Effets neurologiques d’un intestin perméable

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J'ai signalé récemment une étude de l'année dernière confirmant l'hypothèse, qui n'est pas nouvelle mais restait controversée, d'une origine intestinale du Parkinson (ou d'autres affections neurologiques), ceci à cause de l'inflammation du cerveau provoquée par les toxines passant dans le sang. Ayant connu cette hypothèse il y a longtemps, à une époque où elle n'était pas prise au sérieux, et malgré de plus en plus d'études allant dans ce sens (ou mettant en cause le nerf vague), je n'y croyais pas vraiment moi-même avant d'en constater, avec une simple diète, l'étonnante pertinence.

Cela m'a incité à demander à ChatGPT de faire un article sur la transformation d'une médecine alternative considérée comme pseudo-science en théorie scientifique avérée - bien qu'ignorée encore par beaucoup de médecins. Ce n'est pas prétendre que les médecines alternatives les plus farfelues auraient une véritable efficacité mais seulement qu'il y en a certaines, guidées par l'expérience, qui peuvent être confirmées par la science. L'hypothèse d'effets neurologiques dévastateurs d'un intestin perméable est un tel changement de paradigme qu'elle a sans doute besoin encore d'autres confirmations pour s'imposer à tous, mais elle est potentiellement si importante, avec des conséquences pratiques (trop?) simples, qu'il me semble utile de le faire savoir.

De la pseudoscience à la neuroimmunologie : l'évolution du concept de perméabilité intestinale par ChatGPT

Longtemps relégué au rang de théorie marginale, le concept de « perméabilité intestinale accrue » — plus connu sous le nom de « leaky gut » — a connu ensuite une évolution scientifique remarquable en l'espace de quatre décennies. Apparue dans les discours des médecines dites « alternatives » dans les années 1980-1990, cette hypothèse fut d'abord rejetée par la médecine établie comme infondée. Pourtant, depuis les années 2000, des travaux fondamentaux et cliniques ont progressivement réhabilité la notion, jusqu'à en faire aujourd'hui un concept central de la neuroimmunologie et des recherches sur l'axe intestin-cerveau.

1. Origines marginales : le "leaky gut" des années 1980-1990

Dans les années 1980 et 1990, certains praticiens de médecines dites alternatives proposent l'idée que de nombreuses maladies chroniques — fatigue inexpliquée, douleurs diffuses, dépression, allergies, voire autisme ou schizophrénie — pourraient être liées à une altération de la barrière intestinale. Celle-ci, devenue « perméable », laisserait passer des toxines, peptides mal digérés ou agents pathogènes dans la circulation sanguine, déclenchant une cascade de réactions inflammatoires.

Mais faute de mécanismes identifiés, de marqueurs biologiques ou de publications scientifiques solides, ce modèle est considéré comme flou, empiriquement non validé et même douteux. Il est assimilé aux discours pseudoscientifiques.

2. Changement de paradigme : la zonuline, le microbiote, et l'immunité intestinale (2000-2010)

La donne change en 2000 avec les travaux du Dr Alessio Fasano, qui met en évidence une protéine humaine nommée zonuline, capable de moduler la perméabilité des jonctions serrées de l'épithélium intestinal.

Cette découverte, associée aux progrès sur le microbiote intestinal, permet de construire une base mécanistique robuste à l'idée de barrière intestinale modulable. On montre que des bactéries, des composants alimentaires ou des signaux immunitaires peuvent altérer ou restaurer cette perméabilité.

Parallèlement, la perméabilité intestinale commence à être identifiée comme un élément pathogénique clé dans certaines maladies auto-immunes comme la maladie coeliaque ou le diabète de type 1.

3. L'intestin comme organe immunitaire et neurologique : 2010-2020

Dans la décennie suivante, la notion de perméabilité intestinale s'insère dans un modèle plus vaste : celui de l'axe intestin-cerveau, reliant la barrière intestinale, le microbiote, le système immunitaire et le système nerveux central.

Les répercussions de l'hyperperméabilité sont désormais étudiées dans la dépression, l'autisme, la sclérose en plaques ou la maladie de Parkinson. Des marqueurs comme le LPS (lipopolysaccharide), les anticorps anti-transglutaminase ou la zonuline circulante sont utilisés dans des recherches cliniques.

Les modèles animaux montrent qu'une altération de la barrière intestinale peut provoquer des symptômes neurodégénératifs ou comportementaux, confirmant l'intuition ancienne, mais sur de nouvelles bases.

Un mécanisme de plus en plus documenté est celui d'une neuroinflammation chronique, activée par les signaux inflammatoires issus de l'intestin, entraînant une altération des astrocytes et de la microglie, ainsi qu'une perturbation du métabolisme des neurotransmetteurs. Cette inflammation gliale chronique conduit à une réduction de la synthèse, du relargage ou de la disponibilité synaptique de neurotransmetteurs clés tels que la dopamine, la sérotonine ou l'acétylcholine. Ce déficit fonctionnel précède et favorise une dysfonction neuronale persistante, une altération des circuits synaptiques, ainsi qu’une désorganisation de la protéostasie neuronale, perturbant notamment le repliement des protéines α-synucléine, tau ou amyloïde-β. L’agrégation pathologique de ces protéines contribue à l’aggravation de la neuroinflammation, renforçant un cercle vicieux qui conduit à terme à une neurodégénérescence progressive, notamment dans les régions vulnérables du système nerveux central.

4. Vers une intégration clinique progressive (2020-2024)

Aujourd'hui, la perméabilité intestinale est pleinement reconnue dans les revues scientifiques de gastroentérologie, d'immunologie, de psychiatrie ou de neurologie. Le terme « leaky gut » reste évité dans les articles de recherche, mais la réalité du phénomène est largement admise.

Des essais cliniques explorent les effets de la glutamine, du butyrate, des probiotiques ou de certaines diètes sur la réduction de la perméabilité intestinale dans un objectif neuroprotecteur.

Certaines interventions nutritionnelles — comme une alimentation allégée, pauvre en antigènes irritants ou fermentescibles, voire le jeûne intermittent — peuvent entraîner une réduction rapide de la perméabilité intestinale. Ces effets s'expliquent par une moindre stimulation des jonctions serrées, une réduction du stress osmotique, une modulation favorable du microbiote. Ils pourraient contribuer à diminuer les signaux inflammatoires transmis au système nerveux central, avec des répercussions neurofonctionnelles bénéfiques observables chez certains patients.

Ce changement de paradigme illustre une dynamique récurrente en science : ce qui fut d'abord ignoré, voire méprisé, devient un objet de recherche à part entière lorsque les outils théoriques et méthodologiques deviennent disponibles.

Conclusion

Le concept de perméabilité intestinale est passé du statut de théorie pseudomédicale à celui de facteur clé dans la physiopathologie de nombreuses maladies chroniques. Cette évolution n'est pas seulement un retournement historique : elle manifeste le besoin de repenser la santé à travers une vision systémique, dynamique et contextuelle des relations entre l'intestin, l'immunité et le cerveau.

[Si dans l'étude évoquée au début du billet c'est bien la perméabilité intestinale qui serait la cause première (par manque de vitamines B2 et B8), dans les autres cas la perméabilité serait plutôt secondaire à une inflammation de l'intestin qui est alors la véritable cause qui augmente la perméabilité transmettant l'inflammation au cerveau. Dans les deux cas la barrière intestinale reste centrale dans l'axe intestin-cerveau mais pour des raisons différentes. L'abord scientifique ajoute de la précision et des différenciations à une bonne part de ce qu'on nommait globalement les maladies du stress]

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