La confusion est à son comble. Alors que tout a changé avec notre entrée dans l'ère de l'information et que la précarité s'étend, on entend toujours les mêmes vieux discours, par les mêmes vieux partis avec leurs vieilles idées et leurs élites dépassées. Plus personne ne sait quoi penser dans ce marché des idéologies jusqu'à une extrême gauche éclatée repliée sur leurs petites organisations ridicules et incapables de construire une véritable alternative. La "valeur-travail" n'a jamais été aussi haute, au moment même où le travail manque et où il a perdu toute valeur au profit des boursicoteurs et de la finance internationale. Impossible de revenir à la situation antérieure pourtant quand le travail ne se mesure plus au temps salarié car le travail immatériel n'est pas linéaire, sa production n'est pas proportionnelle au temps passé et, par dessus le marché, contrairement au travail forcé d'une simple "force de travail", le travail immatériel et créatif ne peut réussir sans "motivation", sans un certain plaisir de travailler ! Bien sûr, c'est loin d'être le cas partout, la situation empirant au contraire pour beaucoup, mais une majorité de travailleurs aiment quand même leur travail et se battent pour que leur entreprise ne ferme pas. Cette exigence de motivation peut d'ailleurs redoubler l'aliénation aussi et rendre la subordination salariale absolument insupportable d'hypocrisie dès lors qu'elle est forcée...
La revendication d'un revenu garanti est de plus en plus nécessaire dans ce cadre mais elle n'a pourtant aucune chance de s'imposer dans le contexte actuel, du moins pas avant que les représentations du travail aient changé, devenu le premier besoin de l'homme comme valorisation de la personne et non plus devoir de subordination, si souvent humiliant. Pour changer cette représentation du travail comme "désutilité" ne servant qu'à "s'enrichir", n'étant fait que pour l'argent et la consommation, alors que la vraie vie serait ailleurs (dans les loisirs et la distraction), il faudrait arrêter de réclamer sa réduction comme d'un mal nécessaire pour exiger au contraire un meilleur travail, de meilleures conditions de travail, afin de ne plus perdre sa vie à la gagner, et faire d'un mal un bien. Pouvoir être heureux dans son travail, voilà qui devrait améliorer considérablement notre qualité de vie, étant donné que le travail en occupe la plus grande partie !
"Changer le travail pour changer la vie", n'est-ce pas un slogan qui pourrait rassembler tous les travailleurs avec l'avantage de revenir au qualitatif, aux conditions de travail, et pas seulement au quantitatif, au temps de travail ou au salaire ? Une fois persuadés qu'on peut faire du travail autre chose qu'une peine exténuante et qu'on peut se fier à l'autonomie de chacun pour exprimer ses capacités et valoriser ses compétences, le revenu garanti s'imposera sans doute de lui-même combiné avec les institutions nécessaires au développement humain et au travail autonome (c'est-à-dire aussi la production locale dans une économie en partie relocalisée). Il faut changer le travail, pas le réduire (en augmentant encore le stress!) mais exiger d'être mieux traités, de pouvoir s'épanouir dans son emploi comme un droit universel et passer enfin du travail forcé au travail choisi, redonnant ainsi toute sa valeur au travail comme valorisation des travailleurs ; question de dignité humaine et de reconnaissance sociale, d'égalité et de liberté concrète. Ne pourrait-on espérer du retour de la question des conditions de travail et du respect des travailleurs une convergence des luttes ?
Avant que toute profession soit contrainte à devenir désirable en quelque façon, que ce soit pour sa rémunération ou pour son intérêt propre, ce qui devrait certes bousculer quelques hiérarchies, le préalable serait au moins d'arrêter l'identification du travail à une torture, sous prétexte d'une fausse étymologie, alors qu'on doit lutter au contraire pour l'abolition de la torture au travail, dans le droit fil des lois contre le harcèlement moral par exemple.
"C'est par un jeu maladif sur les mots en cherchant des justifications étymologiques à des rapprochements fortuits que les mythes se sont construits. Le mythe est donc issu du travail de la langue" (Michel Boccara, La part animale de l'homme p21, Anthropos, 2002).
Lorsqu'une fausse étymologie est reprise partout, ce n'est jamais sans raison. On ne passe pas son temps à répéter des étymologies justes ! Ainsi religion ne vient pas de religere comme on le répète tout le temps, mais, aussi étonnant que cela puisse paraître, de relegere signifiant exécuter scrupuleusement (religieusement) les rites et non pas relier les hommes, sens que les chrétiens ont voulu imposer depuis Lactance et Tertullien (voir Emile Benveniste, Le vocabulaire des institutions indo-européennes). De même, si le mot "travail" vient sans doute effectivement de tripalium, l'erreur ici c'est de prétendre que ce trépied désignerait un instrument de torture sous prétexte que la première occurrence connue du mot tripallium concernait un instrument de torture, peu utilisé et vite oublié, en forme de trépied, en effet. Le vrai trépied dont il est question dans le "trabar" servait à immobiliser le sabot du cheval pour le travailler (trabar veut dire entraver, ce pourquoi le trabajo est pénible). On appelle toujours dans le sud-ouest "travail" le petit abri pour les chevaux qui jouxte la maison et sert théoriquement au soin de ses sabots. C'est peut-être à cause des chevaux que le sens de travel en anglais désigne le voyage, en tout cas, le sens du travail c'est plutôt l'immobilisation, la table de travail de l'accouchement, c'est être rivé à sa tâche, boulonné à son boulot.
Pourquoi va-t-on chercher cette fausse étymologie pour dire que le travail est une torture alors qu'on ne manque pas de mots pour désigner la peine laborieuse (le "chagrin") ? C'est, sans doute que cet aspect est devenu insupportable, signe qu'on a quitté ce temps où le travail devait être souffrance, sacrifice pour racheter nos fautes, où la valeur mesurait la peine enfin, d'Aristote à Thomas d'Aquin et jusqu'à Adam Smith compris. Marx avait souligné que c'était complètement dépassé à l'époque des machines où, ce qui fait la valeur c'est le temps de travail (de machine) et pas du tout le fait que l'ouvrier soit triste ou joyeux. Inutile donc de changer de travail quand on commence à y trouver du plaisir pour lui garder toute sa valeur, comme le faisaient les premiers bénédictins qui voulaient y gagner leur ciel ! Aujourd'hui, c'est encore tout autre chose car le plaisir qu'on y prend donne cette fois de la valeur au travail créatif ou relationnel, tout comme dans l'ancien artisanat ou pour les artistes. C'est ce qui rend d'autant plus insupportable la souffrance au travail et tout ce qui reste d'esclavage dans le salariat.
Plutôt qu'une soi-disant "propriété collective" des biens de production qui ne change presque rien au fonctionnement de l'entreprise ni surtout à notre vie de tous les jours, notre objectif devrait être celui d'une réappropriation de nos vies et de nouveaux droits sur notre lieu de travail, abolissant la séparation du travail et de la vie (déjà bien entamée). Plutôt que de rester crispés sur des avantages acquis d'un autre siècle, voilà une nouvelle "utopie positive" qui permettrait de reprendre l'offensive pour acquérir de nouveaux droits, sans rester enfermés dans le productivisme et les simples augmentations de salaire. En revalorisant la qualité de la vie sur le lieu de travail, la décroissance matérielle semblera dès lors beaucoup moins menaçante et la relocalisation de l'économie devrait aller de soi, mais pour cela, il faudrait d'abord opérer cette conversion du "travail comme peine" au "travail comme valorisation" ainsi que du travail subi au travail choisi.
L'utopie d'un travail épanouissant et d'une meilleure qualité de vie au travail ne consiste pas à s'imaginer qu'un travail puisse être de tout repos et sans problème. Chaque travail reste un défi épuisant et, les programmeurs le savent mieux que d'autres, on passe son temps à corriger ses erreurs, sans compter les tensions relationnelles inévitables, le manque de reconnaissance, les rivalités, les échecs... Toutes les tâches, même les plus nobles, ont leurs servitudes (et l'on n'a jamais tout ce qu'on mérite!) mais il ne s'agit pas de revendiquer une jouissance sans fin et une vie facile, seulement de conquérir de nouveaux droits et, surtout, de changer la nature du travail. Ce n'est pas gagné mais c'est un objectif de luttes qui pourrait réunir tous les travailleurs et nous sortir de l'ornière en dessinant des chemins nouveaux.
Nouveaux ? Pas tant que ça. La conciliation improbable de travail et plaisir n'est pas le fruit d'une imagination débordante ni d'une illumination soudaine qui ne ferait qu'ajouter à la confusion. C'est d'abord notre situation matérielle, l'évolution de la technique et le devenir immatériel de l'économie qui obligent à reconsidérer le travail du côté du plaisir plus que de la peine, mais ce n'est pas vraiment une découverte pour les psychiatres. En effet, on peut dire que les fous ici nous ont précédés puisqu'après les avoir enchaînés pour les forcer à travailler dans des conditions inhumaines, l'ergothérapie a renversé toutes les valeurs en montrant que le travail avait une fonction curative. Bien sûr, ce n'était plus le même travail, ce n'était plus un travail "contre nous" mais "pour nous". Cette démonstration aurait dû contaminer toute la société mais les conditions n'étaient pas remplies à l'époque où l'informatique balbutiait encore et n'avait pas pénétré tous les bureaux et les usines aussi.
La situation actuelle diffère du tout au tout. On fait comme si le travail avait toujours été valorisé (Travail, Famille, Patrie) mais, à part dans les cours d'éducation civique ou à l'Eglise, le travail a toujours été méprisé au contraire, et ce, depuis la nuit des temps jusqu'aux années 60 au moins. Ensuite, ce qui a commencé à rendre le travail désirable c'est en partie de venir à manquer, sans doute. Ce n'est pas la seule raison pourtant car si dans le chômage on découvrait l'exclusion des échanges et des liens sociaux, donc la part positive du travail, part occultée ordinairement par la fatigue quotidienne et les difficultés rencontrées, c'était aussi le signe que la nature du travail avait changé, devenu plus humain en passant de la force de travail à la résolution de problèmes, de l'ère de l'énergie à l'ère de l'information. D'autres signes manifestent que le travail n'est plus la malédiction divine de la Bible : non seulement le travail des femmes, qui gagnent leur autonomie en sortant du foyer, mais surtout les riches qui désormais répugnent à des loisirs démocratisés et recherchent plutôt les postes de pouvoir, en tout cas une activité professionnelle qui les valorise et les occupe à temps plein le plus souvent, même si rien ne les y oblige (c'est nouveau).
Non, le travail n'est pas forcément la torture qu'on dit, ce dont on devrait paraît-il se faire une raison ! Non, on ne peut se passer trop longtemps de travailler pour les autres et d'être reconnu matériellement pour la valeur de sa contribution. On peut même travailler pour le plaisir et pas seulement pour l'argent. Les apologies de la paresse ne sont que de bonnes blagues pour les enfants quand ce n'est pas simplement la résistance au productivisme ou le rêve bien légitime de repos d'un corps fatigué. Là n'est pas la question, il faut lutter contre les mauvaises conditions de travail, lutter contre le stress, lutter contre l'exploitation, lutter contre l'esclavage mais pour changer le travail et faire enfin un travail qu'on aime. Utopie ? Pas tant que ça puisque c'est ce que prétendent déjà faire certains directeurs des ressources humaines, dans leurs discours au moins ! Baratin ? Oui, souvent, mais ce n'est pas du baratin qu'une entreprise constitue effectivement une communauté humaine et qu'elle a besoin de faire équipe pour fonctionner correctement, de coopération (ça ne peut pas être une compétition de tous contre tous). Il faudrait donc les prendre au mot plutôt. La revendication d'aimer son travail pourrait se révéler en fait beaucoup plus subversive que de lutter contre le travail ou de vouloir le réduire. C'est un changement bien plus profond, changement de point de vue sur le monde et transformation concrète de nos vies. Cela pourrait constituer enfin le premier pas vers une économie plus écologique, moins productiviste et orientée vers la qualité de la vie.
Pour que le travail puisse être épanouissant et faire partie de notre vie, un revenu garanti est absolument nécessaire, condition de l'autonomie et du travail choisi, mais ce n'est pas du tout une mesure suffisante en soi. Il faudra impérativement ne pas laisser les travailleurs isolés mais créer des institutions, comme les coopératives municipales, afin d'assurer l'orientation des individus, la valorisation de leurs compétences et tous les services d'un développement humain (formation, assistance, coopérations, échanges). Ces structures collectives devraient favoriser le travail autonome plutôt que le salariat mais il faudra assurer ainsi une production effective. Il ne s'agit pas de faire n'importe quoi mais d'utiliser au mieux ses compétences. Tout cela paraîtra trop irréaliste bien que beaucoup moins sans doute que les combats d'arrière garde déjà perdus des syndicats, comme de rester obnubilés par un plein emploi mythique qui laisse pourtant tellement d'exclus sur le bord de la route, sans parler d'une nouvelle réduction du temps de travail qui a perdu tout sens ! Le travail a changé, c'est à nous de changer maintenant. Ne laissons plus les entreprises être des lieux inhumains et sans âme. Changeons le travail, du moins notre regard sur le travail comme fonction sociale, sur l'entreprise comme lieu de vie et sur les travailleurs comme compagnons d'aventure. Est-ce possible ? Est-ce désirable ? Est-ce nécessaire ? La réponse ne fait pas de doute, encore faut-il le vouloir et se battre pour : la liberté ne se prouve qu'en acte. Ce ne serait d'ailleurs qu'un premier pas vers d'autres conquêtes, vers une sortie du productivisme capitaliste et la construction d'alternatives locales à la globalisation marchande...
Il faut reprendre tout à zéro, abandonner les vieux schémas pour revendiquer le droit à un travail épanouissant, porter nos forces sur les conditions de travail et la qualité de la vie, changer le travail plutôt que le réduire, conquérir notre autonomie et se réapproprier notre temps de travail enfin. C'est incontestablement la véritable clef du bonheur et de la santé, beaucoup plus que le "pouvoir" ou l'argent, et ce qu'il faudrait mettre un peu plus en valeur, en déconsidérant concurrence, profit, richesse et même les loisirs un peu vains qu'on nous fait miroiter, afin de faire du travail le meilleur des loisirs, inciter les gens à tirer si possible leurs ressources de leurs passions ! Ensuite il deviendra plus naturel sans doute d'assurer un revenu garanti à tous et de créer des coopératives municipales pour travailleurs autonomes. Bien sûr ce n'est pas gagné, loin de là, mais pas impossible non plus à notre époque qui en a tant besoin, libération du travail autonome qui n'est en fait qu'une simple adaptation des nouveaux rapports de production aux nouvelles forces productives immatérielles. Il me semble, c'est une idée que je propose (sera-t-elle bien comprise et peut-être est-ce folie ?) qu'un tel changement de point de vue en faveur d'une "ergothérapie" généralisée pourrait nous guérir de quelques unes de nos folies...
réhabiliter la "valeur travail": c'est le mot d'ordre de la campagne . comme si on n'avais pas déjà vue ce que signifiant les aseptisantes réabilitations des centres urbains , comme si cette expression dans la bouche des gestionnaires ne pouvais pas résumer autre chose qu'une folie criminel , sans doute ultime . qui nous fait croire qu'il y aura du travail pour tous alors qu'il y en aura pour personne , confirmant la devise "si tu cherches un emplois t'aura pas de travail et vice et versa"
ce débat sur les conditions de traivail est effectivement occulté au profit d'une approche purement quantitative notemment portée par les syndicat . mais aujourd'hui , vue les tension qui reignent dans le monde du travail , je crois que ça n'a jamais été plus mal et là le mots torture n'est vraiment pas déplacé , ce débat parait être un véritable luxe . et aujourd'hui que ce soit le précariat , le salariat le travail c''est tout sauf la santé .
par ailleurs là où il y a de l'ergothérapie il y a aussi de la clinique , c'est à dire la paix d'un lieu de vie , un oasis existentiel de véritables microcommunautés basées sur l'expréssion du négatif où la paresse est bien la part cachée du travail . la critique de la paresse me semble très dangereuse , car porteuse de stakanivisme , il y a parfois du bon et pour la santé à se reposer à retrouver nos propres temporalité , où tout simplement à être disponible à des choses et des rencontres dont le train train quotidiens nous interdit même de concevoir l'existence .c'est également dans la paresse , notemment le temps de chomage ( cela apparait dans le film de pierre carles "danger travail") que l'on reconnait la vérité du travail , son positif comme son négatif. il y a parfois du bon en terme organisationnelle à casser les habitudes et à foutre la merde , même si aujoud'hui ça peut paraitre un luxe ( guattari paasait une grande partie de sont temps à faire ça à laborde) de décentrer les gens .
mais la revendication de pouvoir aimer sont travail et d'y trouver du plaisir ne me semble pouvoir émerger qu'a se lançer de façon désabusé dans la lutte où cette revendication se réalise momentanément. il nous faut pour cela , je crois , une bonne grêve générale ...
enfin je ne vois pas la contadiction entre faire moins et mieux en matière de temps de travail . surtout que pour tout un tas d'activités (notemment les sevices)une condition première pour rendre le travail aimable , ce serait de réduire drastiquement le temps de travail , à condition qu'il n'y ai pas de perte de salaires , ou un revenu garanti qui compenserait la perte .
bonjours
trés intéressant , et je rejoint par certains aspects, votre point de vue , mais je pense que vous ne poussez pas assez votre logique jusqu'au bout , et que votre manque de culture marxiste( la vrai), vous empéche de tirer les conclusions necessaires.
Je pense que le travail contraint, aliéné (dure, abrutissant, pénible, de simple éxécution) est en train de s'effacer, et que le travail riche petit à petit le remplace, mais il ne faut pas aller trop vite en besogne beaucoups de gens font encore se travail galére, qui est la base du travail salarié, il ne faut pas l'oublier. Tant qu'on aura pas réduit au maximun ce travail contraint pour tous, ont ne pourra pas vraiment parler du travail comme source d'épanouissement. Je pense aussi que comme le capital repose sur l'exploitation du travail salarié et sur ce travail contraint, plus le salariat sera sapé à la base.Je pense que nous entrons dans une nouvelle aire historique l'effacement du salariat, qui s'étend peut étre à tous, sur la planéte, mais diminue pour tous, sous différente forme (précarité, chômage, temps partiels, cdi, travail temporaire statuts qui deviennent la norme et non plus l'exception). Cela donne raison à Marx, l'abolition du salariat n'est pas un acte volontaire comme le pense les marxistes, mais un stade de l'évolution du capitalisme.
Puisque tout ceci m'intéresse fortement que que cela est suceptible d'intéresser les visiteurs de mon blog je vous met en lien...
à bientôt.
J'ai posé une petite question sur le wiki "coopératives municipales", dans la rubrique discussion, en ce qui concerne les coopératives municipales et le revenu garanti.
J'espère qu'elle alimentera un peu le débat sur ce thème qui me semble très intéressant, en espérant qu'il y ait toujours des personnes susceptibles de vouloir en créer... En tous les cas j'en fait partis !
Effectivement, je ne pense pas qu'on puisse se passer d'un revenu garanti et si je suggère qu'on puisse tenter l'expérience de coopératives municipales même en son absence c'est en désespoir de cause et cela réduit considérablement leur portée. C'est une position de repli, de même que de limiter la garantie du revenu à ceux qui s'inscriraient dans une coopérative municipale qui aurait un peu plus de moyens ou de fournir un revenu uniquement en monnaie locale. Tout cela a de nombreux inconvénients mais il faut tenter l'expérience pour convaincre de son utilité (je répondrais sur le wiki plus tard car je suis un peu débordé en ce moment).
C'est un peu pareil pour ce texte. Je pars de la valeur-travail parce que c'est le thème qui émerge en ce moment mais c'est sûr qu'il est mal orienté. Ma pente est toute autre, c'est la défense du revenu garanti de coopératives municipales et de monnaies locales, mais je vois bien que c'est hors du débat public. Je fais juste une proposition au mouvement social d'une orientation qui pourrait permettre une meilleure convergence des luttes.
Pour l'instant, cela ne semble pas prendre mais revenir au qualitatif serait un vrai progrès, y compris en préférant améliorer les conditions de travail plutôt que de réduire le temps de travail. Même les emplois les plus durs peuvent être valorisés et rendus désirables pour certains. Ce n'est certainement pas le cas actuellement et c'est pour cela qu'il faut porter les luttes là dessus. Si je trouve contre-productif le fait de vouloir continuer la réduction du temps de travail légal pour des raisons que j'ai largement expliqués ailleurs, je suis tout-à-fait pour la modulation du temps de travail partout où c'est possible et pour le temps partiel choisi (très rare de nos jours). Dans certains secteurs une réduction générale est sans aucun doute nécessaire (transports par exemple).
Je sais bien tout ce que m'a apporté le fait de travailler à mi-temps presqu'une dizaine d'années et, à mon âge, j'ai besoin d'un horaire allégé, mais quand j'étais programmeur, il n'était pas question que je quitte mon programme et des bugs irrésolus, je travaillais sans discontinuer le jour et la nuit ! C'est inhumain si on n'est pas motivé mais c'est comme ça et bien mieux qu'un travail ennuyeux.
Ce n'est pas le point que je veux discuter là, pourtant, mais uniquement de mettre l'accent sur la qualité de la vie au travail.
Je ne suis pas tellement en désaccord avec Robert sur le déclin du salariat capitaliste (par contre, sur le manque de culture marxiste...) mais la revendication de meilleures conditions de travail est possible dans les entreprises capitalistes aussi, avec une portée révolutionnaire plus grande que les augmentations de salaire même si ce n'est pas apparent au début.
Sinon, je ne peux m'attendre à ce que cet article rencontre l'approbation de ceux qui se croient révolutionnaires en critiquant la valeur-travail, voire glorifient la paresse et se prennent pour des plantes ! Certes la critique du travail a une charge subversive importante contre la domination et la conception chrétienne du travail comme sacrifice, mais pas quand elle devient trop complaisante et systématique. La critique "marxiste" de l'aliénation ne me semble pas tenir non plus, le Capital vaut mieux que les Manuscrits de 1844. Il m'apparaît aujourd'hui que la critique des conditions de travail et de la qualité de la vie est bien plus révolutionnaire tout en pouvant déboucher sur des conquêtes immédiates. C'est largement une question de stratégie mais c'est aussi s'approcher plus de la vérité que la prétention d'abolir le travail lui-même alors qu'on ne fait qu'abolir la séparation du travail et de la vie.
Bien sûr, rien à dire contre Paul Lafargue qui défendait avec raison le droit au repos et la fuite du salariat mais aujourd'hui on a plutôt affaire à une paresse de l'esprit ! j'ai toujours trouvé imbécile l'idée d'un "droit au bonheur" mais c'est quand même autour d'un droit à une bonne vie, un bon environnement, un bon travail qu'on pourrait se retrouver tous, non ?
Il s'agit de retourner un slogan qui est dirigé contre nous, ce n'est donc pas évident mais c'est souvent une technique très efficace d'utiliser la force de l'adversaire. C'est sûr qu'il faudrait une bonne grève générale, on ne s'en sortira pas sans mais on ne voit rien venir pour l'instant et on peut agir dès maintenant pour porter l'attention sur les conditions concrètes du travail plutôt que sur les grands mots et les grands principes...
evidemment que la paresse ce n'est pas devenir une loque , c'est tout le contraire , il faudrai se faire une conception active de la paresse et voir tout ce qu'elle porte de jubilation de joie et de découverte . d'ailleur pour moi les vrais temps de paresse sont les temps de lutte où les gens se reveil , bousculent les palissades de la politique politicienne autant que l'enclos qui nous tient si communément séparé et se préocuppe de ce qui les concerne ou de dire ce qu'on vraudrait leur faire taire . mais vous ne m'enlèverez pas de l'idée qu'émerger c'est laisser choir, laisser choir tout ce qui nous détourne de l'essentiel. à commencer par le salariat et les petites routines à la con qui scèllent l'enfermement général et toute les séparations .mais après c'est vrai que toute la vulgate sur la paresse est absolument détestable et contre productive surtout lorsqu'elle débouche non sur le travail forcé mais la misère d'une vie qui retourne à l'état clinique , avec notemment tous les risques de disqualification que cela peut engendrer et qui sont pire que tout.
mais après dans le travail, comme pour toute chose , l'enjeu c'est aussi de pouvoir en sortir, c'est une réalité qui n'existe que par son dehors d'où l'intérêt de ne jamais parler de travail sans parler de paresse dont on pourrait donner pour mission de reconstruire toutes nos écologies à commencer par cultiver et accroitre le sentiment "du chez soi" dans un désir de refaire société par le bas , le local . dans cette société par projet , il n'y a évidement pas que l'entreprise qui puisse avoir le monopole du lien social .
cela dit c'est effectivement très stratégique de retourner le slogan de la valeur travail pour réhabilité la valeur du travail par soucis de soi et qui n'est pas comptabilisé dans le calcul du PIB....
d'autant plus qu'un des problèmes politique qui emerge à peu près avec ma génération ( j'ai 30 ans ) , et qui n'est pas sans rapport avec la révolte des banlieues , c'est celui du désoeuvrement : nous sommes tous des petits branleurs nihilistes étouffée par nos propres vomissures . mais c'est qu'on a été fabriqué comme ça et que les vieux cons dans votre genre qui nous tendent des perchent pour nous sortir le cul des ronces sont assez peu nonbreux . on nous traite la plus part du temps avec le plus grand mépris comme si notre destin n'avait été et ne sera que désolation crimes et chatiments . la plante peu aussi se faire carnivore ...
après je pense que ce qui pollue le plus les conditions de travail , c'est quand même les relations de travail . vous dite abolir la torture au travail , il y a bien des lois sans doute insuffisantes ou méconnues : mais je me demande bien comment faire pour eradiquer( carrièrisme et utilitarisme ) toute cette bande de cons qui passe leur temps à baver sur le dos de leurs collèges auprès de leur chef pour garantir leur plan de carrière où ces autres qui vont prendre du plaisir à humilier voir harceler un subordonné, ou ces derniers qui vont s'autoexploiter à travailler pour leur compte au point de n'avoir plus de vie de famille et vont par tomber malade ou divorcer et finir par connaitre la faillite personnelle, pour se retrouver sans rien ....
ensuite, si la coopérative de production peut être quelque chose d'intéressant, car il y a une réelle implication des travailleurs dans les décisions, vous le dite vous même à défaut d'être abritées de la concurrence elles finissent par se comporter comme des entreprises capitalistes .
après il y a la question du temps passé dans les transports pour se rendre sur son lieu de travail . certain y passent plus de 4 heures part jours ! ce qui limite grandement les possibilité de temps libre et accrois le stress du au travail , là je pense que c'est un point qui montre bien la nécéssité de relocaliser la production et de faire en sorte que les gens trouvent à ce loger (dignement) à proximité de leur lieu de travail .
ensuite il y a la question du travail à la maison ou du télé travail qui lui présente l'inconvénient majeure de confiner le travailleur dans une isolement qui peu vite devenir insupportable et pathogène . là un lieu de socialisation, à la hauteur des enjeux et à proximité s'imposerait , ce qui amorce un début de piste pour la coopérative municipale qui pourrait aussi prendre en charge le besoin de refaire société .
mais après la question du revenu est aussi importante pour rendre désirables certaines activité , et de façon large ça joue grandement dans la possibilité qui est offerte au travailleur pour reproduire ses capacité et maintenir ses compétences et surtout à l'époque où le moindre moment de convivialité ou d'appentissage est un sevice marchand .
J’ai sans doute l’avantage sur certains d’être syndicaliste et secrétaire d’un CHSCT dans une très grande société. Je peux donc affirmer d’expérience qu’il est faux de dire que le « débat sur les conditions de travail est effectivement occulté au profit d'une approche purement quantitative notamment portée par les syndicats ».
La question des conditions de travail est au cœur des préoccupations syndicales (en tout cas de la CGT) mais ne s’arrête pas aux conditions matérielles de travail, à la qualité des postes de travail, au temps de travail, mais concerne les relations dans le travail et la place de la démocratie dans l’entreprise.
Je constate un mal-être croissant dans le travail alors que les conditions matérielles se sont globalement améliorées, que le temps de travail (avec les 35 heures) a très sensiblement diminué.
Ce mal-être provient de la pression croissante exercée sur les salariés par des demandes toujours plus exigeantes, une mise en concurrence très étudiée, par la mise en place d’un système dont les analogies avec ce qu’on décrit du système soviétiques sont frappantes :
- planification volontariste et autoritaire à tous les niveaux : en budgets financiers, en moyens humains (m/h), en délais d’exécution etc.
- mise en place d’une véritable nomenklatura dans l’entreprise : stocks options, actions gratuites distribués aux cadres dirigeants dans la plus grande opacité (sous la condition d’obtenir des subordonnés la réalisation du plan)
- luttes politiques opaques au niveau des directions se réglant le plus souvent au détriment des salariés
- véritable culte de la personnalité des dirigeants : dans mon entreprise, par exemple, le numéro 2 mondial a ainsi fait le tour du monde en huit jours pour « rencontrer les salariés » et diffuser les « 7 piliers de l’entreprise » (véritable petit livre rouge pour débiles) et en fait pour rencontrer des gens triés sur le volet et diffuser un message dont la base ne saura rien ; quant au numéro 1, il n’est visible qu’à l’occasion de cérémonies dont il est à la fois le célébrant et le célébré.
Le décalage est devenu abyssal entre ce que nous sommes dans la vie (des citoyens responsables de familles etc.) et ce que l’entreprise fait de nous, entre l’invitation constante à vivre son travail comme une espèce de militantisme et ce qui en est la réalité quotidienne ; entre le discours dans l’entreprise et les objectifs réels qui sont le profit à court terme et rien d’autre ; entre l’immensité des capitaux accumulés (et qui font problème) et la part toujours décroissante des salariés.
Aujourd’hui c’est d’une véritable révolution dont l’entreprise a besoin ; une véritable démocratie dans l’entreprise est nécessaire et doit compléter le contrôle social sur les grands moyens de production et d’échange sans lequel les défis soulevés par les grands risques écologiques ne pourront pas être relevés ; sans lesquels donc les catastrophes qu’on nous annonce risquent de se produire.
En cela, quoi que vous en pensiez, les petites formations d’extrême gauche et bien sûr les grandes organisations syndicales sont plus que jamais nécessaires. De ce point de vue l’avenir peut donc nous réserver bien des surprises.
Je suis d'accord avec ce que vous écrivez.
Mais, je travaille dans l'industrie pour concevoir des nouveaux produits, ça s'appelle la RD. A priori, ça peut sembler un boulot intéressant, malheureusement la conception de la RD par nos chers managers en France m'est apparue très archaïque. Ceux ci, parce qu'ils sont au sommet de la pyramide hiérarchique s'imaginent omniscients et interviennent dans l'ouvrage des ingénieurs comme un chien fou dans un jeu de quilles. Souvent leur conception actuelle de la recherche est digne du XIXeme siècle. Ils n'ont pas saisi que la recherche c'est l'architecture d'un réseau de spécialités techniques orchestré par un ou plusieurs ingénieurs généralistes ayant une compréhension et une sensibilité technique des diverses spécialités impliquées. De plus ils n'ont pas réellement de rigueur intellectuelle et ne savent pas faire appel aux technologies récentes de modélisation informatique. Bref, c'est souvent du mauvais bricolage qui est fait. Ce qui entraîne une déperdition énorme de ressources en temps, matérielles et humaines.
La recherche ne peut être orchestrée de façon autoritaire et unilatérale (de haut en bas), ce qui tue toute créativité et plaisir d'innover.
Seulement, les temps actuels de chômage et de menaces de licenciements que nous vivons font que les patrons peuvent se permettre d’user de l’autoritarisme qui est la négation même de toute créativité. Donc plus d’autoritarisme, moins de créativité, moins de créativité plus de problèmes sociaux, sanitaires et environnementaux et donc encore plus d’autoritarisme puisque plus d’affaiblissement des salariés, jusqu’à quel point d’étouffement ?
La recherche, activité non linéaire, ne peut plus se faire entièrement avec les seules compétences internes d'une entreprise de façon endogamique. Les compétences sont très souvent ailleurs, bureaux d'études indépendants, centres de recherche publics ou privés. Il faut savoir imaginer et trouver les compétences spécialisées, voire spatialisées, et les agencer pour un moment. Chaque innovation, par définition, est un nouveau cas de figure singulier et non pas la reproduction à l’identique des agencements antérieurs de compétences.
Ne pas comprendre cette notion de spécialité technique, c'est à dire de métier, c'est de plus en plus ce que je remarque. Il est demandé au gens la multi spécialisation, ce qui va à l'inverse de la complexification des techniques nécessaires à l'innovation. Dans bien des domaines, on n’innove plus maintenant comme on innovait il y a 30 ans en bricolant sur un coin de table. Concernant, cette aberration de la non reconnaissance des métiers, un livre intéressant est :
"Le travail sans qualités : Les conséquences humaines de la flexibilité" Richard Sennett,Pierre-Emmanuel Dauzat by Richard Sennett
Je pense que pour travailler mieux et moins, il y a la nécessité d’une vraie remise en cause de bien des dirigeants d'entreprise et sans doute faut il les envoyer en formation continue. Car si ils prônent la formation pour leurs employés, je n'ai pas l'impression qu'ils s'appliquent cette recommandation.
Au point, que bien des salariés ont suivi plus de formations que leurs patrons qui restent la tête dans le guidon et pédalent maladroitement, sans réflexion un peu poussée sur ce qui les environne.
Il en résulte souvent une sorte de catéchisme incohérent de l'entreprise ânonné et borné, truffé de terminologies, souvent en langue anglaise (c'est plus chic), et de méthodologies dont la plupart du temps les cadres sup ne comprennent pas grand chose, à part que ça impressionne l'auditoire comme le ferait un mantra magique.
Du coup, n’importe quel vendeur de soupe parvient à fourguer de soit disant nouvelles méthodologies qui sont souvent des mauvaises resucées d’anciennes qu’elles obscurcissent par une novlangue prétentieuse et absconte.
Autre mode épouvantable, celle des open-space, pièce où se trouvent plusieurs bureaux, c’est américain donc c’est chic, où il est très difficile voire parfois impossible de se concentrer, de réfléchir et de discuter au téléphone. Mais c’est à la mode, c’est in et c’est imposé par ces analphabètes de patrons qui ne consultent pas leurs salariés sur les conditions de travail qui leur conviendraient. Leur conception de la communication, c’est « cause toujours tu m’intéresse » ou bien « communique mais ne pense pas ». D’autre part, l’innovation ne nécessite pas d’être vissé à son bureau 8 heures par jour. Les bonnes idées viennent tout autant en allant se balader, en lisant de la littérature, en allant à la plage et toutes sortes d’autres activités…
Bien des patrons devraient retourner à l’école, ou ailleurs, pour réapprendre à réfléchir et appréhender des possibles évolutions, pour cesser de pourrir la vie de leurs salariés et de démolir les entreprises dont ils se prétendent les chefs et les propriétaires, bref les gourous. MEDEF si tu m’entends… D’ailleurs quelles sont les propositions du Medef pour combler les lacunes des entreprises en termes d’innovation ?
On parle beaucoup des problèmes de la recherche publique mais pas de ceux de la recherche privée, en France, qui est pourtant la suite évidente de la première. Sauf quand des ingénieurs RD de Renault décident de s’échapper du broyeur, et de sa langue de bois, kafkaïen-managérial par l’autodestruction.
Je ne sais pas pour qui je vais voter, ni même si je vais voter, mais j’ai trouvé assez savoureux de voir comment Ségolène Royal a étrillé Mme Parisot du Medef lors d’une émission récente, combat épique de mantes religieuses.
Mme Parisot n’a pour argument sociétal et économique que le haro sur les 35 heures qui selon un article récent d’Alternatives Economiques ne se révèlent pas si néfastes au regard de l’étude économique présentée.
D’autre part, je n’ai pas l’impression que les syndicats s’impliquent réellement concernant l’organisation des secteurs dits de haute valeur ajoutée.
(Il faut reconnaître que bien des cadres sont des véritables mollusques patiemment zombifiés.
Ils se prétendent leaders ou managers et sont incapables d’envisager une stratégie commune pour contrer leurs patrons ubuesques à la différence des simples salariés de production qui montrent un peu plus de combativité et de cohérence. Sans doute que comme pour tout premier de la classe congénital, il faut avancer seul vers le sommet de la pyramide. La plus haute marche mérite bien un peu de lâcheté et de bêtise mâtinée de fourberie.)
C’est dommage, parce que c’est là que ça se passe aussi. De l’amélioration et de l’innovation, il va bien en falloir un peu pour commencer à réduire les problèmes écologiques et sociaux.
Il faut reconnaître qu’aujourd’hui la masse des syndiqués est formée de travailleurs peu qualifiés et vieillissants. Cela ne facilite pas le dialogue avec les ingénieurs en RD ou les spécialistes en général. Mais, il ne faudrait pas qu’ils en concluent que les syndicats les méconnaissent ou se désintéressent de leurs conditions de travail. Peut-être faut-il innover dans l’action syndicale pour qu’elle prenne un sens nouveau et que chaque salarié, quelque soit son niveau, puisse s’y investir. (Mais je reconnais que personnellement, je n’ai pas de recette à proposer).
En ce qui concerne le passage en open-space, je suis en plein dans le problème chaque jour. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’une question d’idéologie ou d’incompétence des directions. C’est tout simplement une question de prix du m² ou même aujourd’hui du cm² de surface. (Le prix de l’immobilier est tel que les directions suivent des ratios au cm²).
De la même façon et à l’inverse la soudaine passion des directions pour la RSE (la responsabilité sociale de l’entreprise) vient moins d’une conscience de la gravité des problèmes d’environnement que du coût des postes « utilities » dans les comptes d’exploitation. Les objectifs de « carbone zéro » sont d’abord fondés sur des objectifs de réduction des coûts. Il en va de même de la passion nouvelle pour le recyclage.
Quand je dis qu’il faut faire entrer la démocratie dans l’entreprise, je ne dis pas qu’elle doit nécessairement prendre la forme d’une dictature du plus grand nombre (donc a priori des moins qualifiés). Ce serait remplacer la dictature de l’argent et du profit par une autre qui risquerait de ne pas être moins extravagante dans ses décisions. Non, je pense que le droit à l’information et le droit d’expression doivent respectés ; que les nomenklaturas ne doivent pas être acceptées ; que les décisions doivent être prises chaque fois que c’est possible au plus près de ceux qui ont à les exécuter ; qu’elles doivent être, aussi souvent que possible, collégiales ; que les directions doivent pouvoir être jugées et invalidées, qu’elles doivent être responsables devant le personnel plutôt que devant les actionnaires.
En ce qui concerne le coût calculé au cm2 justifiant les open spaces, il me semble qu'il s'agit d'une myopie de comptables ou d'agents immobiliers étriqués et tétanisés sur leurs additions partielles ne tenant justement pas compte de ce qu'en économie on appelle les externalités de Ricardo.
En l'occurrence, le méconfort préjudiciable à toute activité est sans doute largement générateur de coûts non comptabilisés dans les matrices à oeillères actuelles financières.
En ce qui me concerne, la où je suis le prix du M2 est loin de celui de Paris et des solutions économiquement et humainement viables étaient possibles.
S'en tenir aux critères comptables actuels, faisant office de caution liturgique, ne suffit pas car ceux ci sont très souvent incomplets et caricaturaux.
Je pense que l'idéologie freine largement de manière préconsciente, comme la publicité, la recherche de solutions vivables et la détourne. D'où la nécessité d'extirper tenacement, et je dirai même, impitoyablement, l'idéologie et ses pseudos modèles scientifiques de nos créations. Une forme d’écologie conceptuelle.
En l'occurrence, le méconfort préjudiciable à toute activité et à toute vie est sans doute largement générateur de coûts non comptabilisés dans les matrices financières à œillères des bêtes de somme actuelles de la finance.
Pour ce qui est des nomenklaturas, je ne préconise pas la dictature du peuple ni aucune autre dictature qui de toute façon ne présenterai aucune forme d’intérêt existentiel.
Mais il faut bien constater que la balance des pouvoirs actuels penche à l’évidence du côté de la dictature à tête de taureau de la finance sublimée et de ses calculs hasardeux générant les paradis fiscaux ainsi que ses transferts de fonds plus ou moins illicites vis-à-vis du droit fiscal, tout ça sous couvert de morale protestante (cf. Weber et le capitalisme) en costume rayé de consultant raffiné et communiquant, mais finalement assez souvent inculte( cf. Vincent Petitet « Les nettoyeurs »)
Si les concertations sont de moins en moins collégiales dans l’entreprise, sans doute le presse citron des exigences croissantes du bréviaire de rentabilité (ça ne suffit jamais) de la finance n’y sont pas pour rien.
Quid de tout ça dans cette campagne présidentielle qui m’apparaît comme une foire de baumes au cœur façon je vous aime, je soignerai vos écrouelles, m’aimez vous ?
Même le sortant président s’y est mis pour ses adieux. Amen et alléluia, nous irons tous au paradis. Si c’est le cas, tant mieux, mais ça ne sera pas beaucoup grâce à eux et le chemin sera plus dur pour certains. Je n’ai pas d’animosité à l’égard des affects ou de la comptabilité, mais sont ils nécessaires au point de tout recouvrir.
sur la logique et la pente de la hiérachie qui tend naturellement à son niveau miximale d'incompétance et d'irresposabilité ( c'est toujours le trou du cul qu'est chef) , je vous signale puisque c'est un thème qui revient un peu dans les temoignages précédents un article (très instructif) de jean zin que j'ai trouvé sur son ancien site sur le principe de peter.
jeanzin.free.fr/ecorevo/p...
un piste pour éviter le déregelement hiérachique (et garantir son bonheur) sera de privilègier la qualité de la vie (au travail j'imagine)contre de quantitatif et les avantages matérielles que peuvent donner une promotion dans la hiérarchie . une piste pourrait bien être de promouvoir le dialogue et la démocratie dans l'entreprise et de rendre la promotion détestable . je me souvient d'un livre de pierre clastre , la société contre l'état , où le chef de certaines tribus indiennes à qui ont octroyait le droit d'avoir plusieur femme devait en revanche redistribuer en permanence ses richesses à ses subordonés si bien que le chef apparaissait comme l'indien le plus déplumé et le plus miteux . la piste de limiter au maximum le nombre d'échelon dans la hierachie n'est pas non plus à négliger .
Le travail exige le repos, bien sûr, et d'autant plus qu'il est créatif. La paresse a certainement une fonction essentielle, pour autant qu'elle existe, ce qui est souvent douteux, et qu'elle ne soit pas une religion. Une paresse active n'est pas très différente d'un travail dès lors qu'on occupe une fonction sociale ou que notre production rencontre une reconnaissance sociale sinon c'est tout simplement triste (y compris quand on travaille à plus long terme, c'est ce qui en fait toute la difficulté même si le résultat en vaut la chandelle).
Quand je parle de qualité de vie au travail, je fais surtout allusion au productivisme et à la pression sur les travailleurs contre lesquels il faut lutter mais c'est bien sûr anti-capitaliste, on ne pourra démocratiser des "centres de profit". Il ne s'agit que de trouver un biais pour faire converger les luttes vers une économie plus écologique et relocalisée. Bien sûr les syndicats n'ont jamais abandonné les conditions de travail sur le terrain, mais dans un sens très restreint et qui ne débouche pas sur des mouvements de masse. Les 35H ont souvent aggravés les conditions de travail (sauf pour les cadres qui en sont les grands bénéficiaires).
Quand à l'identification de la grande entreprise avec les régimes totalitaires, ce n'est pas une nouveauté (voir "L'imprécateur" entre autres, ou "Souffrances en France") mais Galbraith est ici le plus précis dans l'identification des multinationales avec des bureaucraties aussi inefficientes que les régimes communistes.
jeanzin.free.fr/ecorevo/p...
Une des plus grandes escroqueries de l'idéologie libérale c'est l'opposition du public au privé, ou plutôt de la bureaucratie étatique corrompue à l'entreprise privée performante alors que l'entreprise est devenue une bureaucratie depuis longtemps déjà, du moins les grandes entreprises.
Galbraith est aussi lucide sur le travail :
"Le mot travail s'applique simultanément à ceux pour lesquels il est épuisant, fastidieux, désagréable, et à ceux qui y prennent manifestement plaisir et n'y voient aucune contrainte [...] User du même mot pour les deux situations est déjà un signe évident d'escroquerie.
Mais ce n'est pas tout. Les individus qui prennent le plus plaisir à leur travail - on ne le soulignera jamais assez - sont presque universellement les mieux payés". (Galbraith p34)
Les mensonges de l'économie, J.K. Galbraith, Grasset, 2004
Ce que je regrette dans l'extrême gauche ou les syndicats, ce n'est pas la radicalité, encore moins la défense des travailleurs, c'est l'idéologie archaïque, c'est le manque d'idée, arc-boutés sur les conquêtes du passé sans pouvoir en imaginer de nouvelles, c'est leur faiblesse que je regrette et leur décomposition, l'impasse où ils mènent un mouvement social qui ne débouche sur rien depuis des années. Il faut régulièrement une régénération de toutes les institutions (une destruction créatrice) mais on a besoin de partis révolutionnaires et de syndicats puissants, ce n'est pas le cas actuellement.
Il est vrai que les patrons sont aussi archaïques et s'agrippent à des modèles de propriété immatérielle dépassés, se montrant la plupart du temps incapables de comprendre le caractère non-linéaire de la recherche et de la production immatérielle. L'incompétence est bien la règle, avec beaucoup de pédantrie aussi.
Les grandes ruptures de civilisations sont difficiles à vivre et on arrive à gâcher toutes nos chances en allant au pire semble-t-il, où se délivrer de la nécessité du travail devient une nouvelle malédiction, et la liberté se transforme en précarité. Il n'y aura pas de solution magique et il faudra toujours renverser les directions sclérosés, il faut faire de la qualité de la vie et du vivre ensemble notre revendication prioritaire. On en est loin...
un point sur lequel, je pense, vous êtes mal informé :
les 35 heures bénéficient aux salariés les moins qualifiés mais beaucoup plus rarement aux cadres qui sont amenés à faire des heures supplémentaires non payées.
Tout syndicaliste que je suis j'ai dû en passer par là pendant des années du seul fait que j'avais un résultat à obtenir et c'est vrai un travail créatif que je voulais mener à bien. C'était tout bénéfice pour la direction qui abuse cyniquement de la loyauté et de la bonne volonté des cadres. Un très petit nombre (que j'ai appelé la nomenklatura) bénéfice des largesses (les cadres "politiques")
J’ai une autre critique plus grave à formuler :
Je ne suis pas du tout d’accord avec l’affirmation que les idées des syndicats sont « archaïques ». Vous répétez naïvement ce que serine sans arrêt la propagande de droite.
Il n’y a en fait que dans les syndicats qu’on réfléchisse sérieusement aux problèmes du travail en partant, non d’utopies comme les ateliers communaux ou les coopératives, mais des réalités de l’économie : la situation dans les grands groupes et les PME.
Il n’y a que les syndicats qui soient en mesure aujourd’hui de mener des luttes de masse. Et même si leur audience est réduite par le martelage idéologique (auquel vous cédez vous-mêmes), ils permettent, par leur patient travail sur le terrain, ces réveils du monde du travail qui surprennent toujours la droite par leur vigueur et leur radicalité.
Je suis, bien sûr, habitué à être en désaccord avec les idéologies du moment et tous les groupes organisés. Je suis habitué à l'incompréhension, au malentendu et au mépris, rien là pour m'étonner, et pourquoi donc aurais-je raison contre les syndicats et contre tout le monde ? Pas la peine de prendre la peine de me lire si je ne dis rien qui vaille mais faut-il pour cela me prendre pour un crétin intégral ? Certes, je suis le premier à reconnaître à quel point notre rationalité est limitée, mais nous pourrions être de la même espèce sur ce point et certes on a tendance à ne pas voir plus loin que ce qu'on a toujours connu ! Pas la peine d'asséner des certitudes pour surtout ne rien changer et prouver ainsi l'archaïsme dont on se défend.
Continuez comme ça, il n'y a rien à redire, c'est parfait, quand il n'y aura plus du tout de syndicat et de droit du travail il n'y aura plus de syndicaliste satisfait de soi non plus ! Les réveils du monde du travail surprennent souvent les syndicats plus qu'ils ne les provoquent, ce que je déplore car je voudrais des syndicats plus forts et plus révolutionnaires et c'est pour cela qu'il faudraient qu'ils soient moins dogmatiques et archaïques (ce n'est pas seulement une calomnie du patronat qui profite outrageusement de son avance pour mener l'offensive).
J'ai été délégué syndical dans ma jeunesse et j'ai pratiqué assez de syndicalistes, souvent trotskystes d'ailleurs, que ce soit chez les Verts ou à ATTAC, pour que leur dogmatisme soit quelque chose que je ne connais pas seulement par ouï-dire mais l'archaïsme des syndicats comme organisation est un fait massif qu'il faut reconnaître pour le dépasser même si c'est presque impossible étant donnée la constitution sociologique de leur base actuelle. Il ne suffit pas de se référer à ce qui existait les 60 dernières années, et qui existe certes encore massivement, pour que la défense des avantages acquis (et du capitalisme salarial) garde un sens pour les 60 années qui viennent. Il ne s'agit pas d'abandonner nos droits mais d'en conquérir de nouveaux, de plus effectifs et plus adaptés aux nouvelles forces productives et aux contraintes écologiques. Certes les syndicats étudient le problème, on est friand de Friot et autres belles théories qui font miroiter l'illusion que tout pourrait redevenir comme avant. Il y a de quoi être désespéré de ce manque de clairvoyance qui n'est pas l'apanage des syndicats, loin de là (c'est comme la sauvegarde des droits d'auteur dans le domaine numérique). Je ne dis pas que les propositions que j'ai pu tirer de l'analyse des transformations du travail à l'ère de l'information seraient satisfaisantes, j'en éprouve trop l'insuffisance, du moins elles répondent à des réalités émergentes qui se généralisent. Qu'on trouve mieux mais il faut s'affronter aux défis de l'avenir et aux souffrances du présent, pas rester tourné vers le passé.
Sinon, il y a évidemment beaucoup de cadres qui ne comptent pas leurs heures, pas seulement les cadres dirigeants, c'est ce que je dis dans mon texte mais, sur la masse, les 35h ont été l'occasion pour un nombre important de ceux qui ont le titre de "cadres", et pas forcément la fonction, de réduire drastiquement leurs horaires. Quand à dire que ce sont les moins qualifiés qui en ont profité je trouve que c'est vite dit mais il ne m'intéresse pas de polémiquer sur ce sujet et seulement sur le fait qu'il faut passer du quantitatif au qualitatif même si cela ne sert à rien et que c'est ce qui s'est toujours fait, à ce qu'il paraît !
ébé, quand on lit certains propos, on est finalement aussi loin du futur que du passé finalement, où par exemple était encore inscrit l'abolition du travail salarié dans les statuts de la CGT.
C'est vrai, c'est tellement mieux de s'occuper de la "réalité de l'économie" du moment, sûrement indépassable non ? tien ça vient pas de la propagande de droite ça ?
Occupons nous donc que du moment strictement présent, et cette "réalité" on finira par se la prendre en pleine gueule (parce que tout est lié).
Qu'ont fait les syndicats pendant la révolte anti-cpe à par siffler la fin de la récréation ? ou fournir un service d'ordre débile (à matraques molles certes).
Non seulement les syndicats sont archaïques comme le démontre Jean Zin, mais ils oublient aussi d'où ils viennent.
D'ailleurs en manife ils me font chier avec leurs camions kiloutou et la grosse sono à soupe marchande qui fout le camp en Suisse.
Enfin "les 35 heures qui bénéficient aux salariés les moins qualifiés", vaste blague, c'est vrai qu'on entend absolument personne se plaindre de l'augmentation des cadences.
L'état lamentable du syndicalisme français a des causes objectives, le pire étant les dérives de la CFDT dont la responsabilité est aussi grande que celle du patronat dans le développement de la précarité et de l'exclusion avec la réduction constante des chômeurs indemnisés. La bonne conscience de ces social-traîtres était confondante, fiers de réduire l'indemnisation des précaires afin de ne pas encourager le développement du précariat !!! Il faut voir le niveau de bêtise criminelle. Le problème, il faut s'en persuader, ce n'est pas l'autre, ce n'est pas le patronat, c'est nous et ceux qui prétendent nous défendre (pareil pour les Verts qui sont responsables de la faillite de l'écologie). Ce n'est pas dédouaner le patronat dont les théories sont au moins aussi débiles (la lutte entre risquophiles et risquophobes comme cache sexe de la lutte des classes) mais le problème n'est pas la méchanceté supposée des exploiteurs du peuple, c'est le fonctionnement du système lui-même, basé sur le profit, sur l'actionnariat où les entreprises ne servent aux actionnaires qu'à faire du profit, ne servent qu'à faire de l'argent avec de l'argent, système qu'on ne peut vraiment réformer et auquel il faudrait opposer des alternatives viables ce qui est loin d'être le cas. Même en remplaçant les directions actuelles par des syndicats, cela ne serait guère mieux, sauf sans doute les premiers temps, dès lors que les règles du marché n'auront pas changé (qui sont la raison même des grandes entreprises).
Il est assez comique effectivement de voir un syndicat qui voulait l'abolition du salariat s'en faire le plus ardent défenseur, un peu comme certains esclaves refusaient leur nouvelle liberté, refusant que leur propriétaire les laisse tomber, avec quelques raisons pour certains au moins. Il y a bien sûr toute une belle théorie derrière, un trotsko-syndicalisme qui est une sorte de dégénérescence de l'anarcho-syndicalisme, et qui voudrait, comme dit à peu près Michel Husson, "tout le monde salarié pour abolir le salariat" ! Dans la débilité, c'est un extrême, mais bien sûr on est tous susceptibles de tomber dans cet excès de dialectique ! Rien de pire pour ces gens là que le travail autonome car il faut se socialiser dans des entreprise de masse pour y prendre le pouvoir. Bien sûr, c'est le syndicat qui compte prendre ainsi le pouvoir, perspective oh combien alléchante quand on voit ce que deviennent toutes les organisations au bout d'un certain temps... En tout cas impossible de discuter avec ces gens là si sûrs d'eux-mêmes, d'être dans la vraie réalité, pas comme ces petits-bourgeois utopistes, alors que la réalité les dément, la précarité s'étend, les conditions de vie se dégradent et qu'ils ne permettent même pas à des luttes victorieuses comme la résistance au CPE de déboucher sur quoi que ce soit ! On est mal barré. Il faut que ça pète mais en l'absence de toute alternative, il faut s'attendre au pire...
Je n'ai rien contre le travail autonome ou les expériences d'autogérence mais imaginer qu'on va dissoudre les grands groupes financiers ou industriel, çà je ne le peux pas!
Je n'imagine même pas qu'on puisse arriver à un contrôle social sur eux sans un mouvement d'ampleur mondiale;
S'il fallait rêver pour agir, c'est d'une nouvelle internationale dont je rêverais.
En attendant, je prends ma part quotidienne à la résistance au libéralisme ; c'est facile de parler d'archaïsme mais diriez-vous cela d'un paysan du tiers monde qui va chaque jour tirer l'eau au puits. Il est comme moi, il voudrait bien être un peu moins "archaïque".
Quant à l'idée que le MEDEF est idiot; çà non plus je ne le crois pas. Les meilleurs cerveaux se mettent au service du pouvoir; regardez les fonctionnaires de Bruxelles par exemple.
Il ne faut pas confondre le discours qui est étudié pour être efficace et la réflexion qui est derrière.
Je ne peux que vous donner raison sur le fait que le travail autonome n'est pas pour tout le monde et qu'on ne supprimera pas plus les grandes entreprises que celles-ci n'ont supprimé l'agriculture, on peut juste espérer une certaine marginalisation progressive... il ne s'agit que d'avoir une alternative possible, ce qui change complètement les rapports de force. Il faudrait lire mes autres textes pour voir que je suis loin d'être un utopiste ou de promettre une abolition immédiate du salariat et du capitalisme qui en est l'autre face. Ces changements de système de production prennent du temps mais dès qu'ils se produisent, l'ancien système perd son hégémonie même si, comme en 1848 avec le salariat émergeant, plus de 90% de la population vit encore de l'ancien mode de production.
Il faut, bien sûr, un syndicalisme salarial comme il y a un syndicalisme paysan et ne pas croire qu'il n'y a qu'un seul modèle. L'archaïsme n'est pas d'être paysan encore aujourd'hui, ce serait de croire comme les physiocrates que toute richesse vient de la terre comme les archéo-marxistes s'imaginent que seul le temps de travail mesure la richesse (valeur-travail) alors que Marx, dans les Grundisse, annonçait déjà que cela n'aurait qu'un temps. L'archaïsme est dans les têtes mais ce n'est pas une faute individuelle, c'est ce qui rend notre époque historique, une nouvelle interprétation du monde à trouver pour nous unifier dans l'action commune. Il faut admettre qu'on ne reviendra pas en arrière et regarder vers le futur mais aucune révolution ne nous sauvera par miracle, la solution ne tombera pas du ciel ni aucune internationale (comme il s'en forme en Amérique du Sud, cela ne va pas loin).
Il y a certes beaucoup d'intelligence vendu au patronat mais ce ne sont peut-être pas les plus intelligents qui savent le mieux se vendre et il est un fait qu'il ne suffit pas de réunir des gens très intelligents pour éviter les comportements collectifs idiots. Voyez qui est président des Etats-Unis, voyez le désastre irakien alors qu'il suffit d'un petit groupe comme les situationnistes pour déstabiliser une société et faire l'esprit 68 malgré la débilité des orgas plus ou moins de masse qui occupaient le terrain. De loin on croit que la science est toute puissante et les intellectuels très intelligents, quand on va y voir de plus près on se rend compte à quel point cette confiance est excessive. Voir l'ennemi personnifié comme un patronat majuscule qui sait tout et organise tout notre malheur est pure folie, forme de théorie du complot. Il ne manque pas de comploteurs et de cercles de manipulateurs mais ils sont plutôt en concurrence car le patronat est divisé, il n'y a pas d'unité des intérêts privés et ce n'est pas l'esprit qui brille chez ces canailles. Il faut bien dire que la connerie domine partout ou presque (à l'université, dans les médias, sur Internet) même si ce n'est pas la même connerie que celle de nos pères, et, bien sûr, j'ai ma part de bêtise qui fera bien ma perte, j'essaie du moins de trouver des solutions, d'indiquer des pistes, de montrer les contraintes, l'utopie c'est de croire que tout pourrait continuer comme maintenant, avec juste un peu de résistance de notre part alors qu'on a passé la ligne sans doute et que tout a déjà changé, qu'il suffit de le reconnaître, faire place à une nouvelle réalité, pas vouloir en faire la seule !
Nous reviendrions à un véritable débat philosophique si vous argumentiez cette idée que la « valeur travail » ne serait plus la valeur qui, en dernier ressort, gouverne les échanges (c’est du moins comme cela que je comprends ce que vous avez écrit).
Je pense qu’il ne faut pas confondre l’idée naïve que cette valeur se mesurerait en temps passé (plus ou moins corrigée d’un multiplicateur lié à la qualité) et celle que les fluctuations des marchés sont déterminés en dernier ressort par la péréquation entre les valeurs travail incorporés dans les marchandises. Ce qui vaut aussi pour le marché du travail et fait de l’exploitation capitaliste non un scandale moral mais un mode de fonctionnement de l’économie (qui peut être dépassé et sera inévitablement dépassé).
A mon avis, « l’archéo-marxisme » n’est que le marxisme tel que le voudraient les critiques du marxisme.
Majoritairement, la valeur travail est historiquement et toujours actuellement assimilée au temps et à son entropie destructrice du capital humain. Il est assez compréhensible qu'il s’agisse d'une valeur comptable biologique au sens de l'irréversibilité de Prigogine. Par conséquent, mis à part quelques professions indépendantes, dites, pour certaines, créatives, seul le temps de l’horloge, reflet du destin biologique, indique la rémunération attribuable.
Pas de valeurs plus sûres et certaines, donc moins incontestables que le vieillissement, la dégradation et la mort.
Le capitalisme comptabilise les destructions avant même qu’il ne produise des richesses.
Je n’accuserai pas les syndicats d’archaïsme dans la mesure ou le paradigme ambiant est constitué de ce temps comptabilisable : la pointeuse de la productivité et le chronomètre des jeux olympiques, en résumé.
Impossible de traiter de la valeur-travail dans un commentaire, d'autant qu'il est aussi inutile d'essayer de convaincre à ce sujet de prétendus marxistes (comme JM Harribey) que de vouloir prouver à un chrétien l'évidence que Jésus n'a jamais existé (contrairement aux autres fondateurs de religion) !
D'abord rappelons que la théorie de la valeur-travail n'est pas de Marx mais de Ricardo. Ce que Marx a fait c'est d'en tirer la théorie de la plus value, elle-même pas du tout comprise par les "marxistes" dont l'interprétation courante est celle de Proudhon dénoncée explicitement par Marx dans "Misère de la philosophie". La plus-value résulte du fait que l'investissement capitaliste permet de réduire le temps de travail et profiter ainsi du différentiel avec le temps de travail nécessaire jusque là, tant que la concurrence n'a pas égalisé la productivité et les prix. Tout ceci n'étant possible que dans le cadre du salariat où ce qui est payé ce n'est pas la production effective mais le temps de travail, temps de machine plutôt, et que les prolétaires ne disposant pas de machines (contrairement à l'ordinateur personnel actuellement) sont obligés de vendre leur force de travail à ceux qui possèdent les moyens de production.
Ce qui se passe avec le devenir immatériel de l'économie (prévu par Marx dans les Grundisse), c'est que la production n'est plus linéaire, plus proportionnelle au temps passé mais devient très aléatoire et non mesurable. C'est un peu comme dans le domaine artistique. Les "marxistes" croient s'en tirer en disant que la valeur d'une oeuvre d'art résulte d'une péréquation statistique entre tout le travail dépensé pour rien dans des oeuvres ratés et les rares oeuvres qui prennent un valeur infinie mais c'est absurde car cela ne permet pas de dégager une plus-value en fonction du temps de travail et, surtout, les productions immatérielles ne sont plus des valeurs d'échange qui pourraient s'échanger en fonction du travail incorporé (un produit à la mode acheté aujourd'hui peut ne plus rien valoir demain n'ayant pas la valeur d'échange d'une table contre 4 chaises par exemple).
Bien sûr, de même que l'agriculture n'a pas disparue avec le capitalisme, il reste de larges pans de l'industrie qui sont encore régis par la valeur-travail mais ce n'est pas le cas des métiers créatifs, du "travail virtuose" et de l'essentiel des nouveaux emplois, ce que le patronat lui-même n'arrive pas à comprendre le plus souvent puisqu'il y a dés lors contradiction entre les rapports de production (salariat payé au temps) et les nouvelles forces productives qui ne se mesurent plus au temps passé.
Pour plus de développements voir, entre autres (j'ai beaucoup écrit sur le sujet) ce texte de mai 2000, écrit juste avant l'explosion de la bulle Internet (réalités et potentiel de la nouvelle économie) :
jeanzin.free.fr/ecorevo/p...
"A mesure que la grande industrie se développe, la création de richesses en vient à dépendre moins du temps de travail et de la quantité de travail utilisée, que de la puissance des agents qui sont mis en mouvement pendant la durée du travail. L'énorme efficience de ces agents est, à son tour, sans rapport aucun avec le temps de travail immédiat que coûte leur production. Elle dépend bien plutôt du niveau général de la science et du progrès de la technologie ou de l'application de cette science à la production. [...] Dés que le travail, sous sa forme immédiate, a cessé d'être la source principale de la richesse, le temps de travail cesse et doit cesser d'être sa mesure, et la valeur d'échange cesse donc aussi d'être la mesure de la valeur d'usage" Grundisse II, p. 220-221
Principes d'une critique de l'économie politique, p 301
Dans la mesure où le temps - quantum de travail - est posé par le capital comme le seul élément déterminant de la production, le travail direct pris comme principe de création des valeurs d'usage disparaît ou du moins se trouve réduit quantitativement et qualitativement à un rôle certes indispensable, mais subalterne, au regard du travail scientifique en général, de l'application technologique des sciences naturelles, et de la force productive générale issue de l'organisation sociale de l'ensemble de la production - qui apparaît comme le don naturel du travail social (bien qu'il s'agisse d'un produit historique). Le capital oeuvre ainsi à sa propre dissolution comme forme qui domine la production.
Voir aussi :
Sur l'abolition du salariat
Capitalisme, salariat, productivisme et nouvelle économie
Je ne sais rien de JM Harribey et de ses positions.
Comme vous, je lis :
« Dés que le travail, sous sa forme immédiate, a cessé d'être la source principale de la richesse, le temps de travail cesse et doit cesser d'être sa mesure, et la valeur d'échange cesse donc aussi d'être la mesure de la valeur d'usage" »
Je vous ferais seulement observer que ce texte va exactement dans le sens de ce que je soutenais (mais que j’ai peut-être mal exprimé) et qu’il n’envisage aucunement une économie « immatérielle ». Il n’autorise pas une remise en question de la compréhension du marxisme et du Capital en particulier.
Ce texte dit que le travail « sous sa forme immédiate » (c'est-à-dire le travail comme activité physique simple) n’est pas, dans une économie développée, la source « principale » de la richesse. On ne peut donc pas mesurer la valeur d’une production en temps passé et en calories brûlées. (les expressions « formes immédiates » et « principale » sont claires)
Marx est d’ailleurs explicite, il écrit :
« le temps de travail cesse et doit cesser d’être sa mesure » c'est-à-dire la mesure de la richesse.
(Marx vise bien le « temps de travail » et non le travail)
Le travail est donc, dans une économie développée, un travail complexe, à haute valeur ajoutée, qui ne se mesure pas en temps ; ce qui ne signifie aucunement que sa valeur (la valeur travail) a disparue et qu’elle a cessé d’être le moteur des péréquations en capitaux et marchandises.
Cela ne remet donc nullement en cause la notion de valeur travail ou celle de plus-value.
La plus-value étant définie la forme économique la plus générale du surproduit en régime capitaliste. Elle peut être une plus-value « absolue » obtenue soit par la prolongation de la journée de travail, soit par l’augmentation de l’intensité du travail
Ou
une plus-value « relative » qui provient d’une diminution du temps de travail nécessaire à la production (de marchandises et de services) sur la base de l’augmentation de la productivité du fait du progrès technique et de l’innovation. Cette plus-value ne se saisit pas au niveau d’une production mais est un produit du fonctionnement global de l’économie partagé ou disputé par la classe capitaliste.
Ceci étant dit, je vais lire ce que vous avez écrit sur ce sujet (fondamental).
Concernant, l'intensité du travail, je ne vois pas comment cela peut être quantifié. La création immatérielle, culture, recherche etc, sont le fruit de plusieurs années d'intérêt porté sur un ou plusieurs domaines d'intérêts personnels.
On en revient toujours à la légitimité des modes d'évaluation des rémunérations concernant ces secteurs en croissance.
A part ça, je viens de découvrir les réflexions de Yves SALESSE sur le site : dsedh.free.fr/emissions_p...
C'est écoutable en MP3. Ca vaut le détour, en particulier concernant le fonctionnement des procédures de décision de la communauté européenne et des gouvernements des pays membres.
Comment se fait il que les traités européens aient pu passer le filtre
du conseil constitutionnel français. Avez vous une réponse ?
Je n'ai pas le temps d'aller écouter Yves Salesse qui fait partie des anciens trotskystes (même si c'est un des meilleurs de la bande), ni de poursuivre la discussion sur le travail. Pensez ce que vous voulez et si j'ai tort tant mieux, on reviendra au salariat unifié comme Husson en rêve encore dans un texte qui vient de paraître, ne voyant pas comme il participe ainsi à renforcer l'exclusion des outsiders et des jeunes qu'il voudrait dénier. Je sais bien que la bêtise règne inévitablement et ne se plie qu'aux contraintes du réel (mais il faut du temps et tant de souffrances). Je donne des éléments, des pistes, des analyses, faites en ce que vous voulez...
Un travail qui ne se mesure plus en "temps de travail" ne peut se mesurer qu'à son produit, ce qui remet en cause le salariat (pas le fait que le travail produit de la valeur mais de façon aléatoire). Le salariat consiste à payer un temps de travail supposé mesurable et linéaire mais surtout à payer le travail immédiat alors que plus ça va et plus le "travail virtuose" implique un travail de formation et d'information extérieur (et tout ce qu'on appelle les externalités positives fournies par les services publics notamment), la productivité étant de plus en plus globale. Tout cela provoque une crise de la mesure qui remet en cause profondément les rapports salariaux et il n'est pas vivable que le patronat essaie de profiter de toutes ces externalités sans participer à leur financement.
Désolé de ne pas en dire plus, mais il faut que je travaille...
Bon, il faudra que je passe du temps à voir en quoi Salesse est un trotskyste. C'est certainement instructif.
Ceci dit, je me trouve en parfait accord avec le fait que le patronat profite du hiatus entre productivité quantifiable matérielle proche des conceptions masse-énergie de la physique, y compris relativiste, et de conceptions qui relèveraient plus de la mécanique quantique( sur lesquelles le patronat ne s'interroge sûrement pas beaucoup ) et des diverses approches de l'information qui lui sont concomitantes.
bonjour Olaf
je parasite quelque peu le debat en cours
pour tenter de repondre a ta question
Comment se fait il que les traités européens aient pu passer le filtre
du conseil constitutionnel français.
Je me suis pose cette question depuis plus de 3 mois quand j’ai appris qu'un deputé conservateur allemand a pu attaquer la ratification du TCE par les deputés allemands et provoquer l’annulation de ce vote devant la cour constitutionnelle allemande et donc empecher le president de la RFA de signer le TCE.
Cette remise en cause juridique que les medias dominants se gardent d’evoquer a mis en crise la presidence Merckel et sa voie de recours pour sauver le traité, alors qu’en France les politiques se sont bien gardés apres le non de 2005,d’explorer les voies juridiques pour que ce vote soit legitimé.
Le TCE ne sera pas ratifié par l'Allemagne - Décision de la Cour constitutionnelle fédérale
Sur un recours du député de la CSU (Union Chrétienne Sociale, droite allemande avec son fief en Bavière), Peter Gauweiler, le TCE n'est pour l'instant pas validé par le Bundesverfassungsgericht, la Cour constitutionnelle fédérale allemande pour des raisons de non-conformité avec le Grundgesetz, la Loi fondamentale (Constitution allemande) et la seconde instance est reportée à 2009 à la fin de la procédure de ratification par tous les Etats membres partie au Traité de la Constitution Européenne.
Le juge auprès de la seconde Chambre de la Cour constitutionnelle fédérale, Siegfried Broß, estime en première instance qu'il manque un tribunal pour les questions de conflit de compétence dans des questions de collision entre le droit national allemand et le droit européen. Siegfried Broß, s'est exprimé en faveur de l'organisation d'un référendum en Allemagne sur le TCE et l'a signifié aux autorités du Bundestag allemand (Parlement, diète fédérale) et du Bundesrat (seconde Chambre, celle des Länder).
La Cour constitutionnelle fédérale ne s'est pas prononcée dans sa globalité quant au fond pour éviter de devenir elle-même co-rédactrice de la Constitution Européenne qui, selon elle est elle-même susceptible de connaître de profonds changements.
http://www.renovezmaintenant67.e...
Mon explication provisoire est que les membres du conseil constitutionnel etant nommés par ceux la meme qu’ils ont servi,ne peuvent pas naturellement se dejuger.
Mais qu’aucun politicien ne se soit risquer d’explorer les voies juridiques pour attaquer les traités meme un anti Maastricht comme Schivardi est sans reponse.
La réponse m'éclaire.
Manifestement, il y a une oblitération politique et médiatique de la question juridique concernant la question européenne.
Que les divers candidats présidentiables n'y fassent pas référence constitue la signature de leur inconsistance.
En dehors des berceuces, peu de perspectives émergent.
Encore une fois, c'est la ritournelle de l'impuissance tous azimuts qui s'affirme.
Bonjour,
moi je vis au Maroc et je suis entrain de gerer ma carriere professionnelle j'ai 6ans d'experiance en tout et j'ai passé par 3 grandes entreprises (mnt je commencerait avec la 4eme entreprise) et les changement vienne pour ameliorer le poste de responsabilite mais on me reproche toujours que c pas stable est ce que c'est vraie ou non?
Merci
Bonjour,
Un article très intéressant, j'ai surtout apprécié le passage sur les ethymologies, passionnant cette idée, qui rappelle le fonctionnement de la rumeur d'une certaine façon. C'est réjouissant de lire des articles de cette qualité sur le web, merci.