Kojève et l’illusion de la fin réconciliatrice

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Kojève a été très important en France pour la compréhension de la Phénoménologie de l'Esprit de Hegel dont il a donné une lecture limpide... mais qui en était une réinterprétation marxisante, anthropologique, matérialiste, assez différente de l'original sur de nombreux points (Etat universel, fin de l'histoire, rejet de la dialectique de la nature). Ses innovations (notamment le désir de désir) étaient cependant très éclairantes, parfois trop, constituant en fait une dogmatisation du système hégélien, transformé en système clos, définitif, et supposé ouvrir sur une prétendue sagesse.

On pouvait y voir cependant une mise à jour du système hégélien au temps du communisme triomphant (ayant donc perdu sa pertinence), la Révolution soviétique redoublant alors l'élan de la Révolution française et Kojève voulant être à Staline ce que Hegel avait été à Napoléon, sa conscience historique. S'il faut aujourd'hui dépasser Kojève, c'est sans doute qu'on est plutôt au temps de la contre-révolution, ou du moins de la fin du mythe révolutionnaire tel que Hegel, comme tant d'autres philosophes allemands, l'avait si profondément ressenti :

D’un seul coup, c’était l’idée, le concept du droit qui prévalait, et contre cela le vieil échafaudage de l’injustice ne pouvait résister. C’est sur l’idée de droit qu’on a donc érigé maintenant une Constitution et c’est sur cette base que tout devait désormais reposer. Depuis que le soleil brille au firmament et que les planètes gravitent autour de lui, on n’avait pas vu encore l’homme se dresser sur la tête, c’est-à-dire sur l’idée, et construire la réalité selon l’idée. Anaxagore avait dit le premier que le “nous”, la raison, gouverne le monde : mais voilà que l’homme en est venu à reconnaître que l’idée doit gouverner la réalité spirituelle. Ce fut ainsi un magnifique lever de soleil. Tous les êtres pensants se sont associés à la célébration de cette époque. Une émotion sublime a régné en ce temps, un enthousiasme de l’esprit a fait frissonner le monde entier, comme si l’on assistait pour la première fois à la réconciliation du divin avec le monde.
Hegel, Philosophie de l’histoire

Tout est là, la réconciliation finale entre l'être et le devoir-être était en marche, attestée par l'histoire vécue, "le ciel allait se trouver transporté sur la terre" (Ph, II, 129). Les esprits étaient assez échauffés pour produire toutes sortes d'utopies comme "le plus ancien programme systématique de l'idéalisme allemand" qu'il avait rédigé, même si Hegel deviendra bien plus réaliste par la suite. Il est frappant de trouver chez presque tous les philosophes une étonnante capacité à soutenir des positions intenables par excès de logique. Ces absurdités sont d'ailleurs souvent ce qui fait tenir tout le système, y croire étant censé apporter bonheur et sagesse au niveau personnel comme au niveau de la société future ! Si nous ne sommes pas encore dans le meilleur des mondes, comme le prétend la Théodicée de Leibniz, Hegel tout autant que Marx nous promettent que c'est pour bientôt, déjà en cours. C'est bien ce qui est contestable, cet aboutissement de la dialectique hégélienne ou de la lutte des classes abolissant les contradictions dans une réconciliation finale.

Le paradoxe, c'est de partir de la reconnaissance de la contradiction et de son caractère inéliminable pour s'imaginer pouvoir y mettre un terme ainsi ! Kojève sera justement celui qui assumera jusqu'au bout ce paradoxe avec le thème de la fin de l'histoire identifiée à l'Etat universel et sans classes, redoublant la fausse interprétation rétroactive de la Révolution Française comme rationalisation et réalisation de l'idée alors que, non seulement elle échappait constamment à ses acteurs, mais surtout qu'elle avait lamentablement échoué - sauf que Napoléon était censé en réaliser les principes en propageant le Code civil, ce qui servira même de modèle à la dialectique historique.

Il est fascinant de voir comme de petites modifications de détail et de grossières simplifications peuvent facilement donner l'illusion d'une logique implacable absolument convaincante à première vue. C'est ainsi que procèdent aussi bien les récits idéologiques (nationaux ou biographiques) que les théories du complot par exemple - mais en fait la plupart des théories, y compris les théories physiques avant leur confrontation à l'expérience où l'on s'aperçoit que ça ne cadre pas, que la réalité est bien plus complexe. De la même façon, Kojève réussit l'exploit de faire passer sa propre théorie pour un commentaire littéral de la Phénoménologie en substituant ses propres concepts à ceux de Hegel sans faire mine d'y toucher.

Comme cela a déjà été souligné par d'autres (Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière), c'est "avant tout, une anthropologisation du Système : l'Homme prend la place de l'Esprit" (p27), ce qui n'est pas rien, l'Esprit étant plus extérieur et collectif. C'est bien une version athée et marxiste de la dialectique historique ("Kojève demeura marqué par l'évidence du déterminisme historique et par la réalité de la lutte des classes" p28). Il y mêlera aussi une dimension existentielle en faisant une lecture purement anthropologique de "Être et Temps", ce que dénoncera Heidegger. On peut dire que l'existentialisme était une réaction au système hégélien, à une histoire prédéterminée qui ne laissait plus aucun sens à l'existence singulière et son opposition au monde. Kojève qui avait fait sa thèse en 1933 chez Karl Jaspers (sur un philosophe chrétien russe, Soloviev) fera donc le tour de force de tenter d'annexer l'existentialisme au système, par l'angoisse de la mort notamment.

La figure de l'Homme se révèle inconsistante pour expliquer l'histoire qui est en grande partie l'histoire du progrès des sciences et des techniques comme du Droit, de l'Esprit donc plus que de l'action humaine ou d'une supposée créativité et liberté. Malgré ce que nous assène Kojève, comme d'ailleurs on le présente assez souvent, l'Homme n'est pas une erreur de la nature, l'Homme est bien plutôt la nature continuée par l'évolution technique résultant toujours de la sélection par le résultat. De plus, l'erreur n'est pas qu'humaine étant au principe de l'évolution génétique. Lorsque Kojève prétend que la nature est sans passé, il nie simplement l'évolution du vivant dont l'Homo faber n'est qu'un aboutissement, avant l'ère des robots? C'est l'évolution qui est créatrice dans sa course entre prédateurs et proies.

L'autre grande déformation qu'il fait subir aux concepts hégéliens, c'est la traduction réductrice d'aufhebung par négation, ce qui certes rend les choses beaucoup plus simples et plus proches de la négativité marxiste, mais qui est bien trompeur, permettant tous les tours de passe-passe, alors que toute négation est partielle et qu'on a plutôt affaire à un dépassement logique qui conserve ce qui est dépassé. Le travail n'est pas une néantisation, l'homme n'est pas néant, comme le reprendra Sartre, il est même ordinairement occupé à s'en défendre (ce qu'on appelle la néguentropie du vivant, inversion locale de l'entropie qui est bien négation de la loi la plus fondamentale de la nature mais cette lutte contre la mort est essentiellement positive, reproductrice, conservatrice).

Pour Hegel, il n'y a pas vraiment de fin de l'histoire, mais un passage à l'histoire conçue, c'est-à-dire comprise comme processus temporels nécessaires. Ce qui disparaît, c'est le temps abstrait, général, comme pure extériorité ou catégorie subjective, alors que le concept l'intériorise comme processus déterminés (de la graine à l'arbre et au fruit), temps particuliers, tout comme l'espace n'est rien d'autre que relations entre corps. "Au moment où le Temps cesse d'être abstrait, il cesse d'être Temps" souligne Kojève mais il y a d'autant moins de fin de l'histoire qu'on ne trouverait pas trace chez Hegel d'Etat universel, seulement des peuples particuliers qui connaissent leur heure de gloire chacun son tour, le cosmopolitisme étant condamné comme se soustrayant à l'Etat local. Même si cela paraît encore trop utopique, c'est pourtant sans doute là où Kojève est plus pertinent que Hegel (ne pouvant dépasser son temps) et constate une tendance effective, qu'on peut dire entropique, d'homogénéisation du monde par les communications, les migrations, les marchandises, le droit et les institutions internationales. Il est certain que la constitution d'un véritable Etat universel serait une sorte de fin de l'histoire (comme a pu longtemps l'incarner l'Empire romain).

La philosophie vient toujours trop tard... Lorsqu'elle peint gris sur gris une manifestation de la vie, celle-ci achève de vieillir... Ce n'est qu'au début du crépuscule que la chouette de Minerve prend son vol.
Principes de la philosophie du Droit, p45

Par contre, la conception de Kojève du savoir absolu confine au délire puisqu'il va jusqu'à parler de "l’anéantissement définitif de l’Homme proprement dit qui signifie aussi la disparition définitive du Discours (Logos) humain au sens propre". Il faut reconnaître malgré tout que c'est seulement à partir de la fin supposée de l'aventure humaine qu'on peut en donner une interprétation définitive, toujours après-coup (comme le point final clôt le sens d'un texte). C'est très différent avec Hegel, même s'il a pu être pris d'un vertige paranoïaque, pour qui le savoir absolu n'est qu'une forme vide, un commencement plus qu'une fin, et qui ne suppose absolument pas la complétude de son contenu ni qu'il n'y aurait plus rien à faire ou découvrir. Ce qui s'achève, ce serait plutôt la conscience de soi de l'Esprit (pas de l'Homme). Ce savoir absolu auquel aboutit la Phénoménologie n'est pas le renoncement à l'action mais l'accès au concept, à la science des phénomènes, c'est-à-dire à la compréhension de la succession de leurs moments nécessaires. La fin de l'histoire subie, c'est le temps de l'effectivité du savoir pas d'un savoir définitif auquel on ne pourrait rien ajouter (Gwendoline Jarczyk et Pierre-Jean Labarrière concluent leur livre "De Kojève à Hegel" par "Le savoir absolu n'est pas l'absolu du savoir")

Il faut signaler enfin que l'usage de la dialectique du Maître et de l'Esclave par Kojève lui donne une place très surévaluée par rapport à celle qu'elle occupe dans la Phénoménologie et dont il fera la préfiguration de la victoire finale du prolétariat qui transformerait par son travail le monde à son image, monde artificialisé qui ne serait plus une nature étrangère. On est toujours dans les belles histoires qui travestissent la dure réalité d'un monde artificiel aussi hostile que la nature souvent car il ne procède pas tant d'une subjectivité que de l'efficacité et de l'après-coup. Cela lui a permis du moins d'expliciter le désir de reconnaissance comme désir de désir, ce qui n'était pas thématisé comme tel chez Hegel et constitue sans doute l'apport principal de Kojève, repris par Sartre et Lacan, bien qu'il peut sembler le réduire à une intersubjectivité qui le dépouille de sa dimension sociale.

Par contre, sa transformation en appel à la révolution est complètement inventée. Il est toujours tentant de prendre ses désirs pour la réalité, et l'on n'est guère regardant sur les raisons qu'on en donne. Le souvenir ébloui qui m'en était resté m'avait mené à publier sur mon blog en 2009 cette brillante leçon de Kojève qui ouvre son Introduction à la lecture de Hegel, mais j'en avais éprouvé une certaine déception, le caractère forcé de sa démonstration m'apparaissant un peu plus. J'ai fini par y ajouter une toute autre interprétation de cette dialectique, moins marxisante et révolutionnaire, où il faudrait comprendre plutôt que l'esclave doit se maîtriser (par la contrainte), apprendre à travailler pour un objectif, atteindre des finalités, et se défaire par force de son égoïsme naturel, obligé à la reconnaissance de l'autre (sans lutter), domestication de l'homme qui constitue la condition de possibilité de l'Etat (du devoir, de la Loi), d'une liberté objective (du Droit) et d'un esprit objectif historique (civilisation des moeurs). Au lieu d'une anthropologie et de l'épanouissement d'une essence humaine, on a plutôt une nature contrariée, contrainte par son milieu en évolution. Ce n'est pas la liberté du Maître, mais une liberté soumise et qui reste servile, en particulier la liberté de vendre sa force de travail, une autonomie subie qui n'est pas indépendance ni une fin radieuse, mais vouée au travail d'une vie dans l'organisation productive et l'Etat de Droit, aussi loin des effusions mystiques que de l'héroïsme de l'être-pour-la-mort...

L’homme qui n’a pas éprouvé l’angoisse de la mort ne sait pas que le Monde naturel donné lui est hostile, qu’il tend à le tuer, à l’anéantir, qu’il est essentiellement inapte à le satisfaire réellement. Cet homme reste donc au fond solidaire avec le Monde donné. Il voudra tout au plus le « réformer », c’est-à-dire en changer les détails, faire des transformations particulières sans modifier ses caractères essentiels. Cet homme agira en réformiste « habile », voire en conformiste, mais jamais en révolutionnaire véritable. Or, le Monde donné où il vit appartient au Maître (humain ou divin), et dans ce Monde il est nécessairement Esclave. Ce n’est donc pas la réforme, mais la suppression « dialectique », voire révolutionnaire du Monde qui peut le libérer, et — par suite — le satisfaire. Or, cette trans-formation révolutionnaire du Monde présuppose la « négation », la non-acceptation du Monde donné dans son ensemble. Et l’origine de cette négation absolue ne peut être que la terreur absolue inspirée par le Monde donné, ou plus exactement par ce — ou celui — qui domine ce Monde, par le Maître de ce Monde.

Le Maître ne peut jamais se détacher du Monde où il vit, et si ce Monde périt, il périt avec lui. Seul l’Esclave peut transcender le Monde donné (asservi au Maître) et ne pas périr. Seul l’Esclave peut transformer le Monde qui le forme et le fixe dans la servitude, et créer un Monde formé par lui où il sera libre. Et l’Esclave n’y parvient que par le travail forcé et angoissé effectué au service du Maître. Certes, ce travail à lui seul ne le libère pas. Mais en transformant le Monde par ce travail, l’Esclave se transforme lui-même et crée ainsi les conditions objectives nouvelles, qui lui permettent de reprendre la Lutte libératrice pour la reconnaissance qu’il a au prime abord refusée par crainte de la mort. Et c’est ainsi qu’en fin de compte tout travail servile réalise non pas la volonté du Maître, mais celle — inconsciente d’abord — de l’Esclave, qui finalement réussit là, où le Maître nécessairement échoue. C’est donc bien la Conscience d’abord dépendante, servante et servile qui réalise et révèle en fin de compte l’idéal de la Conscience-de-soi autonome, et qui est ainsi sa « vérité ».

Il y a tout de même beaucoup à conserver de la lecture de Kojève tout comme de la dialectique hégélienne si souvent éclairante notamment sur la morale (à mille lieues de la si débile et surévaluée généalogie de la morale de Nietzsche). Il faut conserver en particulier la conscience du déchirement initial entre l'être et le devoir-être, la différence du savoir et de la vérité, l'extériorité d'un monde étranger, la révolte contre l'injustice du monde, mais il faut certainement, chez l'un comme chez l'autre, en dépasser la fin supposée réconciliatrice qui l'annule, remplacée au contraire par la conscience d'une opposition insurmontable - ce qui peut certes constituer une sorte de réconciliation, un retour à notre réalité effective, ne cherchant plus à supprimer la contradiction dans une utopie totalitaire. On peut dire que ne plus croire à une fin de l'histoire, à une réconciliation finale, constitue déjà une sorte de fin de l'histoire comme fin des idéologies, voire de la politique, mais ce n'est pas une fin glorieuse et plutôt un épuisement qu'un achèvement, sa négation plus que sa réalisation. C'est bien ainsi que se comprend mieux un savoir absolu qui passe de la foi au savoir par la reconnaissance de "l'inégalité de l'être dans sa singularité avec l'universalité", péché originel qui nous prend toujours en faute, mais reconnaissance aussi de "l'inégalité de l'universalité abstraite avec le Soi", où c'est la Loi qui est fautive dans sa rigueur aveugle (summum jus, summa injuria) et qui doit "renoncer à la dureté de son universalité abstraite".

C'est seulement après avoir abandonné l'espérance de supprimer l'être-étranger d'une façon extérieure, c'est-à-dire étrangère, que cette conscience (puisque le mode étranger supprimé est le retour dans la conscience de soi) se consacre à soi-même. Elle se consacre à son propre monde et à la présence, découvrant le monde comme sa propriété et faisant ainsi le premier pas pour descendre du monde intellectuel, ou plutôt pour animer spirituellement l'élément abstrait de ce monde avec le Soi effectif.
Phénoménologie, p307

Au lieu du romantisme révolutionnaire d'une réconciliation finale où tous les coeurs s'enflammeraient dans un grand élan de fraternité, notre avenir n'est donc pas à l'expression des peuples, ni d'une subjectivité particulière excluant les autres, ni d'une volonté démocratique arbitraire, et pas plus d'une prétendue essence humaine, mais bien plutôt le règne de la science et du droit, de l'économie et la technique, de la force et de la richesse, des catastrophes et de l'écologie enfin, rien de très excitant assurément, et qu'on peut certes trouver déshumanisant, même s'il n'y a rien de vraiment nouveau et sûrement pas de disparition de l'homme ni des discours, seulement des idéologies peut-être (et religions?) ramenées à la modestie de pensées pratiques effectives et véritablement transformatrices cette fois. Ce sont toujours les erreurs qui peuvent prendre fin - pour en faire d'autres sans doute mais il devrait quand même y avoir de moins en moins de fous pour faire encore l'histoire en allant au pire (on n'est pas encore au bout cependant, l'Etat universel n'est qu'à peine ébauché). Il est difficile de renoncer à marquer son temps et participer à l'enthousiasme des foules, mais il n'est plus temps de croire à ces enfantillages quand nous devons devenir adultes enfin à défaut d'être sages, car nous avons un monde à sauver - sans que nous puissions vraiment en décider ni toujours pouvoir y arriver, notre liberté, trop limitée, étant juste d'essayer de faire le nécessaire.

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6 réflexions au sujet de “Kojève et l’illusion de la fin réconciliatrice”

  1. Est-ce que Hegel ou Marx se sont intéressés à la lutte des places? Il me semble que Bourdieu (ou même le Russe Alexandre Zinoviev, cet excellent observateur de la société soviétique des années 30 aux années 80, sur ce sujet de la lutte des places) devrait être un peu plus souvent convoqué, avec ses théories des champs, du capital symbolique, de la violence symbolique... parce que les idéologies se sont toutes heurtées à cette réalité terre à terre de la lutte des places qui devrait avoir une plus grande ... place dans les analyses politiques.

    • Une idéologie hiérarchique comme le nazisme n'a aucun problème avec la lutte des places, c'est le marxisme égalitariste qui prétend nier cette "lutte des places" qui est un autre nom pour la lutte pour son rang, sa dignité, lutte pour la reconnaissance qui a une place pivot dans la Phénoménologie et plus encore pour Kojève qui en gomme cependant le côté hiérarchique et social, réduite à l'intersubjectivité du désir de désir.

    • La lutte des places se fait à l'intérieur d'une classe donnée qui elle même lutte contre une autre classe. L'idée étant qu'une classe, comme un parti politique, a son mode de sélection interne de leader qui permettra de maintenir la classe à laquelle il appartient.

      • La lutte des places est un phénomène spontané qui se manifeste dans tous les groupes (et pas que les groupes humains). Il y a en effet des idéologies hiérarchiques qui s'en accommodent très bien, mais au prix d'une souffrance d'un très grand nombre de "subordonnés". Il y a des idéologies qui sont dans le déni de la lutte des places, en général les idéologies émancipatrices et égalitaires. Et il n'y aurait rien entre ces hiérarchismes et ces dénis? C'est pourtant tout l'enjeu de la domestication de l'intelligence collective dans les groupes humains. Ce n'est pas simple, entre ces deux "fossés" du hiérarchisme et du déni. Mais il y a pourtant des pionniers, ça vaut le coup d'essayer de comprendre leurs "technologies" (municipalisme libertaire; les exemples rapportés par Elinor Ostrom, l'institut des territoires coopératifs, la sociocratie d'Endenbourg, les Johad cimentés par la gestion de l'eau placée à un niveau transcendant.....), pourquoi, bien au-delà d'une quelconque bien-pensance, elles sont efficaces.

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