Il serait déplacé que nous fassions preuve d'un quelconque triomphalisme. Pour l'instant, les Etats Généraux de l'Ecologie Politique n'auront pas mobilisé un parti désorienté comme en Belgique où toute la direction et les militants s'étaient engagés résolument dans l'indispensable reconstruction d'Ecolo, désormais acteur solidement ancré dans la société, ayant constitué avec ses Etats Généraux un travail programmatique sur lequel il peut s'appuyer, et capable de nouer des alliances majoritaires. Ce n'est pas que le besoin ne s'en fait pas cruellement sentir en France aussi, mais les Verts pris dans leurs enjeux de pouvoir et leurs contradictions ont délaissé complètement l'opportunité que leur offrait une structure ouverte sur la société. On arrive au paradoxe que les dirigeants Verts peuvent demander ce que nous apportons alors que ce serait sans doute à eux d'apporter un peu plus à l'ouverture et à l'échange social en participant à nos débats et forums.
L'absence de réelle participation des Verts rend difficile voire impossible la construction de partenariats sauf très ponctuellement.
...on peut avoir des merles
On ne peut demander aux EGEP de rattraper les défaillances des Verts, qui sont celles de la politique actuellement et qui affectent tous les écologistes, constituant une défaite pour les idées que nous portons, mais nous ne sommes pas restés inactifs pour autant.
L'ouverture des journées de Lamoura II a montré le potentiel d'un abord plus distancié et travaillé de la question du pouvoir. Le théâtre-forum fut une grande réussite mobilisant la foule au petit matin du premier jour, ce qui ne s'était jamais vu! Nous ne nous étions pas contenté de cette mise en scène thérapeutique de la question du pouvoir mais nous avions édité aussi une petite brochure (Les EGEP et le pouvoir) avec un texte de Patrick Viveret et le compte-rendu de nos travaux sur le pouvoir, notamment le résumé d'un recueil de critiques de livres disponible pour 20 F (La production de l'autonomie avec Elias, Arendt, Gauchet, Ehrenberg, Lefort, Castoriadis, Foucault, Laborit) permettant de poser les questions du politique et de l'autonomie dans notre démocratie de marché.
Malgré le succès du théâtre-forum et l'excellent accueil réservé aux brochures fournies, la suite des journées n'en fut pas améliorée pour autant...
Faute d'un sursaut des Verts, investissant les EGEP pour renouveler le dialogue des écologistes avec la société qui a tant besoin de nos réponses, nous essayons de sauver ce qui peut l'être et de faire progresser les idées écologistes pour des jours meilleurs. Ainsi, tout ce que nous avons constitué comme bibliographie, critiques de livre, brochures, actes de forum resteront d'autant plus disponibles que presque tout est accessible sur le site etatsgeneraux.org, apportant des ressources indispensables aux débats écologistes.
Avec le peu de moyens que nous avons, et malgré déménagement et changements de personnel, en plus d'une veille technologique qui devrait recevoir le renfort d'autres critiques, et du théâtre-forum qui peut faire une tournée des régions, nos projets se concentrent sur :
- 12 conférences de
l'Université de Tous les Savoirs
- 2 ou 3 procès d'idées
(Lille, Saumur, Lyon) où devront s'imaginer d'autres formes de débats
citoyens (forums hybrides)
- Un forum avec ATTAC sur
les régulations financières
Parmi les nombreux forums
qui ont eu lieu on peut souligner celui sur la prostitution qui a permis
d'organiser avec profit un débat entre des positions très
conflictuelles. Politis, qui nous consacre régulièrement
un dossier, en a témoigné ainsi que sur la culture (avec
Gérard Paquet). EcoRev' a publié les contributions d'un forum
sur l'éducation. D'autres initiatives tentent de donner corps à
l'économie solidaire ou à la démocratie participative,
jusqu'aux spiritualités invités à un dialogue au nom
des EGEP. Pour l'économie et le social, après avoir approfondi
la question de la refondation sociale avec André Gorz, Yann Moulier-Boutang,
Robert Castel, Dominique Méda, différentes revues, etc (hélas
sans suite à présent), et après avoir abordé
en étroite liaison avec Jacques Robin la question des rapports de
l'écologie avec la théorie des systèmes, nous comptons
approfondir la question de la richesse à partir du rapport Viveret
et, notamment, de sa critique par André Gorz. L'environnement n'est
pas beaucoup représenté, peut-être par crainte de rester
entre-soi mais des rencontres ont eu lieu entre écologistes et EDF
notamment. Dans ce domaine il aurait été surtout intéressant
de regrouper les associations écologistes grâce aux EGEP,
cela n'a pas eu lieu encore même si une rencontre organisée
avec Silence pourrait déboucher sur cette perspective. On voit l'étendue
du champ de l'écologie et la difficulté d'en suivre toutes
les pistes à la fois.
Objectif 2003
Nous nous sommes donnés à la dernière Assemblée Générale l'objectif d'un forum de synthèse des Etats Généraux de l'Ecologie Politique en juin 2003. Il s'agit d'en donner dès maintenant les principales orientations afin d'en construire les préparatifs en 2002. Il est probable qu'après juin 2002 les conditions politiques soient très différentes si la gauche est dans l'opposition. Il est essentiel de savoir aujourd'hui si on peut compter sur un véritable investissement de la direction des Verts, pas seulement financier, ou si on doit gérer une fin de processus avorté. Il faut remettre à plat tous les responsables et correspondants ineffectifs. Les forums sont, il faut bien le dire, de plus en plus rares mais surtout ils manquent de cohérence d'ensemble qui permettrait d'avoir une dynamique globale, de faire circuler les comptes-rendus, partir des conclusions des précédents pour les retravailler. On gagnerait à choisir une ou deux directions générales plutôt que de garder une division de l'ensemble des chantiers que nous sommes incapables de couvrir. C'est à cela qu'il faut réfléchir, de cela qu'il faut discuter. Quelles sont les orientations prioritaires, quel doit être l'axe structurant ? Les réponses à ces questions devraient permettre une meilleure communication, correspondant aux nouvelles attentes exprimées.
Si nous devons défendre
une sortie du productivisme, le débat crucial semble clairement
celui du pouvoir dans nos démocraties de marché. La "procédure
démocratique" du vote ne garantit rien. A vouloir une démocratie
totale, on a un déni de démocratie, des réseaux de
petits chefs. Les gaulois s'engueulent joyeusement mais aucun problème
n'est réglé. Il faudrait que les écologistes reconnaissent
les premiers l'impasse d'une démocratie compétitive au profit
d'une démocratie cognitive à construire. Que les écologistes
montrent qu'ils savent gouverner chez eux avant de vouloir gouverner le
monde. Les Etats Généraux peuvent en être l'instrument
et lancer une dynamique en ce sens pour aboutir en 2003, se donner le temps
qu'il faut.