté n'a pas la même culture...

            C'est en tout cas le signe de l'extrême-droitisation des esprits, y compris à gauche, selon des mécanismes bien connus. On a mangé notre pain blanc, on va avoir des Républicains durs aux USA et des droites brutales ici après l'effondrement des "socialistes". Je ne crois pas trop à Podemos qui fait rêver mais pourrait vite décevoir.

        • S’il faut être optimiste, je ne pense pas qu’il faille aller chercher cet optimisme du côté d’un ré-enchantement. Allons au bout du désenchantement et de l’espèce de liberté qu’il nous donne. Cet exercice de notre liberté sans pareil dans l’histoire est une des choses les plus extraordinaires que l’on puisse souhaiter.

          http://philitt.fr/2014/10/09/entretien-avec-marcel-gauchet-le-monde-moderne-est-sous-le-signe-de-lignorance/

          • Marcel Gauchet fait partie de la "gauche" réac, opposé notamment aux homosexuels mais lui a une véritable oeuvre et j'admire beaucoup "le désenchantement du monde" analysant notre sortie de la religion (en dépit des djihadistes) mais il n'est pas matérialiste et si je crois qu'il faut affronter lucidement cette sortie de la religion et notre absence de fondements (notre ignorance première sinon notre bêtise), je ne crois pas du tout que cela nous donnerait une "liberté" (réactionnaire) mais plutôt que cela nous contraint à prendre en compte les processus matériels et notamment écologiques car il reste une transcendance, celle du monde (de la matière).

            Même si je partage sa critique du simplisme de René Girard, je trouve incroyable qu'il minimise le rôle du bouc émissaire qui prend tellement d'importance pourtant dans ce monde qu'on ne comprend pas, qui nous échappe, et dont on cherche vaienement l'origine du mal dans une catégorie ou une autre de la population.

  21. Proposition de rapprochement entre choix-culpabilité-objets-salauds.
    Le fait que nous puissions faire des choix nous place dans une situation d'incertitude quand à l'inocuité des conséquences de ces choix, aussi bien en ce qui concerne le groupe que le milieu. Il est possible que les choix que nous faisons portent atteinte au groupe ou au milieu et nous sommes sensibles à cette possibilité. Nous en concevons certainement de la culpabilité qu'il nous faut métaboliser d'une façon ou d'une autre. Suivant les cultures, le spectre des culpabilités que nous générons sera différent. Si nous sommes plutôt naturalistes, comme nous, nous n'aurons sans doute pas beaucoup de culpabilité vis à vis des atteintes possibles au milieu (ce qui peut expliquer notre très lente conversion à l'écologie), si nous sommes plutôt animistes, alors notre champ de culpabilité touchera aussi bien le groupe, tous les êtres et le milieu. Il me semble qu'une certaine dose de fraternisation soit indispensable vis à vis des "objets" de notre culpabilisation, sinon justement on percevra les autres et le milieu comme des objets étrangers qu'on peut manipuler à notre guise sans conséquence, sans en concevoir de responsabilité/culpabilité.
    Les salauds seraient dans ce schéma des personnes plutôt inaptes à la culpabilité, voyant le groupe et le milieu plutôt comme des objets. Ils sont dans la manipulation d'objets. Le schéma des +/- colle très bien avec ce profil. Ces leaders sans scrupules réussissent aussi à s'imposer parce qu'ils apportent un leurre crédible à la prise en charge de la culpabilité du groupe et de ses membres. Je ne serais pas surpris qu'Annah Harendt ait traité de cette question à propos des procesus de banalisation du mal dans le nazisme, ou bien aussi Christophe Dejours qui a étudié cette question dans l'entreprise.
    Il est assez évident que la religion et les rituels sont des outils de métabolisation de la culpabilité. On récite un notre père ou on fait un don etc et on est lavé pour un temps des erreurs qu'on aurait pu faire.

    • Dans mon article, je dénonce surtout le fait qu'on oblige les chômeurs à chercher un travail qu'il n'y a pas, ce qui est plutôt de l'ordre d'un aveuglement cognitif mais ne peut s'adresser à des objets ni animaux, seulement à des êtres parlants à qui sont adressés cet ordre dépourvu de sens et qui peuvent retourner la culpabilisation à l'envoyeur.

      Ce qui rend les salauds inaptes à la culpabilité, c'est de ne pas se croire responsables à être de simples rouages du système, ce qui est effectivement la banalité du mal et permet de ne pas voir les gens qu'on condamne à mort par des mesures techniques (coupure de l'électricité, suspension des indemnités, licenciement, management par le stress, etc.).

      • mais ne peut s'adresser à des objets ni animaux, seulement à des êtres parlants à qui sont adressés cet ordre dépourvu de sens et qui peuvent retourner la culpabilisation à l'envoyeur
        oui, bien entendu, je me suis un peu décalé et mis dans la peau d'un animiste dans mon commentaire. Mais je crois que notre culturalisme glisse vers un animisme nouveau (dans le sens ou il ne se base plus sur des superstitions et des projections pour établir notre "fraternité" avec le monde vivant, mais plutôt sur des mises en évidence expérimentales sur l'intelligence (corvidés, poulpes...) ou sur les sentiments...). Il me semble que notre visionde l'homme dans le monde le place moins au-dessus, comme c'est le as dans le naturalisme, et plus dedans et en relation avec, comme c'est le cas avec l'animisme. Notre résistance à l'écologie, qui peut s'expliquer par ce naturalisme et ses facteurs de stabilité, n'empèche tout de même pas ce glissement affectif, de fraternisation, qui s'opère.

      • Le fait est que jamais depuis des décennies le keynésianisme n'a été appliqué en France, donc plus aucune marge de manœuvre n'est possible au sein de l'Euro, l'Allemagne et d'autres recaleront le budget français. Il ne restera plus que la sortie incertaine de l'Euro, sans que ça ne garantisse aucune amélioration. Les chômeurs sans aucun pouvoir de nuisance subiront probablement les mêmes avanies. Le système politique actuel est incapable de gérer l'économie ou la redistribution, même quand l'endettement se fait à taux minimes :

        http://www.parisschoolofeconomics.eu/IMG/pdf/n19-octobre2014-lettrepse.pdf

  22. Ce pauvre Valls raconte des âneries, alors qu'il y a pas de boulot et que la France dépense moins que d'autres pays pour le chômage, y compris que l'Allemagne :

    « Nous, en France, avons fait le choix d’un chômage très important et très bien indemnisé. C’est dans le dialogue avec ceux qui recherchent un emploi que l’on peut améliorer la situation. Cela s’appelle réformer le marché du travail. »

    http://www.marianne.net/Valls-prevoit-deja-2-milliards-d-euros-d-economie-sur-les-chomeurs-_a241878.html

    https://scontent-b.xx.fbcdn.net/hphotos-xpf1/v/t1.0-9/10622797_10203967780008380_1245963140493420225_n.jpg?oh=e5de206f6775f2741cb34c3092a05d45&oe=54C78E9E

    • A rajouter, c'est la méthode rhétorique des communicants, quand ils veulent faire avaler des couleuvres, de réquisitionner les valeurs du dialogue. What the fuck !

      Mais quand est ce qu'ils arrêteront de prendre des pas si analphabètes, ayant accès à l'info, pour des cloches ?

      • Mais ça marche. De toute façons, nécessité fait loi. Comme le chômage augmente, il coûte de plus en plus cher, comme on n'a plus les moyens de le payer, son indemnisation est remise en cause. Rien de plus simple (et matériel). On cherche donc des moyens pour montrer que des chômeurs ne méritent pas d'être indemnisés.

        Pour faire cela, il faut être un salaud, faire comme si on voulait ce qu'on était obligé de faire, mais il faut surtout être complètement ignorant du sort des chômeurs. Ces gens là ne savent pas du tout de quoi ils parlent et qu'elle est la vie de ceux qu'ils condamnent de haut.

        Non seulement le chômage n'est pas si bien indemnisé, la moitié des chômeurs ne touchant plus rien, mais il semble qu'on vient seulement de s'apercevoir de l'évidence que martèle cet article : qu'on ne peut passer son temps à chercher un travail qu'il n'y a pas, pas plus qu'on ne va passer son temps à pêcher dans un lac sans poissons !

        La réponse n'est évidemment pas de leur couper les vivres comme cela paraît naturel aux sondages mais de leur apporter un soutien redoublé, d'avoir une politique qui crée des emplois au lieu d'en détruire ou au moins de soutenir le travail autonome. Cela ne se fera pas, seulement des coupes budgétaires et des radiations. L'avenir est bien sombre. On est dans la surenchère entre "socialistes" et sarkozystes, même plus besoin d'avoir peur du FN, l'ennemi est dans la maison...

  23. Il semble que la baisse de l'indemnisation du chômage soit décidée, économies oblige mais avec l'incroyable justification que cela ferait baisser le chômage tout comme la suppression de l'indemnisation des précaires était supposée réduire la précarité, on se fout vraiment de nous !

    • Après une période de chômage de presque une année vers 1990, j'avais écrit un texte que je ne renierais pas aujourd'hui sur ce sujet qui fait écho et témoigne de cette souffrance:

      Etre chômeur, être chômeur c’est avoir du temps qui ne vaut plus rien. C’est donc perdre un peu, ou même tout, de son existence sociale. Si mon temps que je souhaite échanger avec la société ne vaut plus rien, à quoi vais-je donc bien pouvoir employer ce temps ? A essayer de le placer ailleurs sans doute. Mais si après de nombreuses tentatives rien ne vient ? ... Le chômage est un peu comme une chute. Et chaque nouvelle tentative échouée pour retrouver à monnayer son temps est une nouvelle chute. Alors, suivant ma solidité, ma confiance, peut-être vais-je tenter de me détruire un peu pour souffrir moins,ou peut-être vais-je tenter un exode, un exode d’un type un peu particulier, puisque je vais tenter de devenir un étranger dans mon pays, un exilé sur son sol. Etrange situation. Chaque chômeur porte en lui les germes d’une destruction, de lui-même ou des autres, mais il porte aussi les germes d’un exode, d’une reconstruction de lui même et des autres. Et de son image de « nomade de l’identité » émane le non-sens s’il ne sait se relever, d’une quête de sens s’il est patient, et peut-être d’une reconstruction de sens s’il est plus solide. Et cette image irradie aussi le reste de la société, de tous ceux qui guettent leur tour dans ce climat de précarité. C’est parce que chaque chômeur est un nomade potentiel que la société se prépare à changer de cap et attend encore tant des politiciens, de ceux qui pourraient coordonner une action, et proposer un trajet. Même un véhicule bricolé peut faire l’affaire, et même un mirage peut tenir lieu de destination. Plus la situation de fort chômage et de chômage de longue durée persiste, et plus n’importe quel véhicule et n’importe quelle destination deviennent crédibles. Certains ont même commencé le compte à rebours de la prise de pouvoir du xénophobisme, c’est à dire de la destination nulle puisque le xénophobisme n’est que la mise en forme
      politique de la peur de l’inconnu ou de l’étranger ou du futur, ou de la mort. ...

          • Dans mon cas, je suis un salarié un peu autonome, je cherche des budgets pour aboutir, j'en obtiens, mais c'est long à mourir d'ennui.

            Je mets l'accent sur le fait, de mon point de vue, que c'est pas l'absence de travail qui mine, mais l'absence de revenus quand on est au chom-dû, et de surcroit l'impression de pisser dans un violon à envoyer des candidatures qui mènent à rien, à part entretenir des faux espoirs qui sont le terrain de la déprime.

            Personnellement, le chômage ne me pesait pas tant, je me baladais, allait voir des potes, bricolait ou lisait des bidules et j'étais bien content de ne plus avoir à supporter des horaires fixes et un chefaillon de merde, mon côté asocial. C'est la perte de revenus qui devenait difficile.

            Je veux bien que le salariat permette une forme de socialisation, outre le revenu, mais ça reste tout de même assez insatisfaisant pour certains. Le monde de l'entreprise me gonfle un tantinet, les bureaux de merde, le théâtre bidon qui s'y joue d'affection artificielle. Le salariat c'est quand même un peu souvent de la merde en vrac, même si tout le monde se prosterne devant.

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