Pour tous les boursicoteurs, spéculateurs, technocrates, escrocs du commerce, de la politique et de la finance, nous ne sommes que des existences inutiles. L'idéal de vie de cette pensée zéro de la résignation est la saine énergie des enfants travaillant pour permettre à leur pays d'accéder au "développement" et de faire monter la Bourse. La religion du profit veut nous faire accepter les pires conditions de vie au nom d'un paradis de l'abondance toujours repoussé à un peu plus tard. Or, comme disait Keynes, à long terme nous serons tous mort. Nous en avons assez de céder toujours plus aux "nécessités de la croissance" qui ne diminue pas la misère et de subir, par dessus le marché, la mauvaise conscience de ceux qui s'opposent au progrès quand nous défendons notre espace, notre eau, notre air, notre vie et notre avenir.
Nous ne voulons pas une petite place dans les organes du pouvoir, nous ne voulons pas nous suffire d'un peu de modération et de bon sens. Nous voulons affirmer notre place de vivant, notre dignité de citoyen, et renverser ce monde inhumain où nous n'avons plus de place. Nous avons dû subir d'immenses destructions, des millions de chômeurs, de vies brisées, d'exclus dépouillés de tout droit. Nous exigeons de retrouver tous nos droits et d'abord celui de vivre. Nous appelons au sabotage de cette économie tant que nous n'aurons pas fait reconnaître ce droit de vivre face à cette machine de mort, tant que nous n'aurons pas obtenu ce droit exigé par le mouvement social et qui est à notre portée : le revenu d'existence.
Qu'on ne compte pas sur nous pour nous contenter d'un nucléaire
un peu plus surveillé, d'OGM un peu moins dangereux, d'un tout petit
peu moins de routes, un soupçon de moins de pollution. Nous voulons
vivre et vaincre ce monstre froid de l'argent qui nous réduit à
de simples faire valoir et joue avec nos vies. Tant que notre humanité,
nos besoins vitaux ne seront pas reconnus, nous devons mépriser
les industriels, les économistes, les politiques qui nous imposent
le monde déshabité de la marchandise. Nous devons opposer
à la froideur comptable, la passion de la vie et l'affirmation de
la société par nos forces regroupées comme mouvement
social. Certes nous devons toujours respecter la vie même des
salauds responsables de notre désastre, mais pas leurs marchandises,
et nous devons plutôt saboter toute l'économie tant
que l'économie réduit la richesse des possibles à
cette misère présente. Nous devons perdre le respect
d'un monde qui ne nous respecte pas, perdre le respect du travail et de
l'argent toujours mal acquis. Il faut se regrouper pour prendre nous-même
ce qu'on nous refuse.
Qu'on ne nous fasse pas le coup du réalisme, nous qui voyons
effectivement les déchets s'accumuler et les ressources s'épuiser
sous nos yeux, nos vies perdues et l'avenir de nos enfants compromis. Le
petit peuple grec a pu vaincre l'immense empire Perse, la Révolution
française a renversée des siècles de tyrannie. Même
quand le mal absolu semble triompher partout, jusque dans les têtes,
comme en 1941, on peut encore résister et malgré une impuissance
apparente bien ridicule, ce n'est jamais tout-à-fait en vain. Il
y va de la Vérité. Un pays n'est pas riche qui réduit
un quart de sa population à la misère. Il n'y a pas amélioration
du chômage quand on a encore 3 millions de chômeurs officiels.
L'eau n'est plus de l'eau, l'air n'est plus respirable, les vaches sont
folles, il n'y a plus de société, la température n'arrête
pas de monter et on voudrait simplement limiter les dégâts
! Ce n'est plus de l'opportunisme, c'est de la collaboration : l'environnementalisme
ne sert hélas qu'à rendre cette démesure un tout petit
peu plus durable (ce n'est pas à cause des écologistes qu'il
faut prendre des mesures de protection de l'air à Paris, mais parce
que l'air devient effectivement irrespirable, pas besoin d'écologistes
pour ce minimum vital). Nous, nous voulons vraiment vivre.