Il faut partir de la dépolitisation, de l'absence de participation politique. Nous avons essayé de montrer à quel point nous participions dans notre intimité à l'époque individualiste, dans nos représentations et nos pratiques, à quel point nous participions à l'impuissance politique, pas seulement les capitalistes, les libéraux. La société de marché est notre horizon actuel, l'absence de légitimité du politique ne lui permet pas encore d'orienter une économie qui perd pourtant sa légitimité de plus en plus désormais. Chez les écologistes même, les revendications pluralistes et identitaires se contentent de leur représentation et prennent le pas sur le souci d'un pouvoir efficace malgré l'urgence (comme en témoigne chez les Verts, le jeu des tendances ou le débat sur le marché des émissions de co2). La représentation de la pluralité est plus légitime qu'une intervention concrète toujours critiquable. La question du pouvoir que nous voudrions résoudre "à l'extérieur" se pose identiquement "à l'intérieur".
Ce n'est donc pas seulement le goût du pouvoir qui nous intoxiquerait mais plus encore un manque de pouvoir réel de changer les choses qui ne laisse plus que le pouvoir de nommer les personnes. C'est le manque de légitimité des objectifs politiques et de l'action publique qui réduit la politique à un jeu de places où seuls comptent les rapports de force numériques et où les victoires n'ont pas plus d'influence d'un résultat sportif. C'est donc cette contamination d'une délégitimation du politique qui impose la résignation, la pensée unique de la 3ème voie gestionnaire.
C'est là où il ne faudrait pas se tromper dans le diagnostic et bien comprendre le tiraillement interne des Verts qui ne peuvent intégrer le mode de fonctionnement que le système politique les contraint pourtant d'épouser à moins d'être éliminés du jeu. Car s'ils ne peuvent choisir c'est que le jeu politicien n'a plus de sens dans une Europe qui nous dépasse, il n'y a aucune énergie décidée à trancher. L'élection n'est plus le lieu du pouvoir. De l'autre côté, le mouvement social paraît plus légitime mais il ne peut déboucher au-delà de la protestation que par la politique.
On ne peut entériner le déclin du politique qu'il faut au contraire restaurer mais pour cela il faut être conscient de ce à quoi se réduit aujourd'hui la politique et ce qui devrait être sa responsabilité, les tâches qu'elle devrait accomplir, au niveau local comme au niveau global. Ce pourquoi la présence dans les institutions ne se justifie qu'à y porter un contenu. La détermination de l'objectif devrait être considéré comme l'essentiel, plus que la compétition électorale ; mais "l'idéologie est déconsidérée" et la compétition contamine tout parti politique. Impossible de discuter avec des rivaux, ce pour quoi des clubs de réflexions sont toujours indispensables, hors des lieux d'affrontement. C'est à quoi devraient répondre les Egep, grâce à leur nécessaire décalage et indépendance du parti, médiation entre la société et le parti.
Il ne s'agit donc pas de céder à une approche marketing de rentabilité à court terme, ni d'un manque de morale de nos camarades qu'il faudrait sermonner, mais de se donner les structures nécessaires à répondre aux défis du moment : d'une part aux contraintes du champ politique, des règles du jeu électif, et d'autre part à la construction d'objectifs qui soient considérés comme suffisamment légitime.
C'est la question que posent les Egep d'être délaissés
parce que ce ne sont pas des lieux de pouvoir alors que c'est là
que se construit l'alternative politique. Question de la non participation
comme si l'action avait besoin des cadres concurrentiels des élections.
Le problème du pouvoir n'est pas extérieur, il ne concerne
pas que les politiques, il est en nous, dans nos rapports de rivalité,
notre besoin de reconnaissance et de valorisation.