La crise ou quand l'économique dissimule la question du sens de l'existence

Alain CAILLÉ , sociologue

Cinq constats afin d'esquisser les contours de la crise

Non pas que les pauvres actuels ne soient pas pauvres, mais ils ne le sont pas strictement pour des raisons matérielles, en tout cas pas uniquement pour des raisons matérielles. Mais pour des raisons beaucoup plus compliquées : pour des raisons de sens de l'existence.
La crise que nous connaissons est donc également la crise de ces appareils qui fonctionnent à la loi impersonnelle.

L'économie solidaire. Poser les exigences de demain

Alain CAILLE

Cinq propositions pour tenter d'esquisser les contours possibles d'une sortie de crise:

Il n'est pas question de trouver refuge, de trouver remède dans une généralisation de l'économie réciprocitaire à l'ensemble de notre société. il nous faut par contre, penser, instituer une complémentarité entre ces trois logiques en donnant à la troisième (qui constitue par excellence, le refoulé de nos sociétés modernes) une place non pas marginale mais aussi importante que les deux autres systèmes économiques.
D'une part, nous efforcer de penser la démocratie pour elle-même et non plus de manière instrumentale. Il nous faut affirmer que la démocratie doit être à elle-même sa propre fin. Autrement-dit que nous devons nous souhaiter démocrates, non-seulement parce que la démocratie est efficace pour augmenter le Produit National Brut, ou efficace pour gérer certains conflits sociaux, mais parce qu'elle est la fin première de l'existence collective des hommes.

D'autre part, si le cadre national dans lequel s'est joué le processus démocratique depuis deux siècles ne suffit plus, celà signifie qu'il faut imaginer la créativité démocratique, d'un point de vue devenu mondial et d'un point de vue de la localisation de la démocratie. C'est dans ce cadre là, je crois, qu'il faut situer la réflexion sur l'économie solidaire. Inventer une économie solidaire, une économie fondée sur le don, la confiance, ce n'est pas seulement inventer un nouveau système économique, ce qui est pourtant fondamental, c'est aussi de l'articuler à une exigence de démocratie, une exigence mondiale de démocratie d'une part, et une exigence de concrétisation locale.

Si l'espérance en une économie solidaire consiste simplement à multiplier les actions ponctuelles d'aide, de solidarité, aussi nécessaires soient-elles, elle sera vouée à l'échec. Elle restera un cautère sur une jambe de bois, l'adjuvant d'une gestion technocratique de la crise. Par contre, si elle sait s'associer à la reformulation de l'exigence démocratique, elle sera très certainement la base fondamentale du renouveau politique et du redémarrage de nos sociétés dans les années à venir.



[Droit au revenu]