Le basculement du monde, soudain !

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mars 2006Il serait bien étonnant que le gouvernement ne mette pas un terme à la mobilisation étudiante en retirant le CPE. Même dans ce cas, l'essentiel semble pourtant déja acquis : le retour des mobilisations sociales et la reconstitution de nos solidarités devant ce qui a été perçu comme une déclaration ouverte de précarité par toute la société, au-delà de ses jeunes. Fini le temps des défaites, la honte a changé de camp, les revendications sociales ont retrouvé toute leur légitimité. Un nouveau cycle de luttes est enclenché et il y a longtemps que les circonstances n'avaient été aussi favorables.

Bien sûr tout pourrait retomber avec un retrait qui s'impose à l'évidence. On constate malgré tout que, dans les grandes crises, les pouvoirs s'obstinent souvent à envenimer les choses (les dieux aveuglent ceux qu'ils veulent perdre), ce qui n'est la plupart du temps que le symptôme d'une perte de légitimité de leur autorité. Pour l'instant le gouvernement semble avoir tout fait pour provoquer l'explosion et, s'il ne recule pas, ce sera le signe que décidément les temps sont bien mûrs pour une révolution !

Ce n'est pas du tout sûr encore, et le côté répétition de Mai 68 est certainement un obstacle pour résoudre les contradictions du moment, quoiqu'il soit indispensable à toute insurrection de se réapproprier la tradition révolutionnaire. L'essentiel reste d'avoir retrouvé l'esprit de résistance, une confiance mutuelle avec le besoin de se mobiliser pour refaire société, reconstituer une solidarité sociale perdue et combattre la nouvelle barbarie marchande qui nous prive d'avenir. Les valeurs s'inversent, de la réussite individuelle à la solidarité sociale. Les profiteurs vont se retrouver bien isolés tout-à-coup.

En tout cas la mobilisation étudiante est déjà exemplaire dans sa détermination et ce qui serait décisif c'est que les salariés tirent parti de ce rapport de force favorable pour s'y engager. C'est le moment ou jamais d'appeler à une mobilisation générale contre la précarité et pour un véritable développement humain, au-delà de la sécurité sociale.

Rien de mieux sans doute que des occupations, encore faudrait-il qu'elles ne soient pas trop dispersées pour pouvoir y concentrer des forces assez consistantes et libérer l'expression en liaison avec une coordination nationale.

C'est d'autant moins gagné que la situation internationale peut s'en mêler à court terme, mais après des années d'hiver, c'est déjà un beau début de printemps où la vie reprend soudain ses droits, comme si on pouvait de nouveau être fier d'être un homme et d'être bien vivant. Fini de se laisser faire !

...

PS du 13 mars : Incroyable, Villepin n'a pas cédé ! Au fond que nous dit-il ? Que la démocratie ne fonctionne pas et qu'il ne faut pas écouter les gens mais passer en force pour montrer son autorité afin d'être suivi par le peuple comme un guide. Que devons nous faire ? Retrouver le respect des citoyens et de leur expression pour refonder la société sur un projet commun et la volonté de vivre ensemble. C'est cela une révolution, l'auto-affirmation de la société contre un pouvoir illégitime.

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