Pour une écologie du stress
Le stress devrait être le premier de nos soucis. Le rapport au stress constitue
un des fondements de l'écologie, du rapport de l'individu à
son environnement ainsi que de l'articulation du biologique et du social.
- Parce qu'il y a eu beaucoup de progrès dans les conditions de
travail depuis les débuts du salariat, on arrive désormais
au coeur de la question, celle de l'exploitation et de la compétition
économique qui sont remis en cause par la critique de la pression
mise sur les salariés, de leur insécurité sociale qui
est la première cause des accidents du travail et, sans aucun doute, de nombreuses maladies. Par ce biais des accidents du travail
et des maladies "professionnelles", le stress s'introduit de plus en plus dans la protection
sociale et le droit du travail, s'imposant même désormais comme une priorité sociale
de santé publique. Ainsi, aux Etats-Unis, le stress excessif est déjà
la motivation de la majorité des indemnisations versées par
les entreprises. Le BIT insiste depuis quelques années déjà sur la gravité
de la question. Cette année, l'Agence
Européenne pour la Santé et la Sécurité au Travail
lui emboîte le pas en lançant une campagne sur le thème
"Travailler sans stress" (du 21 au 25 octobre 2002). Il ne semble pas qu'on
prenne pourtant toute la mesure de la révolution qui s'annonce avec
une vision plus écologique de la société et du travail. En effet, le recours à
la qualité de la vie ou la qualité du travail opposés
à la simple quantification remettent en cause toute la logique économique.
Il y a déjà un retournement complet du plus singulier (l'accident)
au plus universel (le stress), mais vouloir faire en sorte que le travail
soit vraiment la santé et l'épanouissement du travailleur
c'est vouloir sonner la fin de l'exploitation, du productivisme et de la
course au profit pour se centrer sur le développement humain et favoriser
la coopération plus que la compétition[1]. On peut dire que c'est
fin de l'autonomie de l'économie par rapport à la société,
ainsi que de la séparation du travail et de la vie.
- Reconnaître que la plupart du temps, nos maladies
sont des maladies du stress à un titre ou à un autre, remet
en cause notre politique de santé hypertechnicienne et spécialisée,
aux dépenses exponentielles insoutenables. Plutôt que de se limiter
à une médecine d'urgence, la médecine générale
devrait être d'abord une médecine du stress, ce qui ne veut
pas dire abandonner les prescriptions de drogues mais intervenir d'abord sur
l'humeur et ne pas se limiter au traitement symptomatique ni hésiter
à compléter le traitement avec d'autres pratiques ou interventions
sociales. Ce qui est gênant pour le scientisme, c'est qu'on retrouve
alors les pratiques traditionnelles (diététique, respiration,
relaxation, méditation, yoga, hypnose, etc.), ce qu'on appelle les
médecines parallèles (avec beaucoup de charlatans inévitablement)
qui prétendent guérir de l'état de détresse du
corps plus que de ses symptômes diversifiés, utilisant pour
cela des "panacées" connues depuis toujours (panax ginseng, sauge,
ginkgo biloba etc). Cela ne servirait à rien pourtant de changer
seulement de médecine alors que c'est l'ensemble qu'il faut changer
: société, économie, agriculture, au lieu de s'orienter
vers une course au surhomme, son artificialisation par manipulations génétiques,
drug design (ou mieux des électrodes
dans le cerveau "wirehead"), pour augmenter notre résistance, notre capacité
à faire face à des stress de plus en plus importants.
Faut-il donc adapter l'homme à la société, même
avec des méthodes post-darwiniennes (non sélectives), ou bien
devons nous adapter la société à l'homme,
construire une protection pour notre fragilité humaine ?[2]
- Personne ne peut rêver éliminer tout stress. Il y a un
bon stress, indispensable, vital même (c'est comme l'effet de serre)
mais nous manquons de limites instinctuelles, c'est donc consciemment qu'il
faut que nous y posions des limites sociales, en prenant conscience des conséquences
encourues, mais surtout de ce qu'il y a en jeu, de notre besoin de liberté
et de reconnaissance individuelle (l'origine du stress étant essentiellement sociale, dans nos rapports humains).
Le terme de stress désigne en métallurgie une contrainte qu'on fait subir au métal. On peut l'imager comme un
pli, première forme de catastrophe pour René Thom :
Les singularités
apparaissent lorsque l’on soumet en quelque sorte l’espace à une
contrainte. La manche de ma veste, si je la comprime, je fais apparaître
des plis. C’est une situation générale. Cela ne relève
pas de la mécanique des matériaux. J’énonce en réalité
un théorème abstrait : lorsque’un espace est soumis à
une contrainte, c'est-à-dire lorsqu'on le projette sur quelque chose
de plus petit que sa propre dimension, il accepte la contrainte, sauf en
un certain nombre de points où il concentre, si l’on peut dire,
toute son individualité première. Et c’est dans la présence
de ces singularités que se fait la résistance. Le concept
de singularité, c’est le moyen de subsumer en un point toute une
structure globale.
Conformément à la conception de Simondon, l'individuation résulte d'une "problématisation" d'exigences sociales, point d'articulation entre la pression
sociale et la souffrance individuelle. Car si le stress a presque toujours
une cause sociale, son vécu et ses conséquences biologiques
sont individualisés, impliquant environnement immédiat, histoire
individuelle et prédispositions génétiques. Notre réaction
au stress nous différencie, nous caractérise, nous transforme.
C'est loin d'être uniquement négatif à ce niveau lorsque
c'est une stimulation à l'action ou même à la protestation, participant
au processus adaptatif ; ça le devient lorsque dominent inhibition,
imprévisibilité, passivité, dépression et dégénérescence
physique. Il faut souligner que la différence entre un bon et un mauvais
stress, une bonne et une mauvaise individuation, semble entièrement
dans l'autonomie de l'individu ou sa perte de contrôle, dans sa capacité
de réaction. Domination et imprévisibilité sont mauvaises
pour notre santé. Nous avons besoin de liberté individuelle dans un monde stable.
-
La notion de stress est ambiguë en biologie puisqu'elle désigne
le mécanisme normal d'adaptation, d'éveil,
le signal qui déclenche l'action, aussi bien que son caractère
pathologique de distress destructeur, d'atteinte des fonctions
vitales au-delà d'un seuil d'épuisement. La notion écologique
de stress est plus clairement négative, définie comme ce
qui s'oppose au processus de complexification d'un ecosystème. Le stress
désigne une intervention extérieure désorganisante,
simplificatrice. C'est une notion aussi fondamentale pour l'écologie
que celle d'inertie en physique dont elle est la traduction biologique. La
capacité de résistance au stress n'est pas autre chose que
la capacité de résistance d'une organisation complexe à
l'entropie ou à la mort, le stress se traduisant par une simplification
plus ou moins radicale. On gagne à raisonner en terme subjectif de
stress plutôt que de "risques" faussement objectifs.
- Enfin, du point de
vue de la société comme système informationnel abstrait,
le stress en représente la chair, le feed back bio-psychologique,
la fragilité du vivant face aux discours, son caractère corporel
et temporel de friction et de résistance, ce qui relie la parole au
corps comme vivant. Nous ne sommes pas transparents, de simples relais de
l'information et corvéables à merci. Le stress fixe une limite
corporelle, toujours singulière, aux exigences sociales, aux structures,
au règne de l'information et de la complexité. C'est une intervention
du corps produisant un signal, un écart de la norme, une prise de distance de
l'idéal, un effondrement de la complexité. Ce signal d'alarme
peut être entendu, servir de retour d'information, remplissant sa fonction
de protestation auprès de l'entourage social comme de soi-même,
sinon il ne reste que la voix du corps souffrant. S'il nous
faut donc une protection sociale contre un stress excessif, cela ne saurait
suffire. Il faudrait aussi que la valeur de témoignage des signes du stress
et de la souffrance soit reconnue socialement ; il faudrait construire une société
plus humaine, une société où nos plaintes légitimes
puissent être entendues sans qu'on soit obligé de se tuer à
le dire!
Tel est selon nous, le caractère central
du phénomène de stress pour l'écologie, l'économie
et la santé, bref son caractère éminemment
politique.
-
Henri Laborit a été un pionnier de cette articulation
entre le biologique et le social, l'économie et l'énergie,
l'agression et l'inhibition (L'éloge de la fuite, Mon oncle d'Amérique),
d'une conception cybernétique des écosystèmes, de la
défense d'une société de l'information basée
sur l'autonomie.
-
Christophe Dejours dévoile
la barbarie ordinaire, la banalisation du mal dans un monde économique
cruel et individualiste, remettant en cause la prétendue causalité psychique et les valeurs dominantes d'une
guerre de tous contre tous invivable et indigne.
- Reconnaître le stress excessif comme une cause indirecte commune dans la plupart des
maladies (virus, coeur, cancer, sida, dépression, allergies,
maladies dégénératives, etc.), devrait obliger la médecine
occidentale à retrouver, pour soigner les "maladies psychosomatiques",
des remèdes ou pratiques traditionnelles comme l'hypnose dont la psychobiologie
tente une théorie biologique (
Rossi). Il y
a une nécessité urgente de confrontation des théories
et d'une conférence de consensus sur les maladies du stress.
Notre position par rapport au stress déterminera notre
évolution future entre un surhomme plus résistant pour une compétition plus dure
ou bien une société plus douce et sensible, attentive à notre santé
physique et mentale, un
vouloir mieux vivre ensemble.
[1] C'est le même
changement de logique qui a déjà fait passer les asiles des
travaux forcés à l'ergothérapie.
[2] Ce que cette post-humanité
a d'inhumain c'est bien son manque de fragilité justement qui nous
différencie pourtant des animaux mieux adaptés que nous. Cette
perte de sensibilité est tout simplement une perte d'information.
Il ne faut pas être aussi dogmatique que Hayek et refuser tout remède
au nom de l'auto-organisation des corps comme s'il n'y avait pas nécessairement
rétroaction de l'information sur la structure, mais on peut craindre
malgré tout qu'un excès de protection contre l'extérieur
ne fabrique tout simplement des fous enfermés dans leur délire
et qui sont certes protégés des maladies et cancers, voire
du vieillissement, par leur excès de dopamine (Henri Laborit l'avait
déjà souligné).
La santé mentale priorité de santé publique
Depuis le début de la dépression (1974),
l'exploitation s'exacerbe parfois jusqu'à
menacer ses conditions de reproduction. La rentabilité à court terme n'est pas rentable
à long terme, les symptômes ne s'en font pas attendre :
"Depuis 1980, les maladies chroniques inflammatoires et auto-immunes
sont montées en flèche, hors de contrôle, à un niveau épidémique dont nous
n’avons encore jamais été témoins dans l’histoire de la médecine moderne.
Ces mêmes tendances alarmantes sont en train d’émerger en Grande Bretagne
et en Europe....
- pour des raisons inconnues, des types de maladies gériatriques
et neuro-dégénératives ont complètement dévasté la population adulte de 28
à 45 ans des Etats-Unis avec pour résultat l’effondrement socioéconomique
total de nombreux patients et de leurs familles."
Les questions de santé sont appelées à prendre
de plus en plus d'importance mais il faut bien constater que les causes des
maladies sont d'abord sociales, que la plupart des maladies sont des maladies
du stress ici, de la misère et de la malnutrition en Afrique. C'est
donc tout le système qui est à revoir. La priorité de
la santé publique devrait être la santé mentale, les
conditions de travail et d'épanouissement de chacun. Il n'y a pas de
question plus politique.
Plutôt que de prendre en charge cette exigence
d'écologie du travail, on prétend régler la question
en réprimant (vainement) le recours aux drogues qui ne sont plus psychédéliques
depuis longtemps mais dopantes et constituent souvent une automédication forcée
(avec les smart drinks et tous les additifs alimentaires) pour les malades
du stress. Pour que l'effondrement du corps ne soit pas la seule limite,
il faut restaurer une loi protectrice, une limite légale plus réelle
que celle des 35H et restaurer surtout l'écoute des gens.
Il y a en tout
cas bien des questions à se poser. Ainsi, dès qu'on est fragilisé,
il faut remettre en cause ce qu'on mange, la malbouffe. Face au stress il
faudrait à la fois soigner les symptômes, changer de vie et changer
la société !
"Cependant, s’ils ne sont pas corrigés,
cette altération et ces dysfonctionnements massifs dans les axes neuro-endocrinien-immunitaire-gastro-intestinal
(NEIG) et mitochondrial- oxidatif- phosphorylation- métabolique (MOM),
augmentent fortement le début et la progression de maladies graves, le vieillissement prématuré
et la mortalité.
Notre travail et d’autres
études scientifiques internationales publiées, ont établi que des modèles
de dysfonctionnement spécifiques identifiables, communs à toutes les grandes
maladies auto-immunes, existent dans le système nerveux sympathique autonome,
les mitochondries et le système polyendocrinien.
La sévérité accrue de ces dysfonctionnements très graves, multifactoriels,
pourtant correctibles, a également été scientifiquement documentée comme
cause de toutes les grandes pathologies neurodégénératives. Ré-établir une
chrono-immunomodulation et un immuno-controle convenables par des traitements
utilisant des cocktails hormonaux, des effecteurs neurotransmetteurs et mitochondriaux,
en même temps qu’en rétablissant l’intégrité et la santé gastro-intestinales
ont démontré d’importantes réductions et rémissions dans de nombreuses maladies
neurodégénératives, auto-immunes et psychiatriques."
Mécanisme biologique d'action du stress :
Il faut distinguer stress chronique, traumatisme
et simple état d'alarme. Le mécanisme est assez complexe car
il implique à la fois l'hypothalamus, l'hypophyse (ou pituitaire qui
commande les autres glandes comme la thyroïde) et le système adrénocortical.
Il faut reconnaître le caractère général du processus
adaptatif, impliquant l'ensemble des systèmes hormonaux et immunitaires
qui interagissent entre eux, retentissant d'abord sur l'humeur (anti-dépresseurs).
Très concrètement, lors d'un stress la réaction d'alarme
(vasodilatation, pression artérielle, pouls rapide, élévation
du sucre dans le sang) est produite par les récepteurs beta-adrénergiques
(les bêtabloquants sont des anti-stress) et par l'hypophyse qui secrète
de l'ACTH qui stimule la production de cortisol à la fois dans les
surrénales et les cellules gliales du cerveau. La contrepartie est
le blocage de l'hormone de croissance et des réactions immunitaires,
entre autres.
En retour, la corticotrophin-releasing hormone (CRH) est l'activateur principal de l'axe hypothalamo-pituitaire-adrenergique
(HPA) et du système sympathique (locus coeruleus). En effet, la
présence de corticostéroïdes va augmenter fortement la
production de tyrosine hydroxylase constituant le goulot d'étranglement
(facteur limitant) de la production de dopamine et sérotonine à
partir des protéines disponibles dans le sang. C'est donc la "molécule
de transduction" entre le corps et le cerveau qui augmente les niveaux de
monoamines et donc l'activité nerveuse qui participe elle-même
à l'augmentation de tyrosine hydroxylase. C'est un processus d'amplification
temporelle qui se répercute sur 3 jours au moins, amplifié
encore en cas de stress chronique, distress et problèmes somatiques.
Le stress chronique
A ce stade, le stress peut déjà
provoquer dépression passagère et perturbations immunitaires
(inflammations, urticaire), affectant la mémoire, les hormones et les humeurs.
Il faut cependant distinguer stress ponctuel, voire bénéfique,
stress traumatique et stress chronique.
"Un stress aigu engendre
une telle production de neurotransmetteurs que la cellule transmettrice
finit par s’épuiser. Devant la pénurie de transmetteurs le
cellule réceptrice libère un surnombre de récepteurs
de noradrénaline (afin d’absorber le moindre neurotransmetteur restant).
Ensuite, même si le taux de transmetteurs varient en fonction du
stress, les cellules réceptrices demeurent chroniquement surexcitables.
A l’état de repos, le taux de transmetteurs est faible car le cerveau
compense l’hypersensibilité des cellules réceptrices par
une réduction de la production d’amines." Prozac p186
Le stress chronique engendre donc une hyperactivité
qui se traduit par un état dépressif et des dérèglements
immunologiques. "Le stress chronique altère la structure" des terminaisons
synaptiques dans l'hippocampe (Sapolsky, Science 1996) C'est le syndrome
d'épuisement ou d'inhibition qui serait l'effet d'une insuffisance
des récepteurs de glucocorticoids qui agissent normalement au niveau
moléculaire et d'expression des gènes pour bloquer les réactions
inflammatoires (cytokines). Comme les hormones de croissance, sexuelles,
thyroïdiennes sont réduites, cela produit une série de
dysfonctionnements (dépression, anxiété, problèmes
sexuels et gastriques, diabète, etc.) La sécrétion excessive
de CRH peut être bloquée par l'antalarmin (CRH-R1 antagoniste)
ou le ketoconazole (Antiglucocorticoid) avec un bon résultat sur
la dépression mais avec des effets secondaires indésirables.
Cela montre malgré tout qu'un système immunitaire hyperactif
cause une dépression. La dépression pourrait être la contre
partie d'une hyperactivité immunitaire, d'un trop grand nombre de
cytokines (ou bien d'un déséquilibre entre dopamine euphorisante
et cytokines déprimantes). Ou la dépression pourrait être
aussi la cause de l'hyperactivité immunitaire puisque les anti-dépresseurs
ont un effet anti-inflammatoires et qu'il faut expliquer l'hyperactivité
elle-même par le déficit du système limitant (Dantzer).
En fait, comme toujours en biologie et en écologie ou en systémique,
il s'agit de causalités en boucle, autoréférentielles.
La perturbation peut être attaquée à n'importe quel
endroit mais il faut tenir compte des systèmes opposants et de la
totalité de la boucle de régulation avec ses rétroactions
(auto-récepteurs).
Pour l'instant, on n'était encore qu'au
niveau d'un dérèglement de la régulation des humeurs,
un cercle vicieux avec des conséquences somatiques importantes déjà
mais on reste dans une mauvaise adaptation comme une mauvaise habitude dont
on peut se débarrasser. A la longue pourtant (3 semaines au moins),
l'excès de cortisol finit par détruire les neurones dopaminergiques
de l'hippocampe, alors même que la neurogénèse reste
bloquée (NGF) ainsi que les récepteurs 5-HT1A (impliqués
sans les suicides), plus rien n'arrêtant la production de cortisol
et l'hyperactivité nerveuse. Le prochain stade voit donc une atrophie
de l'hippocampe par destruction de neurones. Selon certaines études,
la durée d'une dépression serait corrélée à
l'importance de l'atrophie de l'hippocampe. Jusqu'à maintenant, cela
semblait aussi irrémédiable que la maladie de Parkinson puisqu'on
croyait qu'il n'y avait plus de production de neurones chez les adultes.
On sait depuis peu qu'il n'en est rien et que donc ces neurones bien spécifiques
sont détruits et reconstitués toute la vie, grâce au Nerve
Growth Factor (NGF) stimulé par les lésions cérébrales
mais bloqué par les corticoïdes justement (http://biopsychiatry.com/newbraincell/index.html). Ainsi, les maladies du stress, résultant d'un niveau trop élevé
de cortisol, seraient des maladies dégénératives mais
réversibles, au moins au début, avant de s'étendre à
d'autres organes. Le remède semble du côté de ce NGF
qu'on vient de découvrir, reconstituant les neurones perdus. Les anti-dépresseurs
étant déjà crédités de cet effet, cela
expliquerait le délais de 3 semaines nécessaire à leur
effet, délais de formation des nouveaux neurones. J'en doute un peu
et pense plutôt que les anti-dépresseurs agissent sur l'humeur
et les récepteurs, avec un délais de sensibilisation ou d'imprégnation
parfois beaucoup plus court. La normalisation des corticoïdes et la
reprise de la neurogénèse par la sécrétion de
NGF n'est sans doute qu'une conséquence de l'amélioration de
l'humeur, tout comme le simple exercice, courir par exemple, suffit à
produire ce NGF. Cette découverte donne beaucoup d'espoir,
dégénérescence ou dérèglements pouvant
avoir en effet une issue fatale, au moins une longue liste de maladies invalidantes
(on a du mal à imaginer la gravité et l'étendue des
conséquences), cela n'empêche pas qu'on peut toujours intervenir
dans le circuit à différents niveaux pour rétablir le
fonctionnement, de même qu'on peut intervenir au niveau social ou individuel.
Traitements
Evidemment, tout dépend dans quel état
on est entre dépression, asthme, spasmophilie, fatigue chronique,
fibromyalgie, polyarthrite, hypertension, cancer, sida, etc. Au niveau du
rétablissement de la neurogénèse (bloquée
par hyperactivité électrique), il semblerait que les électrochocs
soient les plus efficaces, la quantité de neurones de l'hypothalamus
étant augmentée de 50%, et seulement de 20 à 40% avec
les anti-dépresseurs. C'est comme une ardoise magique, on efface tout
et on recommence. Peu de gens sont tentés pourtant, bien que cela
n'ait plus rien à voir avec les anciens électrochocs et qu'on
est endormi, sans rien sentir.
Les anti-dépresseurs agissent
en inhibant la recapture des neurotransmetteurs, la plupart du temps la sérotonine.
Il y a de bizarres modes intellectuelles. Alors que certains ne jurent que
par la dopamine (common pathway) sensée être la clé
de toutes les toxicomanies, de l'apprentissage, des psychoses, etc., d'autres
ne jurent que par la sérotonine (principalement à cause du
Prozac). Tout ceci est dérisoire car tout se tient et dépend
de nombreux facteurs. Ainsi, la sérotonine manque plus souvent aux
femmes qui en ont deux fois moins que les hommes qui manquent plutôt
de dopamine lorsqu'ils sont dominés mais la noradrénaline semble
aussi contrôler la libération de dopamine alors même que
la noradrénaline dépend de la dopamine, etc. En tout cas, l'usage
des drogues nous apprend que la dopamine améliore rapidement l'humeur,
parfois trop, tout est dans la dose, on connaît les dangers de l'excès
et si "le sens de la vie" dépend de la dopamine, nos désirs,
nos projets, on sait aussi qu'un excès de dopamine nous enferme dans
nos certitudes paranoïaques et nous isole dans notre folie. Cela n'empêche
pas que l'amélioration de l'humeur suffit à provoquer de nombreuses
conséquences bénéfiques, l'exercice et le rire aidant
beaucoup aussi. Il semble que l'augmentation de la disponibilité des neuromédiateurs
stabilise les récepteurs et "réamorce la pompe". Les anti-dépresseurs
sont les panacées modernes, prenant la question à sa racine
biologique à défaut d'avoir accès à ses racines
sociales.
Le plus rapide, si ce n'est le plus efficace, semble de passer directement aux récepteurs adrénergiques. Les beta-bloquants
ont valeur de protection du stress lorsqu'on n'est pas encore
malade, mais un stress chronique finit par les désensibiliser or un
blocage des récepteurs beta-adrénergiques favorise les allergies,
par exemple, et l'hypotension orthostatique. Il faut prendre alors au contraire un beta-excitant
comme l'Hept-A-Myl. De même l'Athymil en bloquant les récepteurs
a2 est un anti-dépresseur presqu'immédiat, au point qu'on peut
l'utiliser comme somnifère mais si le stress est chronique, développant
une fibromyalgie, c'est au contraire la clonidine (a2 excitant) qui peut réduire
la tension, etc. En jouant sur les différents récepteurs selon le
niveau de stress on a des effets rapides mais il n'est pas toujours facile
de rétablir un bon équilibre. En tout cas, ce ne sont pas
comme on le croit souvent des traitements à prendre sur de longues
périodes. Une fois l'état rétabli, il vaut mieux arrêter.
Enfin, on peut aborder le problème par le biais des anticorticoïdes (antalarmin, CRH-R1 antagoniste) ou ketoconazole
(Antiglucocorticoid), mais
les effets indésirables étant trop important il vaut mieux
se contenter de la DHEA qui est un antagoniste du cortisol et baisse avec
l'âge. Le gamma-OH découvert par Henri Laborit et longtemps utilisé
par lui comme anti-stress (ainsi qu'un autre produit original retiré
du marché hélas, le minaprin) a également un effet rapide
sur le cortisol des cellules gliales et le niveau de dopamine. Certains prennent des smart drinks, contrôlent leurs réactions biologiques grâce au
biofeedback, d'autres veulent se mettre des électrodes dans le cerveau ou modifier leurs gènes...
On voit qu'on peut prendre le problème de différentes façons. Il ne faut pas négliger le niveau
mental, l'hypnose, les psychothérapies, les techniques du corps ou
l'hygiène de la nourriture et de l'esprit. Ici, les médecines traditionnelles semblent retrouver une certaine
supériorité par le raffinement de leurs techniques et de leurs
remèdes millénaires. Toutes les grandes drogues étaient connues avant l'avènement
de la médecine moderne et le contrôle
du corps par l'esprit a été poussé à l'extrême
par le yoga notamment. De véritables "panacées" comme le panax ginseng
(anti-stress anticorticoïde?) et le ginkgo biloba (vasodilatateur,
protecteur, neuromodulateur de l'Acétylcholine), ou la sauge, dont
notre médecine scientifique se moquait bien à tort alors qu'elles
restent très utiles, tout comme relaxation ou méditation, si
ce n'est le chocolat... Le secret ici, c'est de ne pas habituer le corps
avec des doses immuables mais d'alterner les remèdes et d'être
attentif aux réactions de l'humeur et du corps.
Le caractère naturel ou synthétique d'une
hormone disparaît devant sa fonction. Or une loi incontournable (énoncée
dans la Théorie Endocrinienne du Terrain par le Dr C. DURAFFOURD) régit le
système endocrinien : l'activité d'une hormone est toujours relative par
rapport à celle des autres hormones, la même hormone peut avoir une action
régulatrice, stimulante, freinatrice, inductrice de réactivités, et ce, de
façon physiologique ou pathologique selon les besoins métaboliques, l'état
d'équilibre ou de déséquilibre de l'organisme, dans une fonctionnalité générale,
spécifique de chacun.
Que serait un concert si chacun jouait sa propre musique sans tenir
compte des autres ?
Reste que l'essentiel serait d'éviter
trop de stress et de faire un régime (crudités) ainsi que de l'exercice,
sans négliger un bon sommeil et sa bonne humeur puisqu'on peut guérir
par le rire aussi.
Dossier
Des souffrances sans mots, les maladies du stress
Fatigue chronique, Fibromyalgie, Déficit d'attention, schizophrénie
La communication entre esprit et corps
Psychobiologie de la guérison, Ernest
Lawrence Rossi, Le souffle d'or, 2002 (1986, 1993)
05/07/02
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