La responsabilité du climat

(La Haye - novembre 2000)
Prix du pétrole et économies d'énergie
Commentaire d'Alternatives économiques : Cependant taxer le carburant, en l'absence d'alternative à la route pénaliserait l'économie sans bienfait pour l'environnement. "La question de fond est celle des décisions d'urbanisme ou d'aménagement du territoire", analyse Hélène Gassin, en charge du dossier climatique chez Greenpeace. Alternatives économiques mai 2000
 

 

Synthèse de l'inter-commissions sur le climat et le marché des permis d'émission, réunie le dimanche 21 mai 2000 en présence de Pierre Radanne (Président de l'ADEME).
Jean Zin

Les Enjeux de La Haye

1/ les gaz à effet de serre, gaz carbonique, méthane, oxyde d'azote..; ne sont pas à proprement parler des polluants. S'ils n'existaient pas à l'état naturel, la température de la terre serait de -18° et nous ne serions pas là. C'est donc leur excès qui est en cause.

2/ L'atmosphère est mondiale par définition et, au niveau du climat ce qui compte c'est la diminution globale des émissions de gaz, que ce soit par des investissements extérieurs, dans l'industrie lourde des pays de l'est par exemple, ou par des mesures domestiques d'amélioration d'usines déjà très performantes. Il n'est donc pas choquant de prévoir des échanges de permis d'émission, afin de permettre à ceux qui tiennent plus rapidement leurs objectifs de valoriser leurs efforts, tout en pénalisant les pays qui n'en font pas suffisamment. Le mot clef est l'efficacité au niveau mondial.

3/ Mais les USA émettent à eux seuls près du tiers des gaz à effet de serre des pays de l'annexe 1 (pays industrialisés qui sont concernés par les objectifs de réduction). Il est donc indispensable, dans une optique de convergence à très long terme, que ceux qui émettent le plus fassent le plus d'effort dès maintenant. Il faut absolument que les USA réduisent au plus vite leur consommation énergétique. Le mot clef est l'équité.

4/ Les USA y sont les plus réticents et ce sont eux qui plaident pour que les instruments de flexibilité de KYOTO ne soient pas seulement des mesures additionnelles, mais que la quasi totalité de leurs engagements de réduction puissent être faite ailleurs que chez eux.

5/ De plus, l'année de référence de KYOTO est 1990. La Russie s'est engagée à stabiliser ses émissions au niveau de cette année alors que depuis, celles-ci se sont effondrées en même temps que son économie. La Russie dispose donc d'une quantité énorme de droits qu'elle pourrait vendre sur un marché sans que la moindre réduction n'ait physiquement lieu au niveau mondial. Pire, les USA et la Russie pourraient faire une "bulle" pour tenir leurs engagements en commun (comme l'Europe) et les USA n'auraient rien à faire.

6/ KYOTO pourrait enfin ne jamais entrer en vigueur car il faut que la quasi totalité des pays de l'annexe 1 le ratifient si les USA refusent de le signer. L'enjeu de la négociation est donc bien d'obtenir un véritable engagement des USA, en évitant que les mécanismes de flexibilité ne leur serve d'échappatoire.

7/ Pour s'engager vers une véritable maîtrise du climat, d'autres décisions de cette conférence seront décisives, notamment dans la détermination des contrôles et sanctions. A ce jour, rien n'est prévu pour contrôler vraiment quelles seront les réductions. Il n'est pas encore prévu de sanctions en cas de non-réalisation. Enfin, le nucléaire fait un lobby intensif pour que des centrales soient prises en compte comme réduction de GES (Gaz à Effet de Serre).

8/ L'essentiel est de comprendre que les enjeux financiers sont considérables. Pour la France, on peut évaluer les masses financières concernées à plusieurs fois l'investissement de la filière nucléaire.
 

Motion :

A) L'urgence d'un développement soutenable

Comme en témoignent les dernières tempêtes, les perturbations climatiques liées à l'accroissement des gaz à effet de serre provoquent des désastres humains, économiques et écologiques de plus en plus graves, surtout pour les pays du Sud.

Les Verts réaffirment l'urgence de réduire rapidement nos émissions de gaz carbonique et rappellent la nécessité de parvenir à long terme à une convergence des niveaux d'émission par habitant, ce qui exige la mise en place sans délai de politiques nationales ambitieuses d'économie d'énergie dans les pays développés (ainsi que, pour l'Europe, une coordination démocratique de ces politiques nationales).

Pour les écologistes, l'ampleur des changements nécessaires ne pourra se faire sans une évolution profonde des mentalités permettant une réorientation massive des investissements ainsi que des modes de consommation et de production, dans le sens d'un véritable développement soutenable.

B) La négociation de La Haye : des principes clairs, pas d'échappatoires

Le protocole de Kyoto reste très insuffisant et inégalitaire mais, quelles que soient ses imperfections, il constitue un premier pas important que les Verts doivent soutenir et améliorer. Aussi, face aux propositions américaines pour les prochaines négociations de La Haye sur le climat, Les Verts soutiennent la campagne des ONG regroupés dans le Climate Action Network (CAN), notamment pour empêcher que la réduction planifiée des plafonds d'émissions (les quotas, les QELRO's), assortis de mécanismes additionnels de flexibilité, ne soit dénaturée en un véritable "marché des droits à polluer" ne servant plus que d'échappatoire.

Nous devons obtenir qu'au niveau international, l'essentiel des efforts auxquels les divers États se sont engagés, soient obtenus par des mesures domestiques, limitant les mécanismes de flexibilité aux adaptations économiques sous le contrôle d'une agence internationale, dotée de véritables moyens d'intervention, par laquelle devront passer les transactions. Le recours aux échanges entre États (marché des quotas, MDP ou application conjointe) n'est acceptable qu'à condition
- d'être complémentaire et limité (moins de 20%)
- de faire l'objet d'un contrôle strict, avec un accord international sur les types de projet qui peuvent être pris en compte (exclusion du nucléaire, et dans certains cas des très grands barrages)
- de comporter des sanctions en cas de dépassement

En ce qui concerne le "Mécanisme de Développement Propre", il doit être amélioré afin de parvenir à l'objectif de transfert de technologie vers les pays du sud, et surtout pas à les transformer en "puits de carbone", par reforestation massive par exemple, pour éponger les émissions du nord.

C) Les mesures à prendre : une politique énergétique ambitieuse

Les Verts demandent la mise en place immédiate de mesures nationales (et européennes) ambitieuses coordonnées par une agence européenne fédérale disposant de moyens d'intervention sur les "marchés d'objectifs de réduction" assez puissants pour garantir un prix plancher ainsi qu'une décroissance et une convergence rapides des plafonds d'émission nationaux.

Il faudra mettre en oeuvre une véritable planification énergétique pour l'Europe au service du développement durable, en particulier dans sa dimension éthique et sociale: justice de la redistribution des taxes, des prix des services collectifs entre les classes sociales et les générations, équité dans la consommation des "biens publics" globaux (parmi lesquels figure le climat et les paysages), équité des rapports de coopération avec les Pays en Voie de Développement. Un soin particulier sera porté à la planification et à l'équité des échanges avec les PECO.

Pour cela  nous devons utiliser la multiplicité des instruments disponibles en les adaptant aux spécificités de chaque secteur : normes, aides fiscales et hausse du prix de l'énergie pour l'habitat et le tertiaire, bridage des moteurs, taxation des carburants, en particulier du kérozène et investissements ferroviaires européens pour les transports de personnes ou de marchandises, développement des transports en commun en zone urbaine, taxe sur les consommations d'énergie harmonisée à l'échelle européenne ou permis négociables pour l'industrie, enfin interdictions des gaz fluorés là où leur usage n'est pas indispensable et mécanismes de soutien au développement des énergies renouvelables. Nous devons nous opposer par contre au nucléaire, aux grands barrages et à toute mesure engendrant de nouveaux problèmes écologiques.

L'essentiel est de mettre en place dans chaque secteur des politiques globales aux objectifs cohérents et vérifiables, sans oublier les compensations nécessaires pour ne pas pénaliser les plus pauvres en aggravant les inégalités, ce que nous ne pouvons absolument pas accepter.

Les Verts

- Demandent la mise en place de programmes européens ambitieux, en particulier dans le domaine des transports dont les consommations augmentent considérablement (transferts route-rail, ferroutage, transports en commun urbains).
- Demandent que les déficits entraînés par ces programmes ne soient pas pris en compte dans la limitation du Pacte de stabilité d'Amsterdam (3%) et soient financés à taux quasi-nul par la Banque Centrale Européenne.

- Dénoncent dans le plan français de lutte contre l'effet de serre le privilège exorbitant des transports qui voient leurs émissions croître de 25% à l'horizon 2010 alors que tous les autres secteurs font des efforts.
- Insistent pour que la directive européenne sur les énergies renouvelables soit adoptée rapidement et mise en oeuvre en France, en particulier pour l'électricité, ce qui exige des objectifs plus ambitieux que ceux inscrits dans le plan français de lutte contre l'effet de serre.