Politiques

(Aristocratie, Oligarchie, République, Démocratie)
La lutte pour la liberté
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Celui qui ne fait rien,
Certain qu'il n'y a rien à faire,
Certain que ses forces ne s'y mesurent pas
Rajoute de tout son poids
Aux lourdeurs du monde et à ses fausses lois
 
Morale et politique La bande des quatre Tableau historique La création du monde
 
Nous avons d’abord distingué quatre modalités de la vérité (révélation, vérification, impartialité et authenticité). Puis nous avons vu que chaque vérité était fondée sur une liberté. Enfin ces quatre libertés détermineront quatre morales (moralisme, éthique, justice, esthétisme) puisque la morale est la pratique de la liberté consistant à se donner une règle raisonnable, et dont le contenu vise à établir l’égalité d’un véritable dialogue avec l’Autre (visant sa liberté et sa réalisation politique plutôt qu’une simple protestation morale).
Dialogue armé pour faire vaincre ses propres conditions. Debord
Être libre c’est construire un monde où l’on puisse être libre. Lévinas
Morale et Politique
La politique, comme rapport actif à la société, vise la satisfaction de notre humanité, notre être-ensemble, et l’achèvement de notre morale c’est-à-dire de notre liberté. Platon identifiait la république à la justice et, pour Aristote, l’éthique ne se concevait pas sans la politique, qu’elle précède comme civisme, mais qui seule assure l’autarcie (suffisance, indépendance et satisfaction de tous les besoins humains, de l’âme autant que du corps). En effet, comme nous l’avons vu, le langage fait de nous un animal social et politique (Philia) qui ne se réalise comme raison et vertu qu’au sein d’une communauté de parole. Machiavel a semblé fonder la politique sur la séparation de la morale, mais il se sépare de la morale essentiellement par son réalisme, l’exigence d’efficacité (la réalité efficiente, les hommes tels qu’ils sont) mais aussi les différences de niveau, ce qui n’empêche pas la moralité supposée du Prince d’être elle-même décisive. Le moralisme ne peut rester pur que dans l’inaction alors que la politique est la nécessité de la réussite bien que les moyens d’une fin ne soient pas tous moraux, c’est l’art du compromis (il faut se donner les moyens de ses fins, il y a une hiérarchie entre les fins, une cruauté peut en éviter de pires, on ne peut être plus faible que son ennemi et la conservation de l’État est la première vertu, tout corps tend à se conserver). La moralité elle-même demande, en effet, des conditions politiques minimales, un ordre où les gens ne s’entre-tuent pas (Hobbes, Homo homini lupus). Tout État est fondé sur la violence mais l’État est la possibilité d’un débat politique et d’une paix morale. Nous dépendons complètement des conditions politiques et, pour cela, nous devons y prendre notre part. Pour Hegel, non seulement la conscience se reconnaît dans les autres consciences mais elle sait que le monde de l’effectivité est celui des autres consciences et s’exprime dans la Loi commune. La conscience se réfléchit donc dans la pratique commune et se pense comme substance collective (Politique).
Politiquement correct
Liberté, égalité, fraternité sont effectivement les principes même de la morale (du dialogue) et la morale n’est rien si elle n’est efficace et se suffit du désordre qu’elle dénonce en faisant la belle âme. Hegel avait déjà montré que la morale de l’effort ou de la compassion ne peut être autre chose qu’une ascèse vide si elle ne se préoccupe pas d’efficacité et donc de politique. Marx ajoutera qu’on ne peut se satisfaire d’un savoir contemplatif du sens de l’histoire, ni de bons sentiments, mais qu’il faut réaliser la philosophie, la morale, dans les faits et de sa place. L’un comme l’autre ont dénoncé la charité comme hypocrisie, le seul rapport qui vaille étant l’égalité et la solidarité politique. Pour Hegel la politique c’est participer à l’effectivité historique actuelle, au progrès de la liberté. Pour Marx c’est d’abord l’exercice de cette liberté, lutte morale du faible contre le fort, tentative d’imposer le droit, de rétablir l’égalité, la dignité, la volonté du citoyen (la raison) à une économie trop libérale et inégalitaire qui nous traite en objets alors que nous en sommes les acteurs. L’analyse de la marchandise comme réalité objectivante camouflant les rapports sociaux dont elle est pourtant entièrement constituée sera systématisée par Guy Debord comme spectaculaire concentré (totalitarisme) et diffus (libéralisme) puis intégré (technocratie) qui nous ôte toute initiative comme sujet, ne laissant que violence et terrorisme pour briser l’impuissance. La société aboutit à se supprimer elle-même comme société. L’utopie dictatoriale qui s’est réclamée de Marx n’était qu’une version bureaucratique du capitalisme. Il s’agit, bien au contraire des délires de puissance du pouvoir, de la reconnaissance des droits réels de chacun, d’une institutionnalisation de la vérité des rapports sociaux comme dialogue. Si le pouvoir qui nous traite en objet est impuissant à sauver notre dignité et nos existences broyées encore faut-il qu’il y ait intervention des gouvernés, il faut qu’une volonté l’impose, qu’elle se constitue et se persuade de son droit. Plutôt que science du nécessaire (Platon, idéal, utopie, fascisme) nous devons faire de la politique un art du possible (Aristote) qui ne soit pas un accommodement ni un conservatisme mais se veuille radical. L’écologie impose sa contrainte, ses prévisions et sa prudence. "Dès que l’homme ne se dirige plus, les forces extérieures le reprennent... Tout ce qui est mécanique, tout ce qu’on laisse aller, est faux et mauvais. Alain40". C’est la révolte pourtant qui trouve une solution et non pas la solution qui fera la révolte (les révolutions partent souvent de revendications particulières mais se nourrissent de leur propre force). Aujourd’hui la conscience maussade d’un avenir incertain n’est pas encore le rejet d’une existence gâchée. On arrive à se mobiliser pour les animaux, pour la Gay pride ou contre les pédérastes. On devrait arriver à se mobiliser pour l’essentiel : redonner sens à notre communauté, donner au marché une régulation humaine, faire du travail un développement. Le pouvoir existe à l’évidence (télévisuelle), rien ne résiste au peuple assemblé, seule manque la décision.
La bande des quatre
Chaque système a son principe d’après Montesquieu : honneur/monarchie, crainte/tyrannie, vertu/démocratie (idéologie/totalitarisme Arendt) mais, d’après Tocqueville, la véritable vertu est toujours dans l’équilibre des droits et des devoirs. La politique est (1) souveraineté (Machiavel), direction et contrôle, gouvernement de la société, d’une communauté effective disposant d’une puissance de conservation et de défense (force, sûreté). La nation qui n’a pas les moyens de ses ambitions n’a pas de voix dans la négociation internationale. L’unité de la communauté est fondamentale, le lien social où se constitue son identité (amis/ennemis). Chacun devrait y participer au nom de son appartenance à la nation comme citoyen libre dont procède le souverain (Rousseau) mais sans unité, sans fraternité, sans Philia, il n’y a pas de politique. (2) Le gouvernement doit assurer à tous le bien-être (Aristote) et la survie à long terme, la conservation de la communauté, son autarcie (richesse). L’incapacité est une faute impardonnable de ce point de vue mais chacun doit rester juge de l’efficacité et faire respecter l’intérêt à long terme. La prospérité est, on ne le sait que trop, le premier devoir d’un bon gouvernement (3) La loi, le Droit, l’État assurent la rationalité des rapports sociaux, leur conservation (Montesquieu). Bien que toujours insuffisant et perfectible le Droit, qui est d’abord droit des marchandises, est ce qui crée la possibilité du marché en l’organisant par une rationalité acceptée avec confiance et sûreté pour régler tout conflit interne. La stabilité de la Loi exige des médiations et des corps intermédiaires, des contre-pouvoirs qui la limitent et la légitiment. Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir (Rousseau53). Si l’anarchie supposait une absence complète d’État elle ne serait qu’une sauvagerie mais l’absence d’État n’a jamais signifié que l’absence de forces de répression, ce qui est simplement le signe d’un régime populaire (le mandat du ciel). Sinon la théorie anarchiste est surtout fédéraliste et c’est bien cette tradition qui a été reprise et approfondie par les écologistes (la subsidiarité, penser global agir local). Marx pensait aussi que le Droit et l’État n’étaient que des instruments de domination de classe mais il faut plutôt prendre en compte ses critiques justes pour dépasser, améliorer le Droit et non pour le supprimer ce qui est laisser tout pouvoir au tyran. (4) Le calme est l’âme de la tyrannie, la passion est l’âme de la liberté. St Just 51. Il n’y a pas de politique durable sans l’intervention de la société elle-même, son initiative, son expression, le sentiment de son existence souvent réduit à la guerre contre un ennemi qui soude la communauté, sinon c’est la division de la société elle-même comme résistance, refus, lutte des classes, subversion et violence (Sorel) où elle se divise avant de reconstituer un nouveau compromis. On ne peut se contenter d’être objet du pouvoir, nous devons être sujet de l’histoire, acteur de notre avenir. C’est la dimension esthétique de la politique exigeant la participation de chacun au cours du monde (Oswald), sa révolte, la manifestation de sa propre existence dans une lutte victorieuse, dans un projet d’avenir en progrès. Pas de liberté sans espérance, pourrait-on dire avec la ferme conviction qu’il ne suffit pas de compter sur ses droits mais qu’il faut toujours être prêt à les défendre et faire valoir son propre point de vue. Impossible de ne pas voir là ce que Hanna Arendt a décrit comme totalitarisme reposant sur l’idéologie et la "vérité". L’étendue du désastre d’un XXème siècle qui n’a pu se mesurer à cette nouvelle exigence, réduit à un champ de massacres, n’empêche pas cette exigence du sujet historique de hanter la passivité médiatique prête au pire encore si on n’y pare avant, si on n’y prend garde !
 
 
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Principe Communauté Bien-être Justice Liberté
Théorie Paternalisme Utilitarisme,économisme Légalisme Idéologie (progressisme, libération)
Qualité Autorité,souverain Compétent, prospère Impartial, confiance Solidarité, dénonciation
Vertu Honneur, force Intérêt Formalisme Refus, opposition, créativité
Besoin Représentation, communication Autarcie, distribution Arbitrage, échange Mouvement, expression, conflit
Hiérarchie Reproduction Concorde Contestation/invention
Objet Ordre, conduite Economie, Ecologie Droit, relations Politique, idéologie
Opposition Amis/Ennemis Riche/Pauvre Légal/Interdit Résistance/Passivité
Chose en soi Corps Marchandise Ecrit, Parole, Autre Intentionnalité, rapports sociaux
Régime Aristocratie ou Tyrannie Oligarchie ou mafias République ou bureaucratie Démocratie participative ou Totalitarisme
Cause Efficiente Matérielle Formelle Finale
Universaux Fraternité, Bien Prospérité, Bon Egalité, Vrai Liberté, Beau
 
L’histoire de la politique
Egyptiens Religion, légitimité, pouvoir d'unification
Indo-européens Racisme (exclusion), Aristocratie, domination
Cyrus Unité des peuples et des races
Platon Utopie, Despotisme, rationalisme (sages dirigeant des singes !)
Aristote Démocratie tempérée, classe moyenne, vertu, autarcie
Alexandre Croisement des peuples mais division maîtres/esclaves
Juifs Séparation des peuples mais sans division maîtres/esclaves
Romains Alliance Sénat et Tribuns
César Césarisme, autorité acquise par ses actes
Musulmans Soumission à la communauté
Machiavel Effectivité, réalisme (pouvoir humain et non divin)
Hobbes Pacte social pour éliminer le meurtre, paix par la force, soumission au souverain (Léviathan)
Montesquieu Lumières, constitutions (démocratie, monarchie, tyrannie), sûreté
Rousseau Nation, peuple souverain, liberté (Tiers état, privilèges)
Utilitarisme Optimisation de l'utilité ou du bonheur social
Terreur Volonté générale, suspects
Tocqueville Religion abstraite (centralisme contre corps intermédiaires), équilibre droits/devoirs
Napoléon Universalisme en parole, particularisme en acte, provoquant le Discours à la nation allemande. Fichte
Hegel Peuple, liberté, héros, ruse de la raison, dialectique
Benjamin Constant Monarchie constitutionnelle, médiations, démocratie tempérée
Marx Prolétariat, droits réels mais aussi "abolition des classes" et "dictature du prolétariat"
Bakounine Etat=domination de classe, destruction de l'Etat, fédéralisme
Sorel Violence illégale (Nietzsche, Hobbes), invention, autonomie
Lénine Avant-garde qui se prend pour le peuple
Hitler Hygiénisme, lutte pour la vie, espace vital, peuple, racisme, revanche
Staline Extrémisme, productivisme et propagande. Paternalisme
Lukàcs Sujet/Objet, réification
Mao On a raison de se révolter. Contradictions principales et secondaires. Dialectique pratique
Sartre/Aron Pureté des principes, du côté des victimes/réalisme des solutions, du côté du pouvoir
Debord, Mai 68 Jeunesse comme sujet, autorité illégitime (sans prise de pouvoir), stratégie
Terrorisme Impasse de l'impuissance individuelle, action spectaculaire de l'ère médiatique
Droits de l'homme Spectateur, humanitaire, ingérence
Coordinations Initiatives de la base
Ecologie Citoyen, pouvoir sur son propre environnement, Penser global, agir local

La création du monde (Hegel, Phénoménologie, Esprit, suite de l’invention de soi...)
 
(Hegel, Phénoménologie, Esprit, Pratique)
La nouvelle bonne volonté du Conformisme voulant affirmer son appartenance à son peuple va rencontrer dans l’opposition des devoirs de la famille, comme Loi divine, et des devoirs de la communauté, comme Loi humaine, d’abord la culpabilité puis la corruption avant de s’aliéner dans un Droit formel. Les équivoques du Droit laissent au jugement de chacun de prendre le parti de la conscience vile (victime intéressée) ou de la conscience noble (prête au sacrifice et à la vertu). Mais le sacrifice qui ne va pas jusqu’à la mort est ambigu et tombe dans la rébellion (à la revendication de la conscience vile). Dès lors, ce n’est plus seulement le sacrifice qui compte mais la justesse du conseil, de la loi et du commandement, son contenu universel comme langage du pouvoir. Cette valorisation sans limite du contenu s’épuise d’abord dans la flatterie jusqu’à perdre dans l’extériorité de la culture toute signification sérieuse mais la perte du sens est déjà la foi qui se sait être-pour-un-autre, rapport individuel à l’Universel. Le rassemblement encyclopédique du savoir de l’humanité dissout pourtant cette confusion et cet individualisme dans l’unification du savoir de tous et s’opposant au savoir religieux dénoncé par les Lumières comme corruption du clergé et création humaine intéressée (obscurantisme). Mais les lumières et la puissance de sa critique sombrent pourtant dans l’hypocrisie, l’utilitarisme matérialiste et enfin l’inaction. Jusqu’à se retourner en pure Volonté du peuple, comme volonté agissante de tous, liberté absolue de la Révolution française qui sombre pourtant dans la faction et la Terreur de la simple suspicion, de la division de la volonté générale, perdant encore ainsi toute effectivité. La nouvelle conscience morale, représentée par Kant, revendique cette ineffectivité de l’universalité comme pur devoir être, simple volonté divine. Le but est cependant dévalué par cette inaction et se retourne enfin dans l’action effective d’une bonne conscience inébranlable qui sait que l’action ne vaut que par son intention, sa conviction propre et sa réalisation consciencieuse. Mais la conviction ne vaut qu’à être exprimée et reconnue par l’autre, c’est le langage de la reconnaissance qui unifie les consciences de soi d’abord dans la confusion de la belle âme inapte elle aussi à l’action. Le jugement moral condamne durement cette passivité comme hypocrisie et mépris de l’autre mais il ne peut éviter que son propre jugement se condamne à son tour soi-même, s’égalisant enfin à l’autre dans le Pardon. C’est pour Hegel à peu près le dernier mot mais si l’histoire a réfuté cette fin contemplative, le Savoir absolu reste le savoir du savoir comme histoire, processus dialectique.
 
 
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