I

Je m'intéresse à la question de la vérité dans ce qu'elle a d'impossible et de la liberté en tant qu'elle est contradictoire. Ce qui est mon souci principal, c'est l'erreur, la bêtise, notre rationalité trop limitée notamment au niveau collectif et notre difficulté à nous entendre et savoir quoi faire mais je m'intéresse surtout aux dispositifs concrets d'une démocratie cognitive, de la construction d'une intelligence collective permettant une véritable autogestion responsable et prudente, pas simplement une auto-organisation aveugle et sans mémoire, ceci dans un environnement complexe dont on ne peut connaître qu'un bout, à l'ère de l'information qui bouscule tous nos repères, avec un sens hérité qu'il nous faut non seulement continuer mais reconstruire à chaque fois.

Ce qui me passionne dans la science comme dans la technique, ce n'est pas le savoir positif ni la performance, c'est d'être configurateurs de monde et de contredire nos évidences, de matérialiser nos limites cognitives mais aussi de nous rendre responsables de leurs conséquences imprévues et d'essayer d'y répondre à temps, de savoir ce qu'il faudrait faire en allant y voir de plus près.

II

Le passage à l'ère de l'information, de l'écologie et du développement humain n'a pas trouvé encore sa traduction institutionnelle qui semble bien devoir rejoindre les propositions de Jacques Robin et d'André Gorz (travail autonome ou quaternaire, revenu garanti, associations ou coopératives municipales, monnaies locales), propositions que je défends dans différentes revues mais dont je sais qu'elles ne sont absolument pas crédibles pour l'instant et rencontrent là aussi nos limites conceptuelles. Pour la construction d'une intelligence collective et d'une démocratie cognitive à l'ère de l'information, tout reste à faire... Dans l'état actuel de désorientation il serait urgent de s'y mettre.