Feuille Verte No 4 |
Janvier 1997 Numéro. 5 |
La petite feuille Verte |
L'en Vert du Lot
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L'approche du troisième millénaire réveille chez certains de très anciennes peurs animales et beaucoup se posent cette angoissante question : de quoi demain sera-t-il fait ? Question tellement angoissante que les patrons du CNPF, pourtant bien connus pour leur amour du progrès, préfèrent détourner la tête et choisissent le retour au début du siècle avec l’élection de Seillière (Ernest-Antoine, profession : baron). A part le progrès social, ils montrent ainsi qu’ils ne craignent rien, et en tout cas pas la caricature. Héritier direct des marchands de canons et des pires exploiteurs, lui-même grand profiteur des deniers publics, ce gars-là est décidément bien sympathique. Dans ce numéro, et pour lui rappeler le bon temps, nous lui dédions quelques dessins parus dans L’Assiette au Beurre entre 1902 et 1907 (à cette époque, on appelait un patron un " singe ").
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Après dix jours de négociations, les représentants des 159 pays présents se sont mis d’accord sur un protocole qui doit être maintenant validé par les parlements nationaux pour être applicable. Il va donc falloir attendre quelque temps pour voir une mesure concrète.
Dans ce protocole, six gaz sont concernés : CO2, méthane, oxyde nitreux et trois substituts des CFC. Il est demandé aux pays industrialisés, et à eux seuls, de réduire l’émission de ces gaz de 5,2% en moyenne pour la période comprise entre 2008 et 2012. Cette réduction ne fera que ralentir la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, le processus ne sera pas arrêté. Il faudrait aller plus loin et plus rapidement. Souhaitons qu’une fois lancée, la dynamique visant à faire des économies d’énergie s’accélérera. A savoir que le seuil de sécurité sera atteint quand la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère sera le double de ce qu’elle est actuellement. Si l’on continue au rythme d’émission actuel, cette concentration sera atteinte en 2030. Une réduction de 5,2% aux environs de 2010 ne fait donc que repousser un peu l’échéance.
La mise en place, proposée par les Etats-Unis, d’un marché du droit de polluer n’a pas été totalement rejetée. Elle n’a pas été discutée cette fois-ci mais les discussions sont prévues dans un an à Buenos Aires. Pourtant, une telle idée est une véritable monstruosité. Le but est de permettre aux pays riches (gros pollueurs) de racheter aux pays pauvres (peu pollueurs) le droit d’émettre les m3 de CO2 et autres que ces derniers n’ont pas produits, en leur interdisant de ce fait tout développement. Si un accord se fait sur ce point l’an prochain, il pervertira complètement la finalité des accords. Il aurait fallu s’y opposer dès Kyôto.
L'homme n'a jamais cessé de philosopher, de penser, de s'interroger sur lui, son environnement social et naturel. C'est le problème des valeurs qui se trouve ainsi posé, le sens de l'existence, les finalités de la société, Pourtant, l'interrogation philosophique a souvent été reléguée au rang d'exercice de rhétorique scolaire ou de relation dialectique nécessaire et fondatrice de notre identité. Dans l'Antiquité, Epicure rappelait que " quand on est jeune, il ne faut pas remettre à philosopher et quand on est vieux, il ne faut pas se lasser de philosopher, car jamais il n'est trop tôt ou trop tard pour travailler à la santé de l'âme " (lettre à Ménécée). Aussi, l'émergence des cafés philosophiques n'est-elle pas seulement un simple phénomène de mode, elle exprime un besoin, une nécessité intellectuelle qui n'a jamais cessé d'exister sous des formes différentes. Il s'agit bien d'échanger, de penser ensemble mais sous une forme structurée qui passe par la conceptualisation et l'argumentation, ce qui nous éloigne d'un simple exercice d’autosatisfaction. Cette démarche peut susciter la recherche de la connaissance et donc de la vérité à travers le dialogue. Le café philosophique qui s'est ouvert à Cahors depuis un an se situe dans cette préoccupation en commun de réfléchir à des thèmes qui posent problème même s'ils semblent évidents, banalisés, désinvestis de tout intérêt. Par exemple : qu’est-ce que le temps ? n'est-il pas la dimension complémentaire de l'espace dans lequel j'existe nécessairement ? Il suffit de faire un tour de table pour découvrir une multitude d'interprétations : le temps-durée, le temps subjectif, le temps objectif des horloges, le temps "scientifique", le temps des religions, le temps du souvenir, le temps biologique de la naissance à la mort, le temps sociologique rythmant les activités humaines, la semaine de travail, le temps du repos... Bref, le temps comme limite à mon existence mais, antithèse, le temps comme facteur de réalisation, de construction progressive. D'autres séances porteront sur la conscience, l'inconscient, la finitude, la morale… On peut distinguer plusieurs structures, d'ordre relationnel d'une part, institutionnel d'autre part : les séances se déroulent dans un lieu convivial, le café, et accueillant sans nécessité de présence obligatoire pendant les deux heures de fonctionnement, de 18 à 20 heures, tout public, extra-scolaire ou non, en désacralisant le savoir et en le popularisant, au sens démocratique et noble du terme. Les animateurs, professeurs de philosophie, n'ont pas, dans ce contexte, pour fonction de dispenser un cours mais de permettre l'émergence des problématiques, d'animer le débat, d'orienter et de resituer les interventions, d'apporter des éclaircissements sur tel aspect d'une question. Dans la mesure où les participants représentent un horizon socioculturel et/ou socioprofessionnel élargi, la gestion de cette salutaire diversité n'est pas sans poser des problèmes de résolution des attentes, des présupposés (les préjugés), des pré-requis en fonction des thèmes sélectionnés par les participants eux-mêmes, à la fin de chaque réunion, pour la séance mensuelle suivante. Cette hétérogénéité reflète une multitude de références spécifiques selon les divers domaines de préoccupation. Elle doit pourtant permettre l'instauration de penser ensemble, ou plutôt de penser individuellement dans un groupe hétérogène afin de faire surgir les contradictions et les résolutions, la restructuration de la réflexion et la prise en compte de systèmes de représentation différents. On peut s'interroger sur l’intérêt d'une telle demande collective, à une époque où les moyens audiovisuels et les médias n'ont jamais été aussi développés. Les frustrations, les insatisfactions rencontrées dans la vie sociale quotidienne exigent l'extériorisation de ses problèmes, de ses réflexions et l'écoute de l'autre, non pas perçu comme un moyen en vue d'une fin, mais d'une personne douée de conscience, qui me juge, dialogue et me fait exister. Michel Darnaud
Dans ce numéro
Antoine Soto Philippe Boursier Antoine Soto Catherine Alcouloumbré Jean Zin (La santé liée d'abord aux conditions sociales) Jean Zin Réforme et révolution (histoire et évolution) |
ASSEDIC IMPRESSIONS La décentralisation de l'Assedic vers des sous-préfectures comme Figeac est un signe des temps. Pas un bon signe, seulement l'indication qu'une petite ville n'échappe pas au phénomène chômage, véritable toile d'araignée retenant plus de 3 millions d'adhérents le plus souvent non volontaires. Mais cet aménagement de l'antenne Assedic a du bon. Autrefois on vous recevait dans une des salles de la mairie et vous attendiez plusieurs jours un courrier vous informant de vos droits. Désormais vous êtes fixé en temps réel sur votre sort. Situés allées Victor Hugo, les bureaux de l'Assedic occupent un ancien bâtiment dont la restauration résolument moderne ne laisse pas indifférent. La porte franchie, vous découvrez une grande salle blanche, tout en longueur, dans un style contemporain, à cheval entre la prison et l'hôpital. En guise d'accueil, une machine qui, dès que vous avez appuyé sur un bouton, vous délivre un ticket comportant votre numéro de passage. Si vous aviez l'intention de doubler la personne arrivée avant vous, c'est râpé ! d'autant que dans le fond du hall, un écran numérique indique clairement le numéro du chômeur en train de consulter. En attendant votre tour, c'est un peu comme chez le docteur. Vous prenez place sur une des chaises alignées le long du mur. Interrompant cette linéarité, une table, elle aussi bien dans les tons de notre époque, en plastique fumé, comprenant deux ou trois brochures d'informations ou quelques revues à l'actualité périmée que vous pouvez consulter. Mais cette possibilité de révision n'apporte rien de bien constructif pour un demandeur d'emploi. Fuyant la démesure de cet accueil sans âme, la conversation pas très gaie (mettez-vous à la place de celui qui a perdu son boulot ou de celle qui rêvait d'un meilleur avenir après le bonheur d'avoir obtenu son diplôme) s'installe et meuble cet univers sans espoir, démesuré et impersonnel. En face, les petits bureaux, à la conception proche de la cellule, où chaque employé Assedic, seul avec son ordinateur, instruit le dossier. La machine, dûment programmée, ne fait pas de sentiment. Sa conclusion sans appel attire quelquefois le commentaire de l'employé : " Je suis désolé mais vos droits sont de 75 francs par jour ". Juste de quoi faire la fête ! Question horaires, là aussi c'est parfait : en conformité avec les idéaux de cette fin de XXe siècle puisque l'ouverture entre midi et deux ne lèse pas les travailleurs au noir, qui n'auraient pas d'autres créneaux. Non, excusez-moi, je plaisante : moi qui cumule quelques-unes des qualités du chômeur-type : femme, avec des diplômes inadaptés et en voie de dépasser l'âge d'être dynamique. Enfin, ne sombrons pas dans le pessimisme. Dans ces locaux presque vides, une photocopieuse est à la disposition des chômeurs. Un détail qui, quelque part, indique que les concepteurs de cet espace n'ont pas oublié qu'ils s'adressaient à des êtres humains et à une population démunie. Et puis bientôt il y aura les 35 heures ; nouvel Eldorado des demandeurs d'emploi ! Martine Bégné
Une image difficile à oublier et à comprendre : Dominique Voynet annonçant devant les caméras de télévision la décision du gouvernement français d'autoriser la culture du maïs transgénique. N'y a-t-il pas d'autre alternative que de se soumettre ou de se démettre ? Une image bien éloignée de ce cri de Charles Baudelaire : "L’or ? Je le hais !" Martine Bégné
Selon le Canard Enchaîné, un milliardaire (pesant environ 15 milliards) ne paie pas d’impôt sur la fortune : c’est un "restructurateur d’entreprises" ! Un restructurateur peut devenir riche et un " restructuré " peut devenir SDF : ils demeurent libres, égaux et fraternels !… Carlo Oliva
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A nouveau, bruits, rumeurs, sources sûres... La Confédération Paysanne du Lot avait attiré notre attention cet été sur un gros projet d’atelier porcin dans notre région (Grèzes, Brengues, Blars, Quissac). Une réunion d’information organisée par la Confédération Paysanne vient d’avoir lieu à Grèzes. Le danger représenté par l’installation de ces élevages industriels est multiple :
Les avantages sont donc exclusivement pour les seuls industriels de l’élevage, de l’agro-alimentaire et les laboratoires pharmaceutiques, qui en retirent tous de très confortables profits (calmants, antibiotiques). Nous en avons assez que l’intérêt général subisse l’intérêt particulier : l’opposition des populations concernées doit être prise en compte. La Bretagne est submergée par les pollutions porcines, les industriels cherchent donc à s’implanter en Midi-Pyrénées, notamment dans le Lot. Face à ces projets, agriculteurs et consommateurs s’organisent dans l’Aveyron et dans le Tarn. Les porteurs du projet, des agriculteurs locaux, embrigadés par les instances agricoles à la solde de la FNSEA, ne voient d’autre issue à leurs difficultés d’existence qu’une fuite effrénée dans un productivisme destructeur. Des solutions alternatives existent (productions de qualité, circuits courts de production/distribution, ...), des exemples locaux l’attestent. Plusieurs communes, le SIVOM de Livernon, ont voté des délibérations d’opposition à ce projet. La Confédération Paysanne du Lot appelle donc à la création d’un collectif de lutte. Nous attendons du pouvoir actuel qu’il prenne en compte la diversité syndicale (la Confédération Paysanne est riche de propositions crédibles et réalistes qui assurent réellement un avenir à l’agriculture) et qu’il ne cède pas aux pressions qui vont à l’encontre d’un développement soutenable : non-plafonnement des primes, aides à l’irrigation, autorisation de la mise en culture du maïs transgénique. Jean Luc Morestin
(d’après un
tract de la Confédération Paysanne du Lot)
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Comité de rédaction : Catherine Alcouloumbré, Nelly Beaufour, Dominique Deschamps, Pascal Mallet (responsable de ce numéro), Jean-luc Morestin, Jean Zin. |
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