Brèves
- D'abord il faut dire le choc de cet article (et de ce livre) sur le génocide rwandais:
"Dans le nu de la vie", de Jean Hatzfeld, par Mona Chollet http://www.
inventaire-invention.com/hatzfeld.htm
- J'ai reçu un message du World
Institute of Science qui lance un "appel à Johannesbourg" au nom d'un
certain nombre de prix Nobel, comme en 1992 à Rio.
Founded in 1991 at the College de France,
the WIS considers that only an independent world committee of scientific
experts can constitute a force for objective information and proposals on
vital planetary risks. The WIS will bring together the intellectual and moral
elite of science, the economy, and civil society to constitute a steering
committee charged with drawing up recommendations on major vital planetary
issues evaluated by the WIS (climate, power, biotechnology, agro-ecology,
water, pesticides, and demography).
Contacts : Xavier Brault, (French and English), Paris, France (33) 1 43 31 0177
Professor Louis Albou, Secretary General, (French only), Paris, France (33) 1 47 66 7100
- La petite revue Bio Sciences, trimestriel bien fait, principalement
médical mais pas seulement, offre un interview de Jean Chaline, auteur
notamment des livres "Les horloges du vivant" (1999) et "Les arbres de l'évolution" (2000) chez Hachette. Il y construit une nouvelle théorie de l'évolution
insistant non plus tant sur la sélection naturelle que sur les rythmes
internes des mutations génétiques et les contraintes d'échelle,
contraintes géométriques de caractère fractal qui permettent
de constater des rapports à peu près constants dans l'évolution
de l'infiniment petit à l'infiniment grand, ce qui en constitue précisément
le caractère fractal.
Il s'agit d'une révolution dans les théories de l'évolution
puisque ce n'est plus la sélection des mutations viables qui est observée
mais le mécanisme des mutations qui ne se font pas n'importe comment,
leur logique interne. La théorie darwinienne n'est pas remise en cause
dans son effet sélectif mais elle ne rend pas compte de la cause des
mutations laissées au pur hasard d'une combinatoire aveugle. On doit
distinguer pourtant des évolutions continues, la plupart du temps
réduites aux marges, et les évolutions discontinues qui ont
des effets de seuil, de réorganisation, de différenciations
d'organes. Le hasard en jeu n'est pas homogène comme un bruit de fond constant.
Les continuités et discontinuités ont une structure fractale
et non pas brownienne, ce qui signifie que le hasard est rarement entièrement
aveugle ou également distribué, plutôt effet de lois
imprécises (aléatoires) et de contraintes géométriques.
L'évolution ne consiste pas en une immense combinatoire
aléatoire et continue mais peut se ramener globalement aux mutations de 4
gènes Hox antagonistes (gènes de développement) responsables de sauts qualitatifs discontinus.
C'est une évolution qui répond à une horloge interne
plus qu'à l'extériorité. Ce n'est donc pas une quelconque
"East side story" qui peut expliquer notre émergence mais seulement
une "Inside story" que nous portons en nous, développement de nos
capacités en puissance. "C'est le nouvel organe, apparu par mutation,
qui permet une nouvelle fonction - à condition que la sélection
naturelle lui donne son label de survie". Nous ne nous développons
pas dans un éther sans résistance mais nous ne sommes pas non
plus le simple reflet de l'extériorité. Nous sommes dotés
d'une puissance propre et d'une mémoire de notre parcours. Les nouvelles
espèces apparaissent au croisement du développement de leurs
potentialités et des possibilités de croissance de leur population.
Rien là qui devrait choquer. C'est l'avancée normale du savoir.
Une fois la sélection naturelle acceptée, on n'a pas tout expliqué.
Il faut rendre compte aussi des processus de mutation, des régularités
de l'expérience, mais il n'est pas facile de bousculer des idées
reçues comme on le constate encore : "La pensée unique existe à un état que je ne soupçonnais pas dans toutes
les disciplines et il est très difficile d'introduire des idées nouvelles
qui remettent en cause des idées reçues si rassurantes".
Pourtant, on change de théorie évolutionniste tous les 50 ans,
semble-t-il, c'est-à-dire aussi à peu près à chaque cycle
de Kondratieff. Il doit y avoir là encore une structure fractale, ce
qu'on appelle cycle économique n'étant qu'une simplification de fluctuations
boursières qui ont justement servies à Mandelbrot de modèle
pour l'invention des fractales (l'amplitude des fluctuations à court terme reflète,
à leur échelle, celle des fluctuations à long terme
sur une amplitude supérieure). Bien qu'il faille toujours être
méfiant avec les théories abstraites qui prétendent
à des prédictions concrètes, il n'est pas sans intérêt
de noter que selon cette structure historique, pour Jean Chaline, "le système économique s'effondrerait vers 2080 (plus ou moins 30 ans)", après une accélération
des mutations, un emballement
de l'évolution précédant habituellement l'épuisement
de ses capacités d'adaptation. C'est un résultat qu'on a pu déjà
pressentir sur d'autres bases plus concrètes, et qui confirme au moins
l'urgence de construire une alternative à un système qui n'est
pas durable.
30/08/02
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