De quelques aspects de la situation

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Ce qui caractérise les grandes crises, c'est leur capacité de propagation, leur caractère multifactoriel et générationnel provoquant une complète restructuration en fonction de changements précédents des rapports de force, ce qu'on peut comparer à un tremblement de terre qui enregistre le déplacement des plaques tectoniques ou bien aux vibrations qui vont permettre à des aimants de "s'auto-organiser" entre eux à égale distance. Il faut toujours distinguer l'incident souvent mineur qui peut déclencher un conflit de ses causes profondes, de même qu'il ne faut pas réduire un krach à sa cause factuelle alors que la véritable cause n'est autre que la bulle précédente.

On a malgré tout tendance à se fixer sur l'une ou l'autre cause plus ou moins contingente, quand on n'y voit pas un simple complot, de même qu'on a toujours eu tendance à vouloir minimiser une crise qu'on a cru d'abord de courte durée, puis uniquement bancaire ou financière avant de faire porter le chapeau à l'Euro voire aux politiques d'austérité, pendant que les pays s'enfoncent un à un dans la dépression. Chacun y va de sa petite mesurette sensée nous sortir de cet accident historique et permettre de revenir à l'état antérieur, au business as usual. Sauf que, dès qu'on ne se focalise plus sur l'un ou l'autre aspect de la crise mais qu'on en prend une vue d'ensemble, c'est une série de phénomènes massifs, dont j'ai essayé de faire la liste, qui s'imposent à nous et dessinent un monde futur bien différent de l'ancien.

Expliquer la crise actuelle dans le cadre des cycles de Kondratieff n'est pas la réduire à une causalité unilatérale (l'inflation) mais plutôt à une conjonction de processus qui épousent simplement des cycles générationnels (les nouveaux entrepreneurs de Schumpeter) mettant en oeuvre de nouvelles technologies et une nouvelle organisation productive après le krach de la dette de la génération antérieure. Ce qui frappe, en effet, ce sont les similitudes avec 1929 (ou 1789) même s'il y a aussi de grandes différences. En particulier, le rôle des inégalités dans la crise est très semblable. Ce que dit Joseph Stiglitz du prix des inégalités reprend ce que disaient déjà Eccles, Galbraith ou Livingston. Ce n'est pas qu'on pourrait faire pour autant des inégalités l'unique déterminant du cycle et de sa crise finale. De plus, si on doit inaugurer une nouvelle période de réduction des inégalités, ce serait une erreur de croire qu'elles sont exactement de même nature que dans les années 1930 et que les mêmes recettes pourraient s'y appliquer.

Il y a au moins deux différences majeures avec cette époque, c'est le déclin de l'industrie et de la nation que beaucoup regrettent sans beaucoup de raisons mais qui permettra peut-être de ne pas retomber dans les affres d'un nationalisme passé de mode dont on voit malgré tout des résurgences un peu partout. La tendance serait d'ailleurs plutôt à la sécession, à l'intérieur même des nations (Belgique, Espagne, Italie), comme illusion de pouvoir s'abstraire d'une crise qui est à l'évidence globale, quoique de façon différenciée selon les faiblesses de chacun et son histoire. La principale alternative qu'on trouve à gauche reste pourtant un national capitalisme basé sur le protectionnisme, la nationalisation des banques, l'étatisme et la ré-industrialisation, ce qui est à la fois dangereux et l'échec assuré. Il faut s'en persuader, l'échec de la gauche n'est dû qu'à elle-même, à ses archaïsmes, ses dogmatismes, ses aveuglements. De plus, et contre toute évidence, l'échelon national est considéré comme le seul valable, celui d'une souveraineté surévaluée qu'on prétend porteuse de véritables ruptures. Enfin, pour certains, une révolution mythifiée à hauteur de notre impuissance est supposée pouvoir résoudre magiquement toutes nos contradictions malgré les démentis qu'y apportent les révolutions arabes. Les révolutions sont nécessaires pour mettre fin à des inégalités devenues insultantes ainsi qu'à une corruption généralisée mais il ne faut pas en attendre de miracles au-delà, l'histoire est assez instructive là-dessus. Surtout, il faudrait se rappeler que même si les nations étaient dans la plénitude de leur puissance, y compris guerrière hélas, cela n'a pas empêché la crise de 1929 de les atteindre de plein fouet. Sauf l'URSS, mais qui voudrait refaire l'expérience ? Ne pouvoir fermer ses frontières, c'est ne pas pouvoir se soustraire à une crise systémique qui ne dépend pas de tel ou tel problème local devenu urgent à traiter à cause de la crise justement...

Les gouvernements agissent sous la pression de l'urgence n'ayant guère le choix et pas du tout selon un plan préétabli. Il n'y a ici pas plus de souveraineté des peuples que des parlements ou de leurs dirigeants pour ce qui relève presque d'une catastrophe naturelle. On a certes l'impression souvent que les décisions prises sont contre-productives, dirigées contre les peuples et complètement bornées. Il y a sans aucun doute mieux à faire. Encore faut-il pouvoir le faire, disposer des pouvoirs, des alliés, des leviers de commande, du temps qu'il faut pour s'engager dans de grandes réformes, etc. Il faut combattre l'illusion de pouvoir régler la question en quatre coups de cuiller à pot ou de discours enflammés comme si nous étions en position de maîtriser une crise qui nous dépasse et n'est pas une vue de l'esprit pas plus que celle qui a mené à la deuxième guerre mondiale.

De plus, il y a un certain nombre de différences avec la grande crise qui empêchent de calquer nos politiques sur celles de l'époque:

- Il ne peut y avoir de protectionnisme radical

Il y a de très bonnes raisons de défendre une plus grande dose de protectionnisme pour améliorer la stabilité de l'économie et de la vie locale mais le protectionnisme étant toujours réciproque, une économie exportatrice comme la nôtre risque d'y perdre plus que d'y gagner. Du moins, si un peu plus de protectionnisme peut permettre de limiter la casse dans certains cas, il est absolument impossible à une économie comme la nôtre de se couper de l'Europe pas plus que du reste du monde. La question de rester dans l'Euro paraît bien secondaire par rapport aux interdépendances géographiques renforcées depuis des années. Le protectionnisme ne peut pas être à la hauteur de ce qu'il faudrait pour avoir un effet notable sur le chômage (s'il ne l'aggrave pas!). D'accord donc pour exiger plus de protectionnisme, pas pour en faire une solution à la crise.

- Il ne suffit pas d'une politique keynésienne

On sera bien d'accord sur les ravages de l'austérité qui ne fait qu'aggraver le problème par une récession diminuant les recettes fiscales et continuant ainsi à augmenter la dette. C'est le type même de la bêtise au pouvoir que des mobilisations sociales devraient pouvoir infléchir en forçant les dirigeants européens à sortir de logiques purement comptables. Ce n'est pas une raison pour croire qu'une politique keynésiennes serait suffisante pour refaire partir la machine. La globalisation marchande est bien une réalité, notamment pour les appareils numériques fabriqués en Chine. Cela entraîne un certain découplage du mécanisme keynésien quand la consommation des salariés ne correspond plus à la production des salariés du même pays (on avait déjà vécu cela avec les magnétoscopes japonais). Cela peut rendre inopérant une relance monétaire qui a de toutes façons ses limites. Si nous bénéficions de prix très inférieurs grâce à cette globalisation, cela produit en retour une mise en concurrence du coût du travail et des systèmes de protection sociale. Il n'y a pourtant aucune chance de s'y soustraire, rapport au point précédent (sauf au niveau local peut-être), d'autant plus avec le développement du commerce en ligne.

- L'industrie ne retrouvera plus les niveaux d'emploi du passé

Il ne s'agit pas de nier la nécessité de garder nos industries mais on est consterné par l'attention quasi exclusive qui lui est réservée alors que ses effectifs ne peuvent que diminuer encore comme ceux de l'agriculture avant. Les grandes envolées sur la ré-industrialisation ne sont que du vent. L'avenir de l'industrie est probablement pour partie dans la production au plus près des consommateurs, mais avec des usines automatisées. Difficile pour les vieux marxistes nostalgiques des grands centres industriels d'admettre que l'essentiel désormais se passe dans les services et l'immatériel. Surtout, alors qu'on met en vedette quelques milliers d'emplois industriels perdus, ce sont des millions de précaires qu'on laisse dans la misère car ce ne sont pas seulement des emplois qu'on perd avec l'industrie mais un type de salariat et de protections sociales, liées à l'entreprise, dont sont exclus de plus en plus de travailleurs précaires. Non seulement la focalisation sur la ré-industrialisation est une erreur de stratégie (refaire la dernière guerre) mais c'est aussi ce qui empêche une refonte des protections sociales sur d'autres bases, plus individuelles et universelles et surtout mieux adaptées au travail immatériel et autonome.

- La concurrence des pays les plus peuplés va être de plus en plus forte

On a l'impression parfois que la concurrence des pays émergents ne serait qu'un mauvais moment transitoire à passer mais, sauf encore une fois à s'enfermer derrière des murs étanches, il n'y a aucune chance que ça s'arrête et bien plutôt que ça empire. Du fait qu'ils nous rattrapent, nous perdons notre avance. Le déclin des anciennes nations riches est inévitable. De quoi nous promettre plutôt un appauvrissement relatif qui ne serait pas dramatique au niveau où nous en sommes si la charge en était mieux répartie alors que la concurrence des anciens pays pauvres pèse surtout sur les pauvres ici. On peut en combattre la fatalité tout aussi verbalement ou refuser la pauvreté concrètement par un revenu garanti notamment.

- La population mondiale va continuer de s'accroître

Dans la même veine, notre avenir démographique est tout tracé. Même s'il y a une incertitude sur le pic de population, il ne sera pas atteint avant 2050 au mieux. L'augmentation attendue de 2 milliards d'être humains en plus peut paraître raisonnable par rapport à nos 7 milliards actuels mais la tension sur les ressources va s'accroître, surtout en Afrique (sauf pandémie mortelle ou bioterrorisme) et on va continuer inévitablement à se mélanger, il va falloir s'y faire. L'autre paramètre important, c'est que la population va continuer de vieillir ce qui pose toute une série de problèmes qui vont des retraites aux questions de santé.

- Plusieurs pénuries s'annoncent et des tensions sur les prix

Le plus grave, bien sûr, c'est pour la nourriture, non qu'il soit impossible de nourrir 9 milliards d'être humains mais les causes des famines sont fondamentalement politiques, point où l'on n'est guère brillants, et on risque de manquer de phosphore entre autres. En tout cas les prix devraient monter au moins pour la viande. Il faut s'attendre aussi à une augmentation régulière des prix du pétrole jusqu'à ce que les énergies renouvelables n'en réduisent la demande. Ce qui va continuer d'augmenter aussi, avec tous les problèmes que cela devrait poser, c'est la température...

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Ce ne sont certes pas de bonnes nouvelles mais il faut bien partir de ces réalités nouvelles et cela indique malgré tout quelle devrait être la sortie de crise, conformément aux cycles de Kondratieff, par l'inflation (si ce n'est par une dévaluation massive ou période d'hyperinflation), permettant de se débarrasser du poids de la dette et encourageant de nouveaux investissements. On trouve pas mal de gens de gauche qui sont contre l'inflation supposée peser en priorité sur les plus pauvres alors que les périodes d'inflation se révèlent favorables aux actifs et la lutte contre l'inflation aux rentiers, occasion encore de se tromper de combat.

Nous avons vu ce qui aggravait notre sort par rapport à 1929 mais il y a sans doute plus encore qui pourrait l'adoucir, car nous ne sommes pas sans ressources pourvu qu'on ne se trompe pas d'objectifs. Parmi les points positifs, il y a incontestablement le développement des énergies alternatives qui ne sont pas encore prises en compte à hauteur du problème mais se développent de façon accélérée et sont une partie de la solution. Le plus important cependant, et trop minimisé par la gauche, c'est l'omniprésence du numérique avec toutes sortes de conséquences inédites qui vont du réseau global à la gratuité numérique, l'accès aux enseignements en ligne aussi bien que la saturation de l'attention qui semble condamner une croissance indispensable au capitalisme. On n'en entend guère parler à gauche, ce serait inconvenant quand on se réclame du prolétariat industriel. Pourtant, l'enjeu n'est plus du tout le salariat avec le travail immatériel qui exige d'être un travail choisi et autonome mais qui génère aussi précarité et stress en dehors de protections appropriées comme une revenu garanti. Le réflexe syndical est de s'y opposer ne faisant qu'aggraver le problème. Ce qui pourrait être une émancipation du travail forcé devient une tyrannie encore plus insupportable sans les protections appropriées. En dehors du numérique qui est appelé à prendre la place principale, il faut souligner aussi la chance d'une économie qui passe du quantitatif au qualitatif, en particulier l'agriculture biologique qui devrait prendre une part plus significative de même que l'artisanat. Enfin, le dernier point inaperçu de tous qui doit nous donner le plus d'espoir, c'est la nécessité d'une relocalisation, y compris dans les grandes villes (qui abritent une majorité de la population humaine désormais) ce qui fait du local le bon échelon pour les alternatives et le développement humain comme pour se protéger de la globalisation, mais on préfère rêver de grands soirs qui feraient rendre gorge aux méchants capitalistes !

Il y a une telle inadéquation des processions traditionnelles de la gauche par rapport à ce qu'il faudrait faire qu'il y a de quoi désespérer, véritable cas d'école de dissonance cognitive entre représentation idéologique et réalités vécues. Les propositions dont j'ai retenu la nécessité peuvent paraître trop microscopiques par rapport à l'étendue du problème mais cette combinaison de dispositifs comme le revenu garanti, les coopératives municipales et les monnaies locales répondent au moins partiellement à ces nouvelles réalités, si loin d'une gauche nostalgique...

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55 réflexions au sujet de “De quelques aspects de la situation”

  1. "... l’agriculture biologique qui devrait prendre une part plus significative."
    Bien qu'elle soit souvent minime en pratique, il y a une différence entre agriculture biologique et agriculture durable. L'agriculture biologique n'est pas nécessairement écologique et me paraît un peu trop tôt enfermée dans un moule trop étroit. Elle est centrée sur la qualité biologique des produits, alors que l'agriculture durable prend en compte l'ensemble de la problématique agricole tout en laissant encore des marges de manœuvre dans la façon de faire encore très riche en potentiel de nouveautés et d'innovations.

  2. Le protectionnisme est nécessaire avec le dos de la cuillère, mais pas suffisant.

    La réindustrialisation recréant des emplois est un songe de nuit d'été. Je suis en première ligne pour m'en rendre
    compte et payé, assez bien, pour le voir, Je suis confronté à des machines et des procès de plus en plus performants.

    Ces machines viennent de toutes parts, Porsche entre autres, eh oui... Y a qu'à se servir, presque peu importe le prix.

    Le fait est que les pays les plus productifs surfent sur cette vague auto-alimentée par les capitaux attirés ou auto investis.

    Ce sont aussi des problèmes de stratégie, communs du jeu de dame. Comment faire un coup multiple en un seul tour. Manifestement, certains pays sont moins à l'aise avec cette approche qui demande un peu de ligne d'horizon, lignes de perspectives obliques en point de fuite. Ce type de problème de compétitivité ne dépend pas uniquement de la déflation salariale, mais de structures de travail et de réflexion.

  3. Bonjour,
    Je vous découvre et trouve salutaire et intéressante votre réflexion.
    Pour y réagir rapidement (désolé), je suis bien d'accord pour reconnaître un décalage nuisible et aveugle d'une certaine gauche (au pouvoir) et je trouve pertinent votre appel à regarder la situation avec une perspective plus globale.
    Il faudrait alors peut-être parler, plus que de protectionnisme, de déséquilibre profond dans les règles qui régissent (si mal) le commerce mondial (lorsque l'on parle de déficits commerciaux), mais surtout, surtout, je trouve absent de votre analyse une remise en question du fonctionnement de la finance et de régulations inopérantes et de taxations inexistantes à son égard. Plus que la dénonciation du capitalisme moribond dans sa forme actuelle (tant qu'il n'aura pas pris en compte, comme vous le dites, la réalité numérique), une autre gauche prône le courage politique pour s'atteler à la tâche de rééquilibrage des pouvoirs entre des institutions financières libertaires et libres de toute entrave face à des états qui ne savent, ou ne veulent pas savoir que faire.
    Quant à la transition écologique, le chantier est ouvert...

    • J'aurais sans doute dû le préciser dans l'article mais contrairement à la plupart je ne crois effectivement pas que ce soit la finance le problème ni que mieux la réguler nous sortitait de la crise comme on se l'imagine. Il me semblait que c'était évident étant donné la multiplicité des causes que j'invoque. Je suis bien sûr pour une meilleure régulation et notamment pour l'interdiction des paris sur les prix défendue par Paul Jorion mais je n'en attend aucun miracle, juste une période de re-régulation après la période de dérégulation. Des impôts plus progressifs me semblent plus décisifs mais on est obligé d'y aller progressivement. La taxation des transactions financières me semble aussi une mesure incontournable mais ce n'est pas non plus une recette miracle qui nous sauvera. Il faut d'abord détruire les dettes par l'inflation. De toutes façons, la gauche ne peut se contenter de gérer plus sagement l'économie capitaliste, ni d'en faire un national-capitalisme, c'est ce que je dénonce.

      Je trouve d'ailleurs curieux qu'on ne voit pas qu'il y a contradiction à s'imaginer que tout est la cause de la finance (ou des banques) alors qu'on admet en même temps que ce sont les inégalités qui sont en cause. En se focalisant sur un problème, on oublie les autres et on s'imagine qu'en réglant les problèmes spécifiques de la finance, de la Grèce, de l'Euro, etc., on règlerait le problème global.

      Il y a toute une série de réformes à faire on peut même dire qu'on y sera obligé mais on n'évitera pas la purge, obligée elle aussi. La gauche qui n'est pas au pouvoir est encore plus à côté de la plaque qu'un gouvernement qui doit se coltiner l'urgence et les rapports de force effectifs mais elle va défiler sagement le 30 septembre contre l'austérité et tout le monde sera content. Je suis d'ailleurs un chaud partisan de "l'intervention des peuples", notamment pour empêcher une austérité qui ne fait qu'empirer les choses mais les mobilisations en Grèce ou en Espagne n'ont rien donné du tout, pas plus que les manifestations contre les retraites ici. On est dans des stratégies d'échec. Il ne suffit pas de faire nombre. Je crois que le caractère archaïque et un peu irréel de la gauche actuelle y est pour beaucoup mais il est peu probable qu'on refasse le coup de 1936 (après les grandes vacances, le revenu garanti ?). Il faudrait bloquer le pays mais bien peu y sont prêts, même dans les pays les plus touchés.

  4. Je ne comprends pas le reproche de ne pas parler de l'automation et du numérique alors que c'est un des points principaux dont je parle ici (sans compter tout ce que j'en dis à longueur de textes) !

    Je n'ai pas tellement envie de m'étendre sur Robert Kurz car c'est un peu compliqué et le critiquer n'est en rien une priorité. Je suis assez d'accord avec la "critique de la valeur" qu'il attribue à un Marx dont le caractère prétendu "ésotérique" est par contre purement imaginaire et vient du fait que la compréhension qu'en a un Robert Kurz ébloui par sa trouvaille est bêtement idéaliste au contraire de celle de Marx. J'ai dû batailler contre son "Manifeste contre le travail" auquel on m'assimilait, notamment quand j'ai participé au mouvement de chômeurs à Jussieu et qu'on avait sorti "Le lundi au soleil".

    Gorz était séduit à la fin de sa vie par ses thèses (comme par Tiqqun d'ailleurs) et cela fait 5 ans exactement que j'ai téléphoné à Gorz pour aller le voir afin justement de lui faire part de mes critiques à leur sujet (mais critiques qui s'appliquaient en partie à Gorz lui-même). Il m'a dit qu'on ne pouvait pas se voir car il partait pour un long voyage (alors qu'il ne bougeait jamais de chez lui à cause de la maladie de sa femme). Le lendemain, il se suicidait avec Dorine...

    • Sur le "refus du travail", je tombe ce jour sur une ITW d'Antonio Negri à propos de la sortie de "CommonWealth" (avec Michael Hardt), et j'y lis ceci :

      "Je lisais récemment un livre de Daniel Cohen, qui est aujourd’hui l’un des économistes les plus reconnus en France (je lui ai dédicacé quand il était jeune, ainsi qu’à d’autres, Marx au-delà de Marx). Cohen soutient qu’aujourd’hui, après cette crise, la nouvelle figure anthropologique du travailleur, son idéal-type, est celle du travailleur intellectuel/cognitif et mobile, et que les éléments de communauté se construisent autour de ces caractéristiques. Désormais, l’anthropologie du travailleur doit l’envisager comme un point productif et mobile d’une intersection multitudinaire. La production – et j’ajoute : les constitutions politiques qui en découlent – doit donc être imaginée sur cette base. De ce point de vue (à l’intérieur des projets de résistance et du pouvoir constituant), le refus du travail, aujourd’hui encore (comme cela a toujours été le cas, notamment pour l’ouvrier fordiste), est un refus déterminé. Personne n’a jamais parlé d’un refus du travail dans l’absolu (c'est moi LB qui souligne). Il suffit de lire les plus beaux documents dont nous disposons sur le refus du travail, par exemple ceux hérités des travailleurs de l’usine de pétrochimie de Marguera dans les années 1970 (que l’on peut lire dans la revue Lavoro zero – zéro travail), pour réaliser que c’était un refus complètement déterminé : ce que l’on contestait, c’était les horaires, le salaire, la sujétion du temps libre, les loyers, etc. C’est la même chose aujourd’hui : le refus du travail est un refus absolument déterminé (...)"
      Source : http://www.revuedeslivres.onoma6.com/articles.php?idArt=507

        • Oui, mais on peut préférer parler de pluralité entre privé, public, associatif, autonome et commun au lieu de croire que le commun se substitue aux autres, il y a conservation malgré la négation.

          Sinon, j'ai toujours trouvé Negri intéressant sur le travail mais pas tellement sur le reste. Par contre j'aimais plutôt bien Daniel Cohen jusqu'ici mais son dernier livre semble écrit pour être un best-seller malgré son très mauvais titre et on est stupéfait par son indigence avec des chapitres de 3 pages qui développent une simple idée sans s'attarder à aucune complexification...

          • Refus de la complexité sans doute à l'image de la fin de cet entretien publié par Libération le 3 septembre dernier ("réenchantons le travail en faisant confiance au syndicalisme")...

            Mais bon, reconnaissons que la dialectique "simplifier pour (inciter à) agir" - "complexifier pour mieux (moins mal) approcher le réel" n'est pas la plus simple à faire vivre, n'est-ce pas ?

  5. Merci pour votre réponse et je me contente de souligner des critiques qui n'enlèvent rien aux 95% de l'article avec lesquels je suis d'accord. Je pensais particulièrement à l'automatisation des tâches cognitives. L'automatisation du secteur secondaire a déplacé les emplois vers le tertiaire et n'est pas nouvelle mais qu'en est-il de l'automatisation des services quand il n'existe pas de quatrième secteur? Effectivement, vous êtes un des seuls à en parler et c'est une des raisons qui me font lire le site mais à mon goût, vous n'abordez pas assez cette problématique dans cet article. Par ailleurs, je serais très intéressé d'avoir votre avis concernant les travaux d'Andrew McAfee et de Erik Brynjolfsson (http://raceagainstthemachine.com/authors/).

    • Je ne connais pas tout, ni ne peux tout lire surtout en anglais mais ce que disent ces gens ne me semble pas très différent de ce que j'en dis depuis 1999 ! Bien sûr, je me trompe complètement et ils ont sans doute fait des trouvailles importantes depuis mais il faut de toute façon répéter les choses tout le temps quand on a affaire à un tel bouleversement des bases productives. Bien sûr qu'une partie importante du tertiaire et des tâches cognitives vont être automatisées mais cela ne fait que donner plus de valeur aux tâches que seuls les humains pourront effectuer. Il n'y a pas de limite à la lutte contre l'entropie, donc au travail qui n'est pas un stock donné qui irait en diminuant mais un flux, un effort constant orienté par les nouvelles priorités du moment, le chômage étant lui aussi affaire de déséquilibre des flux monétaires. Je ne crois pas du tout au chômage technologique ni à la fin du travail mais il est indéniable qu'il y a un chômage de masse qui rend effrayant de perdre son emploi et des ouvriers qui perdent leur emploi industriel à cause de l'automation et de la concurrence des pays émergents y compris en Europe.

      • Merci d'avoir pris le temps de répondre. Il n'y a rien de fondamentalement nouveau en effet mais ils mettent à jour les théories sur l'automatisation et l'impact de la technologie sur le chômage en bénéficiant de la taille de laboratoires du MIT et de Harvard pour les données empiriques donc c'est intéressant. Les graphes sont particulièrement parlant. A noter que les deux chercheurs n'ont pas d'opinion tranchée sur le chômage technologique et se contentent d'analyser les changements actuels en terme de productivité et d'emploi. En gros leur position par rapport est de dire que les choses sont peut-être différentes aujourd'hui. C'est dommage de ne pas lire en anglais comme beaucoup d'articles sont en anglais et que c'est une langue facile à apprendre pour un français comme 80% des mots viennent du français. Ceci-dit, en parlant d'automatisation des tâches cognitives, les traductions grâce à google des sites internet atteignent une qualité honorable et s'améliorent tous les jours. Ces traductions illustrent bien l'automatisation des tâches cognitives par l'informatique. Même les vidéos commencent d'ailleurs à être traduites automatiquement.

        • On ne peut imputer le chômage seulement au numérique, comme ce sera le cas par exemple quand les enseignants seront au chômage parce que l'enseignement se fera par vidéos. Surtout aux USA, la délocalisation en Chine a été massive ce qui s'ajoute aux restructurations autour du numérique mais n'est pas du même ordre. On doit distinguer le chômage frictionnel du chômage monétaire comme du chômage structurel ou lié au déficit commercial.

          Je peux lire l'anglais mais très difficilement, avec des risques de contre-sens. La traduction automatique est l'exemple même de l'automatisation qui n'est pas au point. Je l'utilise effectivement pas mal pour me dire à chaque fois que c'est vraiment nul et revenir au texte original. Il y a encore une incompréhension totale du fonctionnement du langage et du cerveau, bien différent des programmes linéaires. De toutes façons, je manque déjà de temps pour lire tous les livres qu'il faudrait absolument que je lise en français. Il est plutôt dommage que les anglais ne puissent pas me lire...

          • Je suis plus optimiste que vous concernant les traductions qui sont loin d'être de bonne qualité pour l'instant mais dont le rythme de progrès m'enthousiasme. Et le domaine du langage est probablement un des plus difficiles à automatiser. Il existe d'ailleurs déjà des logiciels de journalisme sportif qui commentent différemment les matchs suivant les supporters auxquels il s'adresse. Ce processus est d'autant plus intéressant qu'il remettra en valeur le génie humain qui à mon avis réside dans la sensibilité, l'imagination et la créativité. Votre dernière phrase ironique me fait penser à l'avantage qu'ont actuellement les penseurs et écrivains français sur les anglo-saxons puisque ceux-ci traduisent très peu de livres étrangers mis à part la mode des foucault, derrida, deleuze,... dont les livres inondent les librairies anglo-saxonnes.

          • Il y a plusieurs traducteurs en ligne qui donnent des résultats différents.

            Tout dépend aussi des langues traduites. Par exemple le traducteur Google est assez mauvais dans le sens anglais vers français, mais donne de bons résultats dans le sens allemand vers anglais. Assez étrange de le constater... Je m'amuse ainsi à passer par des langues intermédiaires pour avoir de meilleures traductions, plutôt qu'en traduction directe.

            C'est effectivement une drôle de cuisine...

          • Un lien svp pour "creuser" l'idée de "chômage monétaire" ? Merci
            (j'imagine un rapport avec les monnaies locales relocalisatrices de production, par exemple, mais j'aimerais à la fois être sûr de ne pas faire complètement fausse route et aussi avoir une vision aussi complète que possible)

          • C'est juste ce qu'on appelle normalement le chômage keynésien et c'est bien connu des Américains qui gèrent le niveau de chômage par l'injection de monnaie jusqu'au niveau où cela crée de l'inflation (NAIRU). Les monnaies locales peuvent effectivement suppléer au moins en partie à un chômage keynésien, ce pourquoi elles peuvent être plus efficaces que des mesures nationales en Euro (le but n'est pas de se limiter à un rabais de 10%!).

            Je ne vois pas quel lien donner là-dessus (Keynes?) mais cela montre bien que le travail est un flux qui dépend d'un autre flux (monétaire) et non du niveau technique ou de prétendus besoins de base.

  6. Votre analyse est très convaincante, des multiples aspects de la crise actuelle.
    Par choix, je suis moins d’accord avec votre critique des propositions politiques des options de gauche : il y a des urgences dans les réactions de résistance à l’accroissement des inégalités, aux restrictions des acquis sociaux antérieurement acquis, à l’imposition de politiques d’austérité, à la dérégulation financière,… Des résistances s'imposent
    Je trouve que vos critiques s’adressent au « peuple de gauche » plus qu’à l’ensemble des minorités militantes. Soit un peuple qui devrait être très majoritairement acquis à nos idéaux, mais se retrouve sur les thèmes du Front National ( ces nostalgiques nationalistes et protectionnistes que vous dénoncez) lorsqu’il n’est pas séduit tout simplement par les illusoires réformes promises par les experts en économie politique bien pensante.
    Mais je suis d’accord pour estimer avec vous que fait gravement défaut la possibilité, ou la volonté, d’appuyer nos mots d’ordre d’action non plus sur les compromis et régulations de vie sociale héritées du passé, mais beaucoup plus sur les possibilités offertes par les conditions que laissent entrevoir de nouveaux modes de production accessibles, et de nouvelles contradictions à résoudre. L’opposition de gauche, à laquelle je me rattache, a tout à perdre par sa peur de prendre clairement appui sur l’expression de vérités ,que vous rappelez. Réalités que l’électorat populaire connais, pour les subir, tout en étant persuadé qu’il n’y a aucune chance de s’y soustraire. Le rôle d’une gauche lucide serait, plutôt que de s’en tenir seulement à rassembler cycliquement des manifestants, de montrer par une éducation populaire continue que la chance d’un avenir consiste à mettre à jour le positif dans le négatif. Ce me semble être le but (mais à ne pas manquer !) des « assemblées citoyennes » prônées par le Front de Gauche et d’autres organisations qui s’y associent, comme Attac
    Je choisis d’être moins pessimiste que vous, tout en estimant que votre pessimisme concernant les options de gauche est très utile à celle-ci.

    • Mes critiques visent aussi ATTAC (Michel Husson, Jean-Marie Harribey) et presque tous les groupuscules pour l'ignorance du numérique ainsi que Mélenchon, Lordon, Sapir, Todd pour le national-capitalisme-industrialisme en plus. Ce n'est pas que ces gens très sympathiques et généreux (je ne mets pas Généreux dans le même sac) soient nationalistes d'ailleurs mais ils renforcent cette tendance naturelle du fait que tout est encore apparemment organisé autour de la nation (mon voisin paysan ne comprend pas l'augmentation de l'essence qu'il prend pour un complot comme si on pouvait décider du prix de ce qu'on importe).

      Je ne la ramène pas trop car je sais qu'on ne peut pas y faire grand chose mais si au lieu de croire pouvoir vaincre la crise on s'attendait au pire, on pourrait mieux s'organiser localement pour surmonter les moments les plus durs. La nouvelle la plus importante du jour, c'est la création d'une monnaie locale à Naples qui engage 60 millions dans l'affaire. Ce sont ces opérations de sauvetage qui apparaissent marginales qui seront sans doute les plus décisives et que devraient se dépêcher d'imiter les Grecs comme les Espagnols au lieu de se perdre en insultes contre les dieux et les Allemands.

      Je dirais bien que la conversion de la gauche tiendra surtout à la question du revenu garanti qui me semble la pierre de touche de nouvelles protections sociales universelles basées sur l'individu mais les partisans du revenu garanti s'étripent tellement entre eux (et moi-même ne suis d'accord avec aucun!) que c'est sûrement le signe qu'on n'est pas encore tout-à-fait mûrs, qu'il faut une "accélération de l'histoire" pour clarifier les enjeux.

      Des "assemblées citoyennes" pourraient être très utiles en tant qu'elles sont forcément locales, à condition d'être assez ouvertes et ne pas se limiter aux militants. Je suis persuadé que les militants sont indispensables mais lorsqu'on prend un peu de champ on est consterné par toutes les fausses vérités qu'on tient pour indiscutables dans ces groupes, ce qui rend très difficile d'intégrer de nouvelles réalités massives comme le numérique. En tout cas, c'est loin d'être la première fois qu'on organise ces réunions ouvertes et, en dehors du référendum, n'a rien donné jusqu'ici. Ce qui est le plus bête dans le front de gauche, c'est son optimisme béat qui attend un miracle de la bastille comme de ces assemblées citoyennes ou de la manif du 30 septembre. La seule chance que cette manif ait un poids quelconque, c'est qu'elle dégénère, c'est la violence et non le nombre qui peut faire basculer une politique suicidaire, mais ce n'est pas dans la doctrine républicaine à l'eau de rose.

      • Ces essais de monnaies locales me paraissent bien plus utiles, en effet, que de gueuler sur les allemands qui n'ont jamais mis un revolver sur la tempe de ceux qui leur achètent leurs produits, voitures entre autres, d'ailleurs plus chères que les françaises.

        • C'est surtout que les Allemands eux-mêmes vont sombrer avec les autres (il suffirait que les taux augmentent pour que leur dette aussi soit insoutenable).

          Quand les Grecs ont fait faillite, je ne me sentais pas concerné car je n'étais pas Grec. Quand ce sont les Espagnols qui ont été déclarés en faillite, je ne me sentais pas concerné, je n'étais pas Espagnol, etc.

          On peut dire que d'une certaine façon, c'est le fait que l'Allemagne semble résister à la crise qui est le meilleur argument du nationalisme, mais c'est une illusion, juste une question de timing.

          • Faut raison garder, en cas de destruction de l'Euro, le DM sera surévalué, mais pas longtemps.

            Ce sera la guerre des monnaies et la course à l’échalote. Comme d''hab....

            Le problème de base n'est pas la monnaie, mais qui sait produire et qui achète.

            Pour le moment, ce sont les allemands qui savent produire.. Peu importe la monnaie.

          • J'ai bossé en France, puis maintenant en Allemagne.

            J'ai donc des repères de comparaison. Les français sont infoutus de faire aboutir
            des produits un peu innovants. En fait, ils ne comprennent rien à l'innovation.

            Cette histoire de l'Allemagne indigne n'a aucun sens, sorte de passager clandestin à
            proscrire. C'est ridicule, un pays fait des efforts de sobriété et de qualité, alors on lui tombe dessus.

          • Je ne suis pas allemand, mais j'en ai ma claque de voir que tout leur est mis sur le dos.Comme si les autres gouvernements et peuples n'avaient aucune rsponsabilité concernant les évènements en cours. Qui s'est endetté sur 50 ans pour avoir un logement et s'enrichir en spéculant sur l'immobilier ? Des abruts s'endettent et c'est la faute des allemands ?

          • Il y a un peu de vrai mais beaucoup de surestimation et de suffisance de ce prétendu modèle allemand, tout simplement parce que, pour l'instant, l'Allemagne s'en sort bien et croit que cela va durer toujours. Une bonne partie du problème vient pourtant bien des Allemands et de ce salaud de Schroeder qui n'avait de socialiste que le nom et rêvait plutôt de cigares et d'argent. Il est certain qu'en appauvrissant les pauvres il a fourni un avantage comparatif à l'Allemagne par rapport à ses voisins européens, rien de glorieux là-dedans. Il y a aussi un vrai savoir-faire allemand (ce n'est pas nouveau mais la productivité française n'est pas si mauvaise non plus même si elle est en baisse) et ils ont bénéficié de la réunification mais, je le répète, il suffit que les taux montent - ce qui arrivera à un moment ou un autre - et les Allemands seront dans la même situation que les pays du sud car l'Allemagne n'a été sobre que pour les pauvres, sinon elle a autant emprunté que les plus endettés. Il faut vraiment que les grands pays (USA, Allemagne) s'effondrent pour qu'on admette que ce n'est pas un problème local mais une crise systémique...

      • Je ne vois pas trop en quoi l’Allemagne a bénéficié de la réunification.

        Il me semble au contraire qu'elle l'a payée cher.

        La compétitivité frasncaise est en berne complète.

        J'ai eu affaire à des italiens, ou d'origine italienne, y compris mon père, eh bien c'est pas brillant, la plupart du temps ce sont des escrocs.

    • Oui, et il y en a bien d'autres mais ce que j'avais trouvé encourageant avec le Napo de Naples, ce sont les sommes engagées car tout ce qui existe pour l'instant, comme le SOL, est très insuffisant, pouvant disqualifier les monnaies locales comme trop marginales. Il y a un effet de seuil à atteindre mais une fois que le mouvement sera lancé, il devrait se généraliser assez rapidement dans les pays les plus touchés par la crise, apparaissant comme une solution pratique à portée de main et non un truc purement idéologique de bobos écolos.

  7. Je reviens sur mon image (voir commentaire pour votre billet précédent ) du « bâton de berger » de luxe qui au Moyen Age était le signe poétique de la fonction d’un meneur d’hommes d’élite, élu de Dieu (sceptre royal, crosse de l’évêque), et dérisoirement devenu au XXeme siècle une très prosaïque marque de saucisson. Le symbole sous- entend dans chaque cas la présence d’un troupeau, d’ouailles fidèles ou de moutons consommateurs..
    A l’opposé de ces traditions, Patrice Bessac raconte, dans l’Humanité de ce 19 septembre, comment un camarade lui parle par image de l’engagement militant , dans le PCF du XXIème siècle qu’exige le Front de Gauche: « Nous étions des moutons, nous sommes devenus chats…et il est difficile de constituer un troupeau de chats ! », car dans un tel troupeau de chats, « chacun conserve, développe, et partage ses propres compétences, son autonomie propre … les formes du développement de l’intelligence sont en train de changer, les processus créateurs se diffusent… »
    Vous attribuez donc encore aux gauches radicales cet esprit certes religieux que vous avez connu, et que j’avais moi-même refusé, mais qui est pratiquement en voie de disparition ! L’entrée dans l’ère de l’information ou du numérique n’y est pas pour rien, en effet. Et je trouve saine, de votre point de vue distancié, une défiance maintenue: c'est tellement facile de redevenir moutons, veaux ou dévots!
    Quand à l’idée de nation, nous insistons, au Front de Gauche, sur la particularité de l’héritage révolutionnaire français qui fait reposer l’identité nationale exclusivement sur le choix particulier des institutions et des lois d’une république laïque, démocratique et sociale - une culture essentiellement politique ,donc - et où désormais l’économie doit être dépendante de l’écologie.( Il ne s’agit pas bêtement de « sauver la planète », ni d’économie verte ou de croissance durable, mais de respecter les conditions naturelles d’un « bien vivre » de l’espèce humaine). En l'état des choses notre culture nationale française est plus universelle, je pense, que la construction politique européiste qu'on impose aux peuples de l'Europe, sans prendre en compte leur droit d'en juger directement par eux-mêmes.
    Au plaisir de vous lire et relire.

  8. Je suis d'accord avec le fait que le militantisme a changé, même au parti communiste mais pas tant que ça, à l'évidence au parti de gauche où il y a des groupes plus informels et libertaires mais que Mélenchon ne représente pas vraiment (et on ne connaît que lui). Je suis d'accord avec le fait que le numérique y a un rôle décisif mais pas seulement. C'est le sens même du militantisme qui change quand on ne connait pas une guerre par génération comme avant et qu'on ne peut plus compter sur les masses industrielles suivant leur leader. On était certainement plus bêtes et dogmatiques en Mai68 mais ce n'est pas tant le fanatisme que je dénonce ici, plutôt une autre sorte de bêtise, fort commune, qui est l'incapacité à changer de paradigme. Je dois dire que je ne suis pas du tout convaincu par la planification écologique (trop industrielle), quoique je sois pour une forme de planification écologique mais je ne crois pas que cela change quoique ce soit au capitalisme et suis persuadé que le niveau pertinent pour l'écologie reste le local de même que l'enjeu principal reste le travail autonome et la sortie du salariat.

    Il faut se méfier avec des mots comme celui de Nation, comme s'il avait toujours eu le même sens. Pour la Révolution Française, il n'y avait pas vraiment de territoire. La République étant universelle, tout démocrate était français ! Ensuite, le sentiment national s'est forgé, comme toujours, dans la guerre. Ce qui nous a uni, c'est d'avoir le même ennemi (bien plus que l'école). Or, c'est justement ce qui a donné forme au fascisme qui vient de la gauche, qui est une gauche devenue nationaliste par la guerre de 14-18. Le fascisme s'appuie sur des apparences de démocratie et sur des mobilisations de masse, c'est une perversion de la démocratie comme la démagogie mais on ne peut dire qu'il soit étranger à la démocratie. Pour Shlomo Sand, qui parle surtout d'Israël, ce qui rend les démocraties guerrières, c'est de faire du peuple le propriétaire de sa terre. On a là, le mécanisme général de sortie de la religion où l'on fait l'erreur de mettre le peuple à la place de Dieu ou du Roi alors que la place du Dieu omniscient ou de son représentant reste désormais vacante. Cette terre n'appartient à personne. La notion de Nation est très récente, elle n'a rien de naturelle et suit les fluctuations idéologiques du temps qu'il ne faut pas trop s'imaginer pouvoir bien maîtriser. Il faut faire attention aussi à ce que l'universel ne soit pas confisqué par le particularisme national qui s'en réclame. Une nation existe par ses institutions, cela n'oblige pas à croire sa personnification dans les récits qu'on en fait (il y a la tradition glorieuse et la tradition critique).

    La démocratie est trop surévaluée à gauche, complètement idéalisée et comme pouvant décider de n'importe quoi. Le problème de la démocratie, c'est effectivement qu'elle est sans fondements, ce qu'ont bien étudié Castoriadis et Lefort dans les deux faces d'une révolution fondatrice et d'un fonctionnement pluraliste. Si une révolution est nécessaire pour abattre un pourvoir arbitraire, ensuite on peut avoir soit une "démocratie" totalitaire imposant son ordre théocratique ou fasciste, soit une démocratie pluraliste de compromis qui ne peut décider de tout mais se limite à décider surtout du montant d'imposition et de quelques règles du vivre ensemble, pas toujours à bon escient...

    Je ne suis pas d'accord avec la réécriture de l'histoire qui voudrait faire croire que l'Europe s'est construite contre l'avis des peuples auxquels on a demandé leur avis constamment et qui ont soutenu majoritairement ses avancées irréversibles jusqu'à la constitution qui a buttée sur une absurde concurrence libre et non faussée prise comme fondement. Certains ont une conception complotiste de l'Europe manipulée par les Américains et leurs laquais dont Kojève aurait fait partie, ce qui est ridicule alors que la majorité des politiciens ont soutenu cette fédération à petit pas. Au point où nous en sommes, ce sont les événements qui dictent leur loi. Revenir en arrière serait tragique mais on a besoin d'un autre fondement que la concurrence et d'une harmonisation fiscale et sociale. Il est évident depuis le début de la construction européenne que cela impliquait l'effacement progressif des nations et même si on cassait tous les traités pour reprendre notre indépendance elle ne servirait pas beaucoup sous les coups de boutoirs de la spéculation monétaire et de la fuite des capitaux. Il ne fait aucun doute que l'Europe nous donne un peu plus d'autonomie mais c'est l'Europe qu'il faut changer, ce qui est encore plus difficile sans doute que le niveau national mais peut-être pas tant que ça et quand on sera tous dans la merde, cela pourra créer les solidarités nécessaires...

  9. Cela fait partie incontestablement des tentatives pour trouver un nouveau modèle pour remplacer l'ancien et témoigne des nouvelles tendances en oeuvre mais je doute que ce soit autre chose que marginal. C'est sans doute préparer les entreprises à intégrer les nouvelles contraintes écologiques et sociales mais je trouve plus important de favoriser le travail autonome (le statut d'auto-entrepreneur est en sursis...).

    • Je ne comprends pas pourquoi le statut de l'auto-entrepreneur est ainsi mis en sursis, plutôt que de l'améliorer? Les comparaisons fiscales globales semblent démontrer que ce n'est pas un statut avantageux vis à vis de l'artisanat. C'est donc un statut qui permet surtout de tester une idée, d'apporter un complément de revenu, de changer de mentalité vis à vis de sa contribution à l'activité, de réduire le travail au noir.
      Parmi les inconvénients: des entreprises qui auto-entrepreneurisent leurs salariés. C'est repérable quand l'auto-entrepreneur n'a qu'un seul client.

      • Moi, je n'ai qu'un seul client parce que je n'en ai pas trouvé d'autres, sauf très temporairement, mais préfère être indépendant que salarié, ne serait-ce que pour compléter ce très maigre revenu. Ce n'est pas ça le bon critère mais il est évident qu'il faut ajouter des protections au statut d'auto-entrepreneur et empêcher le remplacement de salariés par des auto-entrepreneurs comme je le disais déjà dans mon article sur le sujet.

        C'est un fait qu'un auto-entrepreneur est moins cher qu'un salarié, il y a bien là une concurrence déloyale. Certes, cela ne concerne que les petits revenus car il y a un plafond mais le problème avec l'artisanat, ce n'est pas la fiscalité, c'est qu'il n'y a plus de barrière d'entrée et que n'importe qui peut être maçon ou cordonnier alors qu'avant ne survivaient que les meilleurs, les pros. On augmente la concurrence (en baissant la qualité) mais en même temps on permet à tout le monde de travailler alors que si on remet des barrières d'entrée en les empêchant de travailler, ce seront encore les plus pauvres qui assureront la prospérité des autres (et qu'on accusera par dessus le marché de travailler au noir!).

        Il y a des contradictions entre les intérêts des travailleurs et les socialistes risquent de servir leur clientèle salariée plus que les précaires dont beaucoup ne votent pas. Même si on ne peut gagner beaucoup plus que le smic, le statut d'auto-entrepreneur ne concerne pas que des précaires cependant mais aussi toute une série de nouvelles prestations soit dans les services, soit liés au numérique ou au domaine créatif (rejoignant le problème des intermittents du spectacle). Voilà un domaine où l'on a le "revenu maximum" que certains voudraient imposer aux patrons (mais ce n'est pas le même niveau!). Cela reste un point positif pour la décroissance de ne pas encourager à gagner plus quand on a juste assez.

        Il y a incontestablement des garde-fous à mettre. J'avais proposé ceux-ci dans un commentaire :

        Du côté des entreprises, dans un premier temps, on pourrait interdire d'utiliser plus d'un auto-entrepreneur dans une fonction donnée ou si c'est sur le même poste qu'un ancien salarié. Un contrat d'auto-entrepreneur devrait exclure toute subordination et heures de présences en entreprise (ce devrait être un contrat d'objectif). Il faudrait enfin une différenciation étanche entre proposition d'emploi salarié ou de services externes.

    • Je n'aime pas Bernard Bourgeois ni son interprétation de Hegel, qui manque de négativité, ni sa réduction de l'aufhebung à la suppression alors qu'il y a plutôt dépassement, reconversion, approfondissement, intégration du négatif. Reste que c'est très bien qu'on trouve un texte fiable de l'encyclopédie pour un prix relativement modique.

  10. C’est à désespérer de lire un texte traduit de l’allemand au français, tellement la formulation de l’expression est différente ! Moi je traduirais aufheben par « consommer » mais au sens ancien d’accomplir pleinement et jusqu’à son terme, ce qui implique dépassement dialectique par suppression-refondation, et pas en contournant le négatif. C‘est à partir de la création artistique que se conçoit mieux la nature d’un tel « cataclysme régénérateur ». Ce que je n’ai jamais été capable de faire : concevoir une forme se formant, en précession d’elle-même. Ce qu’Henri Maldiney exprime ainsi : « ce risquer à l’impossible… qui en déchirant la trame du possible pour se faire jour, en montre aussi la force et le sens… " J'ai toujours buté là-dessus.

  11. Quelques infos sur l'évolution et l'économie allemande qui ne peut être un modèle puisque rien ne peut être copié à l'identique d'un pays à l'autre, juste inspirer quelques réflexions et adaptations locales.

    En fait, ce que la zone Euro ne réussit pas faire avec les pays périphériques, correspond à grande échelle à ce que l'Allemagne n'a pas réussi à faire avec l'ex-RDA, surprenant :

    "Mais, au moment où le ministre-président
    bavarois exprimait cet enthousiasme,
    c’est-à-dire bien après la réunification,
    l’on se rendait compte que l’Allemagne
    ne détenait pas le secret de reproduire le
    Mittelstand en ex-RDA. La naissance d’un
    tissu d’entreprises moyennes dynamiques
    s’y fait toujours attendre."

    http://www.la-fabrique.fr/uploads/telechargement/505c96c0-ec68-4d7d-8138-37905762912c-Allemagne_WEB2.pdf

    • Je n'ai pas lu en détail ce pensum mais je n'ai pas vu la démonstration annoncée que l'appauvrissement des pauvres n'avait pas profité à l'économie allemande au détriment des autres pays de l'Euro et surtout des pauvres encore une fois. Elle admet même cet appauvrissement (qui vient aussi de la RDA) mais veut que la seule raison de la réussite de l'Allemagne soit son excellence. Personne ne nie les avantages remarquables du système Rhénan (qui va jusqu'à l'Italie du nord), pas plus qu'on ne peut nier les atouts des USA qui ne sont pas du tout les mêmes pourtant. Il n'y a pas de modèle transposable, en effet, mais une organisation des territoires particulière à chaque fois. Il est stupide par contre de nier les atouts de la France qui sont d'une toute autre nature encore (plus étatiques). On est en déclin mais on fait toujours partie des saigneurs même si ce n'est plus pour très longtemps.

      Il est ridicule de s'auto-admirer quand on est au sommet juste avant la chute finale. C'est ce qui était arrivé au Japon, aux méthodes de production remarquables, en effet, et qui avait dépassé les USA avant de rentrer dans une stagnation qui continue depuis 1987. La crise va toucher tout autant ces colosses aux pieds d'argile que sont l'Allemagne et les USA. Comme je l'ai déjà dit, il suffit que les taux augmentent pour que les dettes de ces grands pays, qui savent paraît-il bien mieux que nous ce qu'est l'économie, soient tout aussi insoutenables que pour la Grèce. Après la crise, chacun retrouvera ses forces et ses faiblesses, mais c'est une autre histoire qui elle aussi a ses cycles, pas la peine de prendre des airs supérieurs chacun à tour de rôle même s'il y a des leçons à prendre des autres.

      On ne se rend pas assez compte à quel point la richesse des riches est basée sur la pauvreté des pauvres, richesse qui se croit légitime (gagnée légalement) quelque soit la pauvreté engendrée. On le voit bien avec les mesures d'austérité qui sont des mesures d'appauvrissement des pauvres (le montant des salaires et les protections sociales des pauvres sont considérés comme un luxe que les riches ne peuvent pas s'offrir!). Il a toujours été nécessaire que les travailleurs se révoltent contre l'oligarchie pour restaurer des conditions de vie supportables, sinon les puissants confisquent tout sans rien pour limiter leur puissance. Pour qu'ils arrêtent de taper sur les pauvres, il faut que les pauvres fassent peur aux riches. C'est peut-être le moment où les manifestations vont devenir plus violentes (c'est là où l'on voit la nécessité de la violence, violence qui a intérêt a être la plus symbolique possible mais qui doit empêcher de continuer dans l'impasse où nos dirigeants nous mettent sous la pression des marchés). Il n'y a effectivement que 3 façons de s'en sortir à court terme, celle de Paul Jorion, complètement improbable dans une Europe désunie, d'un défaut sur toute la dette européenne, un véritable effondrement systémique (boursier, financier, monétaire) qu'on fait tout pour éviter en ne faisant que reculer l'échéance à chaque fois, ou bien un niveau de violence ou de blocage qui empêche les politiques suicidaires actuelles mais qui nous ferait entrer dans des aventures très risquées. Ce n'est certainement pas la meilleure solution mais la seule que semblent nous laisser nos gouvernements.

      • Les "pensums" sont ennuyeux mais au moins évitent les clichés et raccourcis.

        La France a eu des réussites dues à sa tradition centralisatrice permettant à l'état d'intervenir dans l'économie, mais totalement incompatible avec les règles de l'UE. Dans la vie faut faire des choix, si on est pas d'accord avec la politique allemande et celle de l'UE, alors dire sa position et quitter la table si rien ne change.

        L'exemple de la réunification allemande montre qu'avec une monnaie unique, l'ex RDA, même langue et histoire, n'a pas presque pas convergé après 20 ans. Et on veut nous faire croire que des pays différents par leur gestion de l'économie, déflation monétaire versus déflation interne, et leurs langues, vont converger sous les bons auspices d'une monnaie unique et d'un fédéralisme concret dans les rêves. La blague de Jorion sur des défauts simultanés et planifiés aux petits oignons est très drôle et démontre à quel point il plane dans les nuages de ses songes de nuit d'été.

        • "La blague de Jorion sur des défauts simultanés et planifiés aux petits oignons est très drôle et démontre à quel point il plane dans les nuages de ses songes de nuit d'été."
          Sa position met en perspective que la dette n'est pas de l'argent, il est cohérent avec lui-même. Je me demande pourquoi il ne parle plus beaucoup de bancor, (dans une version chartaliste, cad sans référence matérielle du bancor) ou de banceuro dans ce cas, qui permettrait un fédéralisme européen respectueux des divergences économiques et culturelles. D'autant que ce dispositif permettant d'interdire les paris sur les fluctuations des cours serait assez simple à mettre en place en sortant les achats ventes de devises du bilan bancor.
          Je n'ai sans doute pas saisi ce qui nous empêcherait de le faire ou les inconvénients que ce banceuro aurait.

    • Bien sûr, ce qui n'est pas le cas général actuellement mais le devient inévitablement dans les périodes d'inflation. Comme le smic est indexé, par répercussion cela concerne pas mal de revenus mais pas une majorité sans doute après une période de lutte contre l'inflation où c'est ce que Trichet notamment voulait éviter à tout prix (l'indexation des revenus sur l'inflation). Il est certain qu'il faudra des luttes salariales pour réintroduire cette indexation comme la règle et que des petits salaires peuvent en pâtit quelque temps mais les salaires finissent forcément par se réajuster (sauf concurrence avec les pays les plus peuplés ?) alors que le capital dévalué ne retrouve pas sa valeur initiale.

    • Le calcul de l'inflation me parait tout aussi douteux que celui de la surveillance des bulles, problème central.

      Les prix de l'immobilier ont totalement explosé dans certains pays. Il y a un problème des instruments de mesure qui semblent de plus en plus défaillants. Et sans mesure fiable, pas de déductions fiables.

      • L'inflation qui compte et qu'on combat, celle des cycles de Kondratieff, c'est l'inflation des matières premières et produits de base entraînant toute la chaîne de production et des salaires, non pas l'inflation des actions ou de l'immobilier qui sont plus spéculatifs, de l'ordre de bulles effectivement et qui résultent de la concurrence des riches entre eux lorsque la lutte contre l'inflation les a enrichis et appauvri les pauvres. On peut dire qu'il y a toujours l'inflation de quelque chose mais ce qui est déterminant, c'est l'inflation des salaires et son impact sur la monnaie.

  12. Ca qui manque sur ce blog, qui pourtant se réclame de l'information, c'est justement que l'information, en particulier sur le plan des règles juridiques, circule très bien et devance le matériel. La puissance destructrice vient du droit régalien soumis aux classe "informées" du droit :

    Les causes de cette crise sont aujourd’hui bien connues par les enquêtes du FBI: la dérégulation a permis de véritables vagues de pillage, parfois par les mafias, comme celle de La Nouvelle-Orléans, parfois par de simples dirigeants de ces mêmes caisses d’épargne, appâtés par les nouvelles facilités.

    http://www.les-crises.fr/livre-la-grande-fraude/?utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+les-crises-fr+%28Les-Crises.fr%29

    Qui connait le CPI, le CGI, le CPC...?

    Un peu s'intéressent à l'économie, mais au droit ? La plupart n'y comprennent rien. Eh bien sans droit, il n'y a rien. Deleuze l'avait compris.

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