Déjà expliqué :
La marchandise vénale travail se distingue
d'autres marchandises en particulier par sa nature périssable,
par l'impossibilité de l'accumuler, et par le fait que l'offre
ne peut être augmentée ou diminuée avec la même
facilité que pour d'autres produits.
C'est moins la consommation absolue de l'ouvrier que sa consommation relative qui fait le bonheur ou le malheur de sa situation. Une fois dépassée la consommation nécessaire, la valeur de notre jouissance est essentiellement relative.
1. Quel est l'effet de l'accroissement des forces productives sur le salaire ?
Machines : division du travail.
Dans la concurrence des ouvriers avec la machine, il faut remarquer
que les ouvriers travaillant à la main (par exemple les tisseurs
de coton à bras) souffrent encore davantage que les ouvriers de
machines occupés directement dans la fabrique.
Le travail est simplifié. Ses frais de production moindres.
Il devient meilleur marché. La concurrence des ouvriers entre eux
grandit.
...
Concurrence des ouvriers entre eux, non seulement du fait que l'un se
vend meilleur marché que l'autre, mais parce qu'un seul fait le
travail de deux.
L'accroissement des forces productives en général a pour
conséquence :
a) Que la situation des ouvriers empire relativement à celle
des capitalistes, étant donné que la valeur des jouissances
est relative. Les jouissances elles-mêmes ne sont pas autre chose
que des jouissances, des relations, des rapports sociaux.
b) L'ouvrier devient une force productive de plus en plus exclusive
qui produit le plus possible dans le moins de temps possible. Le travail
qualifié se transforme de plus en plus en travail simple.
c) Le salaire dépend de plus en plus du marché mondial,
de même la situation de l'ouvrier.
...
Chaque développement d'une nouvelle force productive est en même temps une arme contre les ouvriers. par exemple, toutes les améliorations des moyens de communications facilitent la concurrence des ouvriers en divers endroits et font d'une concurrence locale une concurrence nationale, etc.
L'abaissement des prix de toutes les marchandises, ce qui d'ailleurs, n'est pas le cas pour les moyens de subsistance les plus immédiats, fait que l'ouvrier porte des haillons rapiécés et que sa misère porte les couleurs de la civilisation.
2. Concurrence entre les ouvriers et les employeurs.
a) Pour déterminer le salaire relatif, il faut remarquer qu'un thaler pour un ouvrier et un thaler pour un employeur n'ont pas la même valeur. l'ouvrier est obligé de tout acheter de plus mauvaise qualité et plus cher. Son thaler ne commande ni autant, ni d'aussi bonne marchandise que celui de l'employeur. l'ouvrier est obligé d'être un gaspilleur et d'acheter et de vendre contre tous les principes économiques.
Il nous faut remarquer en général que nous n'examinons ici qu'un seul côté, le salaire lui-même. Mais l'exploitation de l'ouvrier recommence dès qu'il échange à nouveau le fruit de son travail contre d'autres marchandises. Épiciers, prêteurs sur gage, prêteurs à domicile, tout le monde l'exploite encore une fois.
b) Ayant le commandement des moyens d'occupation, l'employeur a le commandement des moyens de subsistance de l'ouvrier, c'est-à-dire la vie de celui-ci dépend de lui ; de même que l'ouvrier lui-même ravale son activité vitale à un simple moyen d'existence.
c) La marchandise-travail a de grands désavantages par rapport à d'autres marchandises. Pour le capitaliste, il n'y va dans la concurrence avec les ouvriers que du profit, pour les ouvriers, il y va de leur existence.
Le travail est de nature plus périssable que les autres marchandises. Il ne peut être accumulé. l'offre ne peut pas être augmentée ou diminuée avec la même facilité que pour d'autres marchandises.
d) Règlements de fabrique. Législation de l'habitation. Truck-system (paiement des ouvriers en marchandises), tout en laissant sans changement son salaire nominal.
3. Concurrence des ouvriers entre eux.
a) Suivant une loi économique générale, il ne peut
y avoir deux prix du marché. Sur 1.000 ouvriers de même
habileté, ce ne sont pas les 950 occupés qui déterminent
le salaire, mais les 50 qui sont inoccupés.
b) Les ouvriers se font concurrence non seulement parce que l'un s'offre
à meilleur marché que les autres, mais aussi parce qu'un
travaille pour deux.
Avantage de l'ouvrier célibataire sur les ouvriers mariés, etc. Concurrence entre les ouvriers de la campagne et les ouvriers des villes.
4. Fluctuations du salaire (Fluctuation de la demande, crises )
Elles sont provoqués :
1. Par les changements de mode.
2. Par les changements de saison.
3. Par les fluctuations du commerce.
a) En cas de crise :
L'ouvrier réduira ses dépenses ou, pour augmenter sa production, il travaillera un plus grand nombre d'heures ou produira davantage dans le même temps. Mais comme leur salaire est réduit, du fait que la demande du produit qu'ils fabriquent a baissé, ils augmentent encore le rapport défavorable entre l'offre et la demande et la bourgeois dit alors : si seulement les gens voulaient travailler. Du fait de leur surmenage leur salaire s'abaisse donc encore davantage.
b) Au cours de la crise :
Absence complète d'occupation. Réduction du salaire. Maintien du salaire et diminution du nombre des jours de travail.
c) Dans toutes les crises, le mouvement cyclique suivant en ce qui concerne les ouvriers :
L'employeur ne peut employer les ouvriers parce qu'il ne peut pas vendre son produit. Il ne peut vendre son produit parce qu'il n'a pas de preneurs. Il n'a pas de preneurs parce que les ouvriers n'ont rien à échanger que leur travail et c'est précisément à cause de cela qu'ils ne peuvent échanger leur travail.
d) Lorsqu'on parle de hausse du salaire, il est à remarquer qu'il faut toujours avoir en vue le marché mondial et que la hausse du salaire est acquise à ce prix seulement que dans d'autres pays des ouvriers sont privés de pain. [?]
5. Minimum du salaire (Reproduction)
Le salaire journalier que touche l'ouvrier est le profit que rapporte à son possesseur sa machine, son corps. Y est incluse la somme qui est nécessaire pour remplacer l'usure de la machine ou, ce qui revient au même, pour remplacer les ouvriers âgés, usés, par de nouveaux.
...
Si le salaire a une fois baissé, il ne remonte jamais à son niveau antérieur ; le salaire absolu et le salaire relatif.
...
Au cours du développement de la grande industrie, le temps devient de plus en plus la mesure de la valeur des marchandises, c'est-à-dire aussi la mesure du salaire. En même temps, la production de la marchandise-travail devient toujours meilleur marché et coûte de moins en moins de temps de travail au cours du développement de la civilisation.
Le paysan a encore des loisirs et il peut encore gagner quelque chose à côté. Mais la grande industrie (non pas l'industrie manu-facturière) supprime cette situation patriarcale. Chaque mois de la vie, de l'existence de l'ouvrier est ainsi de plus en plus intégré dans ce trafic sordide.
6. Propositions pour y remédier
Caisses d'épargnes, instruction, Malthus, Rossi, Assistance
publique, Proudhon, Weitling
Les Caisses d'épargne sont une triple machine entre les mains du despotisme et du capital :
II. Un autre proposition très goûtée des
bourgeois est l'instruction, tout spécialement l'instruction
industrielle générale.
Nous n'attirerons pas l'attention sur la contradiction absurde qui réside dans le fait que l'industrie moderne remplace de plus en plus le travail complexe par le travail plus simple et pour lequel aucune instruction n'est nécessaire [...]; nous ne ferons pas non plus remarquer que la culture intellectuelle, si l'ouvrier la possédait, serait sans influence directe sur son salaire ; que l'instruction dépend en général des conditions d'existence et que le bourgeois entend par éducation morale le gavage de principes bourgeois, et qu'enfin la classe bourgeoise n'a pas les ressources qu'il faut pour cela et que, si elle les avait, elle ne les emploierait point à offrir au peuple une instruction véritable.
Nous nous bornerons a envisager un point de vue purement économique.
Le sens réel de l'instruction chez les économistes philanthropes est celui-ci faire apprendre à chaque ouvrier le plus de branches de travail possibles, de façon que, s'il est évincé d'une branche par l'emploi d'une nouvelle machine ou par une modification dans la division du travail, il puisse se caser ailleurs le plus facilement possible.
Supposons que ce soit possible
La conséquence en serait que, lorsqu'il y aurait excèdent de bras dans une branche de travail, cet excèdent se produirait aussi dans toutes les autres branches de la production, et que la diminution du salaire dans une branche entraînerait encore plus fortement qu'au-paravant une diminution générale immédiate.
Abstraction faite de cela, par le seul fait déjà
que partout l'industrie moderne simplifie beaucoup le travail et le rend
facile à apprendre, la hausse du salaire dans une branche d'industrie
provoquera aussitôt l'afflux des ouvriers vers cette branche d'industrie
et donnera plus ou moins directement un caractère général
à la diminution du salaire. Naturellement nous ne pouvons nous arrêter
ici aux nombreux petits palliatifs préconisés du côté
bourgeois.
III. Mais il nous faut en arriver à la troisième proposition qui a entraîné et entraîne journellement dans la pratique des conséquences très importantes - la théorie malthusienne.
- Comme le capital ne s'accroît que s'il occupe des ouvriers, l'augmentation du capital implique une augmentation du prolétariat, et comme nous l'avons vu, conformément à la nature des rapports entre le capital et le travail, l'augmentation du prolétariat doit se produire relativement plus vite encore.
- Cependant, la théorie citée plus haut, appelée volontiers une loi naturelle, à savoir que la population s'accroît plus vite que les moyens de subsistance, a été accueillie par le bourgeois avec d'autant plus de faveur qu'elle tranquillise sa conscience, qu'elle fait de sa dureté de coeur un devoir moral, transforme des conséquences sociales en conséquences naturelles, et qu'elle lui fournit enfin l'occasion de regarder sans remuer le petit doigt la ruine du prolétariat du fait de la famine avec la même tranquillité que d'autres événements naturels ; elle lui permet d'autre part, de considérer et de punir la misère du prolétariat comme étant de sa faute à lui. Le prolétariat n'a qu'à mettre un frein, n'est-ce pas, par sa raison, à l'instinct de sa nature et empêcher par son contrôle moral la loi naturelle de prendre un développement pernicieux.
...
La force productive, en particulier la force sociale des ouvriers eux-mêmes, ne leur est pas payée, elle est même dirigée contre eux.
...
On peut considérer la législation de l'assistance publique comme une application de cette théorie. Destruction des rats,a rsenic, asiles de travail, paupérisme en général. Galères à nouveau en pleine civilisation. La barbarie réapparaît, mais engendrée au sein même de la civilisation et comme partie intégrante de celle-ci ; de là, barbarie lépreuse, barbarie en tant que lèpre de la civilisation. les asiles de travail, bastilles des ouvriers. Séparation de la femme et de l'homme.
IV. Nous en venons maintenant à parler brièvement de
ceux qui veulent améliorer la situation des ouvriers par une autre
détermination du salaire (Proudhon).
Rien ici. Voir Misère de la philosophie
V. Sur la fin du salariat (Rossi)
Enfin parmi les remarques faites sur le salaire par des économistes
philanthropes il faut encore citer une opinion. Entre autres économistes,
Rossi a notamment expliqué ce qui suit :
- Toute cette astuce aboutit à ceci : si les ouvriers possédaient assez de travail accumulé (c'est-à-dire assez de capital) pour ne pas être obligés de vivre directement de la vente de leur travail, la forme du salaire disparaîtrait. C'est-à-dire si tous les ouvriers étaient en même temps des capitalistes, ce qui revient donc à supposer et à maintenir le capital sans son opposé, le travail salarié, sans lequel il ne peut exister.
- Cependant, cela est un aveu et nous devons le retenir. Le salaire n'est pas une forme accidentelle de la production bourgeoise, mais toute la production bourgeoise est une forme historique temporaire de la production. Tous les rapports, capital aussi bien que salaire, rente foncière, etc., sont temporaires et peuvent être supprimés à un certain point de l'évolution.
7. Les associations ouvrières (Unification de la classe
ouvrière)
Un des thèmes de la théorie de la population était de vouloir diminuer la concurrence parmi les ouvriers. Les associations ont pour but de la supprimer et de la remplacer par l'union entre les ouvriers.
Ce que font remarquer les économistes contre les associations est juste :
1. Les frais qu'elles causent aux ouvriers sont, le plus souvent, plus grands que l'augmentation du gain qu'elles veulent obtenir. A la longue, elles ne peuvent résister aux lois de la concurrence. Ces coalitions entraînent de nouvelles machines, une nouvelle division du travail, le transfert d'un lieu de production dans un autre. En conséquence de tout cela diminution du salaire.
2. Si les coalitions réussissaient a maintenir dans un pays le prix du travail de façon que le profit baisse considérablement par rapport au profit moyen dans d'autres pays, ou que le capital fût arrêté dans sa croissance, la stagnation et le recul de l'industrie en seraient la conséquence et les ouvriers seraient ruinés ainsi que leurs maîtres, car telle est, comme nous l'avons vu, la situation de l'ouvrier. Sa situation s'aggrave par bonds lorsque le capital productif s'accroît, et il est ruiné à l'avance lorsque le capital diminue ou reste stationnaire.
3. Toute ces objections des économistes bourgeois sont, comme nous l'avons dit, justes, mais justes seulement de leur point de vue. S'il ne s'agissait vraiment dans les associations que de ce dont il s'agit en apparence, notamment de la détermination du salaire, si les rapports entre le capital et le travail étaient éternels, ces coalitions échoueraient impuissantes devant la nécessité des choses. Mais elles servent a l'unification de la classe- ouvrière, à la préparation du renversement de toute l'ancienne société avec ses antagonismes de classes. Et de ce point de vue, les ouvriers se moquent avec raison des malins pédants bourgeois qui leur font le compte du coût de cette guerre civile en morts, blessés et sacrifices d'argent. Celui qui veut battre son adversaire ne va pas discuter avec lui les frais de la guerre. Et ce qui prouve aux économistes mêmes combien les ouvriers ont le cœur généreux, c'est que ce sont les ouvriers de fabriques les mieux payés qui forment les premières coalitions et que les ouvriers emploient tout ce qu'ils peuvent économiser, en se privant, de leur salaire pour créer des associations politiques et industrielles et couvrir les frais de ce mouvement. Et si messieurs les bourgeois et leurs économistes, les prestidigitateurs philanthropes, sont assez bons pour consentir à ajouter au minimum de salaire, c'est-à-dire au minimum vital un peu de thé ou de rhum, de sucre et de viande, il doit, par contre, leur sembler aussi honteux qu'incompréhensible de voir les ouvriers comprendre dans ce minimum un peu des frais de la guerre contre la bourgeoisie, et trouver dans leur activité révolutionnaire même le maximum des jouissances de leur vie.
8. Côté positif du salariat
Productivité, temps libre, délivre des anciens liens
de dépendance, démythifie toutes les fonctions, liberté.
Avant de conclure, il faut encore attirer l'attention sur le côté positif du salariat.
a) Lorsqu'on dit côté positif du salariat, on dit : côté positif du capital, de la grande industrie, de la libre concurrence, du marché mondial, et le n'ai pas besoin de vous expliquer que sans ces rapports de production, ni les moyens de production, ni les ressources matérielles pour la libération du prolétariat et la création d'une nouvelle société n'auraient été créés, ni le prolétariat n'aurait entrepris lui-même son union et son développement qui le rendront vraiment capable de révolutionner l'ancienne société ainsi que lui-même. Compensation du salaire.
b) Prenons nous-mêmes le salaire dans ce qu'il a de plus condamnable,
à savoir que mon activité devient une marchandise, que je
suis entièrement à vendre.
Deuxièmement l'auréole disparaît en général de tous les rapports de la vieille société puisqu'ils sont réduits à de purs rapports d'argent.
De même, tout ce qu'on appelle les travaux supérieurs, intellectuels, artistiques, etc., ont été convertis en articles de commerce et ont par conséquent perdu leur ancien prestige. Quel grand progrès ce fut que tout le régiment des curés, médecins, juristes, etc., c'est-à-dire la religion, la jurisprudence, etc., n'aient plus été acheminés que suivant leur valeur commerciale!
(Troisièmement. Le travail étant devenu une marchandise et étant soumis à la libre concurrence, on chercha à le produire le moins cher possible, c'est-à-dire avec des frais de production aussi bas que possible. De ce fait tout travail physique est devenu infiniment facile et simple pour une organisation robuste de la société - à généraliser.)
Troisièmement. Du fait que, grâce au caractère
de vénalité générale, les ouvriers ont constaté
que tout pouvait être séparé, détaché
d'eux, ils se sont libérés de leur subordination à
un rapport déterminé. Avantage que l'ouvrier puisse utiliser
son argent comme il veut, aussi bien vis à vis des prestations en
nature que vis à vis des manières de vivre purement prescrites
par la classe (féodale).
Plan du livre du salaire dans les Grundisse
Fondements I.
I, p. 231-233 /193-194 : les formes du salaire. Le salaire aux pièces démystification de l'illusion de participation qu'il contient.
I, p. 354 sq. / 302-304 : le rapport salaire/population globale et le rapport travail nécessaire/plus-value. Vers le paiement du travail nécessaire comme paiement de la reproduction d'un tout social.
I. p. 373 / 319 du travail nécessaire comme limite de la valeur d'échange de la force de travail vivante (rigidité du salaire vers le bas?)
I, p. 385-386 / 329 à l'opposé, sur les lois de l'abaissement du salaire au-delà des limites du travail nécessaire. Évolution historique des formes du salaire.
I, p. 428-429 / 368-369 de nouveau à propos de l'évolution historique des formes du salaire : démystification du salaire en tant qu'apparence d'échange entre équivalents. La force de travail, "propriété" du travailleur.
II, p. 109-111 /501 : salaire et excédent de travailleurs.
II, p. 360 / 702 : l'hypothèse d'un minimum du
salaire. Fluidité de cette hypothèse dans le développement
de l'analyse.