CHICHE!

ARGUMENTAIRE paru dans le Court-Bouillon, notre bulletin interne :

Pourquoi nous demandons un Revenu Minimum d'Autonomie ?

 
Nous défendons l'idée que tout être humain a droit a des moyens de
subsistance, à un minimum décent : idée qui peut paraître utopique, dans une
société d'abondance où les pauvres restent, eux aussi, abondants.
Mais un tel état de fait montre que le premier problème de notre économie
n'est pas tant la production des richesses que leur redistribution : alors,
pourquoi ne pas dissocier complètement travail et revenu, et pas seulement
pour les rentiers ?

1) Constat d'insuffisance du RMI :
En France, l'objectif de permettre à tous de bénéficier de la richesse
nationale et d'assurer une couverture sociale n'est pas nouveau. Ce rôle est
essentiellement rempli, pour les plus démunis, par le RMI. Mais pour toucher
le RMI, il faut :
 - remplir les conditions de ressources
 - être français ou résident légal depuis au moins 3 ans
 - disposer d'une adresse postale
 - avoir plus de 25 ans
 - ne pas être étudiant
 - rechercher un emploi
 - participer à la démarche d'insertion proposée par les pouvoirs publics.

Les quatre derniers points sont loin d'être sans conséquences...

1.1) Aide sociale ou contrôle social ?
L'obligation d'insertion et de recherche d'emploi se traduit par une dérive
du RMI de l'aide sociale vers... le contrôle social. En témoignent :

* Les Contrats d'Exploitation Sociale
Un exemple parmi d'autres : Eduardo, 36 ans, est artiste et RMIste. Ne
trouvant pas de travail dans le domaine culturel qui l'intéresse, on lui
propose un CES de plomberie. Il refuse : on lui supprime le RMI. Aurait-il
dû accepter d'être sous-payé pour un travail qu'il n'a pas choisi ?

* Les dérives vers le travail forcé
A Perpignan, le maire (PS), Christian Bourquin, a une drôle de conception du
retour des RMIstes à la vie active. Son projet : les obliger à quelques
heures de travail d'intérêt général par semaine. Et " il y aura des
possibilités de sanction parce qu'elles existent déjà dans les textes " (La
Dépêche du Midi, 20/06/98).

* L'impossibilité de dire non...
 Le RMI ne s'inscrit pas dans une démarche de réinsertion librement
consentie ; il s'appuie sur l'impossibilité de dire non quand on est dans la
dèche. Quitte à faire accepter n'importe quoi, au déni de toutes les
avancées obtenues en droit du travail français. Bah, ça prépare à la
"flexibilité" nécessaire sur le marché de l'emploi, non ?

1.2) Études et RMI : quelle reconversion ?
S'agit-il d'ailleurs vraiment de préparer le RMIste à se réinsérer ? Si dur
qu'il soit de le dire, beaucoup de chômeurs longue durée sont de fait
inadaptés au marché de l'emploi. Quand on a plus exercé depuis longtemps un
métier que l'évolution technologique a déjà rendu obsolète, allez donc
trouver du travail. Mais face à ce constat, le RMI ne donne aucunement les
moyens d'un nouveau départ : celui qui décide alors de reprendre à zéro des
études... perd immédiatement son RMI !

1.3) Tremplin ou trappe de pauvreté ?
Même s'il joue un rôle de minimum social indispensable dans bien des
situations, le RMI a ainsi tendance à devenir aussi, pour ses titulaires, un
piège, une trappe de pauvreté. Revenu minimum acheteur de paix sociale, le
RMI n'insère pas beaucoup...

1.4) Un manque criant : les 18/25 ans
Enfin, l'étrange condition d'âge (plus de 25 ans) laisse sur le carreau bon
nombre de jeunes en situation de précarité parfois dramatique. C'est pour le
moins illogique : avant 18 ans, les jeunes " rapportent " du RMI à leurs
parents (ainsi que des allocations familiales jusqu'à 20 ans), après 25 ans
ils ont droit au RMI ; entre les deux, rien.

Pourtant, le taux de chômage des 18-25 ans n'est jamais tombé en dessous de
19% depuis 10 ans, et le taux de pauvreté des 16-25 ans est passé de 11 à
18% depuis le début des années 90 (Le Monde du 8/1/97, d'après un rapport du
CSERC).

Une extension des minima sociaux vers les jeunes s'impose donc...

2) Revenu et travail : ce qu'on ne dit pas (assez)...
Le plein emploi, c'est fini et bien fini. Après 25 ans de chômage de masse,
il n'est plus question de parler de "crise", mais d'un fonctionnement
"normal" (bien qu'aberrant) de la société capitaliste. Alors, il est
temps de revenir sur quelques éléments de base.

2.1) L'emploi n'est pas une fin en soi
D'abord, rappelons que le chômage ne signifie pas sous-production, bien au
contraire. Il y a de plus en plus de richesses, produites par de moins en
moins de gens. Alors, pourquoi s'acharner sur le "problème de l'emploi" ?

A quoi servent les emplois : à créer aussi bien des bombes que des yaourts,
à vendre des frigos aux esquimaux (de la pub au marketing en passant par les
techniques de ventes, ¾ des emplois consistent à refourguer ce qu'1/4
seulement des personnes ont fabriqué) ou à faire le clown pour que les
sourires n'appartiennent pas à la préhistoire, à polluer (si on travaille
dans une usine pétrochimique) ou à dépolluer (si on travaille dans une
association écologiste), ... bref à rendre la vie meilleure ou pire.

Parler d'emploi (sans plus de précision), c'est oublier que l'emploi est un
moyen, et non une fin. Et que l'important n'est pas de travailler parce que
nous ne savons plus quoi faire de nos journées, mais de faire quelque chose
qui améliore les journées de tous.

2.2) Toute activité n'est pas rémunérable par le marché du travail
En outre, certaines activités fort utiles ne sont pas considérées comme
travail, parce qu'elles ne sont pas payées, ni motivées par le profit ou les
contraintes étatiques.  C'est ce qu'on appelle le "tiers-secteur" :
associations, activités citoyennes, nouveaux rapports sociaux (réseaux d
'échange de savoirs), économie solidaire (systèmes d'échanges locaux,
commerce équitable avec le sud) etc.

Le bénévolat, ça ne paie pas !
 

3) Études : quel droit à l'éducation ?
F. Roosevelt disait : "si vous trouvez que l'éducation coûte trop cher,
essayez l'ignorance". L'éducation est peut-être l'activité utile mais non
rémunératrice par excellence, et il est de l'intérêt de tous que ce soit un
droit pour tous. Mais pour que l'école ne soit un simple moyen de reproduire
la pyramide sociale, il est nécessaire d'en faciliter l'accès aux plus
démunis.

3.1) Bourses : les mains liées
En France, le choix a jusqu'ici toujours été de favoriser un système de
bourses d 'études. S'il est compréhensible de vouloir s'assurer que
l'étudiant boursier étudie sérieusement, la rigueur actuelle en la matière
amène des effets pervers non négligeables :
- pas de droit à l'erreur pour les étudiants défavorisés : rater une année
signifie la fin de la bourse. Alors, mieux vaut ne pas tomber malade ou
perdre un proche en période d'examens...
- impossibilité de changer de filière : alors qu'en première année de fac,
un nombre important d'étudiant se réorientent, cela est de fait interdit aux
boursiers.

Et comme il n'y a pas de RMI avant 25 ans, le boursier travaille sans filet
: on peut ainsi croiser dans le métro parisien un licencié de mathématiques
de 24 ans qui fait la manche...

C'est pourquoi l'idée d'un Revenu Minimum Étudiant (RME) a fait son chemin,
défendue à ce jour par l'UNEF-ID, la LCR, le PRG.

3.2) Étudiants, précaires et frites...
La précarité étudiante signifie aussi que nombre d'étudiants sont à la merci
d'exploiteurs comme McDo, PizzaHut & Co. Et alimentent une population
sous-payée, sans droits syndicaux réels, taillable et corvéable à merci, ce
qui tire vers le bas les droits de tous.

3.3) Le changement de voie : un droit pour toute la vie
Enfin, , le droit à l'éducation est un droit pour toute la vie. Pourtant,
nous avons déjà dit que les RMIstes ne pouvaient être étudiants. Les bourses
sont réservées aux jeunes, donc interdites aux RMIstes, qui ont plus de 25
ans. Alors, la culture et l'éducation sont-elles ouvertes à tous, ou le
privilège d'une élite ?

4) L'autonomie c'est le droit de choisir
Pas de choix si on ne peut pas dire non : or dire non (à un patron, un
représentant de l'État, ou un mafieux qui "a la solution"), lorsqu'on est
au bord de la pauvreté et qu'on ne peut se reposer sur des solidarités
familiales (ou autres) suffisantes, c'est difficile.

C'est pourquoi nous pensons qu'il est essentiel d'accorder à tous un revenu
minimum garanti, inconditionnel, qui constitue ainsi un filet en cas de coup dur.

4.1) Le RMA c'est quoi ?
Ce que nous proposons, c'est donc un " RMI étendu ", appelé Revenu Minimum
d'Autonomie, accordé :
- à partir de 18 ans.
- sous condition de faibles ressources (comme le RMI) et de déclaration
fiscale autonome.

Plus d'obligation de chercher du travail, plus d'interdiction d'étudier, un
âge minimum abaissé. Mais ça change beaucoup de choses...
 
 

4.2) Un revenu garanti, c'est la possibilité de vivre debout
Cela signifie sortir d'une infantilisation des exclus ("si tu es sage, tu
auras des aides sociales"). Cela signifie leur laisser le choix, eux-mêmes,
de la vie qu'il veulent et de leur parcours d'insertion. Cela signifie leur
faire confiance, leur rendre leur dignité sans les culpabiliser.

4.3) Les 18-25 ans : conditions de ressources et rattachement fiscal
Cela change surtout beaucoup pour les jeunes. On nous dira : le RMA
financera les études (ou l'oisiveté) des gosses de riches. Eh non ! Demander
une déclaration fiscale autonome implique que les éventuelles aides des
parents soient déduites du montant de l'allocation versée. Pour les
étudiants, on retrouve donc un RME pour les démunis, remplissant le rôle
social des bourses. Et pour les jeunes précaires, on apporte enfin la
couverture sociale qui s'impose.

5) L'autonomie, c'est pas cher et ça peut rapporter gros
Pour autant que cette mesure semble simple, ne nous y trompons pas : elle
impulse un vrai choix de société, une rupture dans les mentalités.

5.1) Droit à la paresse, droit à l'éducation
Le RMA ne doit pas être perçu comme un acte de charité, mais comme une
redistribution de la richesse en phase avec la mutation du travail en cours.
Cette mesure accompagne et facilite la réduction du temps de travail. Cette
réduction, en effet, ne peut se limiter  à une réduction de la limite
hebdomadaire de travail légal, ou à un abaissement de l'âge de la retraite
(absurde vu la démographie française). Il s'agit de reconnaître la
possibilité et l'utilité d'un temps choisi, tout au long de la vie : années
sabbatiques, périodes de formation continue...

C'est, dans le sens positif d'un épanouissement ouvert à tous, un droit à la
paresse qui s'ouvre ainsi. Le droit pour tous d'avoir des loisirs, de
s'éduquer, de faire le point sur sa vie ; bref comme disait Voltaire : "cultivons notre jardin".

5.2) Apprendre à vivre chichement : vers une société libérée du consumérisme
et du productivisme
C'est reconnaître enfin qu'il faut travailler pour vivre, et non pas vivre
pour travailler. C'est aller vers un choix de vie radicalement opposé à la
logique du "toujours plus" : plus d'argent, plus de gadgets (téléphone
portable, grosse voiture, climatisation...), plus d'emplois... et moins de
temps pour vivre, et surtout vivre ensemble.

Ce revenu n'est seulement un acte de solidarité pour les plus pauvres :
parce qu'il les aide à résister aux pressions, à la "flexibilisation du
monde du travail", et à suivre d'autres voies que celles des entreprises,
il nous apporte à tous.

Dans un monde du paraître généralisé, le RMA ouvre la voie à des gens qui
vivent heureux chichement.

Chiche !



DROIT AU REVENU POUR LES MOINS DE 25 ANS !

1. CE QUI EST INTOLÉRABLE

1.1. Les 18-25 ans ont la citoyenneté politique (ils votent) mais pas la
pleine citoyenneté sociale.

En refusant aux moins de 25 ans le droit au RMI, on refuse de les
considérer comme des personnes autonomes alors qu'on leur accorde le droit
de vote. C'est donc d'abord une question de principe : au nom de quoi les
18-25 ans sont-ils maintenus dans la dépendance de leurs parents ? Les
partisans de l'interdiction du RMI aux moins de 25 ans mettent en avant
l'obligation alimentaire prévue par le Code civil : en se basant sur ce
droit, les jeunes peuvent, légalement, obliger leurs parents à leur verser
une aide financière. Cette réponse est insatisfaisante pour deux raisons :

1) l'obligation alimentaire prévue par le Code civil joue quel que soit
l'âge et dans les deux sens (des ascendants vers les descendants mais aussi
réciproquement) et pourtant les plus de 65 ans bénéficient du minimum
vieillesse, beaucoup plus favorable que le RMI (3 500 F par mois), quel que
soit le revenu de leurs descendants.

2) Faire un procès à ses parents,
c'est psychologiquement pour le moins difficile et matériellement compliqué
(délai, coût des procédures, connaissances nécessaires), quand on est sans
ressources.

Enfin, parmi les pays qui ont mis en place un revenu minimum, la France est
l'un des seuls qui ne l'accorde pas aux moins de 25 ans : ailleurs, ce
droit commence à la majorité civile, même si la prestation est parfois d'un
niveau inférieur.


1.2. Les moins de 25 ans sont de plus en plus touchés par la pauvreté et
ils le sont plus que les autres classes d'âge.

86 % des chômeurs âgés de 15 à 20 ans et 73 % de ceux âgés de 20 à 25 ans
ne perçoivent pas d'indemnité de chômage, ni l'allocation spécifique de
solidarité, faute d'avoir pu travailler suffisamment auparavant. Résultat :

- pour ceux qui ne peuvent compter sur l'aide familiale, le chômage débouche
directement sur la pauvreté :

- les moins de 25 ans sont la seule classe d'âge dont le revenu ait baissé
depuis le milieu des années 1980 ;
- le taux de pauvreté des ménages de moins de 30 ans est passé de 11 à 18 %
entre 1989 et 1994  ;
- les moins de 25 ans sont sur-représentés parmi les pauvres accueillis par
les associations menant des activités caritatives : Secours catholique ,
Comité des sans-logis , Médecins du monde ... Pourtant, ils sont moins
connus, donc moins facilement touchés, que les autres pauvres par les
services sociaux et les associations.


1.3. Cette "armée industrielle de réserve" tire les salaires des jeunes
vers le bas.

Le salaire des 21-25 ans était, en 1984, égal à 58 % de celui des 51-60
ans. En 1994, il ne représentait plus que 53 % de ce dernier. Même
évolution pour le salaire des 18-20 ans : de 44 % à 35 % du salaire des
51-60 ans. A l'inverse, sur la même période, le salaire des plus de 25 ans
est resté stable relativement à celui des 51-60 ans. Mais ces derniers
bénéficient du RMI et souvent des allocations chômage !

1.4. Les dispositifs d'insertion des jeunes ont tous échoué.

CES, SIVP, Exo-jeunes... Plus de 25 dispositifs d'insertion des jeunes se
sont succédé depuis 1976, sans avoir plus de succès l'un que l'autre.
 Les travaux micro-économiques qui étudient le devenir des bénéficiaires
des dispositifs d'insertion après leur passage par ces dispositifs dressent
un tableau cataclysmique. Ainsi, seuls 26 % des bénéficiaires d'un CES
trouvent un emploi dans les trois mois suivant leur sortie (et seuls 7 % un
CDI !).

Ces dispositifs sont pourtant mis en avant par les adversaires de
l'extension du RMI aux moins de 25 ans. Ainsi, Bernard Kouchner, répondant
en décembre dernier à une question du député Vert Jean-Michel Marchand, a
mis en avant le programme TRACE, créé par la loi contre l'exclusion. Il
s'agit d'un dispositif de suivi individualisé qui doit concerner, à terme,
60 000 jeunes, alors qu'il y a au moins 600 000 chômeurs de moins de 25
ans. Surtout, les jeunes suivis par TRACE se verront proposer des contrats
de quelques mois, CES ou stages payés au maximum 2 500 F, qui plus est sans
aucune garantie de revenu entre deux contrats.

Il faut bien sûr lutter contre le chômage des jeunes, mais ça ne passe pas
par des contrats aidés spécifiques aux jeunes, qui, même s'ils
fonctionnaient, seraient dans la logique "papa, j'ai trouvé un emploi, le
tien !". Les solutions au chômage des jeunes passent par des mesures
globales contre le chômage : 32 heures, réforme fiscale, tiers secteur,
choix de solutions techniques et organisationnelles intensives en travail,
relance sélective, baisse des taux d'intérêt...

1.5. Trop d'étudiants sont obligés de travailler pour payer leurs études,
ou de les arrêter par manque d'argent.

Le niveau des bourses d'étude ne permet pas de vivre sans complément, aide
familiale, salaire ou revenu illégal (deal...). De plus, la rigueur
actuelle en matière de contrôle des boursiers amène des effets pervers non
négligeables :

- pas de droit à l'erreur pour les étudiants défavorisés : rater une année
signifie la fin de la bourse. Alors, mieux vaut ne pas tomber malade ou
perdre un proche en période d'examens...
- impossibilité de changer de filière : alors qu'en première année de fac,
un nombre important d'étudiants se réorientent, cela est de fait interdit
aux boursiers.

Et comme il n'y a pas de RMI avant 25 ans, le boursier travaille sans filet :
on peut ainsi croiser dans le métro parisien un licencié de mathématiques
de 24 ans qui fait la manche parce qu'il a raté quelques valeurs de
maîtrise...

Surtout, les bourses sont accordées sous condition de revenu des parents :
quand ces derniers ne veulent pas payer les études de leurs enfants, ces
derniers n'ont d'autre choix que de travailler.

Du coup, nombre d'étudiants sont obligés de trimer dans des métiers sans
intérêt : fast-foods, télémarketing..., où ils alimentent une population
sous-payée, sans droits syndicaux réels, taillable et corvéable à
 merci, ce qui tire vers le bas les droits de tous. De plus, s'il est
possible de poursuivre une filière en lettres ou sciences sociales tout en travaillant,
c'est à peu près impossible en sciences de la nature, vu le nombre d'heures
hebdomadaire, et complètement impossible en prépa, en grande école, en DUT
ou BTS. Du coup, des jeunes issus de milieu modeste, titulaires d'un bac
technique, qui auraient pu réussir dans une filière concrète et encadrée
comme un BTS ou DUT, sont contraints de faire une fac, avec des chances de
succès très faibles (cf. le taux d'échec en DEUG, proche de 50 %).

C'est pourquoi l'idée d'une allocation d'études sous conditions de
ressource du jeune lui-même, et pas de ses parents, défendue depuis les
années 60 par l'UNEF, est aujourd'hui reprise par l'UNEF-ID et la FAGE.

1.6. Il est interdit d'être à la fois RMIste et étudiant.

On exige des RMIstes qu'ils s'insèrent (obligation de signer un contrat
d'insertion), mais on refuse qu'ils poursuivent leurs études. Pourtant,
interdire à un jeune RMIste de poursuivre des études n'est sans doute pas
le meilleur moyen de lui permettre de s'insérer !

De plus, rendre effective cette interdiction (aujourd'hui non contrôlée)
suppose de croiser les fichiers des établissements scolaires avec ceux du
RMI, par le numéro de sécurité sociale, avec les risques qu'on imagine en
terme de droits de l'homme.

2. PROPOSITIONS

2.1. Accorder tout de suite le RMI aux 18-25 ans.

Cette mesure était inscrite dans les accords Verts/PS et PS/PCF. De plus en
plus de voix s'élèvent pour la réclamer (cf. le débat à l'occasion des 10
ans du RMI), y compris Jean-Michel Belorgey, l'auteur de la loi sur le RMI.

2.2. Pour un revenu d'autonomie.

A plus long terme, il faut créer un revenu garanti ouvert à tous les
adultes dont les ressources propres sont inférieures à un certain seuil,
qu'ils soient ou non en formation. Ce revenu, nous proposons de l'appeler
"revenu d'autonomie". Par ce terme, nous insistons sur la nécessité de
permettre aux jeunes de gagner leur autonomie par rapport à leurs parents,
aux emplois précaires et aux contrôles abusifs des services sociaux.
Cette revendication s'adresse en priorité aux moins de 25 ans, qu'ils
soient scolarisés ou non et qu'ils soient Français ou non, mais nous
souhaitons que ce droit soit également attribué à l'ensemble des personnes
résidant en France, sans distinction d'âge. En outre, une harmonisation
européenne doit être mise en place, en particulier afin de faciliter les
échanges susceptibles de favoriser l'émergence d'une citoyenneté européenne.

Pour permettre un réel choix, ce revenu individuel doit être d'au moins
3500 F par mois, ce qui correspond au "seuil de pauvreté". Il sera ouvert
aux jeunes dont les ressources propres sont inférieures à un certain seuil.
Pour en profiter, les jeunes devront faire une déclaration fiscale
autonome. Les économies faites par les administrations publiques sur le
quotient familial, les allocations familiales et les déductions fiscales
versées par les parents à leurs enfants financeront une partie du revenu
d'autonomie. Ce dernier ouvrira droit à une couverture sociale et à l'accès
gratuit à divers services collectifs (médiathèques, musées...) nécessaires
à l'insertion sociale.

En faisant converger la vieille revendication d'une allocation d'études
pour tous avec celle de l'extension du RMI aux moins de 25 ans, le "Revenu
d'autonomie" peut devenir une revendication unifiante pour la jeunesse.

Philippe Quirion




[Revenus]