Révolution et révolution, réformisme et réformisme
Les écologistes attentifs au réel le plus concret ont
depuis longtemps réfuté le mythe d'une révolution
politique instituant le paradis terrestre. Un écologiste est un
réformiste perpétuel, attentif à son environnement,
aux nuisances réelles plus qu'aux discours idéologiques.
Pour autant, il faut distinguer le réformisme superficiel, qui se
contente de masquer les défauts les plus voyants, les fractures
les plus criantes, d'avec un réformisme radical qui s'attaque
aux causes effectives, engage notre responsabilité et exige
des réformes à la mesure des catastrophes écologiques
qui nous menacent. Certaines réformes sont révolutionnaires
en ce qu'elles changent les règles du jeu et ne font pas
que les corriger. Nous avons besoin actuellement de " réformes révolutionnaires
" pour adapter les nouveaux rapports de l'économie et de la société.
Cette adaptation pourrait se faire sans un soulèvement social
mais c'est l'hypothèse la moins probable car seul un mouvement social
pourra produire la force nécessaire à ce bouleversement,
en prenant conscience de sa force sociale et de son existence comme société,
en instituant un dialogue effectif. Car il y a adaptation et adaptation,
selon qu'on s'adapte à son milieu en le subissant
passivement, avec des milliers de vies brisées, en suivant la règle
comme des moutons, en se soumettant aux aléas de l'économie
qui décide souverainement de notre vie ou bien qu'on s'adapte en
faisant face aux problèmes, en adaptant ce milieu mouvant
à nos exigences humaines par nos esprits et nos forces rassemblés.
L'état de l'humanité, les problèmes du présent
Nous sommes aujourd'hui témoins des bouleversements les
plus considérables auxquels l'humanité ait été
confronté, sans qu'aucune réponse n'y soit encore tentée.
Il faut d'abord prendre la mesure du socle de nos civilisations qui s'enracinent
dans le néolithique, fournissant à ce monde paysan
l'unité de ses représentations jusqu'à nos jours.
Cela fait quelques années bien sûr, que nous voyons ce monde
originaire disparaître de notre monde moderne, mais cette réalité
s'étend depuis peu à toute l'étendue du monde,
et la Chine s'éveille à peine de ce sommeil millénaire.
Ici même les traditions encore vives perdent pourtant de leurs couleurs
et petit à petit tournent au folklore. Comme l'empire romain
réclamait sa religion universelle (catholique), la mondialisation
actuelle cherche une religion unificatrice dans le spectacle médiatique
auquel répond le terrorisme-spectacle. Car ce n'est pas la force
des mécaniques qui a permis l'unification du monde, mais le passage
à l'ère de l'information. La nuance est de taille,
et nous sommes dans ce nouveau bouleversement dont nous subissons d'abord
les conséquences par inadaptation à cette nouveauté.
Car l'informatisation, le passage de la " force de travail " à
la " résolution de problèmes " transforme profondément
jusqu'au temps de travail qui ne peut plus être détaché
des loisirs (formation, information, repos). Il y a inadaptation du mode
de rémunération horaire avec la productivité effective
d'un travail qui ne se réduit plus à la force. De même,
la mutation du capitalisme à l'ère des placements boursiers
informatisés, entraîne le glissement du pouvoir effectif du
possesseur de capital au possesseur de compétences ou de
réseaux. A ces changements religieux, économiques, sociaux,
s'ajoutent les problèmes écologiques qui imposent
une modification rapide de nos pratiques, ainsi que la pression de cette
communication universelle et immédiate, souvent réduite à
une voix monocorde.
L'urgence de prendre nos responsabilités
Il est temps de reprendre pouvoir sur notre terre. D'affirmer des frontières
à ne pas dépasser. Nous avons l'occasion historique de reprendre
la conquête ouvrière des Droits de l'homme et de la
femme, du citoyen et du travailleur. Nous avons l'occasion historique de
réaffirmer notre existence comme société. Nous ne
pouvons plus laisser faire maintenant que nous savons que la situation
va sans doute empirer encore, du moins durer encore et encore. La liberté
se prouve en s'opposant au mouvement extérieur, elle n'est effectivement
rien dès qu'elle laisse faire. Plus le temps passera à ne
rien faire, plus monteront les menaces, nous n'avons rien à y gagner.
Question Feuille Verte No 4 |