Le droit à l'opposition

     
     
    Si je participe aux Verts, comme la plupart j'imagine, c'est parce je suis écologiste, et ce pour des raisons philosophiques, économiques et politiques. Je pense que seule l'écologie-politique peut résoudre les impasses du développement planétaire et qu'il y a urgence (la température n'arrête pas de monter).
     
    Cependant, comme d'autres, je ne suis pas chez les Verts parce que j'approuve tout ce qu'ils font, je ne suis pas chez les Verts pour défendre un parti mais pour faire avancer l'écologie dans la société. Non seulement je n'approuve pas tout mais je condamne sévèrement de nombreuses déviations entre les discours et les pratiques, la confiscation de la démocratie au profit de négociations occultes, de décisions prises en petit comité qui nous reviennent par la presse ! Je suis clairement contre l'alliance avec le PS car je ne partage pas la vision optimiste de l'avenir de la majorité des français et je pense qu'il nous sera demandé des comptes sur ce que nous n'aurons pas fait quand c'était encore possible et que nous soutenions le gouvernement. Je suis clairement dans l'opposition. Je suis pour une écologie radicale, car je pense que l'immobilisme actuel n'est pas durable et je suis pour des pratiques politiques écologistes de coopération, de démocratie participative et non pas d'autorité centralisatrice.

    Est-ce qu'on peut être chez les Verts et être dans l'opposition ? La prétention des Verts à regrouper tous les écologistes, à se considérer comme une fédération écologiste, à défendre le droit de l'opposition, semble répondre assez à la question mais la pratique régionale reflète plutôt un repli sur soi, plus préoccupé de refuser de nouveaux arrivant et d'exclure que d'engager une dynamique d'ouverture et de débat. Une fédération écologiste ne peut fonctionner comme le Parti Communiste sur un mode militaire, on ne peut considérer les militants écologistes comme des troupes qu'on peut manipuler pour les besoins du parti, on ne peut exiger d'une fédération la soumission au centralisme démocratique. Les Verts sont la couleur du pluriel. La cohabitation est bien délicate entre des Verts qui manifestent contre le gouvernement (sans-papiers, chômeurs, OGM) et la participation des Verts à la majorité plurielle, une partie de l'opposition interne nous a déjà quittés. La cohabitation est beaucoup plus problématique encore lorsque ce sont les procédures démocratiques qui ne sont pas respectées. Sous prétexte d'une efficacité pratique d'ailleurs fort douteuse, on risque de faire perdre tout crédit à l'écologie en s'alignant sur les pratiques décriée des grands partis, et ce, sans en avoir les moyens. Enfin, ramener la politique au rapport de force nous condamne à des rapports humains déplorables qui n'ont absolument rien de convivial.

    L'élection du porte-parole régional devrait être une véritable élection, à un poste rétribué, et c'est le porte parole régional, en liaison avec les porte-parole départementaux, qui doit conduire les négociations en tenant compte des contraintes locales. Je propose aussi de dissoudre la commission stratégie si elle doit se donner une légitimité supérieure à la démocratie.

     
     



     

     
     

    L'échec des pratiques politiciennes

    Évidemment, c'est moi qui dénonce ce manque de démocratie et de pratiques écologistes qu'on accuse de ne pas respecter la démocratie, alors que je n'étais même pas partie prenante dans les dernières élections régionales. J'ai été le premier surpris lorsque le porte-parole régional lui-même, puis deux Verts de Montauban, m'ont téléphoné pour que je les soutienne contre Onesta, qui tentait d'imposer une stratégie après l'autre sans jamais aucune concertation, essayant plutôt l'intimidation ou la manipulation comme un CPR téléphonique joué d'avance. Je pense qu'il y a là des questions graves, en contradiction avec nos principes.

    Je répète que je ne participais pas à cette campagne électorale mais le Lot n'a jamais rien fait qui n'ait été approuvé par un CPR. Le problème vient du fait qu'après avoir effectivement voté, en assemblée régionale, un accord avec le PS, nous avions constaté dans le CPR juste avant les régionales que les conditions d'un accord n'étant pas réunies dans plusieurs départements, nous pouvions faire des campagnes autonomes. Le département était quasiment unanime sur l'opposition au Parti Socialiste dans le contexte politique du mouvement des chômeurs et des représentants locaux du PS, surtout M. Malvy qui est devenu tardivement le leader régional du PS. Sa nomination comme tête de liste a changé la donne et surtout l'intérêt pour lui d'un accord dans le Lot. Dès lors les négociations ont repris, des postes nous ont été proposés et on a voulu obliger les Verts du Lot a accepter ce nouvel accord au nom de la décision de l'assemblée régionale. La situation avait peut-être changée mais la campagne était commencée, des engagements pris et on ne pouvait se déjuger. Des militants c'est plus compliqué que des soldats de plomb. Pour être des militants, nous n'en avons pas donné notre âme à vendre pour autant. Nous ne pouvions renier notre parole donnée devant les électeurs de ne pas appeler à voter Malvy, voilà tout notre mal. Tenir parole est politiquement une nécessité pour retrouver un minimum de démocratie. On dira que ce n'est pas de la politique. Non ce n'est pas cette politique déconsidérée qui n'intéresse plus personne, c'est un retour à la véritable politique, à notre responsabilité à tous qui est indispensable et ne se limite pas à la parlote. En tout cas, à part manifester chacun notre opposition résolue à cet accord, personne n'a rien fait avant qu'on ne nous laisse à nouveau mener une campagne autonome une fois que l'accord a échoué.
     
    Les réactions après l'échec des régionales ont été aussi insupportables. Si la stratégie n'avait pas réussie, ce n'était pas à cause du général qui avait mal estimé ses troupes, mal conduit les négociations, non, c'était ma faute à moi qui n'y était pour rien, c'était la faute du Lot parce qu'il n'avait pas retourné sa veste aussitôt pour quelques postes, mais c'était aussi la faute d'une ou l'autre, dans une ambiance de Western où il était impossible de s'expliquer et où le simplisme est la seule expression possible. Au point qu'on se demande ce que ce parti a d'écologiste dans son fonctionnement. Ce qui est en cause ce sont nos rapports, l'absence de concertation, ce sont les méthodes, l'absence de démocratie et de considération des personnes.

    Les conditions d'un fonctionnement démocratique ne sont pas réunies et je pense de notre devoir de nous y opposer, de refuser ces dérives et de construire des pratiques plus conformes à nos principes et à notre diversité. Il nous faut revenir aux principes énoncés en préambule de nos statuts. C'est la responsabilité de tous.
     

    (09/98)
    Jean Zin
    Les Verts du Lot