Newsletter 06/06

Temps de lecture : 23 minutes

Leonard de VinciRevues scientifiques du mois de Juin 2006

  • Les forêts ne sont pas des puits de carbone
  • Drogues et neurotransmetteurs
  • Cerveau et méthode globale
  • L'ordinateur quantique
  • Les émotions sociales
  • L'environnement sculpteur de gènes
  • Refroidissement global !
  • Energie sombre et neutrinos
  • Les retombées de Tchernobyl
  • Le caractère culturel de l'intelligence
  • Vieillissement, hormone de croissance et insuline
  • Des anti-dépresseurs contre le cancer
  • Danger du faux sucre et collusion avec l'industrie

La moisson est assez riche ce mois-ci même si cette revue des revues a été faite dans des conditions difficiles car mon ordinateur ne marche plus que par intermittence...


La Recherche no 398, Les défis de l'ordinateur quantique


La Recherche - p12 Les forêts ne sont pas des puits de carbone

Il semblait que l'élévation du taux de CO2 pouvait accélérer le développement de la végétation puisque le CO2 pouvait être considéré comme le facteur limitant de la biomasse. Dans ce cas la végétation aurait pu participer à la régulation du CO2 en absorbant une part du surplus. En particulier les forêts étaient considérés comme de possibles "puits de carbone". C'est ce qui vient d'être réfuté. On avait déjà constaté que les forêts produisaient du méthane (dont l'effet de serre est supérieur au CO2). L'article de ce mois montre que la disponibilité de l'azote est un facteur limitant pour le développement de la végétation et donc pour l'absorbtion du CO2, mais surtout que :

Des expériences de terrain menées sur les forêts tempérées, montrent que les arbres adultes ne grandissent pas plus vite lorsque le CO2 atmosphérique augmente. De plus, même si les forêts se mettaient à croître plus rapidement, le carbone ne serait absorbé que temporairement. Il serait relargué dans l'atmosphère lors de la décomposition de la biomasse ou au grè des incendies. Ainsi, à moyen et long termes, les forêts sur une surface fixe ne constituent pas les puits de carbone invoqués par certains.

En fait, pour stocker le carbone il faudrait faire comme au carbonifère : enterrer les forêts...

- p22 Drogues et neurotransmetteurs

Il y avait 2 théories particulièrement simplistes et stupides qui dominaient depuis une dizaine d'années et qui consistaient à faire du manque de sérotonine la cause des dépressions et de la dopamine la seule responsable des toxicomanies. Evidemment les deux autres neurotransmetteurs interviennent dans un cas comme dans l'autre. C'est ce qui vient d'être démontré par l'équipe de Jean-Pol Tassin sur les souris pour la toxicomanie mais dans les deux cas, ce qui est en cause c'est la perturbation de la régulation biologique de l'équilibre entre dopamine, noradrénaline et sérotonine (la sérotonine et la dopamine en particulier ayant des effets antagonistes).

Chez la souris, le couplage entre leurs systèmes d'émission - qui d'ordinaire se régulent mutuellement lorsqu'ils sont activés - disparaît après quatre injections espacées d'amphétamines. Le découplage - qui dure plusieurs mois après la dernière prise - entraîne une hyperéactivité des neurones à sérotonine et à noradrénaline en cas d'événement stressants : la seule manière de lutter contre cette hyperéactivité serait de reprendre du produit. D'où la rechute.

- p23 Cerveau et méthode globale

Alors que le ministre de l'éducation vient de supprimer la méthode globale pour l'apprentissage de la lecture (ce qui est sans doute justifié) on vient de découvrir qu'il y a bien une zone du cerveau spécialisée dans la reconnaissance des mots écrits ("aire de la forme visuelle des mots"), un patient privé de cette aire étant obligé de déchiffrer péniblement une lettre après l'autre.

Cette spécialisation ne pouvant être héritée de nos lointains ancêtres, tous analphabètes, elle se développe probablement dans le cerveau des enfants pendant qu'ils apprennent à lire.

- p30 L'ordinateur quantique

Quelques mises au point intéressantes sur l'ordinateur quantique, ses perspectives et ses illusions. S'il est peu probable qu'on arrive à un véritable ordinateur quantique, le calcul quantique semble prometteur, apportant de nouveaux concepts, en particulier le fait qu'un "qubit" représente des probabilités et des superpositions d'état, c'est-à-dire des fonctions continues au lieu du simple "bit" du système binaire (on ne revient au système binaire qu'au moment de la mesure, qui supprime probabilité et superposition au profit d'une valeur binaire 0 ou 1, c'est ce qu'on appelle la "décohérence"), cela permet des calculs analogiques et de nouvelles opérations logiques étonnantes comme ce qu'on appelle la "racine carrée de NON" consistant pour un spin, dont le 0 et le 1 sont différenciés par une rotation de 180°, par une rotation de seulement 90°.

Cette porte quantique conduit à des résultats surprenants. En effet, une seule opération suivie d'une mesure de l'état du qubit renvoie celui-ci en position "0" ou "1", avec une probabilité de 50%. Autrement dit, en partant d'un état déterminé, on arrive dans un état apparemment "désordonné". Si cet état n'est pas mesuré, il est possible de répéter l'opération. On revient alors à un état déterminé! Ce processus est d'autant plus étonnant qu'il semble violer le deuxième principe de la thermodynamique, qui prédit l'accroissement du désordre pour un système. Cette porte logique n'a en fait aucune contrepartie en physique classique.

Cela n'empêche pas que le niveau quantique est très difficile à contrôler, surtout pour un grand nombre de qubits indispensables pour de véritables calculs alors que plus il y a d'interactions et plus il est difficile d'éviter le phénomène de décohérence.

S'y ajoute un "temps de cohérence" assez long pour pouvoir effectuer un grand nombre d'opérations élémentaires (potentiellement plusieurs milliers). Par contre, le taux d'erreurs d'une porte logique individuelle devra être amélioré d'un facteur au moins 100 pour que l'ordinateur quantique puisse fonctionner - ce qui est difficile mais pas inaccessible. Côté inconvénient, il faut noter la lenteur de l'opération d'une telle porte logique (10 000 fois plus lente que dans un micro-ordinateur).

Pour Dave Wineland, un "abysse quantique" sépare un système a priori accessible (100 qubits) et un ordinateur "universel" (1 000 000 qubits).

Il faut donc prendre avec circonspection l'annonce par "D-Wave" d'un prototype d'ordinateur quantique pour la fin de cette année et qu'il vaudrait mieux appeler un "calculateur quantique", en anglais "Quantum Information Processing" (QIP), loin de l'architecture de von Neumann. Ce sera plutôt "une plate-forme de simulation, de conception de produits et de processus relevant de la nanotechnologie". Comme dit S. Haroche "Il y a tellement d'autres choses passionnantes à faire qu'un ordinateur, la simulation de systèmes quantiques par exemple" mais cela restera très loin de la flexibilité d'un ordinateur universel.

- p46 Les émotions sociales

Il est un peu agaçant que cet article consacré aux émotions sociales s'intitule "Les traces cérébrales de la morale" alors que la morale est tout autre chose (voir "Misère de la morale") et ne se réduit pas à des "intuitions, des sentiments irréfléchis" qui concernent plutôt la "sensiblerie". On est en pleine confusion identifiant un phénomène rationnel avec un phénomène biologique témoignant simplement du fait que nous sommes des animaux sociaux. Il n'empêche qu'il est intéressant d'étudier les supports biologiques de la socialisation et des relations interpersonnelles (comme les neurotransmetteurs ou les drogues socialisantes). S'il me parait stupide de prétendre qu'un individu fidèle le serait non par vertu, mais par anticipation du "prix affectif" à payer (comme si la vertu était détachée de la réflexion et de tout calcul rationnel!), il est par contre évident "qu'éprouver des émotions morales dépendrait aussi de notre capacité à adopter le point de vue d'autrui et à nous représenter ses pensées" (ce qu'on appelle la "théorie de l'esprit").

En se mettant à la place de quelqu'un, en mentalisant sa souffrance, son ressentiment ou l'injustice de sa situation, nous éprouvons une palette d'émotions telles que la colère contre celui qui cause du tort, de la compassion pour la victime, un sentiment de culpabilité si l'on est soi-même l'auteur de ce tort, ou encore de l'embarras si l'on a le sentiment de s'être dévalorisé aux yeux d'autrui.

On distingue ainsi les émotions de condamnation d'autrui (colère ou mépris), les émotions autoconscientes (culpabilité ou fierté), les émotions d'empathie et celles de louange d'autrui (admiration ou gratitude). Il n'est cependant pas suffisant de se représenter les émotions de l'autre pour avoir une attitude "morale", il suffit de penser aux prédateurs et aux criminels...

- p58 L'environnement sculpteur de gènes

Le darwinisme continue à évoluer en intégrant de plus en plus précisément "l'hérédité des caractères acquis" et la dialectique entre environnement et gènes. On constate, en effet, une variation de certains organismes en fonction des conditions extérieures.

Cette importance de la plasticité phénotypique, jusque-là sous-estimée, soulève des questions. En effet, la sélection naturelle, agent moteur de l'évolution, porte sur les phénotypes, par exemple des caractères morphologiques ou comportementaux. Ce sont des différences phénotypiques entre individus qui leur confèrent des aptitudes différentes, notamment en terme de survie et de reproduction.

A court terme, la plasticité produit des variations qui ne sont pas transmises. Elle tend donc à s'opposer à l'évolution. Mais, à long terme, la plasticité constitue un caractère en tant que tel, susceptible d'être sélectionné s'il est bénéfique. C'est le cas lorsqu'il est avantageux pour une espèce de produire des individus au développement très flexible, capable de s'ajuster aux conditions de l'environnement. Mais de fait, dans de nombreuses espèces, le développement est apparemment peu sensible aux variations environnementales - on appelle canalisation cette capacité de résister aux changements.

La plasticité a-t-elle pour autant totalement disparu chez ces organismes ? Pas complètement : lorsque l'intensité du changement environnemental dépasse un certain seuil, la canalisation peut être rompue.

L'alternative est alors la suivante : si l'environnement continue à fluctuer, la plasticité phénotypique devient la règle. Mais si l'environnement se stabilise sur sa nouvelle valeur, la sélection tend à fixer la nouvelle morphologie.

Un des mécanismes de contrôle de cette plasticité implique une protéine dite Heat shock protein (ou Hsp90) produite lors d'un choc thermique (comme lors d'un sauna) et constituant un agent moléculaire de canalisation mais qui n'agit plus lorsque les conditions sont trop extrêmes, libérant alors les mutations (et les cancers?).

Hsp90 est ce qu'on appelle une protéine chaperonne : elle se fixe sur des protéines instables et les stabilise, leur permettant ainsi d'assurer leur fonction.

En termes évolutifs, les implications potentielles de cette découverte sont passionnantes. Si une population est soumise, comme c'est souvent le cas à la périphérie de l'aire de répartition d'une espèce, à des conditions environnementales inhabituelles, extrêmes, les mutations accumulées à l'état neutre se trouvent exprimées. La variation morphologique augmente alors brutalement, variation sur laquelle la sélection naturelle va pouvoir agir. La variation ayant une base génétique, cette sélection aura des effets sur la morphologie des descendants: en d'autres termes, elle aura des conséquences évolutives. Ce processus pourrait donc induire des différences de vitesse d'évolution : vitesse lente en conditions standard stables (effet "canalisant" des Hsp90 masquant les mutations) et rapide en conditions extrêmes (démasquage des mutations et sélection). Ceci n'est pas sans évoquer la théorie des équilibres ponctués, chère à Stephen Jay Gould.

- p92 Refroidissement global

Le compte-rendu du livre d'un climatologue américain (William Ruddiman, "Plows, Plagues and Petroleum. How Humans Took Control of Climate"), remet le réchauffement climatique en perspective sur le long terme. Nous sommes en effet dans une période dite interglaciaire et nous aurions dû subir une nouvelle glaciation depuis le déclin du rayonnement solaire il y a 11 000 ans (date de la fin de la dernière glaciation). Or l'auteur montre que l'homme a commencé à modifier le climat par son activité depuis le néolithique (depuis 8000 ans et surtout depuis 5000 ans), en particulier par la production de méthane (rizières, vaches) et par le déboisement, pas seulement dans les derniers siècles d'industrialisation passant bien sûr à un tout autre niveau...

L'homme aurait commencé à "prendre le contrôle" du climat, non pas voici deux cents ans, mais dès la révolution néolithique. En injectant force gaz à effet de serre dans l'atmosphère depuis des milliers d'années, et à dose renforcée depuis peu, l'homme est en réalité parvenu, sans le vouloir, à empêcher l'arrivée d'une nouvelle glaciation.

Une fois passé le "bref" épisode de réchauffement climatique dans lequel nous sommes engagés, nous devrions entrer quand même dans une nouvelle glaciation. "Affaire de quelques siècles...". Il n'y a donc pas que du mauvais dans l'augmentation de l'effet de serre, c'est juste un problème de régulation et de rythme (mais un véritable problème).


Pour la Science no 344, Univers primordial


Pour la Science - p20 Energie sombre et neutrinos

La recherche sur les neutrinos avance. La confirmation de l'oscillation des neutrinos impliquant qu'ils aient une masse (même très faible) contrairement à ce qu'on avait pu croire, cela pourrait suffire à expliquer la mystérieuse "énergie sombre" responsable de l'accélération constatée de l'expansion de notre univers et pour laquelle toutes sortes de théories exotiques avaient été échafaudées.

A. Capolupo et ses collègues ont calculé, dans le cadre de la théorie des champs, la contribution à l'énergie du vide impliquée par ces propriétés. Ils pensent avoir montré que, grâce aux oscillations de neutrinos, cette contribution correspond à celle attribuée à l'énergie sombre, et exerce la pression négative requise pour expliquer l'expansion cosmique accélérée. L'énergie sombre ne serait ainsi qu'une conséquence du mélange des espèces de neutrinos présentes dans l'Univers depuis sa naissance. A la comparer aux constructions théoriques échafaudées jusque là pour expliquer l'acccélération de l'expansion cosmique, cette solution a l'avantage d'ête économique : aucune nouvelle particule n'est invoquée.

- p29 Les retombées de Tchernobyl

Alors que la gestion des retombées de Tchernobyl entre dans sa phase judiciaire, Pour la Science publie un article qui semble exonérer les autorités d'alors de l'augmentation constaté des cancers de la thyroïde, relativisant au moins ses conséquences au vu des statistiques. Cependant, on ne peut nier l'incidence de ces retombées nucléaires, même très faibles, et qui auraient pu être évitées.

L'IPSN et l'Institut de veuille sanitaire ont calculé qu'entre 1991 et 2015, le nombre de cancers en excès dans l'Est de la France pourrait être compris entre 0 et un maximum compris entre 7 et 55 pour l'ensemble des enfants qui avaient moins de 15 ans en 1986. Cette incertitude n'est évidemment pas satisfaisante, mais elle montre la difficulté de mettre cet éventuel excès en évidence puisque, pendant la même période, il y aura dans la même population quelque 900 cancers thyroïdiens spontanés (avec une incertitude de 60 sur ce nombre).

Les diverses études épidémiologiques montrent que le nombre de cancers augmente, mais cette augmentation a commencé dix ans avant l'accident et le rythme n'en a pas été modifié depuis 1986. La plupart des spécialistes pensent que cette augmentation est liée à l'essor de l'échographie et à l'évolution des pratiques chirurgicales. Avant Tchernobyl, on savait déjà que 6 à 28 pour cent des adultes sont porteurs de "carcinomes occultes", très petits cancers de la thyroïde qui, pour la plupart, ne se développent pas et passent inaperçus. L'échographie qui permet de dépister un nodule de quelques millimètres conduit à gonfler les statistiques par ce petits cancers sans gravité.

L'augmentation des cancers thyroïdiens en france ne serait pas liée à tchernobyl et ce pour plusieurs raisons : parce qu'elle a commené en 1975 ; car elle existe dans tous les pays développés où l'on pratique des échographies, qu'ils aient été contaminés ou non par l'accident ; car elle ne concerne que les adultes alors qu'un "effet Tchernobyl" ne concernerait que des enfants très jeunes ou in utero en 1986; enfin parce que l'augmentation département par département ne suit pas celle de la contamination.

- p75 Le caractère culturel de l'intelligence

L'article le plus intéressant sans doute bien qu'on puisse considérer qu'il ne dit que des évidences, montre que l'intelligence n'est pas une propriété du cerveau ou de l'individu, c'est un phénomène collectif et culturel puisque l'origine de l'intelligence est l'apprentissage par imitation (en "singeant" les autres).

Chez les êtres humains, l'intelligence se développe progressivement à mesure que l'enfant apprend, grâce aux conseils d'un adulte patient. Sans apports sociaux, c'est-à-dire culturels, importants, même un enfant prodige ne devient qu'un adulte attardé. Ce processus d'apprentissage social est également mis en oeuvre par les grands singes. Plus généralement, les animaux intelligents sont culturels : ils apprennent des solutions innovantes les uns des autres et résolvent les problèmes auxquels ils sont confrontés. En d'autres termes, la culture favorise l'intelligence.

Nos études montrent que la culture (l'apprentissage social de techniques spéciales) favorise non seulement l'intelligence individuelle, mais aussi son développement au fil des générations. Les mécanismes d'apprentissage varient selon les espèces, mais plusieurs expériences ont confirmé ce que l'observation des grands singes en milieu naturel avait mis en évidence : ils apprennent en regardant les autres.

Faisons un pas de plus. Pour des animaux à développement lent vivant dans des sociétés tolérantes, la sélection naturelle favorise une légère amélioration de la capacité d'apprendre (par observation) au détriment d'une amélioration de l'aptitude à innover : dans une telle société, un individu s'appuie sur les générations antérieures. Les conditions sont alors propices à un phénomène de renforcement, au cours duquel les animaux peuvent devenir plus inventifs et développer de meilleurs techniques d'apprentissage social, deux aptitudes qui sous-tendent l'intelligence. Ainsi, les espèces culturelles sont prédisposées à une certaine capacité d'innovation et au dévelopement d'une intelligence supérieure. Cela nous conduit à la nouvelle explication de l'évolution cognitive (expliquant par exemple les performances des singes élevés par des hommes).

Une des prédictions de la théorie de l'intelligence acquise via la culture est que les animaux les plus intelligents vivent dans des populations où le groupe entier adopte systématiquement les innovations introduites par leurs membres.

Des tests de corrélation entre la taille relative du cerveau (en fonction de la taille corporelle) et des variables sociales, par exemple le comportement grégaire, confirment également cette idée.

L'histoire culturelle de nos ancêtres a interagi avec leur capacité innée à améliorer leurs performances. Environ 150 000 ans ont été nécessaires à notre propre espèce pour inventer des expressions élaborées du symbolisme humain, telles que la fabrication d'objets "futiles" finement ouvragés (oeuvres d'art, instruments de musique et offrandes funéraires). L'explosion des techniques ces 10 000 dernières années montre que les apports culturels démultiplient l'innovation, quand bien même elles émanent d'un cerveau qui n'a pas beaucoup changé depuis l'âge de pierre. La culture a construit un nouveau cerveau à partir d'un ancien.


Sciences et Avenir no 712, Programmés pour vivre longtemps


A part l'oscillation très rapide entre le méson et son antiparticule (au rythme de 3000 milliards de fois par seconde) et qui pourrait s'expliquer par la théorie holographique et la vibration de l'univers-membrane, je n'ai retenu du dossier sur le prolongement de la vie que le lien entre hormone de croissance, insuline et vieillissement par le biais de l'IGF-1 (Insulin-like Growth Factor 1) dont le blocage augmente considérablement la longévité de la souris ou de vers, sans qu'on sache vraiment pourquoi (ce serait lié au gène SIR2, qui régule IGF-1 mais aussi le repliement de l'ADN, ainsi qu'à un autre gène "Klotho" relié au circuit de l'insuline et dont l'expression est directement reliée à la longévité).


Courrier International numéro 813, des anti-dépresseurs contre le cancer


Depuis que j'avais étudié les maladies du stress j'avais suggéré que l'utilisation d'anti-dépresseurs pouvait constituer une des meilleures médication contre les maladies dégénératives (malgré la difficulté de leur maniement et le danger de mauvaises indications). Bien que le mécanisme invoqué semble plus spécifique, c'est malgré tout une confirmation de l'intérêt des anti-dépresseurs contre le cancer.

Courrier International publie un texte de Québec Science, qui indique que "des chercheurs de l'université McGill, à Montréal, ont découvert que les médicaments les plus couramment prescrits contre (la dépression) pouvaient aussi retarder la croissance de certaines tumeurs cancéreuses".

Le mensuel canadien explique ainsi que "d'après les résultats d'une étude publiés dans le numéro d'avril du Lancet Oncology Journal, les patients prenant un type d'antidépresseurs appelés «inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine» présenteraient 30 % de moins de risques de développer un cancer colorectal que ceux qui n'en prennent pas".

Québec Science note que "les antidépresseurs, en bloquant la réintégration de la sérotonine dans les cellules, aideraient à éliminer certaines cellules cancéreuses ou à ralentir leur division". (En fait on sait juste que c'est efficace!)


Le Point numéro 1757, Danger du faux sucre et collusion avec l'industrie


Le Point note que "les fabricants de faux sucre sont aux anges".

Le magazine indique ainsi qu' "il y a 15 jours, l'Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) a déboulonné une étude scientifique italienne qui avait montré, en juillet dernier, un risque de cancer chez le rat nourri à l'aspartame".

Le Point s'interroge : "Voilà donc le célèbre faux sucre (?) définitivement lavé de tout soupçon ?".

"Pas tout à fait", poursuit l'hebdomadaire, qui rappelle qu' "entre 1970 et 1998, les effets de l'aspartame chez l'homme et l'animal ont été analysés dans 166 études. Résultat : plus de la moitié d'entre elles suggèrent un impact délétère de l'édulcorant, notamment sur le cerveau et le système nerveux central".

Le Point note que de plus que "quand un chercheur américain de la Northeastern Ohio University passe cette production scientifique au tamis, il met au jour des coïncidences troublantes : 8 % seulement des recherches indépendantes menées sur fonds publics concluent à l'innocuité des édulcorants, contre 100 % des études financées tout ou partie par l'industrie...".

Cela fait longtemps pourtant qu'on sait bien que l'aspartame est légèrement cancérigène. Voilà donc une preuve supplémentaire de la collusion scandaleuse de la recherche et de l'industrie. Ceci dit, le sucre est encore plus dangereux, mais là n'est pas la question...


La Croix du 22 Mai, Excès de neurones et suicide


La Croix se penche sur une "première mondiale", indiquant qu' "une trentaine d'insectes vont subir une IRM à l'hôpital de la Salpêtrière, à Paris".

Le quotidien explique que cette opération, réalisée par l'équipe de recherche de Sylvain Baillet, du laboratoire CNRS de neurosciences cognitives et imagerie cérébrale, doit permettre de "savoir ce qui se passe dans le cerveau de ces insectes au comportement qui ne cesse d'intriguer".

La Croix aborde ainsi ces "scènes étranges de grillons se jetant à l'eau par de belles nuits d'été, abrégeant ainsi leur vie par un acte suicidaire".

Le journal explique que "le grillon est acculé au suicide parce qu'il est littéralement habité par un hôte", un ver qui se développe dans l'insecte et se reproduit dans l'eau.

La Croix explique notamment que les chercheurs ont "découvert que le grillon avait deux fois plus de neurones qu'un grillon sain".

Le quotidien cite en outre Frédéric Thomas, du laboratoire Génétique et évolution des maladies infectieuses (CNRS-IRD), à Montpellier, qui précise : "Tout processus stimulant la neurogenèse a potentiellement un grand intérêt, de nombreuses maladies étant liées à la baisse de neurones".

L'histoire du grillon et du ver est amusante (le ver se révélant apte à sortir rapidement du grillon si celui-ci est ingéré par une grenouille par exemple) mais ce qui me semble surtout intéressant c'est la possible corrélation entre un excès de neurones et des tendances suicidaires (très hypothétique encore, c'est juste troublant).

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8 réflexions au sujet de “Newsletter 06/06”

  1. j'apprends que vous auriez envie d'arraiter votre site et votre blog . si les commentaires en temps réel vous apparaissent peut être décevant , je vous garantit que ces quelques pages écrites ne resterons pas lettre morte . bien à vous très cher jean .

  2. Bonjour,

    Je continue sur le thème du soutien à l'instar de sable. Vos écrits ne sont pas lettre morte, loin de là...

    [tranche de vie perso]
    Je m'occupe d'un site depuis plus de deux ans. Il est très peu fréquenté voire pas du tout, il n'a aucun support financier. Je pourrai facilement jeter l'éponge en disant "ils ne comprennent rien à rien" mais non, je n'en ai jamais eu l'envie.

    Peu m'importe que je sois lu ou non. Le web permet à chacun de s'exprimer de la manière dont il l'entend. Je suis heureux de pouvoir m'amuser avec ce site et les textes qui sont dedans.

    Le reste : quant à savoir si c'est utile ou non. Bah ! Comme le dit belmondo dans le guignolo "Je ne fais pas dans l'utile mais dans l'inutile."
    [/tranche de vie perso]

    amicalement

  3. Il est certain que le plus important, c'est d'écrire. Il est bon malgré tout d'arrrêter de temps en temps et ma position est singulière (je suis à la fois trop sollicité, pas mal attaqué même, et dans une situation très difficile dont il faut que je me sorte). Je ne veux pas trop m'apesantir pour l'instant sur les raisons que j'ai de vouloir sortir d'un réseau qui n'a pas tenu ses promesses, et qui sont multiples (échec politique, problèmes d'ordinateur ou de santé, etc.). Je serais plus explicite sans doute si j'arrête vraiment. Pour l'instant je profite d'un répit car, moi aussi je ne connais pas d'activité plus passionnante que l'écriture...

  4. Il faut bien dire que je ne suis pas du tout favorable à la thérapie cognitive et comportementale (voir par exemple le texte sur "Philosophie de la liberté ou psychologie de la soumission"), ni à la mémétique (voir par exemple la Newsletter 04/2006 sur la transmission culturelle et l'animal culturel), ni aux théories de l'auto-organisation (voir surtout "La complexité et son idéologie").

    Démontrer par des programmes simulant l'évolution la supériorité de la coopération sur l'agressivité est une chose, croire que les choses se passent ainsi en est une autre... Certes, l'imitation a une importance énorme dans l'apprentissage mais la culture ne se réduit ni aux modes, ni aux mouvements de foule et aucune société n'est auto-organisée (voir Canguilhem "Corps et société"). Le langage surtout apporte une structuration bien éloignée de ces simplifications, je pourrais renvoyer aux textes sur Hegel (ou à Lévy-Strauss et Lacan) mais c'est justement un peu compliqué par rapport à ces schématismes rudimentaires...

    Donc je n'ai pas lu la thèse, j'ai juste survolé le résumé et les programmes. Je n'exclue pas d'ailleurs que tout cela finisse par produire quelques résultats utilisables (c'est comme l'économie mathématique si éloignée de la réalité) mais cet aplatissement de la culture (sa technicisation, son instrumentalisation) est bien désespérant ! Bien sûr je ne peux espérer en convaincre quiconque, on est là dans la croyance et le dogmatisme, "l'esprit qui se renie avec la force infinie de l'esprit"...

  5. Bien. Je prends note de vos références et je vais choisir un exemple précis au plus près de la réalité. Voyons, comment parler d’une pratique concrète pour aider à sa propagation, telle que la méthode BRF, par exemple: un mode de culture qui enrichit le sol et économise l’eau
    fr.ekopedia.org/Bois_Ram%...
    fermedupouzat.free.fr/pag...
    Une solution intéressante par les temps secs qui courent, non?
    Quelles mesures et changements de règles ont le plus de chance de réussir à être imitées assez rapidement par un nombre croissant d'agriculteurs selon vous?

  6. C'est évidemment embêtant de ne pas avoir les mêmes croyances mais il ne faut pas croire qu'il est si facile de convertir les autres car, justement, il ne s'agit pas de substituer une pratique à une pratique plus efficace mais d'être fidèle à une histoire, à des appartenances, un système de pensée, etc.

    Pour la méthode BRF qui est effectivement recommandable, la technique de la contagion n'est pas la bonne (sauf si cela se traduisait par des économies substantielles), il serait bien plus efficace de s'organiser et de combiner des actions de terrain (toujours utiles) avec des normes, des subventions, une mobilisation des institutions... Pour ce que je peux en dire car, comme toujours, il faut se méfier des généralités et il faudrait que j'étudie la question en détail, mais des techniques archaïques et peu efficaces ont pu perdurer très longtemps par la force de l'habitude, c'est seulement sur le très long terme que l'efficacité peut s'imposer, à moins d'une forte volonté collective ou de fortes contraintes (économiques par exemple).

    En tout cas plutôt que d'avoir une confiance aveugle dans les processus de contagion, il vaut mieux faire feu de tout bois et utiliser tous les canaux disponibles à la fois, comme le fait le vivant (ce qu'on appelle l'équifinalité).

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