Revenu garanti, coopératives municipales et monnaies locales

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Article pour Multitudes no 27

Depuis la chute du communisme le manque d'alternative paralyse tout mouvement social de quelque ampleur, comme la lutte contre le CPE ne trouvant aucun débouché politique autre qu'une défense illusoire du CDI, sans aucun effet sur le développement de la précarité. Les causes de notre échec ne sont pas dans la force supposée de nos adversaires mais bien dans la faiblesse de nos propositions et dans nos archaïsmes face aux enjeux écologiques tout autant qu'aux bouleversements considérables que nous vivons depuis notre entrée dans l'ère de l'information !

Il ne suffit pas de critiquer le capitalisme et son productivisme insoutenable, il faudrait avoir autre chose à proposer. Au-delà de mesures partielles ou défensives, il y a une nécessité vitale à construire une alternative écologiste à la globalisation marchande, alternative qui soit à la fois réaliste et tournée vers l'avenir, c'est-à-dire en tenant le plus grand compte des contraintes matérielles aussi bien que des nouvelles technologies de l'information, plutôt que de s'accrocher vainement à un passé industriel révolu, et pas aussi glorieux qu'on le dit !

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La part du négatif

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"A la base de chaque être, il existe un principe d'insuffisance" (Georges Bataille, Principe d'incomplétude).

NégatifIl faut enfoncer le clou, l'écharde dans la chair, car on tombe toujours au pire à s'enivrer de mots et se faire une image trop idéalisée de soi-même comme des autres. "Qui veut faire l'ange, fait la bête" disait déjà Pascal, mais l'histoire nous a appris que c'est surtout la porte ouverte à toutes sortes de barbaries, dans la négation de l'existant au nom d'un monde futur supposé purifié de tout négatif !

Ce n'est donc pas seulement ce qu'on peut savoir qui est limité mais bien ce qu'on peut espérer de l'action politique, sans que cela ne diminue en rien pourtant notre devoir de résistance et d'engagement dans la transformation du monde. Il faudra simplement faire preuve d'un peu plus de prudence et de modestie, prendre soin de corriger ses erreurs et de ne laisser aucun pouvoir sans contre-pouvoirs pour l'équilibrer. Refuser l'extrémisme et rabaisser nos prétentions n'est pas se condamner à l'inaction pour autant, ni à un réformisme mou. C'est même tout le contraire puisque c'est ne pas se cacher la réalité des faits. Il faut y voir un préalable à l'indispensable "réalisme révolutionnaire", seul susceptible de se réaliser ! Dans cette perspective, reconnaître la part du négatif (ce qui pourrait définir l'écologie-politique) n'est pas un raffinement intellectuel et marginal, c'est la condition première de toute alternative effective.

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Le massacre des utopies

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http://raforum.apinc.org/IMG/jpg/Mscroi.jpgC'est peu de dire que notre rationalité est limitée et qu'il n'y a aucune alternative crédible. Lorsque le Monde diplomatique prétend le contraire et nous donne les dernières nouvelles de l'Utopie, c'est vraiment à pleurer ! A lire le niveau des propositions et des débats, la situation semble décidément bien plus grave qu'on ne pouvait le penser. Qu'on dérange des gens de si loin pour des bêtises pareilles, c'est incroyable ! Il y a de quoi être en colère contre ces mondes imaginaires qui se présentent comme libertaires alors qu'ils sont encore plus contraignants et moralistes, jusqu'à un certain totalitarisme ne tolérant aucune survivance du passé, et tout cela au nom de principes illusoires et de fausses analyses ! Il faut en finir avec ces utopies stupides et dangereuses alors que c'est la globalisation marchande qui est complètement utopique et qu'il faudrait y opposer rapidement des alternatives locales.

Il y a des problèmes pratiques à résoudre et nous avons besoin d'une alternative concrète au productivisme et au libéralisme qui nous menacent, pas d'un monde prétendu parfait, ni d'un homme nouveau complètement fantasmé, bien loin de ce que nous sommes réellement. C'est pour défendre notre liberté concrète qu'il nous faut nous organiser collectivement et combattre les utopies "libertaires" tout aussi bien que l'utopie libérale. C'est pour avoir une chance de s'en sortir qu'il faut remplacer les idéologies abstraites et les déclarations de principe par une véritable intelligence collective qui prenne en compte les contraintes écologiques, sociales et matérielles. C'est contre nos propre rangs qu'il faut nous retourner car c'est de là que vient le danger, de là ce qui nous condamne à l'impuissance. Après le constat théorique, les travaux pratiques, donc.

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Une rationalité décidément trop limitée

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rationalitéLa situation apparaît sans issue. C'est comme si nous avions atteint nos limites ! Il faut revenir en effet sur la raison profonde d'un échec patent, qui n'est pas seulement le mien, mais celui du mouvement social dans son ensemble, et même de la démocratie tout aussi bien que d'Internet dont l'irruption remarquée sur la scène politique a tout de même tournée court, manifestant sa volatilité extrême ! Il faut se persuader que cet échec ne trouve pas ses causes dans nos ennemis, dans la force de l'économie ou la puissance d'un patronat animé des plus mauvaises intentions, mais bien en nous-mêmes, puisqu'il relève en dernière instance d'un déficit intellectuel, déficit théorique et idéologique flagrant, responsable de la dispersion de nos forces et de l'absence de projet commun.

En effet, ce n'est pas tant un manque de solidarité ni même une passivité soumise devant le spectacle des marchandises qui sont responsables de notre défaite, alors même que les manifestations contre le CPE étaient apparemment "victorieuses". La responsabilité est bien politique, c'est le manque de perspective et d'accord programmatique, d'une alternative crédible et, finalement, un manque d'intelligence collective qui se heurte à notre inorganisation (où même ATTAC sombre), livrée à une rationalité décidément trop limitée et qui ne voit pas plus loin que le bout de son nez !

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Le revenu garanti comme base d’une production alternative

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Alternatifs Invité par les Alternatifs à parler du revenu garanti le 26 août à Auch, j'ai d'abord dénoncé la dispersion actuelle des forces politiques et le manque total d'alternative responsable de l'absence de débouché du mouvement contre le CPE.

Si j'ai bien défendu le revenu garanti, c'est comme base d'une production relocalisée, à l'ère de l'information. En effet, sans revenu garanti favorisant le travail autonome, on tombe dans le travail forcé ou la misère, mais le revenu garanti comme socle de tout développement humain, n'est une véritable alternative qu'à permettre une production plus écologique, simple élément d'un nouveau système de production constitué notamment de coopératives municipales et de monnaies locales.

En mémoire de Bookchin mort le 30 juillet 2006

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De l’individualisme de marché à l’organisation collective

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Jacques Sapir Les trous noirs de la science économiqe En réfutant les bases individualistes du libéralisme grâce à la psychologie expérimentale, Jacques Sapir met en évidence la complexité des rapports de l'individu avec le collectif et l'organisation. Ces courts extraits devraient permettre d'avoir un abord plus réaliste de "l'économie comme problème de cohérence multi-critères et multi-niveaux", plutôt que simple équilibre entre l'offre et la demande, ainsi que d'une société organisée et diversifiée dont les statistiques, trop uniformisantes, ne peuvent rendre compte (ce que montrait déjà Maurice Halbwachs).

Bien sûr, il ne fait que redécouvrir la sociologie économique (qui n'est pas seulement marxiste) et croit un peu trop rapidement apporter ainsi une révolution en économie qui réduirait à zéro toute la science économique antérieure, ce qui est excessif car le point de vue statistique garde une certaine pertinence macroéconomique (de même qu'en Bourse, le modèle Black-Scholes de répartition gaussienne des cours est vérifié d'ordinaire, hors situations extrêmes dont les fractales de Mandelbrot rendent mieux compte). Il apporte du moins quelques éléments pour comprendre les anomalies, les ratages, "les trous noirs de la science économique" comme il appelle un de ses livres.

Le plus intéressant c'est que ce démontage de l'individualisme dépasse l'économie proprement dite pour s'étendre à la formation de tout collectif, dont on sait bien (sauf les libéraux) qu'il se distingue de la somme des individus qui le composent et de leur action, car tout collectif est multi-dimensionnel et doit intégrer un ensemble de contraintes et d'enjeux, ce qu'un point de vue unilatéral (économiciste) ne peut que rater. A l'époque d'Internet, il est indispensable de rappeler le rôle de l'organisation dans la constitution d'une conscience collective qui n'émerge pas d'elle-même mais s'inscrit toujours dans un cadre préétabli, dans un discours institué.

Il est clair que les institutions ou les organisations construisent bien une pensée collective, qui cesse d'être l'addition de la pensée des acteurs inclus soit dans l'institution soit dans l'organisation. p41 (2003)

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La question de la technique

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Jacques Ellul, Le bluff technologique, 1988
Jacques EllulLe bluff technologiqueA l'évidence, le progrès technique s'emballe (omniprésence des réseaux, télésurveillance, biotechnologies, nanotechnologies, etc.) jusqu'à pouvoir nous menacer dans notre existence même. L'optimisme technologique n'est plus de mise devant les dérives, les déceptions et les nuisances qui se multiplient. Il faut absolument dénoncer, avec Jacques Ellul, l'obscurantisme du "bluff technologique" qui prétend résoudre tous nos problèmes et nous faire accéder à l'épanouissement individuel, ou même une surhumanité (si ce n'est l'immortalité), tout aussi bien qu'à une véritable intelligence collective qui brille surtout par son absence, jusqu'à présent du moins !

Au-delà de l'indispensable critique écologiste de la technique, sommes-nous condamnés pour autant à son rejet pur et simple, tombant ainsi d'un obscurantisme dans l'autre ? La technique est-elle ce "processus sans sujet", d'essence totalitaire, qui nous mène à notre perte plus sûrement que le totalitarisme du marché ? Société de la Technique ou société du Spectacle ? Forces matérielles ou rapports sociaux ? C'est une question vitale, celle en tout cas de la transformation des moyens en fin, et plus difficile à trancher qu'il n'y paraît à première vue tant les choses sont intriquées, mais, ce qui est sûr, c'est que cela constitue l'enjeu même de notre temps, la question qui nous est posée et à laquelle nous devons répondre collectivement.

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Conditions d’une alternative antilibérale démocratique

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FSE La désorientation actuelle est totale, au moins dans la mouvance antilibérale tiraillée entre différents archaïsmes plus ou moins inquiétants et sans véritable projet, prête à se vouer à tous les saints... C'est pourtant un besoin impérieux, en politique, d'avoir une vue claire de ses buts, mais il faut bien dire que la conjoncture est déroutante. En effet, ce n'est pas sur un seul front qu'on doit se battre (la globalisation néolibérale) alors que la mutation historique que nous vivons est à la fois politique, économique, écologique et cognitive ! C'est donc sur ces 4 fronts qu'il faudrait avancer pour redonner sens à la démocratie et à la politique en luttant contre un libéralisme destructeur sans retomber pour autant dans un totalitarisme criminel. Voie étroite et difficile, pleine de contradictions mais qui est de notre responsabilité collective. Nous n'avons pas le droit d'échouer si on veut garder une petite chance d'éviter le pire et de sauvegarder notre avenir commun. Il faut se persuader que les causes de l'échec ne sont pas la méchanceté et l'égoïsme de nos adversaires mais bien notre propre bêtise et l'insuffisance de nos propositions.

Il faut bien dire que les obstacles semblent insurmontables et l'objectif impossible à atteindre puisqu'il faudrait à la fois : 1) refonder la démocratie et nos solidarités sociales par la mobilisation populaire sans tomber dans un volontarisme autoritaire et intolérant, 2) plutôt que d'en faire un moyen pour des systèmes sociaux, faire au contraire de l'individu la finalité de tous en s'organisant pour assurer son autonomie concrète et sa participation politique ("mettre l'homme au centre"), 3) on ne peut éviter sans dommages de tenir compte de notre entrée dans l'ère de l'information et de l'écologie ce qui implique de réorienter l'économie vers le développement humain, l'immatériel et la relocalisation, rupture considérable s'il en est ! 4) enfin, il faudrait réussir à construire l'intelligence collective qui nous manque si cruellement, entre démagogie et technocratie, instituer peut-être une improbable mais si nécessaire "démocratie cognitive".

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Les phénomènes révolutionnaires

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Jean Baechler, PUF 1970 - La table ronde 2006 Baechler

Si l'époque actuelle est bien révolutionnaire, cela ne signifie en aucun cas qu'on pourrait revenir naïvement au mythe du grand soir et à la vulgate marxiste alors que nous avons besoin, au contraire, d'étudier lucidement les "phénomènes révolutionnaires" du passé afin de tirer toutes les leçons de leurs échecs et de leurs dérives autoritaires, ce qui ne nous laisse guère de raisons d'être optimistes...

Il faudrait tout de même accorder une plus grande place aux analyses de Marx, et plus généralement à l'économie, que ne l'a fait l'auteur de cette petite étude. En effet s'il y a bien nécessité d'une révolution, c'est au moins pour adapter les rapports de production (qui datent du fordisme) aux nouvelles forces productives (immatérielles). Ce qui est d'ailleurs une conception en tout point conforme à celle de Schumpeter. Il ne s'agit pas simplement d'adapter les institutions actuelles mais bien d'en changer, de les reconstruire sur d'autres bases (revenu garanti et développement humain). Un tel bouleversement ne pourra se faire sans doute en dehors d'une situation révolutionnaire, dont la lutte contre le CPE a pu donner une sorte d'avant-goût, même si elle a tourné court, hélas. Rien à voir en tout cas avec une révolution communiste à l'ancienne, du moins on peut l'espérer !

Il y a une autre raison, tout aussi impérative, à la révolution de notre organisation sociale et de notre système de production, ce sont les contraintes écologiques. Pour sortir du productivisme insoutenable du capitalisme globalisé et de la société de consommation, il y a urgence à relocaliser l'économie et se libérer de la subordination salariale en développant le travail autonome. Le réformisme n'y suffira pas, il faut construire un autre monde, un autre système productif qui tire parti du devenir immatériel de l'économie. Nous avons besoin pour cela d'une alternative, pas seulement d'une "réduction" ou d'une "décroissance". Ce qui importe, ce n'est pas tant d'être révolutionnaire, encore moins de "prévoir" une révolution qui ne se ramène pas ici à un événement ponctuel, c'est le contenu qu'on lui donne, la réponse aux contradictions de notre époque de transition, la prise en compte de notre entrée dans l'ère de l'information, de l'écologie et du développement humain.

Ce n'est pas tout. A suivre Hegel, Kojève, Castoriadis, il y a nécessité pour les sociétés démocratiques qui ne font plus la guerre de se refonder périodiquement par des soulèvements populaires, par l'intervention des mobilisations sociales, affirmation de l'auto-nomie de la société, de sa solidarité active et d'une véritable démocratie participative.

Enfin, on peut considérer que les révolutions ne sont pas simplement un renversement d'institutions périmées, ce sont aussi (comme les révolutions des astres) des phénomènes cycliques et générationnels (voir "Les cycles du capital").

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Vers la révolution du revenu garanti ?

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revenu continuAlors que la lutte contre le CPE s'annonce victorieuse et que se pose la question de la suite du mouvement, le débat entre enfin dans sa phase décisive où ce n'est plus seulement la précarité des jeunes mais la précarisation de toute la société qui est en cause avec la nécessité de trouver de nouvelles protections contre cet état de fait insupportable. Il n'est plus possible de s'en tenir à des positions libérales ni au simple conservatisme. Pour l'instant le modèle inaccessible semble être celui du Danemark, c'est-à-dire d'une grande liberté juridique équilibrée par des syndicats puissants, une grande flexibilité des emplois associée à tous les moyens du développement humain, assez loin de notre réalité actuelle et pas aussi bien qu'on le prétend. L'idée d'un contrat unique où l'on gagne des points à mesure qu'on reste dans la même entreprise ne fera que renforcer la précarité des plus précaires. C'est aussi le reproche qu'on peut faire à la revendication d'une sécurité sociale professionnelle qui représente bien ce qu'il faudrait faire (assurer une continuité du revenu "au-delà de l'emploi") mais avec le même inconvénient de protéger surtout les plus protégés, les insiders, en laissant de plus en plus d'exclus à l'extérieur, outsiders sans droits et sans avenir.

Il n'est pas possible de tolérer ceci plus longtemps et il est temps d'affirmer, comme un nouveau droit de l'homme, le droit à un revenu décent, revenu d'autonomie sans lequel il n'y a pas vraiment de droits. Cela semble encore trop utopique et pourtant c'est une revendication qui insiste et gagne de plus en plus de partisans, revendication qui devrait s'imposer dans le contexte actuel car le revenu garanti n'est pas seulement l'instrument de la lutte contre la précarité et la misère, c'est surtout un renversement complet de logique de la sécurité sociale au développement humain, c'est l'investissement dans la personne, dans son autonomie et sa créativité exigées par le devenir immatériel de l'économie où ceux qui sont devenus plus ou moins des "travailleurs du savoir" sont destinés à la résolution de problèmes dans un environnement incertain. C'est enfin la base d'une production alternative et d'une économie relocalisée.

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Travailler et consommer moins ou autrement?

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FSLForum Social de Bayonne, 29 avril, 9h

La nécessité d'une décroissance matérielle est reconnue par tous les écologistes ainsi que la critique des illusions d'un développement durable. Rappel salutaire des contraintes écologiques, cela ne suffit pas à faire de la décroissance un programme politique pour autant. D'abord, parce que la décroissance matérielle ne signifie pas automatiquement une décroissance économique. La croissance du PIB est un indicateur monétaire (en partie donc annulée par l'inflation) et la croissance des services ou de l'immatériel se distingue par définition d'une croissance matérielle ! Malgré les dévoiements d'un développement prétendu durable, on ne peut confondre développement complexifiant et croissance matérielle. Ce n'est pas l'essentiel pourtant car, outre cet aspect "réducteur", le slogan de la décroissance a surtout l'inconvénient de se présenter comme une simple réduction quantitative : la même chose en moins, où la seule chose qu'on puisse faire c'est de se serrer la ceinture en espérant que ce soit assez massif pour avoir un effet global significatif (étant donné le nombre de pauvres et de miséreux dans le monde on devrait faire vraiment très fort pour peser dans la balance!).

Il faudrait à l'évidence construire un système de production alternatif sur d'autres bases plutôt que s'imaginer pouvoir réduire la croissance d'un système productiviste qui s'emballe au contraire à un rythme de plus en plus insoutenable ! Il n'y a pas d'autre solution que l'altermondialisme, c'est-à-dire une alternative locale au capitalisme globalisé. Une économie écologisée n'est pas une économie plus économe encore (!), mais une économie réinsérée dans son environnement, relocalisée et recentrée sur le développement humain. Il ne s'agit pas tant de produire moins mais autrement, il ne s'agit pas de réduction mais d'alternative, pas seulement de décroissance matérielle quantitative mais de développement humain et de qualité de la vie.

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Ce qu’il faudrait faire…

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AlterEkoloColloque AlterEkolo du samedi 25 mars 2006

Il n'y a pas d'un côté les problèmes de chômage ou de précarité de nos vies privées d'avenir, et de l'autre les problèmes écologiques de décroissance et de sauvegarde de notre avenir commun, ce qui semble bien peu compatible sous cette forme, alors que, dans les deux cas, il s'agit de mettre des limites à un néolibéralisme destructeur et de préserver nos conditions vitales. Tout projet politique ne tenant pas compte des contraintes écologiques est condamné par avance, de même que tout projet écologiste qui voudrait ignorer les contraintes économiques et sociales. L'altermondialisme représente, bien plus que les Verts, cette prise de conscience écologique et sociale avec ses deux exigences de relocalisation et de développement humain. Ce qui manque souvent à l'altermondialisme malgré tout, c'est la prise en compte des transformations considérables d'une économie informationnelle qui se se réduit pas du tout à la globalisation marchande.

Un autre monde est possible mais il ne suffit pas de résister au totalitarisme marchand, il faut se poser la question : que pourrait être la société à venir, plus écologique et moins précaire ? Ni simple décroissance, ni retour en arrière, cette économie relocalisée et recentrée sur le développement humain doit constituer une alternative concrète au capitalisme en permettant la sortie du salariat productiviste, grâce notamment au revenu garanti ainsi qu'à des monnaies locales. Hélas, tout cela parait encore trop utopique, à contre-courant de la mondialisation et de la précarisation néolibérale mais très éloigné aussi des revendications des organisations de gauche (ATTAC, Copernic, LCR, PC, PS...). Même s'il faut effectivement renforcer l'Etat et réformer la fiscalité, les solutions que nous proposent ces partis (protectionnisme, "plein emploi", étatisme, taxations et même réduction du temps de travail) ne sont pourtant que des solutions imaginaires et trop souvent liberticides alors que c'est notre autonomie qu'il faudrait développer. Il y a de quoi désespérer et se persuader que c'est foutu d'avance... Dans la période actuelle on ne peut se contenter de baratin sur la sécurité de l'emploi, ni d'objectifs trop lointains. Il ne s'agit pas d'établir le programme détaillé d'une cité idéale ni de faire le catalogue de nos valeurs mais de donner une ligne directrice forte et lisible pour la construction d'alternatives locales à la globalisation marchande.

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Retrouver un avenir commun

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Grève généraleLe moment est crucial. Jamais la situation n'avait été aussi favorable aux luttes sociales. C'est l'occasion ou jamais pour les salariés de se joindre au mouvement pour défendre leurs revendications, il n'y a pas de doute là-dessus. Et pourtant, il semble que les syndicats s'effraient de leur pouvoir et reculent devant l'appel à la grève générale. Il semble surtout que les salariés ne soient pas favorables encore au renversement du régime, rencontrant la limite du mouvement actuel, son absence de projet qui peut causer sa perte. L'abolition du CPE ne mérite pas une révolution à lui tout seul ! Si on fait une révolution, certes bien nécessaire, cela ne peut être pour revenir simplement au passé et un CDI de plus en plus théorique. Chacun sent bien confusément que c'est une chimère sous cette forme.

Pour sortir de la précarisation de nos vies, il faut une ambition plus positive et tournée vers l'avenir, une refondation des protections sociales centrées sur la personne et les nouvelles forces productives. Il faut profiter de la conjoncture pour adapter notre système social à l'ère qui s'ouvre devant nous, en développant notre autonomie plutôt qu'en rigidifiant les règles. Ce n'est pas la direction empruntée pour l'instant (on comprend pourquoi quand on impose la flexibilité sans la sécurité). Heureusement, cette fois nous avons le temps puisque le mouvement est fait semble-t-il pour durer maintenant, temps indispensable à la réflexion et l'élaboration collective.

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Rétablir la vérité

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CPEIl est comique de voir le gouvernement s'accrocher au CPE et tenter de le justifier ou de l'adoucir sans comprendre qu'il s'agit de bien autre chose désormais. Ce n'est pas seulement contre une mesure discriminatoire et imposée sans concertation que s'élève la jeunesse mais plus encore contre l'officialisation de la précarisation de l'emploi et la destruction des protections sociales dont le CPE ne représente qu'une étape supplémentaire.

Derrière ces revendications immédiates, il y a tout le malaise d'une jeunesse maltraitée mais, au-delà de la jeunesse même, il s'agit pour toute la société de défendre nos valeurs humaines de solidarité, après des années d'un individualisme arrogant, et de rétablir enfin la vérité sur ce que nous sommes, vérité trop longtemps bafouée par les salauds en tout genre.

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Minorité de blocage

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blocageAu-delà du CPE, l'enjeu du mouvement actuel est bien la résistance à la précarisation de nos vies et la refondation des solidarités sociales mais tout autant la contestation d'une démocratie procédurale qui se résume à la formule : vote et tais-toi !

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Le basculement du monde, soudain !

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mars 2006Il serait bien étonnant que le gouvernement ne mette pas un terme à la mobilisation étudiante en retirant le CPE. Même dans ce cas, l'essentiel semble pourtant déja acquis : le retour des mobilisations sociales et la reconstitution de nos solidarités devant ce qui a été perçu comme une déclaration ouverte de précarité par toute la société, au-delà de ses jeunes. Fini le temps des défaites, la honte a changé de camp, les revendications sociales ont retrouvé toute leur légitimité. Un nouveau cycle de luttes est enclenché et il y a longtemps que les circonstances n'avaient été aussi favorables.

Bien sûr tout pourrait retomber avec un retrait qui s'impose à l'évidence. On constate malgré tout que, dans les grandes crises, les pouvoirs s'obstinent souvent à envenimer les choses (les dieux aveuglent ceux qu'ils veulent perdre), ce qui n'est la plupart du temps que le symptôme d'une perte de légitimité de leur autorité. Pour l'instant le gouvernement semble avoir tout fait pour provoquer l'explosion et, s'il ne recule pas, ce sera le signe que décidément les temps sont bien mûrs pour une révolution !

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Une atmosphère de fin de monde…

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La grande ImplosionTout n'est pas toujours pareil et tous ceux qui se persuadent, libéraux en tête, que rien ne peut jamais leur arriver vont devoir se réveiller de leur sommeil dogmatique car nous vivons sans doute la fin d'un monde, celui du XXème siècle au moins et de la globalisation libérale, la fin du monde "moderne", et Gramsci le disait bien, c'est au moment où l'ancien se meurt et le nouveau ne parvient pas à voir le jour que surgissent des monstres.

L'hypothèse que le temps de demain sera identique à celui d'aujourd'hui est toujours, et de loin, l'hypothèse la plus probable, mais cela n'empêche pas le temps de changer, ni d'être le changement même... La stabilité ordinaire des échanges n'empêche pas les krachs de se produire après trop d'arrogances nourrissant des bulles spéculatives qui peuvent durer un moment mais finissent immanquablement par éclater. Les tensions s'exacerbent jusqu'au point de rupture.

Il semble que toute une série de fractures pourraient converger et se rejoindre pour faire de cette année l'année de tous les dangers, sous les plus mauvaises augures. Et si ce n'est pas cette année ce sera la suivante !

A quoi bon jouer les oiseaux de malheur ? Ne vaut-il pas mieux se taire quand tout semble perdu et qu'on ne peut plus y croire ? Les chances sont bien maigres de ne pas céder à la tentation du pire mais s'il faudrait en effet pouvoir se donner un objectif commun, défendre l'espérance dans une utopie collective, tirer parti des si considérables potentialités de l'époque, il faut bien constater que tout cela manque cruellement encore, n'emporte pas l'adhésion, et, si on veut avoir une chance de les surmonter, il faut reconnaître d'abord les causes de notre impuissance devant ces bouleversements considérables que nous devons subir dans les pires conditions.

Il n'y a pas seulement la destruction du code du travail presque achevée (du CNE au CPE), l'extension considérable d'une précarité invivable, le choc des générations qui s'amorce à peine, la guerre des religions qui n'est pas prête de s'éteindre, l'entrée dans l'ère de l'information comme ignorée de tous ! Il y a aussi la menace d'une nouvelle peste qui décime des populations devenues trop nombreuses, avant le déclenchement sans doute d'un nouveau déluge avec le réchauffement climatique ; et le plus extraordinaire c'est que nous continuons comme si de rien n'était, comme si on voulait brûler tout le pétrole qui nous reste jusqu'à sa dernière goutte et courir à notre perte ! Surtout ne rien changer, le nez dans le guidon ! Pas étonnant que le ciel nous tombe sur la tête.

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De la statistique à l’organisation sociale

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On ne peut considérer une société ou un marché comme une foule inorganisée d'individus isolés n'ayant aucun rapport entre eux. Dès lors les statistiques sont trompeuses en ne retenant que les effets globaux sans tenir compte des différenciations internes et de l'organisation sociale (ce qui, notamment, justifie la richesses des riches en accablant les pauvres responsables de leur pauvreté).

Il est aussi absurde de traiter statistiquement une société que les lettres d'un livre qui ne sont pas du tout distribuées au hasard ! Il faut au moins reconnaître que la société est divisée par la lutte des classes, mais aussi par toutes autres sortes de divisions (sexuelle, générationnelle, géographique, inclus/exclus, etc), ce que l'approfondissement par Maurice Halbwachs des causes du suicide permettait déjà d'établir contre Durkheim.

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