Le tournant identitaire et gnostique du nazi Heidegger

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Jean-Pierre Faye, L'expérience narrative et ses transformations, 2010

Jusqu'ici les philosophes n'ont fait qu'examiner les récits, la narration, le mythos à la lumière du logos, de la raison. N'est-il pas urgent d'examiner les "raisons" à la lumière des positions de narration ? Une simple "tache" narrative peut contribuer à renverser la position de la "pensée". p59

S'il y a bien un aveuglement consternant, c'est celui d'un grand nombre d'intellectuels envers le nazisme de Heidegger, qui n'aurait jamais dû faire le moindre doute pourtant, et qu'on peut assimiler à du négationnisme (il faut voir comme Guillaume Fagniez, dans le numéro de l'hiver 2012 de la revue Philosophie, tente de désamorcer, en dépit du contexte lourdement antisémite, la charge de Heidegger contre "l'Asiatique" dans une conférence italienne de 1936 "L'Europe et la philosophie allemande" et de le disculper entièrement par la méfiance qu'il suscite malgré tout chez les idéologues officiels alors qu'il est quand même l'ambassadeur du régime à cette occasion et membre du parti - certes du côté des SA qui avaient perdu la partie en 1934). Il faut bien dire que même ceux qui parlaient déjà, comme moi, du nazi Heidegger, avaient cependant tendance à atténuer sa responsabilité, en faisant tout au plus un "idiot utile" du régime, sa conception toute personnelle du national-socialisme étant supposée très éloignée de la vulgarité d'un racisme biologique et de toute politique d'extermination. C'était sans doute le croire plus bête qu'il n'était car on découvre depuis quelques années à quel point il adhérait à l'idéologie hitlérienne et tentait de l'intégrer à sa philosophie, d'en donner sa version du moins, certes critique mais avec le souci de se conformer à l'orthodoxie nazi, et pas seulement pour se protéger.

Ce qu'il appellera lui-même un tournant de sa philosophie, daté de son époque nazie, se révélera effectivement une véritable introduction du nazisme dans la philosophie, passant de l'angoisse de la mort trop individuelle à l'enracinement, l'identitaire, l'originaire, l'appartenance à un peuple mythique, le retour d'une religiosité vaguement mystique et la réduction de l'histoire à une décadence où nous perdrions notre humanité et notre âme à cause de l'empire de la technique et de la raison. On ne peut dire que ce soit un tournant nazi car il était encore plus nazi avant mais bien l'introduction de son nazisme dans sa philosophie (devenue en même temps critique du nazisme réel, un peu comme un trotskiste critiquant Staline). On ne peut dire non plus que ces thèmes soient étrangers à notre actualité, leur résurgence témoignant plutôt qu'ils n'ont pas fait l'objet d'assez d'attention de la part de nos penseurs.

Il faut tout de suite préciser que cette faute originelle ne suffit pas à l'annulation de tout ce que Heidegger a pu apporter à la philosophie et qui est considérable mais c'est justement le scandale, exigeant d'y penser à deux fois et qui ne peut laisser indemne ses apports justement. Le point sur lequel je voudrais insister et qui rapproche l'existentialisme d'une sagesse plus que d'une philo-sophie avec le thème de l'aliénation, c'est la complicité entre authenticité et extermination. De quoi choquer, certes, les âmes sensibles qui trouveront cela trop exagéré pour leurs intentions si pures mais qu'on ne peut que constater chez les critiques de la technique comme de l'aliénation ravalant facilement les autres à des automates ou des bêtes en troupeau, délestés de toute humanité. La recherche de l'origine comme de leur propre identité en aura décidément ébloui beaucoup trop par ses promesses d'inouï (et il faut bien dire que ses analyses existentiales pouvaient être éblouissantes, tout comme sa lecture du Sophiste par exemple, et ce qu'il peut avoir de plus faux reste un moment de la vérité comme sujet qui se dévoile dans ses errements mêmes, impossible à expulser de l'histoire de la philosophie, pas plus qu'on ne peut expulser le nazisme de l'Histoire qui ne renvoie pas à une vérité de l'origine mais au compte de ses impasses et illusions).

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L’Europe conquise par les agriculteurs espagnols

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- L'Europe conquise par les agriculteurs espagnols

Néolithique européen

Bien que l'échantillon soit trop faible, il se pourrait qu'on retrouve dans 40% des Européens les gènes mitochondriaux d'une population ayant peuplé la péninsule ibérique entre 6100 et 4200 ans.

Comme les Basques sont la population la plus ancienne d'Europe et qu'ils sont apparentés aux Berbères, on peut supposer que la colonisation par les agriculteurs est venue principalement de là même si la carte que j'ai trouvé indique bien l'existence de plusieurs foyers. Il se pourrait que la brusque désertification du Sahara il y a 4900 ans dont parle la brève précédente y soit pour quelque chose ? On peut penser que la néolithisation se fait la plupart du temps par remplacement des anciens chasseurs-cueilleurs nomades mais sans doute plus par mélange avec les villages de pêcheurs déjà sédentarisés (plus "civilisés").

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Des métamatériaux optiques avec des nano-antennes

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- Des métamatériaux optiques avec des nano-antennes

Ces chercheurs ont mis au point une nouvelle façon de manipuler la lumière en utilisant des antennes optiques à l'échelle nanométrique. Ce sont effectivement des nano-antennes radios, pliés en V pour créer ce qu'on appelle un "résonateur optique". En recouvrant une surface avec un certain nombre de ces résonateurs, courbés sous des angles différents, on crée ce qu'on appelle une metasurface à partir de laquelle on peut obtenir de la lumière à peu près tout ce qu'on veut.

C'est une toute nouvelle classe d'optiques, dépourvue des distorsions communes à leurs homologues conventionnels, et qui seraient faciles à fabriquer par des méthodes d'impression industrielles.

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L’exploitation de l’hydrogène naturel

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- L'exploitation de l'hydrogène naturel

Il y a trois ans environ, les chercheurs de l’Institut ont été contactés par une équipe russe : des émanations naturelles d’hydrogène avaient été détectées au sein des plaines de Russie. Or, traditionnellement les spécialistes ont toujours considéré que le gaz d’hydrogène, que l’on trouve dans l’atmosphère, ne pouvait pas se former dans le sous-sol.

L’hydrogène naturel semble cumuler tous les atouts : sa combustion ne libère pas de CO2. Sa production dans le sous-sol se fait de manière continue, contrairement aux réservoirs d’hydrocarbures qui s’épuisent au cours du temps. Son exploitation ne nécessite pas de forage profond et, enfin, sa répartition semble équitable entre les continents.

C'est quand même incroyable qu'on découvre seulement maintenant qu'il y a des sources naturelles d'hydrogène ! A signaler aussi les perspectives du stockage solide de l'hydrogène dans des hydrures de magnésium. Voilà 2 obstacles à l'utilisation massive de l'hydrogène levés coup sur coup : sa production et son stockage !

Sciences et Avenir a mis cette incroyable annonce en couverture, qualifiée de nouvel eldorado, et précise qu'une des utilisation immédiate serait de mélanger 20% d'hydrogène au méthane, ce nouveau carburant moins polluant étant appelé Hythane et pouvant être utilisé comme le gaz naturel. Reste qu'il n'est pas complètement sûr que les fuites d'hydrogène soient si bonnes que ça, faisant baisser le niveau d'oxygène sans doute, en renforçant la couverture nuageuse ?

Voir aussi l'article de René Trégouët sur RTflash.

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