La révolution numérique

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Comme on m'a demandé, suite au billet précédent, de revenir sur la révolution numérique pour en préciser les enjeux et que je n'ai pas le temps actuellement de refaire un texte sur ce sujet que j'ai traité tant de fois, il ne m'a pas semblé inutile de reprendre ici l'introduction de mon livre de 2004 "Le monde de l'information" qui est sans doute mon livre le plus difficile mais certainement le plus indispensable pour comprendre notre temps. Occasion de rendre hommage à Jacques Robin dont la révolution informationnelle était l'obsession depuis toujours et à qui je dois d'en avoir compris toute la portée une fois clarifié ce concept d'information qui était resté si obscur.

1. Changer d'ère (information et communication)

Une société peut être dite nouvelle quand il y a transformation structurelle dans les relations de production, dans les relations de pouvoir, dans les relations entre les personnes.
L'ère de l'information, Manuel Castells

La révolution informatique 1981Nous vivons une révolution comme l'humanité en a connu bien peu dans son histoire, un véritable changement d'ère qui se produit à une rapidité inouïe et dont nous arrivons difficilement à prendre toute la mesure. Les technologies numériques et informatiques ont bouleversé nos modes de vie et de production, au point qu'on a peine à imaginer que l'utilisation d'Internet remonte à moins de dix ans. C'est donc depuis relativement peu de temps que nous sommes entrés vraiment dans l'ère de l'information, de la communication et du spectacle. S'il n'y a pas forcément de quoi s'en extasier, on ne peut faire non plus comme s'il ne s'était rien passé et que tout pouvait continuer comme avant. Il faut se rendre à l'évidence, la société, les conditions de travail et les protections sociales en sont durablement affectées mais c'est l'ensemble de notre monde qui en est profondément transformé.

CommunicationsLa plupart du temps on ne voit cette rupture majeure qu'à travers la question des communications dont l'importance semble effectivement croître de façon exponentielle. Le développement des réseaux couvre et globalise la planète entière, que ce soit pour l'information, le commerce, les relations sociales et politiques. Le terrorisme international en constitue une des manifestations les plus "spectaculaires". Ce que ce livre voudrait montrer pourtant, c'est que là ne se situe pas l'essentiel de la révolution anthropologique que nous vivons. L'intensification des communications ne rend pas compte du fait que ce sont bien les règles du jeu qui changent, les forces productives, les processus de valorisation, les rapports sociaux, nos représentations, nos valeurs et jusqu'à notre horizon collectif.

MatrixLe secret de ce monde, c'est l'information en tant qu'elle s'oppose à l'énergie et à l'entropie. Cela ne veut pas dire que l'information explique tous les bouleversements actuels, mais qu'il faut prendre la mesure de tout ce qu'elle permet d'expliquer. En effet, sur de nombreux plans nous quittons le monde matériel, de l'énergie et de la lutte, pour intégrer l'univers de l'immatériel, le monde de l'information et de la coopération. On passe ainsi d'une société de la peine à une société de la panne ! Pour caractériser l'opposition entre l'ancien et le nouveau monde, nous utiliserons classiquement les termes de "société thermodynamique" et de "société de l'information" (ou bien l'ère de l'énergie et l'ère de l'information). Il y a toujours une part d'arbitraire dans la nomination mais si l'on doit préférer cette formulation à celle qui opposerait par exemple une économie industrielle à une économie de service (ou même une économie cognitive), c'est qu'on trouvera dans l'opposition de l'énergie et de l'information l'origine d'un certain nombre de ruptures brutales que nous subissons, et qui vont bien au-delà de l'économie ou de la révolution industrielle. Nous ne ferons que souligner ici les conséquences de cette opposition qui nous servira de fil conducteur, comme elle a servi à Jacques Robin tout au long de sa vie pour souligner par contraste la portée de nouvelles technologies informationnelles qui nous font véritablement "Changer d'ère" (Seuil, 1989).

Terre Bien sûr, ce n'est pas parce qu'il y a un développement sans précédent de l'immatériel et une relative dématérialisation de l'économie qu'il faudrait aller s'imaginer que le monde matériel ou énergétique n'existe plus et que nous n'aurions plus qu'à nous évader dans un monde virtuel et déshumanisé. Tout au contraire, on verra que le monde de l'information c'est aussi le monde de l'écologie et du développement humain, de notre responsabilité envers les générations futures face aux informations dont nous disposons, de régulation des cycles vitaux et de sortie d'un productivisme salarial insoutenable, au profit d'une logique d'investissement dans l'avenir, d'un développement humain intégrant le long terme au-delà de la productivité immédiate. C'est l'information sur l'état de la planète qui nous rend responsables écologiquement de notre avenir commun alors que le besoin de formation induit par les technologies informationnelles rend indispensable la réorientation de l'économie vers le développement humain.

Thermostat

Il faut souligner, en effet, que l'information introduit une dimension de "lutte contre l'entropie", grâce à ses capacités de régulation et de correction d'erreurs. L'information a pour fonction l'anticipation et l'investissement dans l'avenir (à l'opposée de la vision à court terme du libéralisme et de l'irresponsabilité des marchés). Ainsi, les informations sur les catastrophes qui nous guettent permettent d'éviter la violence de leur pression sélective, d'une sélection darwinienne qui opère par contrainte extérieure, en lui substituant une anticipation intériorisée, une adaptation autonome et en douceur (passage de l'évolution à l'apprentissage). Les informations qui nous parviennent nous rendent donc responsables et nous obligent à fixer des finalités collectives explicites afin de mettre en place un pilotage par objectif capable de moduler notre action sur ses effets. C'est absolument essentiel et devrait mobiliser toute notre réflexion.

PyloneIl ne faut voir là aucune utopie technologique, comme si tout était gagné d'avance. Il n'y a aucune raison que tout se passe bien. Ce n'est pas une question de hardware. Ceux qui s'imaginent que l'intensification des communications, la multiplication des réseaux, le haut débit supprimeront les hiérarchies en égalisant les conditions se trompent lourdement alors qu'il est démontré au contraire que c'est un facteur d'instabilité et d'augmentation des inégalités locales. Le monde de l'information est aussi le monde de l'incertitude, de la précarité, de la discontinuité, de processus non-linéaires et d'emballements plus ou moins catastrophiques si on ne cultive pas soigneusement son jardin.

bombe Prendre conscience de notre entrée dans l'ère de l'information ne signifie aucunement vouloir embellir la situation et s'en faire le spectateur enthousiaste, c'est bien plutôt vouloir prendre en main notre destin, assumer notre responsabilité collective, corriger le tir, surmonter nos échecs. Ce n'est pas parce que, à l'opposée des tentations d'un impossible retour en arrière, j'appelle à tirer parti de la nouvelle logique coopérative des réseaux, à s'adapter au passage à l'immatériel, à construire une démocratie cognitive et des régulations écologiques que je tombe dans une quelconque technophilie. Rien ne se fera tout seul, ce qui se fera sans nous se fera contre nous. Il n'y a pas de déterminisme technologique mécanique, seulement de nouvelles possibilités que nous pouvons transformer en opportunités mais qui peuvent aussi bien se retourner contre nous, détruire de fragiles équilibres. C'est à nous de savoir tirer parti des nouvelles potentialités de régulation, de coopération et de développement humain ouvertes par les technologies informationnelles, ainsi que de lutter contre leurs côtés pervers (précarité, flexibilité, temps réel, dictature du court terme, fracture numérique, insignifiance). Seulement, pour construire un monde plus humain et s'adapter à ses transformations, il faut d'abord l'interpréter correctement, essayer d'en comprendre la nouvelle logique.

2. De la société thermodynamique à la société informationnelle

Cellule Bien sûr le rôle de l'information a toujours été considérable dans les sociétés, l'économie ou les phénomènes biologiques qui mêlent indissolublement information, matière et énergie. Il y a évidemment une continuité de la vie, de l'humanité, de nos sociétés et de l'économie mais il y a aussi du nouveau, des seuils irréversibles, des émergences historiques, des changements de niveau. Notre conviction est que nous subissons une rupture majeure avec la généralisation de l'informatique et de la numérisation ou l'émergence des biotechnologies, rupture dont les caractéristiques peuvent être largement reliées aux spécificités du concept d'information plus encore qu'à l'explosion des communications, ou la complexification de nos sociétés.

Puit de pétrole en IrakNous voulons donc attirer l'attention sur le fait qu'au-delà de la communication et des réseaux qui permettent de relier ce qui était séparé, le monde de l'information dans lequel nous sommes entrés s'oppose entièrement au monde de l'énergie dont nous sortons à peine. Bien qu'on en éprouve tous les jours les conséquences et les contradictions, on ne se rend pas bien compte encore à quel point ce sont des mondes aux logiques incommensurables. S'il y a rupture c'est entre l'ère énergétique et l'ère de l'information à cause de ce changement complet de logique et de perspectives. C'est un point où j'insiste, je me répète, introduisant assez de redondance pour essayer de forcer l'attention.

    Norbert Wiener 1894-1964
Norbert WienerC'est par le contraste entre l'ancien et le nouveau monde qu'on peut mettre en évidence la rupture d'ordre civilisationnelle que nous vivons de trop près pour nous en rendre vraiment compte. Nous verrons plus loin ce qui justifie de ramener cette rupture à l'opposition de l'énergie et de l'information mais on peut dire qu'il n'y a là rien de nouveau car cette opposition entre la "société thermodynamique" basée sur l'énergie, la domination, la croissance, et la "société informationnelle" autogérée, où chacun participe aux décisions, aux circuits de l'information, est déjà préfigurée chez Norbert Wiener, le père de la cybernétique (1948). Elle a été souvent reprise depuis, par Henri Laborit notamment (La nouvelle grille). Il était clair dès cette époque que les transformations sociales attendues étaient directement reliées aux caractéristiques de l'information, dans son opposition à l'énergie. En effet, "l'information n'est qu'Information, elle n'est ni masse ni énergie". Hélas, de nombreuses confusions ou exagérations finiront par obscurcir considérablement les choses, jusqu'à rejeter aux enfers le concept de cybernétique devenu trop suspect. La pertinence de ces concepts ne fait pourtant que se confirmer, en premier lieu dans la production, avec le passage effectif d'une société à l'autre.

Travailleurs La société de l'énergie, c'est ce que nous connaissons depuis le néolithique sans doute, mais surtout depuis la révolution industrielle et thermodynamique. Les guerres du pétrole se situent encore entièrement dans ce contexte, retour de la vieille Amérique dominée par le pétrôle, bien loin de la nouvelle économie. C'est le domaine matériel de la force, de la contrainte, de la lutte, de la compétition, de l'appropriation, du nombre, de la quantité, du travail et de la peine. C'est le monde industriel de la mécanique et des machines, d'une productivité immédiate mesurée par le temps salarié.

PcLa société de l'information c'est l'univers immatériel du savoir, de la direction par objectifs, du contrôle, de la persuasion, de la coopération, de la qualité, de la résolution de problèmes et donc des pannes... C'est, au niveau du software, aussi bien la programmation et les communications que l'éducation ou le spectacle, et, pour le hardware, les automatismes aussi bien que les média ou les appareils numériques en attendant les biotechnologies. On n'y a plus tant besoin de force de travail contrainte et subordonnée mais de formation, d'innovation, d'autonomie, d'un travail virtuose qui ne se mesure pas à son temps d'exécution, pas plus qu'un travail de recherche ou un travail créatif dont les résultats restent complètement aléatoires par définition.

Quand c'est la force de travail qui est dominante, elle peut être soumise à une discipline, à des contraintes. Quand c'est l'information qui devient cruciale et qu'on fait appel à la subjectivité, le travail devient en grande partie autonome, mobilisant la liberté et la motivation du travailleur pour atteindre ses objectifs. Ce n'est pas toujours un progrès car cela peut se traduire par une aliénation de toute la vie, en plus de produire précarité ou exclusion. En tout cas ce n'est plus un travail contraint mais seulement valorisé ou sanctionné après-coup.

Henri Laborit 1914-1995

Henri LaboritOn peut trouver prémonitoire ce que disait Henri Laborit au début des années 1970, prévoyant que nous aurions besoin de plus en plus de temps libre car "l'individu doit passer le plus clair de son temps à recueillir des informations" 313. "Il faut propager au plus vite cette notion que l'homme n'est pas une force de travail, mais une structure qui traite l'information." 329. "La plus-value, ce qu'abandonne le "travailleur" à quelque niveau hiérarchique où il se situe, c'est surtout de l'information. Plus un travail est "intellectualisé", plus le travailleur est exploité." 142

Just in timeCe qui n'avait pas été prévu, certes, et qui est pourtant sans doute ce qui oppose le plus le monde de l'information à celui de la force, c'est qu'on y perd toute proportionnalité entre la cause et l'effet, entre le travail et sa productivité devenue non-linéaire. Dès lors, on ne peut plus assurer la continuité purement quantitative de la production de masse, qui est remplacée par la discontinuité qualitative d'une économie de la demande (flux tendus). C'est un monde incertain, monde de la précarité, de la flexibilité et de l'intermittence. On en donnera plus loin les raisons mais on admettra qu'il peut être utile de comprendre que ce n'est pas une situation transitoire que nous connaissons actuellement, et plutôt que d'entretenir l'illusion d'un retour en arrière, prendre acte de cette discontinuité de l'emploi pour organiser la protection sociale en conséquence, en assurant la continuité du revenu en premier lieu.

LinuxDe même, reconnaître les possibilités illimités de la reproduction numérique et les nécessités de la circulation des savoirs, milite pour une économie de la gratuité et de la coopération dans le domaine immatériel, ce qui implique une politique favorable aux logiciels-libres et vigoureusement opposée aux brevets logiciels. Il est absurde de développer des techniques de reproduction si performantes et de vouloir mettre en même temps des barrières à la communication. Ce sont des questions concrètes qui se posent dans l'immédiat et touchent notre vie quotidienne.

On voit déjà toute l'étendue des conséquences de la révolution en cours, mais ce n'est pas parce que nous entrons dans l'ère de l'information que l'information n'était pas déjà omniprésente auparavant dans les sociétés humaines comme dans la nature. Avant de nous attaquer aux caractéristiques de l'information, nous allons donc poursuivre le panorama en l'abordant par ses effets les plus spectaculaires dans le règne animal, puisque la vie elle-même est entièrement basée sur l'information.

3. Le pouvoir de l'information : le paon et le putois

ADNCertains se croient encore dans la jungle, dans un monde dominé par la force, l'énergie ou le nombre alors que nous sommes bel et bien dans une société du spectacle et de l'information, mais la jungle elle-même, n'est pas tant qu'on le dit le règne de la force, c'est déjà celui de l'information, de l'apparence, de l'odeur, des cris. La perception y est vitale. On sait que la cellule elle-même est complètement liée à l'information génétique, à la redondance des deux brins d'ADN, à ses capacités de reproduction et de correction d'erreurs, caractéristiques essentielles de l'information comme on le verra.

Gorille Derrière leurs éprouvettes, les biochimistes ne voient bien sûr aucune information, aucune perception du monde mais seulement une interaction chimique et les évolutionnistes habitués à l'idéologie de la lutte pour la survie et de la sélection du plus fort, pensent encore l'évolution comme un rapport de force dans une sélection aveugle. Les préjugés de l'ère énergétique et d'une vision mécaniste du monde ont la vie dure. La théorie darwinienne de la lutte pour la survie se révèle pour ce qu'elle est, l'idéologie de son époque et du capitalisme sauvage qu'on trouvait déjà chez Spencer avant Darwin. L'insuffisance d'une telle conception saute pourtant aux yeux, contredite de mille façons. La nature, ce n'est pas toujours la loi du plus fort, sinon l'homme ne serait pas né si fragile et dépourvu de tout... En fait la fragilité est un facteur adaptatif (faire d'une faiblesse une force) et les phénomènes de renforcement ou de stabilisation sont plus importants que les phénomènes d'élimination dans la sélection naturelle.

pornoLe monde biologique n'est pas celui de la lutte mais de la communication et de la coopération, de la reproduction et de la séduction, voire de la vérité et du mensonge. C'est un monde plein de leurres, d'erreurs et de mirages car c'est un monde connu par ouï-dire, indirectement, à travers nos sens et laissé à notre représentation. Le monde de la vie c'est celui du paon et du putois, de l'empire des signes. La sexualité c'est déjà la dictature de l'apparence (chants, plumage, parade) livrée aux "prégnances animales" telle qu'on les retrouve dans la pornographie. La biochimie est une chimie des formes, chimie conditionnelle, sur un modèle proche des transistors : c'est ouvert ou fermé, ça s'attache à un récepteur ou ça ne s'y attache pas, c'est le signal convenu ou c'est du bruit. De par son appartenance à l'univers de l'information le monde de la vie est un monde non-linéaire, monde du tout ou rien (on est vivant ou mort).

PutoisA la différence de forces physiques, l'absence de toute proportionnalité entre la cause et l'effet dans le domaine biologique peut être illustrée par de nombreux exemples qui n'ont rien d'exceptionnel. Il suffit de constater la capacité d'une seule molécule de phéromone sexuelle d'attirer un insecte qui peut être situé à plusieurs kilomètres parfois. Ce qui est plus remarquable encore, c'est de constater le pouvoir que peut avoir l'information de triompher face à la force pure. Sur ce point, la stratégie la plus démonstrative par son économie de moyens est certainement celle du putois (selon le nom commun) qui éloigne bien plus puissants que lui grâce à son odeur nauséabonde et fait place nette sans coup férir. Les systèmes de communication sont fragiles et leur perturbation désorganise facilement l'adversaire avec une dépense infime d'énergie.

PaonLe critère d'adaptation n'est pas toujours beaucoup plus pertinent que celui de la force s'il prétend aller au-delà d'une viabilité indispensable. L'exemple du paon était à cet égard embarrassant pour Darwin lui-même, sa parure chargée de signes trop voyants l'exposant dangereusement aux prédateurs. Il faut croire qu'il a le pouvoir d'en impressionner plus d'un, d'en mettre "plein les yeux", mais l'adaptation est un critère bien insuffisant dans ce cas. On introduit toutes sortes de biais (niche écologique, viabilité, hasards) pour rester dans une représentation mécaniste de la sélection alors qu'il faudrait y comprendre le rôle déterminant de l'information, dans son imperfection même, pour orienter les formes à travers la sexualité au moins. Le rapport de l'organisme au monde n'est pas de l'ordre du bruit et de l'agitation chaotique. Il est constitué de perceptions et de réactions conditionnelles, d'interactions et de sélections. Contrairement au monde physique, l'univers biologique est traversé de flux d'informations, de la cellule à l'organisme ou l'écosystème.

PC Les technologies de l'information n'ont donc rien inventé, elles ont seulement mis à notre disposition ce qui est au fondement de la vie, elles l'ont généralisé grâce au PC qui est une machine universelle, un GPS (General Problem Solver) un peu comme la vie elle-même. Remarquons qu'avec l'ordinateur personnel chacun peut désormais être propriétaire de son moyen de production, ce qui transforme plus qu'on ne croit le rapport salarial et la subordination à l'employeur. Si nous avons du mal à nous faire aux lois de cet univers de l'information ce n'est pas que nous n'aurions aucune familiarité avec lui, la passion des enfants pour l'informatique prouve bien le contraire, mais plus simplement parce que nous quittons une économie de l'énergie, de la force de travail et de sa productivité immédiate, de la domination et de l'appropriation, qui nous avait habitué à de toutes autres lois, lois qu'on a voulu nous faire prendre pour des lois naturelles alors que ce ne sont que les lois d'une guerre de tous contre tous intenable. Il faut du temps pour changer de croyances et de représentations sans paraître trop naïf ou ringard.

Suite du Monde de l'information : Qu'est-ce que l'information ?

Voir aussi :

On peut comparer au plus ancien : Réalités et potentiel de la nouvelle économie (05/2000), écrit à la demande de rezo.net, mais il y a bien d'autres textes où j'aborde les conséquences pour le travail ou l'écologie de ce nouveau stade cognitif, notamment dans mon livre "L'écologie-politique à l'ère de information" (06/05).

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3 réflexions au sujet de “La révolution numérique”

    • Oui, Jean-Claude Ameisen fait partie de gens intéressants et j'avais beaucoup aimé La sculpture du vivant. Il était crucial de réhabiliter l'empathie que déniait un darwinisme vulgaire très éloigné de Darwin mais il ne faudrait pas tomber dans l'excès inverse de ne voir qu'empathie partout, les neurones miroirs notamment pouvant servir aux prédateurs tout autant qu'aux familiers et l'ocytocine qui renforce les liens renforce aussi l'agressivité envers les étrangers. De même si l'information est nécessaire à l'empathie et constitue souvent un lien (le premier mot dit la communication elle-même - Lévinas), elle peut être tout le contraire. Il faut admettre cette vérité à deux faces opposées.

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