Une chose me surprend toujours lorsqu'on parle de la catastrophe écologique, c'est qu'on en parle comme d'une apocalypse totale et instantanée, plus proche en cela d'une guerre nucléaire qui d'ailleurs nous menace de plus en plus sauf qu'elle ne sera pas totale. Pour détruire la planète il faudrait vraiment mettre le paquet. Le pire qui pourrait se produire, ce serait un hiver nucléaire de quelques années. Ce serait catastrophique, faisant beaucoup de morts et favorisant les famines et les épidémies, mais pas la fin du monde (accélérant plutôt son unification sans doute?).
De leur côté, les catastrophes écologiques n'auront pas la soudaineté de l'explosion d'une bombe et ne seront pas simultanées sur toute l'étendue de la planète. Des effondrement écologiques locaux risquent bien de se multiplier mais il est délirant de prolonger les courbes à l'infini et s'affoler de la disparition de l'humanité au moment même où elle n'a jamais été aussi nombreuse. Ce qu'on peut craindre de ces catastrophes, c'est là aussi une mortalité accrue temporairement par famines, épidémies ou guerres qui pourront certes diminuer la population mais très loin d'une extinction.
D'autant qu'à mesure que la population diminuerait, son empreinte écologique diminuerait aussi (tout comme la crise a réduit pendant quelques années les émissions mondiales). Parler de fin du monde n'a aucun sens sinon, certes, la fin de notre monde actuel et de sa précieuse biodiversité qu'on ne réussit pas à préserver. Il ne s'agit pas de minimiser la gravité des effondrements écologiques qui se préparent et leur coût humain probable qu'il faudrait éviter à tout prix, mais cela n'empêche pas qu'à l'opposé de ce qu'on dit, les catastrophes ne s'ajoutent pas dans un emballement qui irait jusqu'à nous rayer de la carte. Non seulement les catastrophes attendues sont la plupart du temps progressives mais elles devraient provoquer des réactions de plus en plus fortes empêchant qu'on aille au pire. L'idée répandue que la totalité des catastrophes annoncées se produiraient toutes et en même temps ne tient pas debout, il faudra les affronter une à une.
Le malheur, c'est qu'en dépit de tous les lanceurs d'alerte et des prévisions scientifiques, il semble bien qu'il soit nécessaire qu'une catastrophe se produise pour que les solidarités en sortent renforcées et qu'on mobilise assez de moyens pour empêcher qu'elle se reproduise.
Notre situation est donc bien catastrophique, elle n'est pas complètement désespérée. Sortir de la naïveté du tout ou rien est indispensable pour mieux repérer les menaces réelles et leurs échéances afin de construire des stratégies à long terme capables de s'en prémunir. Il n'y a aucune raison d'être optimiste pour un court terme inquiétant tenté par les régressions écologiques, les pouvoirs autoritaires et les confrontations militaires mais la globalisation climatique et numérique est encore très récente et nous ne sommes pas sans ressources. Malgré les désastres qui se profilent à l'horizon, il faut se persuader que tout n'est pas perdu et que, si nous ne pouvons les empêcher encore, après les catastrophes les beaux jours reviendront, plus déterminés à préserver l'avenir.