Entreprises

Exposé introductif de Michel CAPRON

 

Michel CAPRON introduit la réunion.

Chacun a une représentation de l'entreprise. Mais le nom et la réalité même d'entreprise sont à « dé diaboliser ».

Pourtant il faut se garder du schématisme. La réalité des entreprises est complexe. Le milieu dans lequel se meuvent les entreprises est lui-même complexe. Si les Verts veulent faire des propositions novatrices et opérationnelles par  rapport aux entreprises, il faut qu'ils ne soient pas réducteurs.

Les enjeux pour les Verts dans leurs rapports avec la société civile sont très importants.

Il faut revenir à un certain nombre de concepts et de réalités basiques.

L'économie de marché

Quelle que soit l'opinion qu'on peut se faire des entreprises, qu'elle soit bonne ou mauvaise, le développement économique pour l'homme de la rue, c'est l'économie de marché. Dans la représentation commune, le modèle le plus efficace est donné par l'économie de marché.

Mais il faut bien voir que si à notre époque historique l'économie de marché est la seule qui paraisse efficace, à d'autres époques, et même à toutes les époques, il existe une organisation de la production en unités de base. Ces unités de base on peut les appeler des entreprises. Dans notre système capitaliste les raisons d'être des entreprises sont la recherche du profit. Mais à toutes les époques il s'agit de satisfaire les besoins. Pour cela il faut organiser la division du travail et organiser la production.

Néanmoins il est très difficile de donner une définition des entreprises qui soit valable quels que soient les époques et les lieux. On ne peut pas les définir par un lieu ou un espace. On ne peut pas non plus les définir par des durées de vie déterminée. Une définition minimale est la suivante : « Entités qui produisent des biens et des services ».

L'étymologie donne quelques indications : il s'agit de prendre en main.

Dans les économies de marché qui sont les nôtres les frontières entre les entreprises sont les endroits où il y a commutation de propriété des marchandises. Les frontières juridiques de l'entreprise sont les lignes de démarcation où s'effectue la métamorphose de la marchandise en argent et réciproquement.

Les facettes contradictoires des entreprises

 

La création des richesses

Les entreprises créent des valeurs d'usage, les richesses, qui visent à satisfaire des besoins humains. Pour cela le processus de production détruit des ressources, des ressources naturelles, des matières premières, du travail humain. Il produit également des externalités négatives ou positives.

L'interaction des différents acteurs

Mais l'entreprise est également un milieu vivant dans lequel interagissent différents acteurs, les propriétaires, propriétaire de l'entreprise, propriétaires des marchandises, propriétaires des capitaux etc., les salariés, les actionnaires, les dirigeants. Les intérêts de ces différents partenaires sont divergent. Néanmoins ils sont bon gré mal gré obligés de coopérer ensemble pour assurer la production commune. Dans la conception marxienne classique il y a deux catégories d'intérêts opposés, ceux des salariés d'une part, ceux des différentes catégories d'exploiteurs d'autre part.

Ainsi les entreprises apparaissent comme des entités contradictoires. Ce qui les caractérise dans notre société c'est d'une part la nécessité de coopérer et d'autre part la présence d'intérêts antagonistes. C'est pourquoi d'une part les entreprises rejettent et excluent ; d'autre part elles intègrent et qualifient les différents acteurs. Il y a donc une dimension de citoyenneté interne à l'entreprise.

Les rapports de l'entreprise avec l'environnement et avec la société civile

Les rapports des entreprises avec l'environnement et la société civile sont complexes. D'abord elle doit négocier l'acquisition et le renouvellement des différentes richesses qu'elle doit détruire et combiner dans le processus de production. D'autre part la société civile, y compris les autorités publiques qui la représentent, accorde le droit « d'exploiter », dans tous les sens de ce mot, non seulement les richesses matérielles mais également les capacités humaines des salariés, à condition de respecter des règles communes.

La recherche du profit maximal rend les entreprises prédatrices. Mais cette prédation est limitée.

La somme des intérêts particuliers antagonistes ne peut pas coïncider avec l'intérêt général. En effet l'intérêt général commande d'éviter qu'il y ait surconsommation des biens environnementaux. Chaque nation et chaque époque construit des conventions sociales qui sont définies comme des « seuils » d’acceptabilité et qui sont différentes suivant les niveaux d'activité des entreprises et leurs conséquences.

Le principe d'explication fondamental du fonctionnement des entreprises est l'utilitarisme. Quel que soit le mode d'organisation sociale, elles agissent en fonction de leur « intérêt bien compris ».

À long terme cet intérêt consiste à « ménager » l'environnement, voire à le « fertiliser ».

À court terme, et plus particulièrement vis-à-vis des salariés, il s'agit de mettre en oeuvre un certain paternalisme qui vise à modérer l'exploitation de la force de travail. Il existe ainsi un contrat implicite et tacite. En échange du droit d'exploitation, dans tous les sens de ce mot, l'entreprise produit des utilités qui satisfont des besoins. Du point de vue social les utilités produites par les entreprises correspondent à la capacité à répondre aux besoins sociaux dans un bon rapport qualité-prix. Les entreprises ont besoin d'une légitimité de leur activité vis-à-vis de la société civile. Cette légitimité est détruite s'il existe un décalage entre les valeurs morales qui dirigent les activités de l'entreprise et les valeurs morales de la société dans laquelle ces activités s'exercent. Ainsi le défi majeur pour les entreprises consiste à assurer la fonction productive tout en légitimant les externalités et négatives (les comptables nationaux emploieraient l'adjectif « fatales ») produites par ces activités.

Dans l'histoire récente de nos sociétés les difficultés des entreprises résultent de leur nécessité d'interagir avec de nombreux partenaires qui les soumettent à des injonctions contradictoires : un interdit multiple, des identifications divergentes, des réseaux de solidarité et le « loup pour l’homme » qui est le membre élémentaire de la société civile.

Mais l'entreprise fait partie de la société civile. En ce sens elle en reflète les contradictions fondamentales, et en particulier celles des groupes de pression dont certains n'ont pas des attentes bien définies et en conséquence ne sont pas prévisibles avec une grande précision. Dans les années récentes on a assisté en particulier à une montée en régime des organisations non-gouvernementales qui se sont plus ou moins substituer à l'Etat dont le poids de cesser de diminuer sous l'effet en particulier des idéologies de la privatisation et de la dérégulation.

Les entreprises sont tiraillées entre des exigences contradictoires :

  1. elles doivent être efficaces du point de vue économique ;
  2. elles doivent respecter un minimum de justice sociale ;
  3. elles doivent respecter la législation et la réglementation collective ;
  4. enfin, elle aussi, elles doivent assumer une certaine solidarité inter génération elles, au moins du côté des détenteurs du patrimoine de l'entreprise.

Conclusions provisoires

On peut conclure provisoirement par une question : quel rôle les états généraux de l'écologie politique veulent jouer au sujet du contrat tacite et implicite entre les entreprises et la société civile ?

Les états généraux peuvent rendre plus clair et plus explicite ce contrat par un débat public. Mais qu'est-ce que la société civile est prête à accepter ou pas ? D'une part il faut respecter les droits humains fondamentaux et d'autre part il existe une série de textes. Mais Michel constate une absence de réflexion globale qui associe les trois thèmes fondamentaux du développement durable, à savoir la recherche de l'efficacité économique, le respect des seuils environnementaux et le respect de l'équité sociale. Comment ces trois aspects peuvent être conciliés et combinés dans les unités de production de base. Bien sûr il est nécessaire de faire des arbitrages. Les autorités politiques publiques sont amenées à effectuer ces arbitrages de manière tâtonnante et chaotique. Ainsi le secrétaire général de l'organisation des Nations unies a défini en janvier 1999 les composants globaux du développement durable : développement humain, division du travail et conventions de protection de l'environnement.

L'appel du secrétaire général de l'ONU à être plus concret et plus opérationnel est parfaitement légitime. Mais les critères empiriques opérationnels manquent. Des pistes consistent à utiliser des techniques d'évaluation et des critères d'orientation des capitaux pour analyser la gestion des entreprises. Un 1er exemple a été donné par les audits sociaux. Ces évaluations peuvent être réalisées par les autorités publiques. Les grands domaines d'évaluation sont

  1. les mesures de précaution et de prudence ;
  2. la justice et l'équité sociale ;
  3. la solidarité inter générationnelle.

En particulier il convient de privilégier les biens publics globaux que constituent le patrimoine culturel et l'aménagement de l'espace. Enfin la citoyenneté commande de privilégier la transparence et la concertation au niveau local. Ainsi les entreprises ont des comptes à rendre à la société civile par rapport aux tenants et aboutissants de leurs activités.

Mais jusqu'à présent le dialogue entre les entreprises et la société civile est un peu timide. Cela suppose de la part des entreprises un changement profond des rapports sociaux, et en particulier, le passage du dialogue avec un seul interlocuteur, les syndicats de salariés, à une concertation avec les différents partenaires qui représentent d'une part les consommateurs et les responsables de l'environnement et d'autre part les partenaires de la société civile qui ne sont pas représentés par les syndicats de salariés. Un certain nombre de pays sont des pionniers dans ce genre d'expérience, en particulier le Québec et l'Irlande.

Exposé du discutant

Martial présente l'association 1901 intitulée « centre français d'informations sur les entreprises ». Cette association a été créée en 1996. Elle comprend aujourd'hui trois salariés.

Les changements observés entre 1990 de 2000

Le déclin de l'Etat

La puissance des Etats diminue ; leur crédibilité aussi.

La montée en régime des entreprises

Parallèlement à cette réduction de la puissance des Etats, celle des entreprises augmente considérablement. Mais comme il faut assurer la reproduction des conditions sociales d'existence des activités des entreprises, celles-ci ont été amenées à se substituer à l'Etat défaillant. Les grandes entreprises en particulier met en avant des valeurs morales. Ainsi on a vu des entreprises d'articles de sport se préoccuper de l'exploitation éventuelle du travail des enfants. On voit apparaître de nouvelles solidarités et de nouvelles appartenances. L'affaiblissement de l'exécutif étatique est en partie compensé par la montée du pouvoir judiciaire. L'arbitrage étatique se transforme en procès juridique.

Mais il ne s'agit pas là d'une progression régulière. Il y a des à-coups, des soubresauts. L'année 1994 marque un tournant. C'est d'abord la fin de l’Uruguay round à Marrakech et la création de l'Office mondial du commerce. Mais cette même année l'union des industries textiles se préoccupe du travail des enfants, du respect de l'environnement et des libertés syndicales.

Les comportements citoyens

Le militantisme diminue beaucoup. Les comportements de protestation changent. À la protestation politicienne se substituent des comportements de consumérisme. De la valse des éthiques on passe à la valse des étiquettes. Ces changements des consommateurs entraînent des changements des entreprises. La consommation éthique apparaît en France autour de l'année 1995, alors qu'elle était apparue aux Pays-Bas autour de l'année 1989.

La consommation éthique poursuit trois objectifs :

  1. sensibiliser les consommateurs ; l'opération la plus célèbre est celle des cafés Max Havelaar à partir de 1993 ;
  2. sensibiliser les grandes entreprises : leur intérêt bien compris consiste à respecter les règles éthiques. Un certain nombre d'actions spectaculaires ont été développées par rapport à l'entreprise Nike 92 et par rapport à certains syndicats en Indonésie à peu près la même époque. Des campagnes publicitaires utilisant la presse ont entraîné des actions en direction des entreprises.
  3. Proposer une offre alternative notamment au niveau des sous-traitants.

Que faire ?

Un certain nombre de pratiques innovantes ont été mises au point par les mouvements de consommateurs citoyens :

Les codes de bonne conduite ont fait l'objet de nouvelles versions et surtout sont portés par des associations qui se mettent en place pour veiller à la déontologie et à l'éthique.

Les entreprises avaient déjà mis en place des « rapports sociaux ». Il s'agit de rendre compte des rapports de l'entreprise avec l'environnement social. Parallèlement certaines entreprises ont créé des « rapports environnementaux ». En France on en compte environ une quinzaine. Cela reste donc très embryonnaire. En outre intellectuellement et matériellement c’est très insatisfaisant. En effet il n'y a pas d’homogénéisation des critères et il n'existe pas de système précis d'indicateurs. Tout cela apparaît en fait une opération de communication des entreprises qui essayent ainsi d'améliorer leur image de marque, surtout lorsque qu’elles agressent l'environnement, comme c'est le cas des entreprises chimiques ou des cimenteries.

Une variante de ces rapports environnementaux est constituée par les « plans environnementaux des entreprises » (PEE) et de manière générale par les « accords volontaires ».

Il y a également des normes, normes ISO 14 000, et des systèmes d'évaluation environnementale européens (EMAS).

L'idée générale intuitive de toutes ces mesures, plus ou moins « volontaires » ou contraintes par les règlements, est d'introduire une coopération entre les entreprises et la société civile qui soit gagnante pour les deux parties (win win).

Le milieu de l'audit social est très hétérogène. On peut se demander par ailleurs si la généralisation de ce genre d'audits ne permet pas aux grands cabinets juridiques anglo-saxons de créer de nouveaux marchés et d'asseoir leur domination à l'échelle mondiale.

Ces sociétés introduisent des techniques de « rating social » et de « rating environnemental ». L'objectif consiste à noter les grandes entreprises cotées en Bourse afin de mieux les vendre à des gestionnaires collectifs comme les fonds de pension. Il existe à l'heure actuelle 27 fonds éthiques. Les techniques d’interventions en assemblée générale sont très pratiquées aux États-Unis et très efficaces.

La société civile cherche des cautions pour les activités non lucratives, cautions qui sont difficiles à obtenir auprès des milieux financiers. D'autre part elle est sensible aux questions d'image et de réputation.

Mais les critères implicites qui sont mis en oeuvre par la société civile ne sont pas faciles à expliciter et à quantifier. Un précédent qui doit rendre prudent est celui du bilan social. Pour les firmes multinationales la part d'activité qui est exercée en France est faible. De sorte que dans une stratégie de communication à l'échelle mondiale ce qui se passe en France peut-être une vitrine symbolique relativement peu coûteuse qui permet de dissimuler ce qui se passe dans les pays en voie de développement. Néanmoins ce mouvement qui multiplie les interventions citoyennes peut devenir un outil de médiation entre les autorités politiques et les directions d'entreprise.

L'épargne salariale constitue également un levier d'action très puissant, puisqu'elle mobilise des centaines de milliards de francs.

  1. Il s'agit d'abord de rendre transparentes et pertinentes les informations relatives aux 4000 fonds de pension identifiés.
  2. Il s'agit ensuite de retourner contre elle-même la logique de la compétition.
  3. Il s'agit enfin d'impliquer les citoyens.

 

 

C'est en ce sens qu'agit l'association du centre français d'informations sur les entreprises.

  1. Elle participe au débat.
  2. Elle diffuse une lettre qui décrit l'impact de ces mouvements citoyens sur les activités des entreprises.
  3. Elle publie les analyses des politiques certaines grandes entreprises afin d'alimenter les agences de notation.

 

 

L'ambition de cette association serait de réorienter les fonds de gestion vers le développement durable. Il s'agit donc de forger des critères pour évaluer les deux autres volets non économiques du développement durable, à savoir la politique sociale et la politique environnementale de ces entreprises.

 

 

Comment prolonger ces actions militantes ?

Il faut d'abord que ces actions soient davantage engagées.

  1. Il faut multiplier les lieux légitimes de négociation notamment avec les citoyens. Il faut pouvoir vérifier la réalité des engagements de quelque parti que ce soit.
  2. Comment obtenir des moyens ?
  3. Comment évaluer les résultats ?
  4. Comment confronter ces résultats avec la réalité ?

Discussion générale

 

Bernard GUIBERT

Bernard insiste sur l'importance de la construction sociale et de l'application des normes.

Romain PARIS

A travers la question des marchés et de la hiérarchie des normes se pose de la question de savoir si le délitement de l'Etat est irréversible et inéluctable. Lorsqu'on oppose l'économie politique à la science économique on suggère qu'il faille remettre de l'ordre dans la hiérarchie des valeurs et subordonner les questions économiques aux questions éthiques.

Michel CAPRON

Michel CAPRON répond aux deux interpellations en rappelant que les normes sont fabriquées par consensus et donc à partir du fonctionnement de l'Etat. Il objecte à Bernard Guibert que les entreprises sont préoccupées par leur image et leur réputation. En conséquence même s'il n'y a pas de norme publique, il y a une certaine autorégulation des entreprises. Quelle est la fiabilité et l'efficacité de cette autorégulation ? Parallèlement à cela comment vérifier la sincérité, la vérité des audits et le sérieux des agrément et des certifications ?

Personnellement Michel ne souhaite pas le développement des normes qui répondent plus à des critères géopolitiques de règlement des rapports entre le Nord et le Sud qu’à un véritable souci éthique. D'autre part il insiste sur le fait que le développement des audits favorise la conquête des parts de marché par les grands cabinets d'audit américain.

Martial

Martial considère que dans la réalité les choses sont plus complexes. En particulier ces intérêts complexes et contradictoires nécessitent des arbitrages, ce qui annonce le retour nécessaire les interventions de l'Etat. Il faut peut-être relativiser la décennie qui a commencé en 1994. Il y a eu les déclarations de bonnes intentions, mais il a manqué les moyens de les mettre en oeuvre.

Il faut distinguer les normes, les référentiels et les règles qui appellent des informations pertinentes et les obligations de respecter ces règles. Souvent les conventions internationales oublient qu'il n'existe pas de police internationale pour les faire respecter.

Les organisations non-gouvernementales s'intéressent aux conditions de travail, plus que les syndicats. On ne peut pas pour autant dire qu'elles pallient les défaillances des Etats. Il s'agit de faire bouger la société civile. L'organisation internationale du travail (OIT) rechigne à intervenir pour des raisons politiques, dans la mesure où les pays en voie de développement préfèrent souvent la croissance économique à la justice sociale.

En ce qui concerne l'expérience des ISO 14 000, elle est assez décevante. En effet les informations pertinentes manquent où sont mauvaises et la législation n'est pas respectée.

En conclusion il est préférable qu’il y ait une intervention de l'Etat. Mais l'environnement est tellement complexe que cette intervention est délicate.

Alain LECOEUR

 

 

Le point de vue que veut apporter Alain est celui des militants qui ont fondé il y a plus de trente ans l'écologie politique. Ce mouvement s'est insurgé contre l'anarchie de la production capitaliste et la recherche de la productivité à tout prix.

C'était au moment de l’âge d’or du productivisme.

Depuis les Verts sont passés de la contestation en parole à la gestion des affaires et à la participation au gouvernement. Depuis les entreprises ont pris conscience que leur intérêt bien compris consiste à prendre en compte les deux autres composantes du développement durable (le social et l’écologique).

 

 

Les Verts auront à prendre langue avec les entreprises. Ils doivent leur demander de promouvoir la démocratie en leur sein, de respecter les normes sociales et les normes environnementales. Le facteur décisif de cette transformation et la relation des Verts avec les syndicats. Historiquement c’est la CFDT qui est la plus proche des Verts. Une autre manière de transformer le mode de production productiviste est d'agir sur la consommation avec les mouvements de consommateurs et avec les normes. Mais en ce qui concerne ces derniers moyens Alain est un peu sceptique. En effet il manque les moyens de traçabilité et de contrôle à chaque étape.

Bernard GUIBERT

Bernard relativise le jugement précédent dans la mesure où la participation aux affaires politiques ne signifie pas, loin de là, une participation intense à la gestion des entreprises. Deuxièmement la prise de conscience par les entreprises des contraintes environnementales apparaît jusqu'à présent comme relativement marginale pour ne pas dire dérisoire.

Néanmoins il rappelle combien, au moins sur le plan symbolique, l'adoption des lois Auroux en 1982 avait été très importante pour le développement de la démocratie à l'intérieur des entreprises.

Romain PARIS

Romain se demande où se situent les citoyens dans le triangle classique constitué par la société civile, les entreprises et les consommateurs. Il dénonce une confusion dans le langage qui pervertit les angles d'attaque par rapport à l'absence de démocratie à l'intérieur des entreprises. Il ne s'agit pas en effet, selon lui, de confondre la société civile et les citoyens. La société civile peut être passive. La sémantique commande de réserver l'adjectif « citoyens » aux acteurs des différentes luttes.

Alain LECOEUR

Le déclenchement de la prise de conscience s'est effectué à Rio en 1992. Au fond ce serait déjà très bien si en gardant la charte de Rio on l'appliquait tout simplement.

Dans la charte de Rio le problème est que le citoyen à l'intérieur de l'entreprise est représenté par des syndicats. Le droit des salariés (différents de celui de la citoyenneté) commande celui de l'environnement.

La promotion des produits éthiquement corrects développe un marché dont on ne peut pas affirmer qu'il est strictement anticapitaliste.

 

Martial

Martial doute de la démocratisation à l'intérieur des entreprises. Il pense que l'évaluation des politiques environnementales permet déjà d'avancer quelques transformations.

D'autre part il rappelle que dans les grandes entreprises le pourcentage du temps des dirigeants consacré aux contraintes environnementales et sociales représente moins de 1 %. Il faudrait donc un renversement fort de toutes ces tendances de fond.

Le ministère de l'environnement a publié sur Internet un certain nombre de bilans d'expérience sur les incitations positives et les informations nécessaires au développement des « plans environnement d'entreprises » (PEE).

Evelyne

Évelyne rappelle que la loi fondamentale du capitalisme est l'accumulation du capital, c'est-à-dire la loi du profit. Dans ces conditions comme les salariés sont pris dans des relations de subordination, ils ne peuvent pas faire valoir leur citoyenneté à l'intérieur de l'entreprise.

L'organisation mondiale du commerce régule des marchés. Mais le mode de production capitaliste n'est qu'une partie, très dynamique bien sûr, de l'économie de marché. Dans ces conditions, l'évaluation des politiques environnementales doit avoir comme cible totale l’ensemble des marchés et non pas les seules entreprises capitalistes. Mais les forces du marché dissolvent le lien social. Il est donc très important de développer un type d'entreprises qui soit différent de l'économie administrée et de l'économie capitaliste classique et qui ressoude la solidarité sociale, comme les entreprises à but social.